Note d'Introduction : Oui, je suis en vie. Je compte un jour finir Les Corps Fous à Lier. En attendant, je vous propose ce court OS qui m'est venu un matin sur la route du travail en voyant un cerisier en fleurs.


Deux pétales sur un linteau

Dudley soupira un grand coup avant de toquer doucement à la porte d'entrée du 4, Privet Drive. Il entendit les pas lents de quelqu'un qui peine à se déplacer et enfin, le visage ridé de sa mère apparut dans l'entrebâillement. Elle n'avait pas perdu sa méfiance avec le temps, bien qu'elle se soit adoucie. Elle eut un rictus qu'il reconnut comme un sourire et après avoir passé la porte, il la serra dans ses bras. Elle lui parut encore plus maigre que lors de sa dernière visite. Il prétexta être fatigué pour la pousser à s'asseoir à ses côtés sur le canapé faisant face à la cheminée.

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Comme d'habitude, elle babilla des banalités dont elle l'avait déjà entretenu au téléphone mais il sourit et s'étonna de chaque information comme si elle était inédite.

"Comment vont les filles ?

-Oh, tu sais, elles nous écrivent. Mais elles sont très occupées à l'école. Je suppose…" Pétunia eut un crispement des épaules et regarda le tableau pendu depuis quelques semaines au-dessus de la cheminée. Dudley ne l'avait jamais vu avant et se demanda pourquoi subitement, sa mère avait changé le décor de ce cette pièce qu'il n'avait jamais vu évoluer en plusieurs décennies. Il s'agissait d'une nature morte représentant deux vases, l'un accueillant de grandes fleurs blanches, l'autre de petites fleurs d'un rose tirant sur le violet. Entre les deux vases, des pétales des deux essences mélangées formait un parterre d'un réalisme foudroyant.

Dudley songea que le tableau était peint avec tant de talent qu'on aurait pu, selon la lumière, avoir l'impression que les pétales bougeaient légèrement. Comme son regard s'était arrêté dessus, Pétunia crut bon de préciser :

"C'est un héritage de famille. Un cadeau que nous avions offert à nos parents." Avec Lily, cela sous-entendait mais Dudley avait appris depuis longtemps qu'on ne devait pas parler de la mère d'Harry à sa mère. Lui-même n'avait renoué avec son cousin que quelques semaines plus tôt, en découvrant une lettre familière adressée à chacune de ses filles. Contrairement à ses craintes, Harry s'était montré très compréhensif. Ils n'étaient pas exactement liés, mais au moins étaient-ils capables de se parler civilement et de laisser leurs enfants se fréquenter. Il se contenta alors de hocher la tête en silence face à la déclaration de sa mère.

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Soudain, Pétunia demanda d'une voix aiguë :

"C'est moi qui l'ait peint. Tu savais que je peignais ?

-Non." Il fut sincèrement étonné cette fois-ci. Rigoureuse, méthodique, parfois rigide et froide, étaient des adjectifs qu'il parvenait aisément à lui associer, mais certainement pas celui d'artiste.

"Ton père aimait bien mes tableaux. Mais j'ai arrêté avant que tu naisses. Je n'y trouvais plus goût.

-C'est dommage. C'est très beau." Elle eut un sourire et tapota sa main de la sienne, si pâle, si parcheminée.

"C'est gentil d'être venu mon grand. Mais j'ai mon ménage à faire.

-Tu as besoin d'aide ? Je peux…

-Non ! Tu dois te reposer mon Dudley. Et puis, ça me maintient en forme." Il l'embrassa sur la joue et elle le chassa d'une tape comme lorsqu'il avait six ans.

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Retournant au salon, Pétunia resta quelques instants devant la cheminée. Elle fixait farouchement les pétales tombées entre les deux vases, sur le tableau. Soudain, elle passa une main fébrile sur le linteau poussiéreux. Elle fixa ensuite sa main, sur laquelle étaient restées accrochées une pétale de lys et une de pétunia. Puis, se parlant à elle-même, elle souffla :

"Vernon avait tort d'avoir peur. Ta magie a toujours été belle et douce."


Note de Fin : En espérant que ça vous ait plu.