Auteur : Temi-Chou
Titre : L'ange et le succube
Disclaimer : M'sieur Satoshi, immense respect, tout est à vous. Mais vous n'auriez pas Sacha, modèle humain, 3D, âgé de 21 ans, sous la main ? Non, parce que sinon, ça m'intéresse.
Note : Pas très joyeux, mais ça finit bien.
L'ange et le succube.
Passer voir Sacha en l'absence de sa mère n'était peut-être pas la meilleure idée qu'elle ait eue cette année.
L'atmosphère, dans le couloir sombre menant au salon, d'où provenaient des bruits qu'elle ne parvenait pas à identifier, était lourde, presque collante. Elle n'osait faire de bruit, sans comprendre pourquoi cela lui paraissait si essentiel de ne pas se faire repérer.
Elle comprit, cependant, en arrivant sur le seuil du salon.
Ondine resta bouche bée devant le spectacle qui s'offrait à elle, partagée entre plusieurs émotions contradictoires. Dégoût, émerveillement et jalousie scindaient ses pensées.
Le dégoût, tout d'abord, pour cette fille et ces mains glissées dans ses cheveux, accompagnant son mouvement, se crispant parfois, soulevant l'estomac d'Ondine, mais pas assez pour la faire rebrousser chemin. C'était un peu comme un accident de voiture, on est horrifié, mais on ne peut se détourner du spectacle offert par la déchéance des gens.
Ondine assistait en son cœur à la déchéance de celui qu'elle avait longtemps considéré comme un ange, bien trop chaste pour qu'elle puisse l'imaginer en telle position.
S'appuyant contre le chambranle de la porte, pour ne pas tomber, elle laissa ses yeux continuer leur course, pour goûter à la deuxième émotion.
L'émerveillement.
Dieu qu'il était beau, ainsi abandonné, les yeux mi-clos, la bouche entrouverte, qui laissait filtrer quelques gémissements et soupirs de plaisir. Elle ne pouvait cesser de scruter ce visage, qu'elle avait vu dans tous ses états, humide de larmes, déformé de rage, éclairé de bonheur et de joie. Jamais encore elle n'avait souhaité aussi fort pouvoir le voir de plus près, pouvoir s'abreuver de ce plaisir qui le rendait réellement angélique. Elle suivit encore et encore la courbe du profil de Sacha, en en savourant chaque ligne, chaque expression, chaque défaut. Elle le connaissait par cœur.
Son regard s'aventura plus bas, sur le tee-shirt remonté, laissant entrevoir un petit morceau de son ventre, la braguette ouverte et cette fille, encore. Des cheveux blonds qui s'accordaient mal avec cette peau – une peau qu'Ondine savait douce –, des mains trop fines caressant ce ventre qu'elle-même aurait voulu toucher, un visage qui se grave dans sa rétine, qui n'en repartira plus, la jalousie. Un monstre grondant dans son ventre, la haine, qu'elle étouffe, elle n'y peut rien.
La tristesse qui l'emporte, qui l'étouffe et ses yeux qui remontent, cherchant un réconfort sur le visage de l'ange sans pudeur, perdu dans les limbes de son plaisir, ne se rendant compte de la scène qui se jouait sans lui, dont il était pourtant l'acteur principal.
Un gémissement plus fort que les autres, des papillons dans le ventre d'Ondine, ses joues qui s'enflamment, la vue qui se brouille et un frisson qui la secoue, le désir.
L'air qui se colle à sa peau, la suffocation, honte. Elle ne comprenait pas la réaction de son corps, ce désir sourd de Sacha, qui répondait comme un écho à celui du garçon, pour une autre femme, trahison de bas étage.
Le dégoût et la honte qui s'effacent, laissent place à l'imaginaire qui remplace cette fille par elle et d'un coup, elle sent presque les mains de l'ange dans ses cheveux. Et le désir, toujours, la vue qui se trouble au fur et à mesure que les soupirs s'intensifient, qu'elle voit le ventre du garçon tressaillir sous l'habile langue de l'autre.
Une tentative pour reprendre corps avec la réalité, s'accrochant aux cheveux blonds et au regard fou d'amour que lance l'autre sur le visage de son ange. C'est un viol.
Le dégoût qui revient, et s'agrippe à elle, refuse de la lâcher. Le désir qui augmente en parallèle, elle se mord les lèvres pour ne pas gémir. Ses yeux qui reviennent, inlassables, caresser impudiquement le visage de l'ange, qu'elle dévore. Sa respiration qui lui échappe et se fait écho de celle de Sacha. Chaque soupir, chaque variation, chaque gémissement devient sien et laisse monter en elle le plaisir qui explose, lorsqu'elle voit le ventre de l'ange se contracter dans une dernière envolée, la plus haute, la plus belle.
Les larmes qui roulent sur ses joues quand elle réalise, le spectacle qui se déroule sous ses yeux, l'ange qui redevient homme, descend plus bas encore lorsqu'il frôle l'autre et la fait asseoir sur lui pour unir leurs lèvres.
Une fuite. La sienne à elle, qui sait que ce moment si beau sera le pire qu'elle n'ait jamais vécu. Les mots d'amour qu'elle entend, qu'elle aurait voulu prononcer, qui lui coupent le souffle. Ses jambes qui la portent, seules fidèles lorsque son esprit et son cœur décident à l'unisson de ne plus lui montrer qu'une image, l'autre, la blonde aux mains fines, un succube.
Ondine s'écroule et laisse enfin couler les larmes, dans un jardin d'enfant, désert, il fait trop chaud. Elle se recroqueville, enserre ses genoux entre ses bras et réfugie son visage dans cette prison d'ombre. Le soleil de plomb ne la réchauffe pas. Un museau se glisse dans sa main, humide, elle relève la tête.
-Pikaaaaa…
Elle renifle et sourit entre ses larmes. Une ombre passe devant le soleil, elle lève la tête et l'ange devenu homme est là, devant elle, il lui tend une main.
Elle se répugne à la prendre, hésite, et vois un reflet blond, derrière son ange, qui tombe de son piédestal, une fois de plus. Une fois de trop.
Elle repousse la main avec violence.
-Laisse-moi tranquille, tu me dégoûtes.
Elle sait que c'est faux et espère qu'il n'y croira pas. Le museau noir et humide se pose de nouveau sur sa main, elle sourit et gratte entre les deux oreilles jaunes, pour montrer qu'elle va bien. Les deux oreilles se baissent et Pikachu laisse échapper un gémissement. Il n'y croit pas. Sacha non plus.
-Ben qu'est-ce qu'il t'arrive, Ondine ?
-Rejoins-la et disparais, je ne veux plus jamais te voir.
Des images reviennent, déjà, trop tôt, beaucoup trop tôt. L'ange est de retour et elle pleure encore plus fort. Un mot flotte entre eux, jalousie.
Sacha se détourne et dit à Pikachu de rester avec Ondine. La petite créature escalade les genoux et se pelotonne entre les bras qui l'enserrent et Ondine pleure encore.
Les images de l'ange et de l'homme se superposent. Elle l'aime. Il est parti. Et cette fille…
Pikachu se pelotonne et lèche la main sur laquelle les larmes s'écrasent. Et malgré elle, elle se sent obligée d'expliquer à la petite créature pourquoi elle pleure, pourquoi tant de tristesse, tant de haine.
Elle chuchote qu'elle l'aime, qu'il est ange et diable, qu'il est homme, qu'elle aurait tout fait pour être l'autre, pour être belle, pour lui plaire. Elle lui aurait vendu son âme pour avoir un peu de la sienne. Elle chuchote qu'il est son vin, qu'il l'enivre, qu'ensemble, ils auraient bu la vie jusqu'à la lie.
Et Pikachu ne comprend pas vraiment tout ce qu'elle dit, il ne comprend que l'essentiel, que les sentiments. Amour, tristesse. Cocktail Molotov dans un cœur meurtri.
Et Ondine chuchote encore. Elle avoue, les images, le dégoût, la surprise, le désir, l'émerveillement, la peur, la honte, cette haine grondante qui monte en elle et ne veut que détruire. L'ange, le succube, elle-même. Le monde, en somme.
Elle ressasse les images, les mélange au présent, folie. Chagrin.
Elle hurle, ensuite, son mépris, pour elle-même, pour son corps et sa jouissance.
Elle rit, enfin, au nez de l'espoir, qui s'est foutu d'elle, comme souvent, blessant, n'achevant pas, laissant à terre et ne relevant pas.
Elle se calme, après, longtemps après, la créature s'est endormie, le vent s'est levé, balayant ses larmes et sa tristesse, ne laissant en elle qu'un goût d'inachevé.
La voix de l'ange, enfin, redevient celle de Sacha, elle est redescendue sur Terre.
Quand enfin il appelle Pikachu, que celui-ci se réveille et hésite à partir, elle lui fait signe d'y aller. Elle va bien. C'est presque un mensonge, quasiment une vérité, autre réalité.
Et lui, l'ange, le diable, l'homme, Sacha, ne repasse pas. Il respecte son choix.
Elle ne veut plus le voir, ne veut pourtant que lui, douce folie.
L'orage gronde et commence à mouiller ses joues. Elle court pour s'abriter mais ne trouve rien. Elle s'allonge où elle est. Que le monde la laisse se noyer.
Et voilà, fin du premier chapitre. Comme promis, c'est pas joyeux. Le deuxième et dernier chapitre, "La princesse et le héros", arrivera d'ici peu de temps et sera du point de vue de Sacha, histoire de varier les plaisirs et que ce soit pas toujours les mêmes qui souffrent. See you !
