Je t'aime jusque là

AN/ Le titre est emprunté à J. Roubaud (ou plutôt à sa femme...). Bonne lecture.

Des gouttes qui tombent. Une à une. Elles font flic floc, et il lui semble entendre le claquement de ses larmes sur la tombe. Un bruit sec et abrupt, comme elle. Comme son visage livide sur le sol marbé de sang. Le sang qui lui a coulé entre les doigts, quand il a voulu... Non ! Pas cette image, s'il vous plaît, pitié, il veut oublier mon dieu oublier la texture immonde de ce liquide qui se faufilait entre ses mèches blondes, toujours toujours encore encore. Il se souvient si bien de ses lèvres entrouvertes, de ses yeux écarquillés de surprise... Elle ne s'attendait pas à mourir bien sûr. Jamais personne ne s'était attendu à ce qu'elle meure... Elle était la lune, elle était le soleil, elle était le monde. Tout cela à la fois et plus encore. Elle était son univers, le sien, le leur aussi et mon dieu elle est bien morte n'est-ce-pas... Il ne sait pas il ne sait plus si c'est une question, ces quelques mots qu'il ne cesse de répéter, ou si ce martèlement strident n'est là que pour le torturer davantage. Il sait pourquoi et en même temps pas vraiment, parce que même lui qui en a testé les frontières ne peut pas comprendre la mort, il sait seulement que c'est insensé et en même temps si logique parce qu'après tout c'est le cycle de la vie n'est-ce-pas... Il ne peut que regarder au loin, les yeux vitreux et l'esprit fixé sur sa peau sablonneuse. Il ne veut pas vivre et il ne peut pas mourir alors il ne cesse de penser qu'il la trahit, elle qui vivait pour la vie et le sourire. Alors il soupire et entend le flic floc de la pluie ou de ses larmes il ne sait plus, et il ne peut pas bouger car il refuse d'avancer, pas sans elle. Il voudrait savoir pourquoi il doit rester là, sur cette terre maudite, alors que son coeur à elle ne bat plus et le sien juste à peine, assez pour le torturer en le forçant à continuer. Il voudrait pouvoir poser la main sur son torse et en plus rien sentir, car alors la douleur s'évanouirait n'est-ce-pas... Ou peut-être pas, parce qu'un amour pareil ne meurt jamais, ou du moins c'est ce qu'elle disait mais il n'est pas sûr. Est-ce-qu'elle l'aime encore, même si son corps à présent n'est plus qu'une statue de marbre pâle qe jamais plus on ne pourra peindre, même si ses yeux ne se font plus désormais que le miroir d'une surprise éternelle pour elle et d'une agonie infernale infine, de l'agonie en fait pour lui et peut-être pour elle qui sait et au fond y a-t-il même une différence ?

Review ? Je ne sais trop quoi penser de ce texte, et je voudrais des avis...