Voici une petite fiction que j'ai écrite il y a quelques semaines mais que j'attendais de mettre en ligne. Comme toujours le couple principal est Gray et Juvia. Histoire indépendante des autres. J'espère que vous apprécierez.
Bonne lecture,
Prologue
Je me souviens encore de ses baisers brûlants, arides, empressés malgré la fraicheur de ses lèvres gercées. Ses yeux pétillent intensément dans l'obscurité les rendant un peu plus flous et j'entends le blizzard derrière les murs psalmodiant une douce mélodie sinistre pour accompagner notre léthargie. Je reconnais chaque recoin de son visage pour l'avoir si souvent observé, de son nez droit à son arcade entaillée en passant par ses joues imberbes et d'une délicieuse douceur. Il y a cette fièvre qui nous entourent, nous consument, nous perdons la raison, plus rien ne compte excepté nos deux corps qui vacillent, sombrent dans la folie de cette ardeur rutilante. Plus rien ne compte dans cet espace-temps. Ses bras puissants et musclés m'enserrent la taille alors que je frémie entre ses doigts alors qu'il me sculpte avidement comme le fait l'artiste sur l'argile. J'ai l'impression de me plier à ses caresses sans me rompre, tout est si étrange. Je m'accroche à ses cheveux de jais, voulant m'y perdre à l'intérieur, tirant dessus pour m'enivrer d'un extase sans nom tout en geignant son nom. Mes doigts s'emmêlent dans ses mèches rebelles avec ferveur alors que je brûle à l'intérieur. Il grogne, non pas de douleur mais d'un désir incandescent presque irrationnel, le rendant que plus désirable. Trop longtemps enfoui, inassouvi. Sa mâchoire carrée frôle l'arrête de mon menton et tous deux nous frissonnons d'un délicieux plaisir alors qu'il renâcle. J'aime écouter son souffle précipité dans ma nuque, ses baisers à la fois froids et chauds se déverser sur son cou et son corps se plaquer sur le mien avec fougue alors qu'il perd pied. C'est fou ce qu'il peut me rendre dingue. La tension est électrique entre nous, rendant un peu plus palpable notre exaltation. Je gémis contre sa bouche alors que je me délecte de son odeur si particulière. Il sent le gel douche mais surtout il sent lui…
Qui aurait pu croire qu'une telle chose arriverait entre nous ? Certes, je l'aime depuis très longtemps mais qu'en est-il réellement de lui ? Nous sommes amis depuis tant d'années. Se côtoyer chaque jour et le regarder se battre sans cesse avec son rival mais aussi meilleur ami. Quand j'y repense, tout deux ont failli s'entretuer c'est ce qui nous a conduits ici à présent. La part de END en Natsu a été annihilée après un combat titanesque entre le mage de feu et celui de glace. J'en ai frissonné d'horreur pendant tout ce laps de temps. Incapable de bouger, atterrée et en pleurant je les suppliais d'arrêter. Mais le démon avait bien trop d'emprise sur notre camarade qu'il était impossible de le raisonner. Je me souviens des larmes de l'homme que j'aime alors qu'il affrontait notre compagnon. Il affichait une facette qu'il montre peu souvent. Je n'en ai même été témoin que deux seules fois. C'est difficile à expliquer, mais cela me brisait le cœur et les entrailles de le voir dans cet état. Un petit garçon sans défense... Mon amoureux...
Oui un combat digne des plus grands héros…
La chaleur monte en moi crescendo, je ne veux plus me contenir car c'est trop dur alors je me laisse submerger par l'émotion. Tous ces sentiments si forts qui se bousculent dans mon cerveau comprimé, menaçant de le faire imploser. Le sang afflue tellement que mes tempes oscillent entre rêve et réalité. Il est tout pour moi et je veux tout de lui. J'y passerai mon existence entière pour lui faire plaisir. Je m'offre à lui sans hésitation, ni réserve car je l'aime tellement…
Nos cinq sens sont en alerte, nous ne faisons qu'un dans ce désert polaire. Je n'ai pas besoin de me cacher, avec lui c'est comme si c'était inné, on se comprend rien que par nos prunelles. Un seul regard et tout s'embrase, nous oublions tout jusqu'à notre prénom. Parfois, nous murmurons celui de l'autre, il n'y a que cela dont nous sommes capables de nous souvenir. La présence de l'autre, éternelle et immuable. Et puis, il y cet instant, magique, libérateur, incomparable où nous touchons en même temps, un monde inconnu mais d'une extrême saveur. Je me cambre et j'halète en gémissant son nom alors que son corps épuisé s'affaisse sur le mien et qu'il pousse un soupir de gratitude. Nous somme en sueur malgré le froid mordant entre ces quatre murs de pierre.
Nous étions deux et pendant un millième de seconde nous n'étions qu'un…
Il reste ainsi, l'oreille appuyée contre la poitrine et j'entoure mes bras autour de sa taille alors que ses mains baladent sur mes hanches tout en me déclenchant de terribles frissons. En silence, nous apprécions la respiration de l'autre, précipitée qui redevient peu à peu silencieuse.
Il me donne un chate baiser puis bascule sur le côté pour me prendre dans ses bras. Encore étourdie, je me laisse aller contre son abdomen de rêve et je soupire d'un bonheur sans nom. Petit à petit, tout nous reviens en mémoire ce qui nous laisse pantois. Nous sommes dans son village natal où Déliora a tout saccagé sur son passage. Sa mère est morte ainsi que son père alors qu'il le protégeait. Mais Silver est revenu partiellement à la vie il y a de cela plus d'un an et demi. Ce spectre du passé à une fois de plus tourmenté mon beau preux chevalier. Mais celui qui emprisonnait l'âme de Keith a été vaincu et en conséquence son géniteur a disparu dans l'espace-temps. Depuis, je sais que derrière sa façade, il cache sa peine mais aussi son soulagement que son paternel ait pu rejoindre sa femme là-haut dans les cieux. A jamais ils seront liés.
Depuis ce jour fatidique, nous ne nous sommes plus quittés. Et voilà, alors que nous venons nous recueillir comme chaque mois sur la tombe de ses défunts parents qu'il craque et s'empare de moi, de mes lèvres, de mon corps alors que je ne m'y attendais pas. Tétanisée d'abord, je ne comprends pas ce qui m'arrive et puis c'est comme si c'était évident. La providence ? Peut-être. L'attirance ? Inévitablement. De l'amour ? Je ne sais pas, mais nous nous retirons dans l'une des baraques abandonnées qui possèdent encore un toit pour nous abriter. Ce gite sera notre couverture à l'abri des regards, bien que personne ne foule ces terres maudites depuis des décennies. Alors nous nous laissons aller à nos besoins primaires sans aucune vergogne. Seul Dieu sera témoin de notre avarice, mais surtout de notre désir réciproque.
Il embrasse ma chevelure azurée et alors je ferme mes paupières, lourdes, sentant le sommeil me gagner. Je ne sais pas ce que sera demain, mais à présent j'ai foi en lui, en nous. Il est là et me réchauffe le bras par ses caresses, traçant des allées-venues régulières. J'expire de bien-être en m'enfonçant d'avantage dans sa cage thoracique alors qu'il resserre son étreinte. Je plonge dans le vide, tête la première et Morphée me recouvre de ses vagues.
Juvia émergea de son sommeil profond lorsque le froid alentour titilla ses joues découvertes ainsi que son épaule dénudée. Gémissant et en s'étirant, la fée ouvrit les yeux pour observer les lieux. Les souvenirs de la veille revinrent dans sa mémoire et elle s'empourpra aussitôt, toute trace de sommeil évaporée. Gray et elle, un infime instant uni dans cette couverture, tout deux enlacés.
La jeune femme releva le drap, incertaine, constata qu'elle était nue et étouffa un petit cri aigu dans ses poumons. Elle s'embrasa comme un braséro. Quelqu'un pouffa près d'elle et elle releva ses iris fous pour tomber sur son amant qui lui souriait. Vêtu de son pantalon noir qui lui tombait sur ses hanches, il ravivait la braise dans le feu de fortune qu'ils avaient construit à l'ava-vite pour ne pas mourir congelé pendant leur repos. La sirène eut du mal à déglutir tant son compagnon était d'une beauté ténébreuse ensorcelante et renversante. Il l'observait de ses pupilles sombres et froides où une lueur étrange s'y consumait. Celui-ci se rapprochait déjà avec le regard d'un chasseur alors que sa proie, par instinct se plaquait la couverture sur sa poitrine et frémissait. L'océanide n'aurait su expliquer son geste mais il l'intimidait. Gray se mit à sa hauteur en posant les genoux sur les pierres brutes et se pencha pour lui voler un baiser. Incohérente et surtout décontenancée, la femme-pluie n'eut pas le temps de comprendre ce qui lui arrivait qu'il se retirait déjà. Elle retint une moue attristée alors qu'il la dévorait d'un sourire lascif.
- Habille-toi pour ne pas prendre froid, pendant ce temps je vais essayer de nous trouver des vivres supplémentaires pour le retour.
La dryade de l'eau acquiesça d'un petit hochement de tête timide avant que son amoureux n'enfile un manteau fourré. Remontant le col jusqu'à son cou, il dégagea les planches de bois qui servaient de porte et s'engouffra au dehors en faisant bien attention à refermer convenablement pour ne pas que la bleue ne crève de froid en se préparant. Pas un mot sur leur nuit ensemble. Est-ce que cela signifiait qu'il acceptait qu'elle prenne le statut de petite amie ? Regrettait-il son geste ? Que se passerait-il à présent ? Que devenait-elle pour lui ? Une histoire sans lendemain ? Pourtant, ne venait-il pas de l'embrasser ? Juvia secoua vivement la tête tout en se tapotant les joues. Elle ne devait pas penser à de telles choses. La jeune femme avait une confiance aveugle en lui.
Profitant de ce moment de répits avec elle-même, la nymphe se releva avec élégance en entourant le drap autour de son corps de déesse et partit à l'assaut de ses vêtements qui étaient un peu exposés partout dans la grande pièce. Il faut dire que dans le feu de l'action, aucun des deux n'avaient songé à les rassembler au même endroit. L'aquatique retrouva sa robe près de l'entrée, son soutien-gorge près du feu (une chance qu'il n'ait pas brulé), ses cuissardes près de la cagette où ils stockaient leurs aliments, son manteau et son bonnet sur une chaise fracassée. Dans son désastre, un seul élément matériel manqua à l'appel pour son plus grand malheur. Que faire ? Est-ce un coup de son amant ? Si oui, quel pervers il faisait ! Horrifiée, l'amphitrite retourna tous ce qu'il y avait dans la pièce en poussant des complaintes sourdes. Elle se voyait mal s'enliser dans la neige en ne portant aucun sous-vêtement. Prise de panique, elle se rua sur son sac de voyage et finit par Ô grand Dieu trouver ce qu'il lui fallait et soupira de soulagement. Jamais de sa vie, elle ne fut aussi ravie par un simple bout de tissu !
S'habillant à la hâte avant que son bien-aimé ne revienne, Juvia s'empressa ensuite de ranimer le feu et prit une casserole qu'elle remplit de neige afin de pouvoir préparer son bouillon. Leur repas ne serait pas super appétissant mais au moins il leur tiendrait chaud au ventre par ce temps infernal. L'amphitrite tira le rideau que Gray par miracle avait réussi à réparer et regarda au dehors. Il ne neigeait plus bien que le ciel demeurait blanc avec ses gros nuages chargés. La jeune femme pouvait voir très loin, certes pas autant qu'un guépard, mais elle aurait tout le loisir du monde à admirer son homme revenir, le souffle court, sa croix en argent se balançant fièrement sur son torse.
Le ténébreux, vêtu de ses bottes rembourrées, levait ses jambes à une hauteur à le faire chavirer tant la neige était épaisse dans ce coin là. Il maugréa alors que l'humidité agressait sa peau à travers son pantalon. Les mains à tâtons dans le vide, il tentait de tenir l'équilibre tant bien que mal. Brusquement, son pied s'enlisa plus profondément et il chancela dans la poudreuse de tout son long. Poussant un juron, le taciturne se redressa sur les genoux alors qu'il secouait la tête vivement pour faire tomber des particules de glaçons. Quelque chose frôla ses oreilles et il se releva prestement à la recherche de ce bruit infime qu'il venait d'entendre. Quelqu'un l'épiait il en était presque certain. Se retournant vivement en pensant trouver l'océanide, il ne vit que des sapins blancs à perte de vue.
- Juvia, si c'est toi, c'est pas drôle.
Le vent se leva dans la cime des arbres, faisant battre son cœur à la chamade. Pourquoi percevait-il une aura mystérieuse. Maléfique ? Il n'en était pas certain. Il frissonna alors qu'à nouveau des voix sinistres résonnèrent à ces oreilles. Avec une certaine grâce, Gray se remit sur ses pieds d'un bond et pivota sur lui-même pour chercher l'origine de ce phénomène inquiétant. Les sapins et autres conifères grincèrent lugubrement, leurs branches s'emmêlant pour brouiller le ciel. L'air devint un peu plus glacé alors que le vent balayait la poudreuse au sol. Le taciturne demanda s'il y avait quelqu'un mais ne perçu aucune réponse si ce n'est sa propre voix qui résonna en écho sur les parois des glaces des montagnes. L'homme haussa les épaules puis retourna à son périple quand soudain un nouveau timbre agressa son ouïe. Il ne l'avait entendu que très peu mais assez pour s'en souvenir. Cette voix grave, désincarnée, rauque. Celle de son père...
- Papa ? héla le brun en regardant tour à tour chaque direction offerte.
Rien que le silence. Gray ferma les paupières alors que l'angoisse nouait son ventre et tenta de chasser toute pensée de sa tête afin de pouvoir analyser la situation au mieux. Lentement, le brouhaha revint près de lui. Fronçant les sourcils tant il se concentrait, il réussit à percevoir une faible lamentation. Quelque chose d'étrange monta lentement en lui. Qu'est-ce que c'était que ce brouhaha environnant. Un chant ? Une complainte ?
"Fils des glaciers, tu seras à jamais maudit pour avoir fait basculer l'équilibre. Nos voix te tourmenteront tant que tu ne seras pas libre."
Le taciturne ouvrit précipitamment les paupières, médusé par ces sombres menaces, alors que son muscle cardiaque s'était emballé. Jetant un coup d'œil au ciel, il s'aperçut que les nuages étaient devenus plus sombres, plus menaçants, plus lourds. Un tourbillon inquiétant s'agrandissait au dessus de sa tête alors qu'aucun orage n'était à prévoir. Un instant le phénomène se stoppa pour finalement lui foncer droit dessus, lui passant au travers du corps et Gray ne put réfréner un frisson d'horreur. Inquiet pour la jeune femme restée en retrait, il fit rapidement demi-tour craignant qu'il ne lui arrive malheur alors qu'il tremblait de froid. Tous ses os le faisaient souffrir, mais cela lui importait peu. Sa gorge lui brûlait tant elle était sèche, mais il ne s'en préoccupa pas non plus. Tout ce qu'il voulait s'était s'assurer que l'océanide allait bien. Il le sentait au plus profond de son être qu'elle était en danger. Il devait la protéger ! Il le voulait ! La femme-pluie avait pris une place bien trop conséquente dans son cœur de marbre et il ne pouvait se résoudre à la perdre, elle-aussi. Il ne le supporterait pas. Pas après ce qu'ils avaient vécu ensemble.
Déboulant avec fougue dans la baraque déglinguée, Juvia sursauta en entendant son amant entrer en trombe et lui lança un coup d'œil furtif. En le voyant si blême, elle se redressa vivement alors qu'elle remuait son potage et laissa sa tâche de côté, la cuillère en bois tambourinant sur le sol. Le voir si paniqué, lui retourna l'estomac en une fraction de seconde et elle eut du mal à déglutir.
- Gray-sama ?
- Dieu merci, tu n'as rien... soupira l'autre soudain rassuré.
Ne perdant pas une minute de plus, le maître glaçon enjamba rapidement la distance qui le séparait de l'amphitrite et sans crier gare, l'attrapa pour la plaquer contre lui. La fée resta interdite par ce brusque changement d'humeur. Elle ne comprenait pas sa soudaine angoisse alors que celui-ci reniflait bruyamment dans sa chevelure comme si sa vie en dépendait. Il tremblait. Avait-il froid ? C'était tout bonnement impossible dans la mesure où c'était un magicien de glace ! Alors pourquoi semblait-il si désemparé, désespéré ? Ils restèrent un long moment dans cette position sans rien dire. Puis, avec réserve, la bleue passa ses bras frêles autour de la taille de son bien-aimé et resta là, à lui murmurer des paroles réconfortantes alors qu'il grelottait toujours contre elle, les dents serrées.
Le reste de la journée se déroula dans le silence le plus total, ce qui désarçonna un peu l'élémentaire. Mais, avec le recul, elle savait que son compagnon n'était pas très bavard même après tout ce temps passé ensemble. Elle le connaissait à présent mieux que quiconque et savait que lorsqu'il était comme cela c'est qu'il était tiraillé par un évènement mais se gardait bien de lui demander. La jeune femme savait que c'était une cause perdue et que s'il voulait se confier tôt ou tard, il le ferait de lui-même. Tout ce qu'elle pouvait faire et espérer, c'était attendre qu'il daigne se révéler. Une seule fois, elle avait tenté de percer sa carapace et s'en était suivi de terribles représailles. Or, elle ne voulait plus vivre un tel fiasco. Alors, comme à son habitude, la dryade prenait soin de lui par de petites attentions sans rien laisser transparaître. Ils mangèrent près du feu, qui pour son plus grand bonheur, lui réchauffa ses doigts gelés. Ensuite, ils se promenèrent dans les alentours, main dans la main, bien que le brun restait impassible et ne cessait de jeter des coups d'œil par dessus son épaule pour s'assurer que personne ne les suivait. Pourquoi tant de craintes alors qu'ils pouvaient très bien se défendre. La nymphe n'y comprenait vraiment plus rien mais demeurait muette à ce sujet épineux. Par moment, Gray semblait terrifié et pour l'encourager elle pressait un peu plus sa main dans la sienne pour lui faire comprendre qu'elle était avec lui et qu'elle le protègerait de tous ces maux. Alors, celui-ci redevenait calme bien que sa respiration restait précipitée.
La nuit qui suivi se passa dans la plus banale monotonie comme si la veille n'avait jamais existé. Gray ne lui fit pas l'amour et la néréide se contenta de se blottir contre lui alors que ses paupières étaient lourdes de sommeil. Son amoureux resta étendu, un bras l'entourant, mais ses pupilles délibérément fixées sur le plafond semblaient ailleurs. Un brin anxieuse, la femme-pluie s'assoupit dans cette chaleur nouvelle qu'était les bras de son prince.
Alors que le vent criait à travers les planches, le taciturne émergea en sursaut, réveillant sa camarade près de lui et se convulsa. Il s'agrippa le cœur avec force alors que la naïade se redressait pour l'observer encore un peu engourdi. L'apercevant si mal en point, la fée tenta une approche et posa ses doigts fins sur son avant-bras pour l'apaiser.
- Gray-sama ? Est-ce que ça va ?
En entendant cette voix qu'il aimait tant, le solitaire se tourna brusquement vers la déesse et croisa son regard océan. Ses iris traduisaient une inquiétude sans nom et il se contenta d'hocher la tête alors que sa voix lui faisait défaut. Comment pourrait-il lui avouer qu'il entendait des sons sinistres. Cette menace grandissante envahit son esprit et il frissonna de dégoût. Ce pressentiment ne lui avait pas quitté le ventre depuis le matin même. Affiché un masque était primordial pour ne pas l'affoler. S'il lui disait ce qui lui arrivait, la fée le prendrait surement pour un attardé qui en avait un peu trop reçu sur la caboche.
- C'est rien, rendors toi. Je vais juste faire un tour et je reviens.
Le demon slayer ferma les paupières pour éviter soigneusement le regard triste de celle qu'il aimait. Il ne pouvait pas l'accaparer de ses tourments. Elle avait déjà suffisamment pleuré pour lui, autant ne pas y rajouter une nouvelle couche. Il la borda avec précaution bien que ses pupilles lui délivraient un message silencieux qui en disait long. Elle ne voulait que son bien-être. Alors, à la hâte, le fils de Silver attrapa son pantalon, son pull et son manteau qu'il se dépêcha de les enfiler pour filer prendre l'air. Plus vite il se sentirait mieux et plus vite il pourrait la rejoindre pour s'emmitoufler dans ses bras savoureux. L'océanide le regarda partir avec un léger pincement au cœur mais s'abstint de le suivre sachant pertinemment qu'elle devait le laisser tranquille. En soupirant, elle reposa sa crinière sur l'oreiller et serra la couverture sur elle alors qu'elle n'avait pas froid. Et s'il regrettait son geste de la veille ?
Gray une fois au dehors, s'attrapa la tête à deux mains et tomba à genoux, vidé de ses forces. Devant sa coéquipière, il avait tenté de faire bonne figure mais sa cervelle lui faisait un mal de chien qu'il avait de plus en plus de mal à dissimuler. Il ne cessait d'entendre ces échos prophétiques qui lui battaient les tempes. Il n'en pouvait plus, il ne supportait plus cette angoisse. Il serra d'avantage ses cheveux à s'en faire mal et posa le front sur la couche blanche au sol.
- Foutez-moi la paix, bordel de merde !
Juvia se réveilla en sursaut et instinctivement de mit à trembler alors que son corps était en nage. Elle venait de faire un mauvais rêve à propos duquel Gray la quittait pour la laisser seule avec sa peine. Rapidement, elle évalua les lieux et s'aperçut avec horreur que le brun n'était pas auprès d'elle. Où était-il donc passé ? Avait-il fini par la rejoindre cette nuit ou était-il resté dehors ? Ne perdant pas une seconde, elle se releva brutalement et s'affaira à se vêtir chaudement pour le retrouver. Son subconscient lui murmurait qu'elle devait se hâter au risque de le perdre. Elle poussa un gémissement lorsqu'elle cogna son pied sur une cagette alors qu'elle sautillait sur l'autre pour enfiler ses longues bottes. Puis, elle arracha les palettes qui camouflaient l'entrée et se précipita au dehors. Elle soupira d'aise lorsqu'elle découvrit la silhouette élancée de son amoureux dans la vaste étendue blanche. Les mains dans les poches, il était dos à elle et semblait observer le firmament. Le ciel était d'un magnifique bleu annonçant une journée sans neige. Ils pourraient rentrer aujourd'hui sans crainte de se perdre en cours de route à cause du blizzard. La fée avait hâte de retrouver ses amis bien que ces quelques jours, seule avec son bien-aimé l'avait comblé de bonheur. Leur relation avait pris un tournant radical et elle s'en émerveillait encore n'osant tout bonnement pas y croire tant cela était inattendu. Tant espéré et au final cela s'était concrétisé par une nuit magnifique. Un savoureux goût sucré inonda ses papilles et elle sourit de bonheur en se remémorant la saveur des lèvres de Gray sur les siennes. Incomparable et inoubliable. Cette ferveur qui s'était dégagée du disciple d'Ul la faisait encore vibrer.
Avec enthousiasme, la femme-pluie s'élança vers son amoureux toute guillerette et l'appela afin qu'il se retourne. Celui-ci pivota nonchalamment vers elle et la toisa. Lorsque les iris de la fée croisèrent ceux durs et arrogants de son amant, elle s'immobilisa. Elle ne parvenait pas à croire qu'il était encore capable de lui lancer ce genre de regard acerbe. Elle pensait qu'elle y trouverait une lueur lui indiquant qu'il en pinçait pour elle, mais il n'en était rien. Tout ce qu'elle voyait c'était cette glace. Avait-elle vécu un rêve éphémère ? Etait-ce bien cela ? Prenant une profonde inspiration pour se calmer, l'aquatique s'avança prudemment.
- Bonjour Gray-sama ! Juvia a été surprise de ne pas te voir auprès d'elle ce matin...
L'homme soupira exagérément et le cœur de la bleue ne fit qu'un seul tour dans sa poitrine. Un mauvais pressentiment. Il n'était pas dans son état normal. Quelque chose clochait c'était presque une évidence ! Où était passé l'être aimant qui l'avait comblé toute une nuit en lui murmurant qu'il avait besoin d'elle alors qu'il se fondait en elle. Juvia papillonna pour évacuer son angoisse grandissante et sourit timidement. Cependant, le visage de son comparse demeura impassible et elle tressaillit. Mais que se passait-il à la fin ?!
- Juvia, dit l'autre d'une voix distante comme s'il cherchait ses mots. Tu devrais rentrer à Magnolia.
- Bien sûr, on part aujourd'hui, le temps est idéal pour voyager.
- Non, tu ne comprends pas. Je ne rentre pas avec toi.
- Comment ça ? demanda la bleue surprise.
Ne supportant pas de la voir si effarée, le taciturne lui tourna le dos et inspira à plein régime pour contenir la tristesse dans sa voix. Sa décision était sans équivoque. Il y avait réfléchi toute la nuit afin de savoir si c'était la bonne. Après avoir pesé le pour et le contre, il avait dû se rendre à l'évidence que c'était la solution la plus adéquate pour eux, mais surtout pour elle. Il la délivrerait d'un fardeau qu'elle ne devait pas porter. Lui seul en était responsable et assumerait les conséquences de ses actes.
- Je ne rentre pas. Je ne reviendrai pas à Magnolia...
L'amphitrite ouvrit grands les yeux, stupéfaite par le ton détaché de sa voix. Elle ne comprenait pas ce brusque retournement de situation. Qu'elle était encore cette nouvelle folie qu'il lui déblatérait. La fée refoula les larmes qui menaçaient de s'écouler et étouffa un sanglot alors qu'une boule s'était formée dans sa gorge et que son cœur menaçait de sortir.
- Qu'est-ce que Gray-sama raconte ? risqua-t-elle courageusement.
- Je pars et je ne souhaite pas que tu m'accompagnes, rétorqua l'autre d'une voix autoritaire.
- Mais...
Juvia se tut un instant, le temps d'assimiler la nouvelle alors que le ténébreux ravalait la bile qui venait de lui monter dans la bouche et qu'il fermait ses paupières pour s'empêcher de craquer. Il serrait si fort ses mains que ses phalanges avaient blanchi et que ses ongles s'ancraient dans sa peau. Ses jambes avaient du mal à le supporter mais il devait pourtant l'endurer. Son mal n'était rien. Seule l'ondine comptait et il la protégerait à sa manière. Peut-être rude, mais c'était le mieux à faire.
- Tu ferais bien d'y aller tout de suite, la route est longue et le temps peut changer d'une minute à l'autre.
- Mais Gray...
Dans son désarroi, l'océanide en oublia le suffixe sama qui s'accolait à son prénom. Elle n'arrivait pas à digérer ces dernières paroles. N'y tenant plus, ses jambes flageolantes trop, elle tomba dans la poudreuse à sa merci, les mains à plat dans la glace. Ses doigts rougirent mais elle n'en tint pas compte bien que la douleur élançait ses ongles. Cette fois, elle ne put contenir le débordement de son chagrin et poussa un faible couinement.
Le nudiste grinça des dents en sentant l'autre dans son dos qui s'affalait en n'osant croire ce qu'il venait de lui dire. Pour lui aussi, la quitter était un vrai supplice. Depuis un an et demi, ils ne s'étaient plus quittés un seul jour. Ils avaient appris à se connaître et avait vécu ensemble dans le même appartement lorsque Fairy Tail avait été dissoute. Chaque soir, il la scrutait faiblement, alors qu'elle bouquinait tranquillement dans le fauteuil près du feu alors que lui faisait mine de s'intéresser à autre chose. Il adorait la voir si détendue et surtout si naturelle en sa présence sans que ses joues ne prennent la couleur cramoisie alors qu'il lui parlait.
- Est-ce que c'est à cause de Juvia ? demanda dans un souffle la femme en baissant la tête. Juvia n'a-t-elle pas réussi à combler le vide ?
Le cœur du créateur se serra à ces lamentations. Elle se trompait ! Pendant cet infime moment où il s'était lié à elle, il avait trouvé le repos dans son âme. Elle avait pansé une blessure inestimable mais il ne devait pas le lui dire. Un nouveau chemin était tracé et il devait l'emprunter seul. Alors qu'une larme roulait le long de sa joue saillante, il se racla la gorge pour reprendre contenance. Ne rien laisser transparaître était primordial.
- Je suis désolé, prends bien soin de toi et des autres. Je ne t'oublierai jamais...
Sur ses dires, le brun attrapa son sac de voyage et partit rapidement vers les monts enneigés alors que la femme-pluie explosait et pleurait à chaudes larmes.
- Gray ! hurla-t-elle. Pourquoi ?!
En guise de réponse, le vent fouetta son visage et elle se laissa tomber dans la poudreuse, sa pommette entrant en contact avec la neige. Elle resta étendue ainsi à pleurer son désespoir pendant des minutes. Des heures ? Peut-être. En tout cas, toute notion du temps se volatilisa en même temps que son cœur volait en éclats.
Alors, est-ce que ce prologue vous a donné envie de connaître la suite ? Pensez-vous que Gray reviendra ?
Merci d'avoir prit le temps de lire ce prologue jusqu'au bout et j'espère vous dire à très bientôt.
