Originellement, je souhaitais publier cette histoire courte en une seule fois, et puis j'ai changé d'avis ! Autant vous laisser le plaisir de découvrir tout cela en plusieurs chapitres, même courts. On savoure mieux, à petites doses...

J'espère qu'elle vous plaira, cette histoire toute simple, je l'ai écrite sans prétention, sans même avoir l'intention de la publier ici, alors tous vos commentaires sont des bonus qui m'iront droit au cœur, que ça soit positif ou négatif.

Je re précise. Il s'agira de chapitres courts, et il y en aura peu ! Bien sûr, les personnages de Bella et d'Edward appartiennent pleinement à leur créatrice Stephenie Meyer. Pour ceux qui craignent que cette fiction finissent comme la précédente, c'est-à-dire incomplète, soyez rassurés, elle est déjà entièrement écrite ;)

Bonne lecture !

/histoirecourte


Observer les New Yorkais dans le métro était devenu mon passe-temps favori. Les gens passaient sans conteste assez de temps dans les transports pour avoir le temps de s'ennuyer, de s'énerver et d'être à cran avant d'entamer leur labeur quotidien. Les quais du métro étaient martelés sans pitié par ces voyageurs ingrats, trop pressés, trop stressés. Néanmoins, il était intéressant de les observer sans leur masque social. Dès lors qu'ils utilisaient les transports en commun, les usagers devenaient des bêtes sauvages peu patientes, peu souriantes et réduisaient toutes interactions à néant. Casques sur le crâne, nez dans le journal, méninges concentrées sur des téléphones dernier cri. Il y avait aussi les lecteurs, les rêveurs et enfin, les observateurs, dont je faisais partie. Certains passagers retiennent plus l'attention, d'autres vous passent sous les yeux sans que vous ne le voyiez.

L'espoir de croiser une âme sœur par hasard reste dans chaque esprit, au détour d'un couloir de métro.
Je croyais l'avoir aperçue, cette âme. On peut nier l'existence de l'amour au premier regard, mais qu'en est-il du désir ?

Sur le quai d'en face, elle arborait le même masque d'indifférence et de dureté que les autres. Je l'ai suivie des yeux, la toisant pour n'en pas perdre une miette. Le spectacle de la froideur feinte. C'était une observatrice, à n'en pas douter. Ses yeux passaient d'un usager à l'autre, à la recherche d'un sujet d'étude digne d'intérêt.
L'observatrice sous couverture par excellence. Et qu'elle était belle, cette épieuse des temps modernes. Les yeux sombres d'une personnalité tourmentée, une crinière bouclée et brune coupée au carré, une robe d'été rouge aux lignes sages et pourtant si provocantes, lorsqu'elles habillaient ce corps si tentant.

J'étais resté là, immobile, sur le quai d'en face, la reluquant sans vergogne, abasourdi. Sa ligne de mire avait croisé la mienne, l'espace d'un instant. Le bruit assourdissant d'un rame de métro arrivant à quai m'avait à peine dérangé, jusqu'à ce que le train fauche mon regard, interrompt sans pitié ce doux état de contemplation et me dérobe cette belle inconnue, qui, sans doute, grimpa dans le train, avant de disparaître dans le tunnel.

Le désir battait encore à mes tempes quand mon train arriva à quai, quelques minutes plus tard. J'avais chaud. J'avais la certitude d'avoir entre aperçu un élément important de ma vie. Et pourtant, ça n'avait duré que quelques secondes.

La deuxième rencontre eut lieu 3 mois plus tard. Même regard noir, le visage encadré de la même tignasse –plus longue- Robe noire et veste rouge. Du rouge, encore. Cette fois, nous étions sur le même quai. Prêts à monter par la même porte. Tous deux en quête d'un sujet d'observation. Le mien était déjà tout trouvé : Elle.
Elle s'assit, et je pris place à ses côtés. Conscient d'entrer dans un jeu qu'elle n'aurait pas forcément envie de jouer.

Je laissais passer deux stations avant d'entamer la conversation. Son attention était toute fixée sur un homme et son chien, qui semblaient tous deux enfermés dans leur bulle, au milieu de l'atmosphère malsaine du métro.

- Pourquoi l'avoir choisir lui ?

Elle contint sa surprise d'être interrompue juste à temps et me répondit dans un murmure. Les observateurs se reconnaissent toujours entre eux.

- Regarde comme ils se dévorent des yeux, tous les deux.

Je suivis son regard en attendant la suite, et constatai l'amour débordant que le maître portait à son chien, sa fidélité sans borne et la confiance dégoulinant des prunelles brunes du border collie. Ce couple atypique suintait d'affection par tous les pores.

L'observatrice continua son discours :

- J'ai rarement observé autant d'amour et de dévouement dans les yeux d'amoureux. Tu sais pourquoi ?

Je lui fis signe que « non ».

- Parce que on n'a pas besoin de dévoiler ses sentiments à son chien pour qu'il t'aime en retour, parce qu'il ne parle pas le même langage mais te comprend tout de même. Parce qu'il est d'une fidélité sans limite et parce que sa vie est entre tes mains. Un chien te quitte rarement de son propre chef, c'est toi qui le quittes. La fracture dans un couple, une famille, ou en amitié, est une des choses les plus difficiles qui soit. Avec un chien, cette fracture n'intervient qu'à sa mort. Et il ne peut s'agir, ni d'une trahison, ni d'une décision de sa part. Ce que l'on aime chez le chien, c'est, à la fois, sa grande humanité, et sa grande animalité, que nous, humains, avons perdue. Dans un couple, on hésite à dire qu'on s'aime, et parfois on se retient de le dire de peur que ça ne soit pas réciproque. Et c'est dommage, on ne devrait pas se retenir de dire qu'on s'aime.

Je reportai mon attention sur elle, admirant son visage animé par la passion. Quand elle s'en rendit compte, elle rougit furieusement en conservant dans les yeux la même étincelle de défi et de rébellion.

La voix métallique annonça mon arrêt, il fallait agir, et vite.

- Est-ce que tu as un stylo ? lui demandai-je doucement.

Elle fouilla un instant dans son sac et me tendit un stylo feutre noir. Je profitai de l'occasion pour prendre sa main dans la mienne et lui voler un carré de peau pour écrire un numéro de téléphone, pris le temps de tracer chaque chiffre aussi soigneusement que possible, puis me levai au moment où les portes s'ouvraient.

- Attends bien que ça sèche, s'il te plait.

Elle me suivit des yeux, estomaquée, continua à me fixer à travers la vitre du métro quand celui-ci démarra, puis me perdit de vue.

Je ne la vis plus pendant le mois qui suivit et ne reçus aucune nouvelle de sa part. Un jour pourtant, mon téléphone vibra dans ma poche et je sus que c'était elle. Il était minuit et demie. Ça ne pouvait être qu'elle. Je le sentais. Son message était concis :

RDV à 2 : 00 am – Pelham Bay Park Station.

C'était un lieu de rendez-vous inattendu. En plein Bronx. Que pouvait faire une fille comme elle dans le Bronx à cette heure-ci de la nuit. J'aurai certainement la réponse en honorant son invitation à venir la voir.

Je fis le chemin du Queens à Pelham Park Station en un peu plus d'une heure. Certaines lignes ferment la nuit et ralentissent substantiellement la progression dans la tentaculaire New York. J'arrivai en gare de Pelham Bay Park juste à l'heure, à moitié rassuré, mais ce coin du Bronx semblait plus sûr et calme que les autres. Je décidai d'attendre l'inconnue du métro à l'extérieur et descendis du quai du métro aérien vers la rue. Pelham Bay jouissait d'une certaine tranquillité par rapport au reste du district, dans lequel je n'avais pas l'habitude d'aller. Dans les rues parallèles à Westchester Avenue, de petites maisonnettes modestes s'alignaient dans des rues proprettes.

L'inconnue du métro vivait-elle ici ?

Soudain, une voix -sa voix- m'interpella :

- Bonsoir l'inconnu du train.


À très vite pour la suite ;)