Chapitre 1
Un soleil éblouissant s'infiltrait à travers les rideaux de la chambre et sa chaleur vint doucement caresser ma joue. J'attrapai les couvertures et je les resserrai contre mon corps frêle tout en remontant mes jambes contre ma poitrine. Je ressentais comme un malaise profond face au calme qui régnait autour de moi. J'ouvris péniblement les yeux en gardant le visage enfoui dans les draps pour les habituer à la lumière aveuglante. Lorsque j'eus le courage d'affronter mon environnement, je découvris avec effroi le décor de ma chambre à coucher, à Storybrooke. Mes premières pensées se tournèrent vers Henry. Précipitamment, je rejetai la couverture et sautai du lit double pour me ruer vers la chambre de mon fils. Je la découvris vide; son lit n'était même pas défait. Je restai bêtement sur le pas de la porte, mes mains se mirent à trembler légèrement lorsque mon regard fixa la date affichée sur le radio réveil. Au fond de moi, je savais que j'avais laissé mon fils s'en aller avec sa mère biologique, que je leur avait donné de nouveaux souvenirs, une nouvelle vie. Je ne comprenais pas pourquoi j'étais de retour à Storybrooke. Je n'arrivais pas à détourner mon regard de la date. Je venais de perdre une année ou plutôt d'oublier une année entière. Un malaise s'empara de moi, je me retins au chambranle de la porte avant de sentir les larmes affluer dans mes yeux. Je ne reverrais jamais mon fils, je n'arriverais pas à vivre avec cette terrible douleur, je ne le supporterais pas et pourtant je savais que je devais être forte. Forte pour affronter les personnes qui allait partager mon quotidien, Blanche Neige et David notamment. Je ne devais pas laisser transparaitre ma faiblesse. Prenant trois grandes inspirations, je ravalai les larmes qui menaçaient de sortir.
Lorsque je regagnai ma chambre, mon premier réflexe fut de regarder par la fenêtre. Les branches du pommier étaient recouvertes d'une couche de poudreuse. Je n'avais jamais vu Storybrooke sous la neige jusqu'à présent. Des frissons parcouraient ma colonne vertébrale me rappelant que trop bien le trouble que je ressentais. Je ne pouvais pas rester seule. Deux solutions s'offraient à moi. Soit je m'enfermais dans une sphère infernale et restai enfermée ici, me laissant submerger par mes émotions, soit je sortais prendre l'air pour aérer mes pensées. Je n'hésitais pas longtemps. Je partis rapidement sous la douche pour me préparer. Je choisis une tenue chic et classe et pris soin de me couvrir pour ne pas avoir froid. Cela dit ma douleur intérieure anesthésiait déjà le froid que j'allais devoir affronter.
Sur la route qui menait au Granny's Dinner, certains habitants me dévisagèrent, quelques uns allant même jusqu'à changer de trottoir. Je me sentais mal à l'aise pourtant la peur que je semblait inspirer ne m'atteint pas. Mon coeur saignait beaucoup trop pour que je me soucie d'autre chose. Le vide présent en moi était trop violent. Je savais où j'allais, me guidant aveuglément. Je croisais les passants sans réellement y faire attention. Je m'arrêtais devant la porte du restaurant, hésitant encore à entrer et puis je relevai la tête, redressant mon buste et mes épaules dans une attitude fière. Personne ne devait voir ce que je ressentais réellement. Je devais essayer de supporter la perte de mon fils. C'était mon fardeau et celui de personne d'autre. Lorsque je considérai, après de longues minutes que j'étais prête, j'ouvris lentement la porte, m'introduisant à l'intérieur du Granny's. Je m'avançai au comptoir, commandant un verre de Whisky malgré l'heure matinale avant d'aller m'assoir à une table dans le fond. J'ignorais royalement le regard que me lança Blanche Neige sur mon passage.
« Je crois que Regina a besoin d'aide. Remarqua Blanche Neige
- Demande lui les raisons qui l'on poussé à nous ramener ici, cette fois ci ! Répondit amèrement David.
- David, tu crois vraiment qu'elle est responsable ? Regarde là, un whisky à 9h du matin, là elle cherche à oublier plus que l'année précédente. Je suis convaincue qu'elle n'y est pour rien aujourd'hui. »
Sans un mot, Blanche neige quitta David avant qu'il n'ait eu le temps de répondre et elle vint s'assoir en face de moi. Mes doigts parcouraient le verre transparent et mon regard ne quittait pas le liquide ambré. La boisson arpentait lentement les parois dans un mouvement circulaire, et je me demandais si j'allais le boire ou si le simple fait de l'avoir entre les mains me consolerai. J'arrêtai mon geste quand la main de Blanche se posa sur la mienne. Je savais qu'elle était en face de moi et pourtant je refusais de relever la tête. Cela ne l'empêcha pas de jouer les psy avec moi.
« Regina, je te connais assez pour savoir que tu ne vas pas bien. » Commença la jeune femme en douceur.
Je relevai prestement la tête et m'arrêtai sur son ventre rebondit.
« Si je ne te connaissais pas, je pourrais croire que tu as dévalisé un marchand de glace ! Répondit-je d'un ton glaçant pour couper court à toute discussion.
- Le whisky à une heure si matinale ne te ressemble pas ! N'abandonna pas la princesse.
- C'est que tu ne me connais pas aussi bien que ça. Je tournai la tête vers David qui ne pouvait s'empêcher de nous dévisager. Je revins vers elle et je la regardai droit dans les yeux. Quand est-ce que tu vas te décider à me le demander ?
- Regina, écoute, tout le monde se pose beaucoup de questions depuis les dernières heures, nous sommes revenus à Storybrooke sans aucun souvenirs de l'année passée et...
- Et je suis la seule a avoir déjà lancé une malédiction. Alors je suis la coupable toute désignée. Lui crachai-je au visage.
- Non, ce n'est pas ce que je voulais dire... Tu as changé, tu n'es plus la même personne Regina et je crois en toi mais...
- Ne te fatigue pas !
- Avec la perte d'Henry, je me disais que tu aurais pu... je dis seulement que tu aurais pu, avoir créé cette malédiction dans le but de le faire revenir auprès de toi.
- Et m'infliger une souffrance supplémentaire en effaçant mes propres souvenirs. Généralement lorsque je jette un sort, ce n'est pas pour me faire du mal ! Et la perte d'Henry est ma souffrance.
- Ça va être difficile de convaincre tout le monde.
- Si Emma avait été là, elle me croirais mais encore une fois je suis le bouc émissaire. Une méchante reste une méchante. » lui lançai-je sans ménagement.
J'en avais assez entendu, j'aurais mieux fait de rester chez moi. j'avalais d'une traite le verre encore intact, espérant que cela me soulagerait un instant, et je récupérai mon manteau ainsi que mon sac sur la banquette. Je m'apprêtai à rejoindre la sortie lorsque je me rendis compte que tous les regards étaient braqués sur moi. Tous me dévisageaient. Je lisais dans leurs yeux la haine que je leur inspirais. J'avais fait tant d'efforts pour devenir la femme que j'étais aujourd'hui et pourtant, ils étaient prêt à me blâmer à la première occasion. Je décidai de faire abstraction, relevant la tête et me montrant digne pour traverser l'allée qui menait vers la sortie. Pourtant, une poigne ferme retint mon bras. Il semblait qu'on ne veuille pas me laisser partir si facilement.
« Enlevez vos sales mains de chirurgien raté et ne vous avisez plus de me toucher, Dr Whale ! M'énervai-je instantanément. Il m'était difficile de garder mon calme.
- Pas avant que vous ayez expliqué pourquoi vous nous avez tous renvoyé ici ! » Me questionna-t-il avec insistance.
Je balayai l'assemblée des yeux en essayant de ne pas céder à la panique. Je savais que je ne pourrais pas les convaincre de mon innocence et je n'avais pas la force de me battre. S'ils voulaient croire que la méchante reine avait frappé une fois encore, alors très bien. Reprendre ce rôle un instant me laisserait assez de temps pour disparaître. Leur expliquer le contraire était peine perdu. J'essayai tout de même de raisonner Whale pour l'inciter à me lâcher et pour les calmer.
« Je suis aussi confuse que vous... je n'y suis pour rien tentai-je. J'ai également oublié mes souvenirs. Et mon fils... Il n'est pas avec moi. Je vous dis la vérité.
- Vous êtes la méchante reine et vous seule avez la connaissance du sortilège répondit Whale avant de resserrer un peu plus sa main autour de mon bras. Alors ne nous mentez pas ! »
Resserrant mes poings, une jointure blanche apparut, je ne parviendrais pas à garder ma contenance plus longtemps.
« Lâchez moi ! Ne me touchez pas ! » Ordonnai-je fermement en me dégageant de toutes mes forces, reculant de quelques pas.
Je les jaugeai désormais avec une pointe de défi, mon corps tout entier était sous tension, je sentais les prémices d'une chaleur naissante dans le creux de ma main, cela me donna une idée pour me défiler. Je pouvais laisser sortir la méchante reine quelques instants, après tout ils me considéraient toujours comme telle. Je ressentais mes ongles s'enfoncer dans la chair de mes paumes, ma mâchoire se contracta et j'arquai un sourcil provocateur.
« Très bien, si vous voulez la méchante reine vous l'aurez ! Mais ne venez pas vous plaindre ! »
La chaleur s'intensifia dans ma main puis parcourut mes doigts pour venir réchauffer ma paume, et une boule de feu se matérialisa. Je voulais simplement effrayer l'assistance. Je fut ravie de constater de la panique dans leur regards. David resserra son étreinte sur Blanche et il plaça une main protectrice sur son ventre pour protéger l'enfant à naître. J'assistai à leur bonheur alors que j'avais tout perdu. Ils allaient avoir un enfant, une famille à nouveau. Je les regardai avec écœurement en pensant à Henry, que je ne reverrais probablement jamais. La colère s'empara de mon être tout entier. La noirceur prit place au fond de mes pupilles et je les défiai l'un après l'autre. En plus de la souffrance que j'éprouvais, on me blâmait encore et toujours. Il leur fallait une coupable et j'étais toute désignée. Je fis danser un instant le feu vif entre mes doigts, hésitant à l'envoyer à l'autre bout de la pièce ou à le laisser s'éteindre. Je n'eus cependant pas le temps de prendre de décision puisque la porte du Granny's s'ouvrit subitement dans un fracas, provoquant une violente agitation. Les visages convergèrent vers l'entrée, oubliant ainsi ma personne. Je refermai alors ma main effaçant en moins d'une seconde la boule de feu. Un homme que je n'avais jamais vu auparavant entra, accompagné d'un petit garçon qu'il portait à bout de bras. Il semblait essoufflé, choqué, et était suivi d'autres hommes vêtus comme lui et portant arcs et arbalètes. Il s'arrêta, et demanda où il pouvait trouver un guérisseur, l'un de ses compagnons ayant été blessé par une créature maléfique ressemblant à un singe ailé. Nos regards se croisèrent suffisamment longtemps pour que je ressente un trouble, son regard bleu azur me faisant perdre pied. J'avais l'impression de le connaître et pourtant nous ne nous étions jamais rencontrés auparavant. Je cherchais dans mes souvenirs si je me rappelais d'un lieu, d'un objet qui aurait pu m'amener sur la piste de cet homme mais ma conscience rencontra le néant. Pourtant j'étais déstabilisée. Je n'étais pas prête à lutter contre un mystère de plus. La disparition d'un an de souvenirs et notre retour à Storybrooke était plus important. Après tout, il faisait certainement partie de la longue liste des personnes que j'avais brisées dans mon passé. Je me devais de l'oublier, et me concentrer sur le moyen d'oublier la souffrance que provoquait l'absence d'Henry
Je réapparus dans la chambre d'Henry, à l'abri des regards, seule. Cette pièce sans vie me ramena à ma plus grande détresse. Je n'avais pas spécialement choisi d'atterrir à cet endroit, c'était la première fois que mon subconscient choisissait à ma place. J'oubliais alors tout, la discussion avec Blanche neige, la malédiction et l'accusation des habitants. Le lit vide me ramena à une réalité difficile, je vins m'assoir sur le lit avant que mes jambes ne se dérobent sous mon poids et j'attrapai le premier coussin à ma portée. Pour la première fois depuis mon réveil, je me laissais aller, laissant s'échapper toutes les larmes de mon corps et je m'accrochai comme une bouée de sauvetage à son oreiller bleu. Les battements de mon cœur me faisaient mal. Ma gorge et ma mâchoire étaient tellement serrées par mes sanglots que je me retrouvais crispée. Mon corps tout entier tremblait légèrement et j'enfouis un peu plus mon visage dans le tissu.
« Henry... murmurai-je Henry, tu me manques tellement... »
Mes sanglots redoublèrent d'intensité. La perte de mon fils était une effroyable épreuve. La plus terrible malédiction qu'il soit. Je réalisai qu'il ne savait même pas qui j'étais. Je lui avais donné de nouveaux souvenirs qui l'empêchaient de se souvenir de moi, et c'était encore plus douloureux d'avoir conscience qu'il ne chercherait pas à me retrouver. Je ne pouvais continuer à souffrir de cette manière. Je relevai la tête et je fixai la fenêtre de la chambre. Les flocons avaient commencé à tomber, assombrissant le ciel; comme si mon état d'esprit influait sur le temps. Le ciel pleurait des larmes de glaces, mon cœur saignait. Je rejetai l'oreiller, séchai d'un revers de main nerveux les larmes sous mes yeux et le long de mes joues.
Je me relevai, rajustai ma robe et lissai une mèche brune qui me tombait sur le front. Mon caveau regorgeait de merveille pour pratiquer la magie, ainsi je réfléchissais à un sort ou une potion, n'importe quoi pouvant me permettre d'oublier mon fils. C'est alors que la solution m'apparût. Mon propre cœur devait quitter ma poitrine. Je pourrais éloigner ma souffrance et ainsi être soulagée. Je quittai précipitamment la chambre et dévalai les escaliers aussi vite que mes talons me le permettait. Je sortis de la maison en oubliant de refermer la porte d'entrée, démarrant rapidement ma berline noir sans prêter attention à l'ombre qui s'infiltrait chez moi.
Je roulai jusqu'au cimetière, en prenant soin de ne pas avoir d'accident. Je me garai non loin de mon caveau et me rendis rapidement dans la crypte. Je réalisai vite que cet endroit n'avait pas été rangé depuis bien trop longtemps, j'avais entassé des ingrédients aussi dangereux les uns des autres. J'attrapai le vieux grimoire de ma mère et je le feuilletai quelques instants en espérant trouver un sort utile. Mais honnêtement je n'avais pas la tête à me plonger dans de la lecture et d'entamer la moindre recherche. La priorité était mon coeur et ce que j'avais décidé d'en faire. Alors je laissai retomber le grimoire dans un bruit mat et je me dirigeai sans plus attendre devant le mur magique qui renfermait encore de nombreux cœurs. Des cœurs dont j'étais incapable de me souvenir de la provenance. Mais je pouvais être sûr qu'il restait des emplacements vides et l'un d'entre eux pouvait y accueillir mon coeur. Un geste de la main me permit de l'ouvrir et sans réfléchir, l'autre main plongea, vive et précise, arrachant mon propre coeur de ma poitrine. Mon buste bascula légèrement en avant et ma poitrine explosa en morceau. Je grimaçai en laissant une plainte sourde retentir dans le caveau. J'avais oublié à quel point cela pouvait être douloureux de s'arracher le coeur. L'organe rouge lumineux qui battait désormais en rythme dans ma main était marqué de sa part d'ombre qui ne s'en irait jamais. Je l'observais un instant avant de le déposer à son emplacement, là où personne n'aurait l'idée de venir le chercher. Du moins c'est ce que je voulais bien croire. Je scellai l'endroit avec la magie du sang. Étant fille unique sans parent encore vivant, personne ne pourrait l'atteindre. Je me détournai rapidement, ramassant le grimoire que j'avais laissé tomber pour le remettre à sa place initiale avant de m'en aller. Je n'avais plus rien à faire ici.
En remontant à la surface, je fus surprise par la couche de neige qui ne cessait de s'épaissir. Je ne devrais pas tarder avant de devoir rentrer à pied. Je pris place sur le siège conducteur en m'empressant de mettre la clé dans le compteur. A cet instant, je remarquai une feuille de papier, pliée en deux sur le siège à mes côtés ainsi qu'un morceau de tissu qui renfermait un objet fin et long. Une lettre jaunie l'accompagnait, je n'eus pas de mal à la reconnaître. Je dépliai soigneusement la feuille de papier après avoir regardé tout autour de moi pour m'assurer que personne ne m'observait. J'avais cru apercevoir une ombre en sortant de chez moi tout à l'heure et je n'en avais pas tenu compte. Maintenant, un cadeau empoisonné trônait sur le siège de ma voiture. J'étais suivie, cela déclencha un frisson glacial et désagréable le long de ma colonne vertébrale, Je rapportai mon attention à l'écriture soignée qui noircissait le blanc de la page. Une encre verte émeraude, Une écriture de femme.
Profite de ce cadeau pour soulager ta peine, un aller simple. love my sweety sister ! Zelena.
Je ratai un battement, si on pouvait appeler cela ainsi. L'ombre chez moi que j'avais cru entrevoir, n'était pas le fruit de mon imagination. Ma douleur avait réduit ma vigilance. On se jouait de moi. Cette femme se jouait de moi. Je soulevai d'un geste le tissu qui recouvrait une épingle à cheveux. Je pris l'extrémité du bout des doigts en évitant soigneusement la pointe. Un flash parcourut tout mon corps violemment et un enchevêtrement d'images inconnu défila dans mes yeux.
Je me trouvais dans mon propre château, vêtue d'une robe noire brodée de pierres précieuses et d'une cape duveteuse m'ayant appartenu dans la forêt enchantée. Je n'étais pas seule. Tandis que je préparai un sortilège, l'homme aux yeux bleu azur se trouvait non loin de moi. Nous étions seuls. Il me parlait désespérément et je n'écoutai pas. Je trempai la pointe de l'épingle dans le liquide grisâtre. Un charme du sommeil. L'image disparut. Cette fois j'étais assise dans la cour du château, seule, l'épingle encore entre les doigts, j'étais prête à l'utiliser sur moi. Une voix résonna derrière moi sans que je n'arrive à en discerner les mots. En me retournant, je découvris la méchante sorcière de l'ouest vêtue d'une de mes robes. Elle récupéra l'épingle de mes mains en un claquement de doigts, dans un nuage de fumée verte.
Les images s'évanouirent. De nouveau dans ma voiture, un peu déboussolée par ce que je venais de voir. D'où venait ses flashs ? Serait-il possible qu'ils viennent de l'année oubliée ? Si c'était le cas alors cette Zelena ne pouvait être que la méchante sorcière de l'Ouest. Mais je n'avais jamais eu de sœur. Tout ceci n'avait aucun sens. Je posais mon front sur le volant un instant avant de souffler un grand coup. Je reposai prudemment l'épingle à cheveux sur le tissu sans prendre le temps de lire le dernier document. Je devais retourner chez moi. Avec un peu de chance l'intruse était encore chez moi et je pourrais m'expliquer avec elle et prouver à toute la ville que je n'avais pas lancé la malédiction. Je démarrai en trombe en faisant totalement abstraction du temps déplorable qui continuait de s'abattre sur la ville. Si ça continuait comme ça les routes ne seraient plus praticable demain matin. Je me garai dans l'allée sans vérifier si ma voiture était alignée le long de la haie. La porte d'entrée était entrouverte et la pénombre de l'entrée ne laissait pas deviner qu'une personne pouvait se trouver à l'intérieur. J'avançai prudemment. Ma paume de main se posa sur le bois froid de la porte blanche et je l'ouvris doucement. Celle ci grinça légèrement. Dans mon autre main, je laissai un feu incandescent s'animer. Je me déplaçai doucement, un pied devant l'autre jusqu'à rejoindre le salon. Sans raison la boule de feu s'éteignit instantanément et je me retrouvai nez à nez avec la femme que je recherchais. Fière et droite face à moi, elle portait une robe d'un vert émeraude identique à l'encre utilisée sur le mot. Un chapeau noir se posait sur une longue chevelure rousse.
« Bonjour à toi aussi Sis' ! Sourit la méchante sorcière. Tu n'as pas aimé mon petit cadeau ? Ta meilleure solution ! Rit-elle cette fois ci.
- Je suis fille unique et... commençai-je
- Tu n'as pas lu la lettre de notre chère... maman ! Me coupa-t-elle sans la moindre politesse
- Comment as-tu pu entrer dans mon caveau ? Comment as-tu contré la magie du sang que j'avais installée ! raillai-je
- Je n'ai pas eu besoin de la contrer, je suis ta sœur. Ta demi-sœur si tu préfères jouer sur les mots ! Et je ne désire qu'une seule chose de toi ! Tu m'es précieuse Regina ! Tu m'as tout pris, notre mère t'as tout donné et m'a abandonné, tu vas payer et je vais tout te prendre, je vais rétablir l'équilibre. Elle était haineuse et d'une jalousie sans pareil.
- J'ai déjà tout perdu, tu perds ton temps !
- Oh non, il y a encore quelques ombres au tableau qui mérite d'être modifiées !
- Alors explique toi !
- Disons que tu as toujours eu tout ce que je convoitais, et tu ne l'as jamais mérité. Elle s'approcha dangereusement de moi. Et je vais tout reprendre, j'ai eu un bon professeur, j'ai toujours été meilleure que toi et pourtant c'est toi qu'il a choisi tout comme notre mère mais crois moi, ça va changer très bientôt. Son souffle était à quelques centimètre de mon visage. Sa proximité m'oppressait mais je ne fléchissais pas et je la défiais.
- Je ne perds jamais. Lui crachai-je au visage.
- Moi non plus, et aujourd'hui j'ai un petit cadeau pour toi, sœurette. » m'annonça-t-elle
Elle me bloqua le bras gauche, je voulus me dégager en lui envoyant un revers de la main mais elle contra mon attaque et elle immobilisa mon cou, coupant ma respiration. Sans avoir l'opportunité de riposter, je sentis un bracelet de cuir m'encercler le poignet. Elle lâcha la pression sur ma gorge en serra sa propre mâchoire et je me réceptionnai sur les genoux passant une main sur ma gorge en reprenant de l'air pour oxygéner mes poumons.
« Et maintenant je vais récupérer la chose dont j'ai le plus besoin pour mettre au point mon projet. Ton cœur ! »
Elle plongea sa main dans ma poitrine en moins de temps qu'il ne me faut pour la repousser, une sensation désagréable me brula l'intérieur de la cage thoracique tandis qu'elle cherchait désespérément l'organe vital. En vain. Mon cœur n'était plus dans ma poitrine et je remercia le ciel qu'Henry m'ait inspiré cette idée. Elle retira brutalement sa main et folle de rage elle me cracha au visage.
« Ton coeur ! Où est-il ?
- Je te l'ai dis, j'ai déjà tout perdu et si tu avais eu la chance d'avoir notre mère et mon fils, tu comprendrais que l'amour et les sentiments sont une faiblesse, je ne me balade pas avec mon cœur quand il en va de ma survie. Tu aurais pu savoir cela, voilà ce qui fait notre différence. Je la regardai se décomposer et devenir verte de jalousie face à cette remarque. Sa colère bouillonnait.
- Nous n'en avons pas fini, toutes les deux, je finirais par avoir ton cœur ! Sois en sûre et n'oublie pas Regina, je ne perds jamais ! »
En à peine une seconde, elle s'évapora, me laissant seule au milieu du salon dans un silence troublant. Je restai abasourdie un instant. La main sur ma poitrine, encore sous le choc d'avoir été malmenée de cette manière. Je devais me remettre de cette faiblesse que mon corps avait subit. Mon attention se porta rapidement sur mon poignet gauche. J'avais déjà presque oublié qu'elle y avait enserré un bracelet de cuir. Lorsque je le détaillai, je ferma les yeux en soupirant, les traits du visage tirés en secouant légèrement la tête de droite à gauche. Je m'assis à même le sol mettant un temps bien trop long à comprendre que je n'étais plus en sécurité. Mon coeur encore moins. Elle avait fait en sorte que je ne puisse plus utiliser mes pouvoirs. Elle jouait la carte de la facilité. Et sans ma magie, je me sentais soudain faible, démunie d'une partie de moi même. Je devenais vulnérable dans ce combat qu'elle avait déclenchée. J'essayai tout de même d'enlever le bracelet mais cela s'avéra inutile comme je l'avais prédit avant de tenter quand même.
Je sortis de mes pensées lorsque j'entendis un bruit provenant de l'entrée. Décidément, ma maison était le lieu de chasse de nombreux prédateurs aujourd'hui. En même temps je ne pouvais pas oublier que toute la ville en avait après moi compte tenu de mon passé diabolique. Je regardai la porte d'entrée encore ouverte avec insistance. Une ombre passa au ralenti. En à peine quelques secondes, un homme me faisait face, l'arc bandé, près à décocher sa flèche. Mon premier réflexe fut de reculer. Je reconnus le regard bleu azur de ma vision, le même regard qui m'avait troublé quelques heures plus tôt chez Granny. Nous nous dévisageâmes d'abord de longues minutes avant qu'il ne se décide à baisser son arc.
« Toutes mes excuses, Milady, je croyais... enfin j'ai vu quelqu'un rôder autour de la maison, la porte étant restée ouverte.
- Si vous cherchez la méchante sorcière, elle a déjà mis les voiles ! Répondis-je sèchement.
- En réalité, j'étais sur la trace d'un singe ailé, ils menacent la ville, plusieurs personnes ont déjà disparu au abord de la ville.
- Oh oui... les singes, bien sûr ! Je levais les yeux au ciel. Dois-je vous rappeler que la limite de la ville se trouve a plusieurs kilomètres de l'entrée de ma demeure et que vous venez de me menacer avec... une flèche ! Et non je ne suis pas un singe ailé, Le provoquai-je
- J'espère que cette erreur ne va pas me coûter mon cœur, votre majesté.
- Vous savez qui je suis ? Je parus étonnée.
- La Méchante Reine a une réputation sans précédent »
On me collait encore une étiquette et je détestais cela. J'arquai un sourcil lui faisant comprendre que je n'aimais pas que l'on m'appelle ainsi mais que ça ne m'étonnait guère et que j'y étais habituée. Surtout en cette maudite journée.
« Regina suffira. Maintenant si vous voulez bien ranger vos flèches, Je ne voudrais pas perdre la trace de la méchante sorcière et vous avez un singe ailé à poursuivre. Répondis-je pour ne pas perdre de temps.
- Cette méchante sorcière me paraît bien plus dangereuse que mon singe ailé et je crois qu'un coup de main vous serait utile. Répondit l'homme ne me laissant pas le choix.
- Oh non ! vous n'allez rien faire du tout, c'est mon affaire et je tiens à la gérer seule. M'opposai-je clairement.
- Vous aurez besoin d'un voleur pour vous protéger majesté !
- Un voleur ?
Robin de Locksley. À votre service. » Robin me tendit la main pour m'aider à me remettre debout. Je n'avais même pas eu la décence de me relever.
Je m'apprêtai à lui prendre la main pour me redresser mais la première chose que je reconnus, fut le tatouage de lion dessiné sur son poignet. Je n'étais pas capable de supporter plus d'émotions aujourd'hui. Cet homme se trouvait être l'âme sœur que Clochette avait voulu me présenter. Je loupai un battement et arrêtai mon geste. Nos deux mains flottaient l'une au dessus de l'autre sans se toucher. Je ne pouvais pas les celer. Je n'étais pas prête à gérer cet aspect de ma vie que j'avais refoulé.
« Tout va bien ? » Me demanda-t-il soucieux de mon bien être.
En moins de temps qu'il n'en faut, je baissai la tête pour qu'il ne remarque pas mon trouble et je me redressai seule. Fuir devant lui sans le regarder était facile. Je quittai ma maison sans me retourner, le laissant seul à l'endroit que j'occupais précédemment. Un bruit de moteur s'entendit dans la rue avant qu'il ne réagisse. Robin ramassa sa flèche qui avait échoué sur le parquet. Il soupira, se promettant de me retrouver.
