Comme promis, voici le premier OS de la petite série de trois One-Shots que j'ai écrit dernièrement :)

Pour les intéressés, mon post suivant sera pour le week-end prochain, mais je pense plutôt ajouter un OS à "The Bright Side".

Le thème est donc le même mais j'ai essayé de faire trois situations bien différentes. Et je le précise bien : ce n'est pas du tout une histoire continue !

J'espère que ça vous plaira !

Bonne lecture :)


One Night Stand

Si Patrick Jane se trouvait dans ce bar là, ce soir précis, c'était tout bonnement une affaire d'exception. Jane n'était pas le genre d'homme qui appréciait la compagnie des inconnus, et s'il voulait se plonger dans l'alcool – ce qui était rare-, c'était toujours en solitaire. Mais ce jour-là, il avait invité ses vieux amis forains à boire un coup alors qu'ils étaient de passage. Cela faisait maintenant longtemps qu'ils étaient partis, mais Jane était toujours assis à sa place. Il s'était pris à l'un de ses jeux favoris : celui de l'observation. Regarder les gens autour de lui et deviner leur personnalité était une véritable passion pour lui.

Ce qu'il n'avait pas prévu, c'était l'arrivée de Teresa Lisbon. En la voyant entrer, il eut immédiatement envie de la rejoindre pour qu'il puisse aller l'embêter un peu, mais quelque chose le poussa à rester cloué sur son siège. Et ce quelque chose se résumait au fait que Lisbon n'était pas habillée comme d'habitude. Etonné de l'assurance qui dégageait d'elle dans un lieu où elle semblait d'habitude mal à l'aise, et de sa démarche particulièrement féminine, Jane fut dévorée de curiosité. Il reporta son regard sur le visage de sa supérieure. Il ne l'avait jamais vue ainsi – un peu plus maquillée que d'habitude, de sorte que son regard soit mis en valeur, ses longs cheveux détachés soigneusement coiffés, et ces vêtements… Elle portait un haut qui épousait parfaitement ses formes, avec un certain décolleté, et un jean que Jane aurait qualifié de moulant ainsi qu'une simple paire de bottes. On n'aurait pas vraiment pu dire que sa tenue était sexy, mais tout du moins, elle éveillait l'intérêt.

Lisbon s'assit au bar et commanda quelque chose. De là où il se trouvait, Jane la voyait de trois quart. Il se renfrogna dans son siège pour ne pas qu'elle l'aperçoive. Il avait comprit assez vite que Lisbon avait sans doute rendez-vous avec un petit ami. Il n'était pas au courant qu'elle était en couple. C'était d'ailleurs plutôt étrange, Lisbon était si solitaire. Il savait qu'il aurait dû s'en aller. Il ne pouvait pas rester ici et observer sa collègue à son insu – ça serait comme de l'espionnage. Non, vraiment, il ne pouvait pas faire ça, c'était du voyeurisme. Jane était presque prêt à quitter le bar ni vu ni connu lorsqu'un homme vint s'asseoir à côté de Lisbon et commença à lui parler. Le consultant oublia alors sa bonne résolution et se rassit confortablement. Était-ce son petit ami ? Non, ils n'avaient pas l'air de se connaître. L'homme, qui n'était apparemment pas sobre, posa assez rapidement sa main sur la cuisse de Lisbon. Jane manqua de s'étouffer avec l'eau qu'il était en train de boire. Heureusement, Lisbon rembarra l'homme et se détourna de lui. Jane aurait tout donné pour entendre ce qu'elle avait dit. Le type se leva du siège et sortit de la salle d'un air bourru. Lisbon commença à boire dans son verre. Elle jetait de temps en temps un regard dans la salle et Jane baissait la tête à chaque fois en espérant qu'elle ne le remarque pas. Plus il restait ici, plus il s'enfonçait dans sa bêtise, mais il ne pouvait pas résister. Elle ne saurait jamais rien. Il ne la taquinerait pas avec ça. Juré.

Un deuxième homme, plus charmant que le premier, s'assit à un tabouret de distance de Lisbon. « Mon cher ami, Lisbon n'est apparemment pas un cœur à prendre » pensa Jane avec amusement. L'agent considéra l'inconnu et lui lança un regard mystérieux. Elle devait en faire, des cœurs brisés. L'homme sourit d'un air séducteur et engagea la conversation. Lisbon répondit sous le scepticisme de Jane. Et son petit ami, alors ? Elle ne flirtait quand même pas avec d'autres hommes alors qu'elle voyait quelqu'un ?

Jane but encore quelques gorgées. La situation l'intéressait au maximum. Lisbon rejetait ses cheveux en arrière et arborait des demi-sourires révélateurs. Si, elle flirtait. Et elle était douée. Après un moment, elle posa sa main sur le tabouret à côté d'elle comme pour l'inviter à s'y asseoir, ce que l'homme fit sans attendre. Jane s'était trompé, elle n'avait pas de petit ami : elle était là pour en chercher un. Mais quelque chose ne plaisait pas à Jane. Le prétendant de Lisbon avait comme une lueur de lubricité dans le regard. Cela ne semblait pas vraiment gêner Lisbon, ou peut-être ne le remarquait-elle pas.

Ils restèrent là à discuter, ou plutôt à se livrer à ce petit jeu de séduction pendant au moins une heure. Jane continuait de les regarder en se sentant de plus en plus en colère, à la fois contre le gars en question et contre Lisbon. Faisait-elle exprès d'ignorer l'évidence ? Le but de cet inconnu était de la mettre dans son lit, rien de plus. Ils semblèrent franchir un stade lorsque l'homme s'approcha encore d'elle pour lui parler à l'oreille. Il fit courir ses doigts le long de la taille de Lisbon. Quant à Teresa, elle continuait de sourire de manière ensorcelante. Elle ne rigolait pas comme une femme totalement sous le charme – en fait, Jane avait l'impression que c'était elle qui menait le jeu. Puis, l'inconnu essaya d'embrasser Lisbon, mais elle ne se laissa pas faire et détourna la tête. Jane ne put s'empêcher de sourire de satisfaction. Mais ce fut de courte durée, car l'instant d'après, Lisbon saisit la main du type et se leva du tabouret pour sortir. Jane se mit à paniquer. Il ne pouvait pas rester là sans rien faire. Ils se dirigèrent vers la porte et quittèrent le bar. Jane hésita un instant. Ce n'était pas ses affaires après tout, mais Lisbon était son amie, et il ne pouvait décemment pas la laisser dans cette situation, alors que les intentions de son compagnon étaient peu recommandables. Il se leva d'un bond, laissa quelques billets sur sa table et sortit du bar en trombe. Lisbon et le type se dirigeaient vers le parking.

- Lisbon ! héla-t-il en marchant vers eux.

Lisbon se tourna vers lui et lâcha aussitôt la main du type. Elle le regarda avec surprise.

- Jane ? Qu'est-ce que vous faites là ?

Arrivé à sa hauteur, il la prit par le poignet et l'entraîna à l'écart du type.

- Lisbon, je ne peux pas vous laisser partir avec cet homme.

- Quoi ? demanda-t-elle, dans l'incompréhension totale.

- Hey, vous avez un problème ? demanda l'inconnu d'un air mécontent en s'adressant à Jane.

- T'inquiète pas, c'est mon collègue, répondit Lisbon. Va à la voiture, je te rejoins dans une minute.

L'homme hocha la tête et s'exécuta après avoir lancé un regard noir au consultant. Ce dernier regarda Lisbon.

- Ne faites pas ça. J'ai observé ce gars et il est clair que la seule chose qu'il veut, c'est coucher avec vous.

Lisbon recula d'un pas et fronça les sourcils. Jane pu directement voir qu'elle était énervée et outrée à l'extrême. Ce n'était pas vraiment la réaction à laquelle il s'était attendu.

- Mais de quoi je me mêle ? demanda Lisbon lentement d'une manière menaçante, essayant de se contrôler.

Jane essaya de lui faire entendre raison avant qu'elle n'explose de rage.

- Je dis ça pour vous aider. Vous méritez mieux que lui. Une fois que… une fois qu'il aura eu ce qu'il voulait, il va vous laisser tomber. Il faut que vous compreniez… Il ne veut pas une relation à long terme !

Mais devant le regard de Lisbon, il sentait qu'il s'enfonçait.

- Ça fait combien de temps que vous m'espionnez, au juste ?! Vous m'avez suivi ? se mit-elle à crier.

- Quoi ? Non ! Non, j'étais là par hasard, je vous le jure ! se défendit Jane.

- Peu importe, vous n'aviez pas à m'espionner ! Ce ne sont pas vos affaires, Jane, je suis adulte ! Je sais ce que je fais !

- Ah oui ? Vous saviez que…

Jane tendit le bras dans là où était le type peu de temps auparavant. Et, alors que les choses commençaient à s'éclaircir dans son esprit, il reporta son regard sur Lisbon.

- Vous saviez qu'il… dit-il un ton plus bas.

Lisbon soutint son regard sans répondre et croisa les bras. Elle était devenue écarlate. Elle fit avec ses lèvres cette petite moue adorable qu'elle arborait quand elle ne voulait pas avouer quelque chose et détourna le regard.

- Oh, lâcha Jane, embarrassé.

- Dégagez, dit Lisbon d'un ton glacial.

- Je…

- Sérieusement, Jane. Je suis vraiment énervée alors fichez le camp avant que je ne dise quelque chose que je regrette.

Jane ressentit une douleur affreuse. Ce n'était pas une blague. Lisbon était en colère, c'était une vraie dispute. Il hocha la tête et fit demi-tour, le cœur lourd.

Jane pensa à ce qu'il s'était passé quasiment toute la nuit. Il était blessé par les paroles de Lisbon et il se sentait vraiment idiot. Il n'arrivait décidément pas à lire en elle aussi bien qu'il voulait le faire croire. Il aurait pourtant dû comprendre directement ce qu'il se passait. Lisbon avait des aventures. Lisbon avait des aventures d'une nuit. Soit. Ce n'était pas bien grave. C'était même normal. C'était une femme très occupée avec son travail qui n'était pas prête à changer de rythme pour un homme, mais qui avait tout de même des besoins, et elle avait trouvé une solution alternative. Ça durait sûrement depuis longtemps, mais Jane n'avait jamais songé à cette possibilité. A ses yeux, Lisbon était l'incarnation même de l'intouchable. Quel idiot. Quand elle n'était pas dérangée par les moqueries de son consultant, Lisbon pouvait se comporter en véritable croqueuse d'homme. Maintenant, il le savait.
Il pensa à tous ces gens qui avaient fait un court passage dans sa vie. Aucun d'eux n'était conscient de la chance qu'ils avaient.

« De la chance qu'ils avaient ? Tu dérailles, mon vieux » se dit Jane. Enfin, si, on pouvait le dire, ils avaient de la chance que Lisbon soit ouverte à ce genre de relation, jolie, intelligente, intrigante, drôle et spirituelle comme elle était. Oh, Seigneur. Voilà qu'il en était à faire la liste de ses qualités. Et dire que tous ces hommes ne profitaient que de son corps alors qu'il y avait tellement plus à découvrir si on cherchait un peu plus loin…

Comme il n'avait pas envie qu'il y ait des tensions entre eux, Jane se rendit au bureau de sa patronne dès le lendemain matin. Elle était à son bureau et se mit à rougir en le voyant entrer.

- Lisbon, à propos de…

- Si vous voulez parlez…

Ils avaient parlé en même temps. Lisbon se reprit la première.

- Ecoutez, au sujet d'hier soir… Je préfère qu'on oublie ce qu'il s'est passé, d'accord ? Je me suis peut-être un peu trop énervée sur vous, je sais que vous ne pensiez pas à mal. J'aimerais qu'on n'en reparle plus.

- Non, c'est moi qui m'excuse. Je n'aurais pas dû rester dans ce bar en vous voyant, et je n'aurais pas dû intervenir. Je suis désolé.

Lisbon hocha la tête.

- C'est pas grave.

Elle lui adressa un petit sourire pour lui montrer sa bonne foi. Elle n'avait vraiment pas envie de revenir là-dessus.

« Pour une fois, il n'a pas fait l'imbécile », se dit Lisbon en achevant d'appliquer son rouge à lèvre. Elle saisit ensuite sa brosse à cheveux. En effet, ces deux dernières semaines avaient été particulièrement calmes. Jane n'avait nullement refait allusion à cette soirée où il l'avait vue dans le bar. Quand elle y repensant, elle s'en voulait de sa réaction. Mais elle avait vraiment été embarrassée – surtout que Jane n'avait apparemment pas compris qu'elle n'était pas une sainte-nitouche jusque là – et son mécanisme de défense avait été de hurler sur son consultant. Elle s'était demandé ce qu'il avait pensé en l'observant à son insu. Ses aventures sans lendemain étaient bien-sûr une partie de sa vie qu'elle cachait plus ou moins aux autres. Est-ce que Jane s'était finalement rendu compte qu'elle était une femme ?

Lisbon leva les yeux au ciel, se sentant stupide de réfléchir à ce genre de choses. Jane était incapable de voir autre chose en elle qu'une alliée. Et c'était très bien comme ça. N'est-ce pas ?

L'agent jeta un œil à son reflet une dernière fois avant de quitter son appartement et de rejoindre sa voiture. La nuit était tombée depuis un long moment. Elle roula pendant une quinzaine de minutes avant d'atteindre un bar-restaurant à la périphérie de la ville. Elle entra à l'intérieur. Il n'y avait plus grand monde dans la partie restaurant à cette heure, la plupart des gens étaient accoudés au bar. Elle aimait bien cet endroit : l'ambiance était sympa, il n'y avait pas trop d'ivrognes, ils diffusaient du jazz et leur tequila était succulente.

Alors qu'elle allait s'asseoir, plusieurs regards appréciateurs se posèrent sur elle. Teresa Lisbon ne l'avouerait jamais, mais elle aimait cela. Se sentir désirée. Les jeux de séduction – occasionnels, bien entendu – lui plaisaient. D'ailleurs, elle ne couchait pas avec n'importe qui. Elle aimait les hommes avec du charme, du répondant, drôles et un peu mystérieux. Elle faisait tout de même attention à garder une certaine distance – elle ne voulait pas tomber amoureuse. Quoique, tomber amoureuse dans sa situation serait un miracle.

« Mais à quelle situation je pense, au juste ? » se réprimanda-t-elle mentalement alors qu'elle recevait son verre. Elle but une gorgée de tequila et apprécia le goût et la sensation de chaleur lorsque le liquide s'écoula dans sa gorge. Elle jeta un œil alentours. Elle avait bien repéré ce type avec sa chemise bleue foncée. Leurs regards s'accrochèrent un instant. Juste assez longtemps, en fait. Lisbon haussa les sourcils avec un petit sourire, auquel l'homme répondit. Elle regarda ensuite à nouveau son verre en attendant qu'il fasse le premier pas lorsqu'elle sentit une présence dans son dos.

- Je peux vous offrir le prochain verre ? souffla une voix à son oreille.

Le cœur de Lisbon fit une chute libre dans sa poitrine. Jane s'assit sur le tabouret à côté tandis qu'elle se remettait de sa crise cardiaque. Elle n'avait maintenant plus aucun contact visuel avec Chemise Bleue. Quant à Jane, il était égal à lui-même, en train de la regarder avec un sourire séduisant.

- Oh, bon sang, allez-vous en, Jane.

- Mais je suis sérieux, je voudrais vous offrir un verre.

Elle le fixa pendant quelques secondes sans comprendre – ou plutôt, refusant d'essayer même de comprendre le message qu'il voulait lui faire passer.

- Euh… non merci.

L'expression de Jane devint alors plus sérieuse et les battements du cœur de Lisbon recommencèrent à s'affoler. Il se mit à la dévisager. Elle n'était plus capable de prononcer un mot. Dans un geste lent et délicat, Jane pris sa main qui était sur le bar. Mal à l'aise, Lisbon cessa de le regarder et retira sa main tout aussi doucement. Jane pencha la tête légèrement sur le côté.

- Jane… souffla-t-elle.

- Teresa.

- Ce n'est pas drôle, dit-elle toujours sans le regarder.

- Non, ça ne l'est pas.

Lisbon posa alors les yeux sur lui.

- Vous savez, quand je vous ai observé l'autre soir, avec cet homme, j'ai remarqué comme vos yeux brillaient lorsque vous riiez, et la façon dont vous souriez quand vous rougissez. J'ai vu la manière adorable dont vous frissonniez quand il vous soufflait quelque chose à l'oreille.

Lisbon le regardait, et rien que la façon dont sa voix était grave et hypnotisante lui donnait des papillons dans le ventre. Elle aurait bien voulu lui dire de s'arrêter là, mais l'usage de la parole semblait l'avoir quitté en même temps que la faculté de réfléchir avec raison. Et Jane continua.

- Et la seule chose dont j'avais envie, Teresa, c'était d'être cet homme. D'être celui qui vous faisait rire, rougir et frissonner.

Il prit une des mèches de cheveux de Lisbon, non pas pour la mettre derrière son oreille, mais pour la placer sur son épaule. Et bien-sûr, elle frissonna.

- Laissez-moi être cet homme. Juste ce soir.

Non, non, non. Il était hors de question qu'elle laisse cela se produire.

Elle hocha la tête.

Il lui sourit. Ce n'était pas un grand sourire, et certainement pas un sourire moqueur. C'était un sourire tendre et sincère. Lisbon sentit quelque chose fondre au niveau de sa poitrine. Essayant de reprendre ses esprits, elle but d'un trait le reste de sa tequila puis se tourna vers Jane.

- Alors, vous me l'offrez, ce verre ? demanda-t-elle en haussant les sourcils.

Le sourire de Jane s'agrandit et il appela le barman pour qu'il les serve. Les deux mains posées autour de son verre comme pour avoir un point d'ancrage, Lisbon déclara :

- Avouez que vous m'avez suivie, cette fois.

Jane haussa les épaules et regarda en l'air d'un air faussement coupable. Lisbon secoua la tête avec un rire léger.

- Je pense que c'est à ce moment-là que je dois porter plainte pour harcèlement, déclara-t-elle.

- Vous n'oseriez pas.

- Vous croyez ?

- Je sais que vous appréciez ma compagnie.

- Et que dois-je dire de vous, alors, si vous allez jusqu'à me suivre à 10 heures du soir pour profiter de ma présence ?

Un éclat de malice dans les yeux, Jane se pencha vers elle.

- Je vous laisse trouver la réponse à cette question par vous-même.

Lisbon eut un sourire joueur.

- Quel séducteur vous faites.

- Seulement avec vous, Lisbon, seulement avec vous, répondit le consultant en se redressant.

Lisbon but une nouvelle gorgée et fut imitée par Jane. Elle commençait à se sentir bien.

- N'importe quoi, poursuivit-elle.

- Quoi ?

- Vous savez très bien qu'il vous suffit d'un sourire pour que toutes les femmes tombent amoureuses de vous.

Jane ne put qu'attraper la perche qu'elle lui tendait.

- Donc, j'en déduis que ça marche avec vous.

Lisbon le regarda pendant une poignée de secondes durant lesquelles elle sentit à nouveau des papillons dans son ventre, avant de répliquer :

- Je ne suis pas comme toutes les femmes.

Jane eut un petit rire.

- Je ne peux pas vous contredire sur ce point, admit-il.

Lisbon lui offrit un sourire resplendissant.

- Alors, vous regrettez de ne pas passer la soirée avec le type à la chemise bleue ?

La surprise de l'agent dû se lire sur son visage, mais l'habitude la poussa à ne pas demander à Jane « Comment… ? » d'un air incrédule. Elle se contenta de hausser les épaules.

- Je ne sais pas encore.

- Est-ce que je dois prendre ça pour un défi ?

- Peut-être… fit-elle en ne pouvant s'empêcher de sourire à nouveau.

- Que d'ambiguïté, ce soir, Lisbon ! Bien, alors je propose qu'on aille faire un tour dehors.

- D'accord, à condition que vous n'avez aucun geste déplacé.

- Enfin, Lisbon, je n'oserais pas, dit-il en reprenant l'expression qu'il avait utilisé quelques minutes auparavant.

Lisbon eut un rire moqueur.

- Ça, c'est bien la chose la plus ridicule que vous avez dites ce soir.

Ils achevèrent leurs verres et sortirent ensuite du bar. Ils marchèrent dans les rues désertes en silence pendant un moment, seulement éclairés par les lampadaires. La nuit était calme. Tout à coup, un courant d'air froid passa par là et Lisbon, en chemisier, frissonna. Jane lui jeta alors un œil et elle le vit.

- Vous êtes censé mettre votre veste sur mes épaules, là, n'est-ce pas ?

- Vous voulez que je mette ma veste sur vos épaules ?

Lisbon le regarda.

- Non.

Jane sourit.

- Eh bien, vos désirs ne sont pas des ordres, répondit-il en enlevant sa veste.

Il la posa sur Lisbon qui s'était arrêtée. Elle se sentit tout de suite réchauffée et était entourée de l'odeur de Jane. C'était agréable, mais elle la retira tout de même.

- Vraiment, je n'en ai pas besoin, dit-elle en la lui tendant.

Il la reprit en poursuivant sa marche.

- Vous gâchez tout, Lisbon, se plaint-il.

- Je gâche quoi ?

- L'ambiance.

- L'ambiance ?

- Oui, l'atmosphère, tout ça.

Mais Lisbon était sérieuse et s'arrêta à nouveau.

- Jane.

Il se tourna vers elle. Elle fit un petit non avec sa tête pour montrer qu'elle était perdue.

- Dites-moi réellement pourquoi vous êtes venu.

Le rythme cardiaque de l'agent accéléra lorsque Jane fit un pas vers elle.

- Vous faites seulement semblant de ne pas le savoir, n'est-ce pas ?

Elle soupira sans répondre, en essayant de calmer sa respiration. La conversation devenait très, très dangereuse.

- Dites-moi que vous ne voulez pas que je reste.

Il s'approcha encore d'elle. Quel tricheur. Il savait très bien qu'elle perdrait la tête s'il continuait. Il fallait qu'elle recule. Qu'elle fasse au moins trois pas en arrière. Ce n'était pourtant pas bien compliqué. Mais elle ne bougea, et elle ne dit rien, et le visage de Jane se retrouva à quelques centimètres du sien.

- Dites-le, la défia-t-il à nouveau.

- Je croyais que mes désirs n'étaient pas des ordres, parvint-elle à souffler.

- Alors dites le contraire, répondit-il en effleurant sa joue d'une main.

Elle abandonna.

- Ne m'embrassez pas.

Jane ne se fit pas prier et une seconde plus tard, ses lèvres étaient pressées contre celles de Teresa. Le cœur de cette dernière fit une nouvelle chute libre. Cet homme causerait sa mort, c'était maintenant évident. Ses mains trouvèrent la nuque du consultant et le baiser s'approfondit. La sensation était étourdissante, intense, exquise. Jane passa ses bras autour de Lisbon. Elle pouvait sentir le cœur de Jane battre aussi vite que le sien. Lorsque Jane se détacha d'elle, elle l'attira aussitôt dans sa direction pour un deuxième baiser, mais elle le stoppa presque aussi vite. Elle se recula juste assez pour regarder Jane. Elle inspira et expira longuement, et même sa respiration tremblait. Le souffle de Jane ne se portait pas non plus au mieux, mais il semblait surtout attendre la réaction de Lisbon. Cette dernière pinça les lèvres, regarda ailleurs, regarda à nouveau Jane et enleva ses mains de sa nuque, mais il la prit de vitesse et les rattrapa pour les garder entre eux. Lisbon lui adressa un sourire attendri qui disparut bien vite. Elle déglutit difficilement et fronça les sourcils un instant, avant de déclarer :

- Il y a une bonne raison qui fait que nous allons maintenant rentrer chez nous et ne plus jamais repenser à ça.

Le visage de Jane se décomposa.

- Laquelle ?

- Vous êtes Patrick Jane et je suis Teresa Lisbon.

Jane sembla attendre la suite.

- C'est tout ?

- Eh bien, je pense que ça résume assez bien notre principal problème, oui.

Jane la fixa sans répondre, puis se mit à caresser de ses pouces les mains de l'agent qui étaient dans les siennes.

- Alors ne soyons plus ces personnes, murmura-t-il.

Lisbon sourit tristement avant de poser son front contre l'épaule de Jane.

- J'aimerais que ça soit aussi simple.

- C'est vous qui rendez les choses compliquées, Teresa.

- Non. C'est la vie qui rend les choses compliquées…

Jane posa un baiser dans ses cheveux.

- Une nuit. Juste une nuit. Et ensuite on oublie tout.

Lisbon se retira de son épaule.

- Vous voulez que je vous fasse une vraie liste de tous les arguments qui sont contre cette idée ? Parce-que j'en ai jusqu'à demain matin.

- Non, je pense qu'on pourrait trouver des occupations beaucoup plus attrayantes d'ici-là.

Lisbon sentit une bouffée de chaleur l'envahir devant le sous-entendu. Jane eut un sourire triomphant.

- Voilà : rire, frissonner, rougir, arrêtez-moi si je me trompe mais je crois que le compte est bon.

Elle leva les yeux au ciel.

- Moi, je crois surtout que je suis totalement en train de perdre ma soirée.

- Oh, s'il-vous plaît Lisbon, arrêtez de mentir. Je pensais sincèrement qu'on avait dépassé ce stade.

Ils se regardèrent d'un air de défi, puis Jane abdiqua.

- Bon, très bien, vous voulez qu'on fasse une liste, et même si vos désirs ne sont toujours pas des ordres, c'est l'exception qui confirme la règle. Faisons cette liste. Vous commencez.

- Très bien.

Elle se détacha complètement de lui et croisa les bras.

- Contre : on travaille ensemble.

- Pour : on en a tous les deux envie.

- Contre : vous êtes déjà insupportable et ça va empirer les choses.

Lisbon attendit une répartie, mais elle ne vint pas.

- Quoi, vous êtes déjà à court d'idée ? le nargua-t-elle.

- Au contraire, ma chère, je pense que j'ai gagné.

- Ah bon ?

- Eh oui ! L'adage ne dit-il pas « L'envie est la seule raison valable » ?

Lisbon fronça les sourcils.

- Euh, je ne crois pas, non. C'est vous qui venez de l'inventer !

- Et alors ?

Lisbon secoua la tête.

- Vous n'avez pas le droit d'inventer des adages.

Jane feint la surprise.

- Sérieusement ? Il faut une formation ? Est-ce que les cours d'invention d'adages existent ?

Lisbon roula des yeux avec un rire.

- Vous savez quoi, Jane ? Vous me rendez cinglée.

Il lui fit un grand sourire.

- Vous passez aux arguments « pour » maintenant ? Vous pourriez prévenir quand les règles du jeu changent. Je refuse de faire les « contre ». Je n'en ai pas.

- Sans blague ?

Ils se sourirent mutuellement, puis Jane reprit son sérieux. Il la regarda d'un air interrogateur pour connaître sa décision. Lisbon se mordilla la lèvre et se rapprocha de lui. Il ne la quittait pas des yeux. Elle posa une main sur la joue de Jane, puis approcha son visage du sien pour l'embrasser calmement. Il lui rendit son baiser.

- Voilà ma réponse, murmura-t-elle.

L'une des mains de Jane glissa dans ses cheveux et il se pencha vers elle pour un nouveau baiser.

Une nuit puis ils oublieraient tout.

Une nuit pour tout oublier.