Fandom : Kuroko no basuke

Titre : Les lapins pas si crétins

Disclaimer : Les personnages de Kuroko no basuke ne m'appartiennent pas et je sais que menacer IG Prod' et Tadatoshi Fujimaki n'y changera rien. L'illustration utilisée pour cette fanfic appartient à la fabuleuse artiste 3ternal-star, dont certains fanarts sont postés sur DeviantArt. Aussi, je ne fais pas du tout d'argent avec cette fanfic.

Rating : M. Toujours. Ça ne rigole pas !

Genre : Promis, quand je le saurai, je vous le dirai.

Pairing : Midorima x Takao (la tentation était trop forte), Akashi x Kuroko (ça fait déjà la troisième fois, mine de rien…)

Note de l'auteur : Voilà, ça, c'est fait… Je peux aller m'enterrer dans un cercueil pour le restant de mes jours, je ne regrette rien.

Message personnel : Poucelina, je ne te remercie pas du tout sur ce coup-là… C'est de ta faute si j'ai dévié de mon chemin tout tracé, et si j'ai délaissé la rédaction de ma fanfic « triste et déprimante » pour écrire et publier ça ! Je t'en veux tellement que pour la peine, je t'obligerai à la lire jusqu'au bout ! Mouahahahaha !

Message personnel (bis) : Riddikulus, à ton avis, qui a réalisé un lavage de cerveau dans ma pauvre petite tête, au point de me faire récidiver sur du Akashi x Kuroko ? Et au point de me faire écrire sur une idée que tu affectionnes tout particulièrement et que tu sauras reconnaître ? Et par-dessus le marché, tu veux que je te remercie ? Jamais ! Je te condamne à lire cette fanfic et à mourir noyée dans ta propre bave ! Ou étouffée de rire, au choix…


Chapitre 1 : L'enlèvement

Les écouteurs de son nouvel MP3 sur les oreilles, Takao se dandinait légèrement dans sa toute petite cuisine. Vêtu simplement d'un jogging usé, d'un vilain tee-shirt couvert d'un long tablier bleu rayé de noir et de gris que sa mère lui avait offert quand il s'était mis en ménage avec son petit ami de longue date, Midorima Shintarô, il s'affairait aux fourneaux.

Il avait quitté son travail de professeur de secondaire un peu plus tôt que d'ordinaire aujourd'hui, soit à dix-huit heures. D'habitude, il aimait rester discuter avec les collègues, les élèves, les parents d'élèves parfois. D'autant plus qu'il était le coach de l'équipe de basket de son établissement, ce qui lui rajoutait une sacrée quantité de travail supplémentaire après les cours. Il rentrait rarement chez lui avant vingt heures, d'autant plus qu'il préférait largement rester en salle des professeurs à bosser plutôt que de ramener de la paperasse chez lui.

Il enseignait dans un collège privé réputé. Ce qui expliquait facilement que oui, il bûchait dur, comme ses élèves.

Avec Shin-chan, qui était étudiant en médecine à la prestigieuse Université de Tôkyô, ils ne se voyaient pas beaucoup et n'avaient que peu d'occasions de passer du temps ensemble. Ce dernier, qui arrivait vers la fin de ses études, commençait à faire des internats en hôpital, ce qui signifiait des horaires de folies et un emploi du temps complètement décalé des gens ordinaires; sans compter d'éventuelles urgences, les remplacements intempestifs de personnel pour combler des trous de planning…

Ils étaient déjà dans leur septième année de vie commune, sachant qu'ils avaient arrêté de se tourner autour pour se fréquenter "officiellement " (comme des grands) en début de seconde année de lycée, à Shûtoku. A leur grand étonnement, leur mise en couple n'avait surpris personne : ils s'étaient alors rendus compte que leur relation paraissait évidente et naturelle à tous ceux qui les connaissaient et avaient l'habitude de les voir interagir au quotidien. Encouragés par cette nouvelle, ils s'étaient installés dans un appartement en plein centre-ville pour leurs études et ne l'avaient plus quitté depuis lors. Leurs parents respectifs connaissaient leur amitié depuis le lycée et n'avaient pas bronché. L'annonce de leur couple, cependant, ne s'était pas déroulée sans heurt. Les Midorima n'avaient d'ailleurs toujours pas digéré le coup, même s'ils tentaient de faire bonne figure en public et qu'ils n'avaient jamais causé d'esclandre. Cela ne les avait pas empêchés, en douce, de tenter de saboter la relation du fils aîné afin qu'il épouse une fille "bien comme il faut" qui lui ferait des enfants capables de reprendre la clinique privée fondée par le grand-père de Shintarô. Avec les années, cependant, la virulence de leur poison diminuait. Les Takao étaient plus partagés et s'étaient déchirés en interne sur la question. Certains membres, à commencer par la sœur cadette de Kazunari, étaient pour ou neutres; d'autres, comme les parents, étaient contre et priaient tous les jours pour que cette relation hors de toute convenance, entre deux jeunes hommes, cessât au plus tôt.

Malgré ces moments familiaux ponctués de discussions douloureuses, d'aveux trop longtemps tus, de confessions, de larmes et de coups bas, le couple formé par Kazunari et Shintarô tenait bon, de la plus belle des manières. Leurs amis, comme les anciens de la Génération des Miracles, leurs anciens coéquipiers de Shûtoku et même leur entraîneur et professeur d'Anglais de l'époque, Nakatani Masaaki, n'en étaient pas étonnés et les imaginaient sans problème finir leur vie ensemble. Les deux tourtereaux, en plus de s'aimer et de se connaître sur le bout des doigts, étaient aussi têtus l'un que l'autre et n'étaient pas prêts à laisser qui que ce soit piétiner sans vergogne leur histoire, dicter sa loi et leur dire ce qu'ils devaient faire. La farouche détermination, sans aucune faille, de Midorima une fois qu'il avait décidé d'assumer, une bonne fois pour toutes, ses actes et ses sentiments, forçait l'admiration. Quant à Takao, ce n'était même pas la peine d'en parler… Quiconque voulait s'en prendre à son Shin-chan, son bébé, son nounours, son porte-bonheur, l'homme de sa vie, devait lui passer sur le corps. Ni plus, ni moins.

Mais heureusement, ils n'en n'étaient plus à ce stade. Ils avaient mis de la distance avec les membres les plus nuisibles de leur famille qui souhaitaient la dissolution de leur couple. Ils se contentaient du minimum syndical avec les autres, pour éviter les problèmes. Et avec leurs amis, leurs collègues, leurs connaissances qui les entouraient, ils ne se sentaient pas si isolés que cela, tout compte fait.

Takao et Midorima menaient donc une petite vie routinière et ce, bien avant que le brun ne commençât à travailler : en effet, l'étudiant en médecine freinait sur les sorties, surtout le soir, ainsi que sur les dépenses inutiles, tandis que le professeur se chargeait de pimenter leur quotidien avec tous pleins de petits riens. Un équilibre naturel, issu de leurs traits de caractère respectifs, s'était par conséquent mis en place de lui-même lorsqu'ils avaient emménagé dans cet appartement et cela leur suffisait amplement.

Etait-il possible d'être autant comblé ? Et ce, par une seule personne ?

Kazunari ne l'aurait pas cru s'il n'avait pas rencontré son chéri, mais maintenant, il pouvait répondre sans hésitation, sans crainte de paraître niais ou fleur bleue : oui, c'était tout à fait possible.

La cuisine dans laquelle il se trouvait était minuscule, il fallait bien l'avouer, mais elle remplissant néanmoins son rôle : la gazinière avec le four incrusté permettait de faire de bons petits plats; il y avait un plan de travail entre celle-ci et l'évier, assorti de placards en haut et en bas. Un réfrigérateur, ainsi qu'une machine à laver poussive posée en-dessous d'étagères venaient compléter le tableau.

Shin-chan n'y mettait toujours pas un pied, sauf pour aller se prendre une boisson au frais ou pour s'occuper du linge. Et même le brun était forcé de l'admettre: son petit ami était une calamité sur patte, une fois dans cette pièce. De sorte que Kazunari cuisinait dès qu'il avait un peu de temps et qu'il n'était pas trop fatigué, si bien sûr, ils se retrouvaient à deux dans l'appartement. Il s'échinait rarement à préparer quelque chose quand il savait qu'il passerait l'après-midi ou la soirée seul. Midorima, lui, avait une arme toute trouvée : les plats à emporter. Ces derniers l'aidaient à ne pas mourir de faim lorsque c'était son tour d'errer comme une âme en peine chez eux. Et quand ils étaient à deux, mais complètement crevés : les livraisons à domicile ! Ils abusaient encore et encore de cette astuce, et ils n'en avaient même pas honte, surtout quand ils se retrouvaient autour de la table basse du salon vers vingt-et-une heures, semblables à des morts-vivants, le ventre et la tête aussi vides que des trous d'air…

Le brun en tablier jeta un coup d'œil fier au grand bol de mochi (1) qu'il avait déjà préparé : il avait quitté son établissement dès la fin des cours pour s'empresser de les faire. Les mochi accompagnaient parfaitement le petit plat sucré qu'il était en train de réaliser, et dont il avait entamé la préparation depuis la veille au soir. Ses petites boules de mochi, qui tenaient aisément dans la main, étaient bien blanches, couvertes de noix de coco râpées. Il les avait goûtées, bien sûr : un délice ! Elles étaient sucrées et plairaient à coup sûr.

Les yeux bleus métallisés de Kazunari les quittèrent presque à regret et migrèrent vers la casserole chaude posée sur la gazinière en pleine activité. Dedans cuisait depuis plus de deux heures un liquide semblable à une sauce épaisse de couleur rougeâtre, parsemé de haricots rouges suffisamment mous pour être écrasés entre les doigts : de l'oshiruko (2). Il se saisit d'une grande cuillère posée sur le plan de travail et remua doucement la soupe qu'il n'avait pas encore sucrée, en pensant à son amoureux. Contrairement aux apparences et à ce qu'on pouvait croire, vu le nombre de fois qu'il s'était amusé à reprendre Murasakibara sur ses habitudes alimentaires, Shin-chan aimait le sucre. Il n'en était pas drogué comme certains, mais comme il ne faisait rien à moitié, il s'attendait, si le dessert était doux, à ce qu'il y en ait en quantité suffisante. De sorte que Kazunari prit bien soin de verser, par intermittence et tout en remuant, un grand verre de sucre. Il mélangea lentement, comme s'il effectuait un travail minutieux requérant toute son attention, avant de troquer la cuillère contre une louche et en prit une lampée. Il hésita à rajouter des épices afin d'en relever la soupe, mais il se dit que ce n'était pas nécessaire. Avec les mochi, elle descendrait comme un cycliste dévalant une colline. Et puis, Midorima aimait les choses simples, après tout, du moment qu'elles étaient goûteuses.

Takao eut un sourire attendri en pensant à l'homme qu'il aimait.


Aujourd'hui était le six Juillet. Demain, il fêterait ses vingt-cinq ans. Dont sept années vécues sans regret auprès de son ancien camarade et partenaire devenu son compagnon, Kazunari.

Shintarô savait que celui-ci mijotait quelque chose pour son anniversaire et depuis longtemps. Le brun le faisait toujours, sous la forme d'une petite attention, d'un cadeau, d'une nuit particulièrement coquine ou encore d'un plat original terminé par un bon bol d'oshiruko. Ce dessert, réputé pour être sa boisson favorite, était un must, un incontournable que Kazunari lui préparait à chaque fois et qui ne le lassait toujours pas. Même si cette soupe était usuellement un dessert d'hiver et qu'on était en plein été, et même si Midorima restait quelqu'un de très attaché aux traditions malgré son attirance pour les hommes (enfin, surtout un en particulier), il ne refusait pas un bol de shiruko fait maison.

Lorsque tombait l'anniversaire de son faucon, dans la seconde moitié du mois de Novembre, Midorima marquait le coup en sortant des sentiers battus et en l'emmenant dans des endroits insolites, dans la capitale ou ailleurs lorsqu'ils le pouvaient. Ce pouvait être un bar à karaoké, une exposition sur un thème original, un restaurant avec une vue panoramique, une attraction, une initiation à un sport de sensations fortes…

En été ou en automne, donc, ces deux fêtes, ainsi que Noël et la Nouvelle Année, symbolisaient pour eux un moment privilégié et intime à deux, qu'il leur était de plus en plus difficile à mettre en place avec leur emploi du temps respectif. Il s'agissait pourtant d'une série de rituels qu'ils tenaient à conserver : quatre fois par année, ils s'accordaient un moment unique dégoulinant de romantisme. C'était peu, mais ils ne s'en plaignaient pas. Puisque le reste du temps, eh bien… Ils restaient fidèle à eux-mêmes, pouvait-on dire. Et cela incluait, bien entendu, des chamailleries interminables entre deux amoureux comme au premier jour.

Il était gâté de vivre avec Kazunari, il s'en rendait compte. C'était quelqu'un d'extraordinairement gentil et généreux. Il inspirait une confiance positive à quiconque posait les yeux sur lui. Il était entraînant, inspirant comme une musique rythmée. Il était une bouffée d'amour et de tendresse dans son monde auparavant si froid, si mécanique, tellement désolé. Il était drôle, il était vif, un peu gaffeur, subtil quand il le fallait. Il était affreusement sexy. Il était…

Il était son faucon, quoi.

Sur ces amoureuses pensées, Midorima arriva devant la porte de son appartement. Machinalement, la veste sur le bras à cause de la chaleur, il sortit les clés de la poche de son pantalon droit et rentra chez lui. A l'entrée, il pila net et resta debout sans même enlever ses chaussures, ni refermer derrière lui. Il reconnaissait l'odeur envahissant leur petit nid douillet. Cette odeur douce et sucrée…

Soudain guilleret en imaginant son petit ami cuisiner une soupe de haricots rouges comme il les aimait, il se racla la gorge, redressa ses lunettes sur son nez et mit sa joie en sourdine à l'aide d'une masque sévère. Car oui, ils avaient grandi, depuis le temps, mais Shintarô était toujours un peu gêné d'avancer le cœur en bandoulière, contrairement à Takao, qui d'ailleurs, continuait de le traiter ouvertement de tsundere, même si c'était moins fréquent qu'avant. L'étudiant en médecine rechignait encore légèrement à afficher tout l'attachement qu'il éprouvait envers celui qu'il chérissait.

Deux bras forts le saisirent à la taille. Deux autres mains lui enserrèrent la bouche afin qu'il ne crie pas, et une troisième lui emprisonna le nez dans un épais mouchoir fortement imbibé d'une solution qu'il reconnut automatiquement comme étant de l'éther, un anesthésiant autrefois couramment utilisé en médecine, mais abandonné par la suite car très facilement inflammable. Son premier réflexe fut de tourner la tête et de crier, mais il se rendit compte que la prise de ses assaillants était ferme et solide. Ce qui l'étonna, car il mesurait quand même près de deux mètres ! Ce fut ce constat qui commença à le faire paniquer et à se débattre comme un beau diable. Dans ses mouvements, qui devenaient de plus en plus désordonnés au fur et à mesure qu'il sentait son esprit s'embrumer à cause de l'éther, sa tête bougea à droite et à gauche, mais ses attaquants étaient si forts que Midorima ne put rien voir, rien entendre lui permettant d'identifier ses trois agresseurs.

Il n'eut pas trop le temps de s'interroger sur ce qui se passait, ni sur le comment du pourquoi de ces hommes qui avaient décidé de s'en prendre à lui alors qu'il rentrait paisiblement dans son appartement. Déjà, ses yeux se fermaient, sa conscience s'envolait vers d'autres cieux. Et Kazunari ? Qu'allait-il devenir ? Qu'est-ce que ses agresseurs lui feraient subir ensuite ?

Il n'eut aucune réponse à ces questions alors qu'il sombra dans un sommeil lourd et noir.


Deux choses le réveillèrent : les secousses dont était victime son pauvre corps et des éclats de voix qui agressaient son ouïe sensible. Il était encore un peu confus et sa tête lui tournait.

Kazunari… Que lui était-il arrivé ? Qu'est-ce qui s'était passé après cet enlèvement ? Est-ce que son compagnon était toujours sain et sauf ? Si oui, dans quel état ?

La peur d'imaginer son petit ami agressé à son tour ouvrit les yeux de jade de Midorima d'un seul coup. Il se rendit compte qu'il… ne voyait rien du tout. On les lui avait bandés. Ainsi que la bouche. Ses poignets étaient fermement ligotés derrière son dos, aussi solidement que l'étaient ses chevilles l'une à l'autre, avec des cordes. Il était couché sur le côté, mais sur une surface molletonneuse comme un matelas, dans un véhicule selon toute vraisemblance possédant un habitacle suffisamment large pour qu'il n'ait pas besoin de beaucoup replier ses pieds; de sorte qu'il se trouvait dans une position assez confortable.

Cela n'enlevait rien à la barbarie de l'acte, selon lui. Comment avait-on osé lui faire ça, à l'entrée de chez lui ? Etait-ce pour un cambriolage ? Pourquoi lui et son petit appartement, précisément ? Avec Takao, ils ne roulaient pas sur l'or et ne vivaient pas dans un quartier huppé. Avait-il fait quelque chose de mal envers le commanditaire de son enlèvement ? Voulait-on le kidnapper pour faire chanter sa famille, son petit ami ? D'autres questions, plus pragmatiques, furent ensuite soulevées : depuis combien de temps était-il dans cette voiture ? Quelle était la destination de leur voyage ? Avait-il dormi longtemps ? Dans quelle ville se trouvait-il ?

Et Kazunari, que faisait-il en ce moment même ? Où était-il, et avec qui ?

Les interrogations diverses et variées fusèrent dans sa tête et la bombardèrent durant un moment, jusqu'à ce qu'il se calme de lui-même et retrouve son sang-froid. Il ne servait à rien de paniquer, au final. Tout ce qui importait, c'était de trouver une solution pour se tirer d'ici. Et pour cela, il fallait engranger le plus d'informations possibles. Ce qui tombait à point nommé : ses ravisseurs caquetaient comme des poules.

« Putain, font chier, ces bouchons !

-On arrive quand ? J'ai faim. »

Mais qu'est-ce que… Ces voix… La râleuse, la blasée…

« Mais j'en sais rien, tu vois pas que c'est bouché ? Impossible d'avancer !

-Pourquoi on m'a embarqué avec vous, dans cette affaire, moi ? J'avais rien demandé, vous auriez pu vous débrouiller sans moi, vous êtes trois ! »

Cette voix qui chouinait sans cesse…

« T'as pas vu le gabarit du bestiau ? Il fallait être trois pour le porter !

-Justement !

-Justement non ! Il nous fallait un chauffeur, en plus, ça aurait pu mal tourner, et tu sais que ça se serait mal terminé pour nous ! Tu oublies à qui on a affaire ! Pas droit à l'erreur, sinon… Couic ! »

Cette autre voix rageuse qui lui donnait de l'urticaire…

« Mouais, mais en attendant, j'ai faim.

-La ferme, toi, c'est pas à l'ordre du jour ! On a nos petites miches à sauver !

-Oh, m'emmerde pas, toi, là, devant ! On se gare pas n'importe comment ! Putain, si j'étais pas en civil, la prune que je lui aurais collée, à celui-là… J'aurais dû prendre le panier à salade, avec les gyrophares à fond les ballons, et paf ! Livraison express, on serait déjà sur le chemin du retour !

-Livraison de quoi ? Salade ?

-Mais non, débile ! C'est comme ça qu'on appelle les fourgons de police !

-C'est toi, qui es débile ! T'es flic à Tôkyô et tu ne connais même pas le trafic ?

-Ecoute, au cas où tu t'en rappelles pas, le gaijin (3), Tôkyô, c'est grand ! Et je suis pas dans mon arrondissement, ici!

-Oh, tu ravales ton insulte fissa ! Je suis peut-être reparti vivre aux States, mais je reste Japonais, j'ai les deux nationalités ! »

Impossible.

Les pires bras cassés de cette bande de bras cassés à laquelle il avait eu le malheur d'appartenir dans sa folle jeunesse... Quelle erreur de débutant…

Midorima sentit ses narines fumer comme un volcan.

« Bon, on arrive ou pas ? J'ai dû annuler une séance de shooting pour cette connerie !

-Ecoute, blondinet, on va pas en reparler, O.K. ? Pas envie d'avoir des ennuis ! Moi non plus, j'avais rien à voir dedans ! Avec leurs trucs de gay et tout ça, là ! Tu crois pas que j'ai autre chose à foutre ? J'ai ma nana et ma gosse qui m'attendent ! Alors toi, devant, avance, putain ! J'ai une livraison à faire! »

Shintarô fut ensuite secoué par un bruit de klaxon qui lui défonça les tympans.

« T'acharne pas, on y est presque ! Mais bon, il a quand même eu une idée assez tordue, tu crois pas ?

-Franchement, je crois plus en rien ! Ils sont gays ! Y'a rien à faire !

-Oh, tu insinues quoi, avec ça ?

-Qu'ils ont le cul en feu ! Ecoute, Bakagami… Je sais que t'en as pincé pour Tetsu, mais admets la vérité !

-T'es bouché, c'est pas vrai ! Je te la refais combien de fois ? Je t'ai déjà montré une photo de ma chérie? C'est juste une bombe avec ce qui faut là où il faut et son équipe a terminé seconde des playoffs en WNBA, alors ta gueule ! Moi et Kuroko, c'est amical !

-Dis, Aominecchi, tu crois vraiment que c'est pour une histoire de cul, qu'on fait tout ça ?

-Pour quoi d'autre ? Ça n'empêche, j'ai toujours faim.

-Murasakibaracchi, t'es juste chiant, ferme-la. T'es impossible quand tu n'es pas avec Himuro-kun, tu n'as pas changé d'un poil !

-C'est surtout être ici qui est chiant. Et Muro-chin est à Akita alors que moi, je suis revenu à Tôkyô.

-Laisse-moi deviner la suite : tu penses jamais à amener des bonbons en rab quand tu sors, c'est ça ?

-Muro-chin le faisait à ma place. Je m'y étais habitué…

-Epouse-le, qu'est-ce que tu veux que je te dise ! Et hop, deux autres en plus ! Juste, ne me contaminez pas, par pitié !

-Mine-chin, je n'ai pas ce genre de relation avec Muro-chin. Donc si tu ne veux pas que je t'écrabouille comme un insecte pour nous avoir insultés, écrase.

-Laisse tomber cet Aho, il est juste devenu complètement parano, il déconne à plein tube, c'est sa frustration qui parle...

-Oh, je te permets pas !

-Ce serait incestueux, en plus, comme relation, Murasakibara… Vu comment il te considère comme un petit frère…

-C'est vrai que j'y avais jamais pensé, mais tu as raison, Kagamicchi, toi et Murasakibaracchi, vous êtes les petits frangins de Himuro-kun !

-Et écrabouille-moi comme un insecte et tu verras la bagnole foncer dans le décor, pauvre tâche ! Et moi, je préfère être mille fois dans le monde des morts plutôt que d'affronter les deux autres, là ! Et le troisième larron va nous ressusciter, pour nous tuer de nouveau ! Donc on se calme et on me laisse conduire ! »

La seule et l'unique chose qui empêchait le pauvre captif entièrement entravé de faire un scandale en ruant dans les brancards, maintenant qu'il avait deviné, à leur voix et leurs paroles, l'identité de ses agresseurs avérés, et de les engueuler ensuite comme du poisson pourri... c'était son ignorance de la personne ayant commandité son enlèvement. Mais qui, au nom de Dieu, avait demandé à ces quatre manches de le kidnapper devant chez lui ? Ils parlaient de deux, trois personnes… Mais qui ?

Midorima ne connaissait pas non plus leur destination. Où voulait-on donc l'emmener, au point de mettre en place une telle mise en scène ?

« Bon, les mecs, on se gare dans le parking souterrain. Et on prend les escaliers de secours, les gars… Sinon, en pleine soirée, on se fera gauler direct dehors ! Et là, adieu nos têtes de beaux gosses! Et même toi, blondinet !

-N'en rajoute pas !

-Ouais, ça marche.

-Je suis.

-Pas le choix. On le porte comme tout à l'heure-là ?

-Ouais, mais je vous aide, parce qu'il a l'air lourd, l'animal !

-Il n'en a pas que l'air, je te rassure, toi la feignasse qui était au volant pendant qu'on le ramenait dans la bagnole ! »

Midorima pouffa de protestation dans son bâillon : bien sûr, qu'il pesait son poids, il ne l'avait pas fait exprès ! Il faisait près de deux mètres et quatre-vingt-six kilos aux dernières nouvelles !

Il sentit la voiture ralentir, tourner plusieurs fois sèchement, avant de s'arrêter tout à fait.

Voilà, ils étaient arrivés, très certainement.

Et maintenant, à quelle sauce allait-il être mangé ?


(1) Les mochi sont des petites boules de riz gluant pouvant être saupoudrées de noix de coco râpées, servies à température ambiante ou glacées

(2) l'oshiruko, ou simplement shiruko, est la soupe de haricots rouges sucrée que Midorima aime boire en canette

(3) gaijin désigne de manière vulgaire un étranger vivant au Japon