Il fait nuit. Je suis entouré de brouillard. Il fait froid. Je suis en sous-vêtements. Comment suis-je arrivé ici ? Une silhouette. Elle s'approche : qu'est-ce que je fais ? Je veux dire, je fais genre j'ai pas peur ou je me barre en courant ? Oh bah oui : « Hey dis donc c'est pas John Cena, le catcheur le plus populaire de la WWE qui court en hurlant de peur là-bas ? » « Ah ouais, t'as raison mais qu'est-ce qu'il fout en slip ? ». Je perdrais toute crédibilité. Vraiment. Et mon job c'est ma vie. La silhouette s'arrête soudain. Je déglutis (putain la honte !) et tente un minable :

« Heey ! »

Pas de réponse. Boh, avec un peu de chance personne ne me verra ou alors avec la vitesse, on ne me reconnaîtra pas. Je m'apprête à m'élancer quand la-dite silhouette me saisit l'avant-bras, me provoquant un frisson, et m'approche brutalement de son corps brûlant et… nu ? Euh… Je lève la tête et n'ai que le temps d'apercevoir un regard acier très -trop- familier avant que des lèvres sensuelles n'effleurent les miennes me faisant perdre pied… et me réveillent.

« Haaaan ! C'était un rêve ! »

Attends ! Un rêve de MON subconscient où Randy Orton me roule une pelle qui… me fait perdre pied ? Je passe mes deux mains sur mon visage fatigué (sûrement plus que je le pensais d'ailleurs) et au moment où je lève le regard sur le ring où s'entraînent Sheamus et Evan, j'aperçois la silhouette de on-se-demande-qui-comme-de-par-hasard dans un escalier à droite de l'endroit où je… me suis endormi visiblement. Il m'adresse un signe de la main poli : il a l'air pressé et… voûté. Ok, il est toujours voûté mais là, on dirait qu'il est vraiment exténué. Je redirige mon regard vite vite sur le ring en le sentant dériver inévitablement vers son… ses… moulées… Ok, ok ! Tout va bien : je suis juste en manque. Il me suffit juste de trouver une fille bien roulée à baiser. Et vite. Il me reste presque une heure et demi avant l'entraînement avec Mike et... Orton. Évidemment.

oOoOoOoOo

Je suis devant la chambre de Brie, en train de frapper à la porte . J'ai couché avec elle il y a deux ou trois jours et d'après ce que j'ai compris : avec elle, c'est quand je veux, où je veux… Autant en profiter quand c'est nécessaire. Mais visiblement elle est absente. Je me retourne, me tâte sur la direction à prendre, ne sachant vraiment pas où la chercher quand je l'aperçois soudain, dans une tenue plutôt rare chez elle (débardeur et pantalon de survêtement), le corps encore humide d'une douche. Et bah voilà, même pas besoin de chercher.

« Hey Brie !

- Nan moi c'est Nikki.

C'est bien ma veine : mauvaise sœur. A-t-on idée de se ressembler autant aussi ?

- Ah désolé. Où est ta sœur ?

- Pourquoi tu la cherches ?

Elle a l'air… soucieuse. Naaan, j'ai pas le temps pour un état d'âme de diva aujourd'hui.

- Euh… pour coucher avec elle.

Waah, qu'est-ce qu'il me prend de balancer ça comme ça ? La précipitation ne te mènera nulle part John !

- Quoi ? Tu couches avec elle ?

- Hein ? Euh… J'ai pas trop le temps de discuter donc… Si tu pouvais juste me dire où elle…

- Putain, vous êtes tous les mêmes. Avant-hier, quand on a… bah… je croyais que c'était sérieux entre nous. Je pensais qu'on sortait vraiment ensemble. Mais c'était que du cul en fait. Je te pensais différent. Mais au final, toi aussi t'as une queue à la place du cerveau qui pense que les divas sont toutes des putes à la disposition des catcheurs en mal d' « amour ». Et en plus tu oses me balancer que tu veux te taper ma sœur ?

- Aaaah c'était tooooi ! Putain, désolé. Mais vous vous ressemblez tellement ! J'ai cru que c'était Brie moi ! »

Petit rire. Elle, en revanche, n'a pas l'air de trouver ça drôle du tout. Son visage se décompose et devient furieux. Puis c'est la claque. Retentissante. Aouch… Je l'ai peut-être pas volée, remarque. Elle me bouscule violemment –mais au final elle a été beaucoup plus bousculée que moi- avant d'entrer dans la chambre voisine à celle devant laquelle je me trouve. C'est alors que j'entends un rire qui ne devrait pas me secouer les entrailles comme ça.

« Bah alors Cena, on cherche quelqu'un pour se détendre avant l'entraînement?

- Ortooon ! Hm… Oui… je…voulais… Mais j'ai confondu les jumelles et… Je suis vraiment nul dans tout ce qui est… relationnel… Donc bon tant pis : j'en trouverai bien une autre de toute façon. »

Dis donc. Pourquoi –avant ce fichu rêve de mes deux- je n'avais pas remarqué son sourire ravageur ? Et ce corps ! Bon sang ! Ouais, ça m'était arrivé de me dire qu'il était sacrément bien foutu (à la limite une fois je me suis même dit qu'il avait un corps de dieu grec... vite fait, comme ça, tout à fait innocemment) mais je m'étais dit que le désir que je ressentais alors c'était le désir d'être fait comme lui (et que oui cette idée m'excitait au point de me sentir légèrement durcir des fois) ou encore que mon état d'excitation parfois quand je catchais avec lui était dû à la proximité de nos corps (un truc totalement humain quoi, en plus, ça m'arrive aussi avec d'autres comme... comme... 'Fin j'ai pas de nom en tête là tout de suite mais... voilà...) : j'aurais dû comprendre pourtant qu'avec le corps que j'ai, pas besoin du sien et qu'au final, si j'ai pas de nom en tête c'est parce que y'en a pas du tout en fait. On m'a toujours reproché ma complète ignorance des sentiments humains, même des miens : je vais finir par croire que c'est vrai… Enfin bref !… Cessation de divagations John ! Ce désir ! Oui ! Alors, ce désir… en fait c'était… Naaan ? Ca ?

- Ca c'est sûr, tu l'es. Si elle s'est mise en colère c'est parce qu'elle est amoureuse de toi. »

Complètement perdu dans mes pensées existentialistes, je l'ai à peine écouté. Pas le temps en plus d'analyser la phrase qu'il vient de dire puisqu'il me jette un regard lourd de reproches avant de s'éloigner de sa démarche féline. Je sens alors mon regard glisser tout à fait contre ma volonté vers sa nuque sensuelle où j'aperçois avec un sourire conquis le début de son tatouage qui plonge dans le col de sa chemise noire, qui, elle, moule parfaitement ses muscles dorsaux et recouvre juste où il faut son jean taille basse légèrement évasé qui ne laisse pourtant pas beaucoup de place à l'imagination quant à la perfection de son derrière musclé qui, lui, se balance au rythme de ses pas, faisant vibrer ses cuisses et…

Ok. Ca a le mérite d'être clair pour une fois : je bande sec. En plein milieu d'un couloir largement emprunté par tous les membres de la WWE, staff compris, ainsi que le personnel de l'arène. Vite, cachage. Je glisse nonchalamment mes mains dans mon jean, les étirant vers l'avant pour donner l'impression que c'est ce geste qui provoque la légère déformation de ma braguette et avise une porte au coin du couloir à l'opposé de la direction où Orton est parti. Je m'y engouffre comme si de rien n'était saluant au passage John Morrison et Alicia qui discutent un peu plus loin. C'est… une salle de réunion visiblement. Vide fort heureusement. Je baisse les yeux sur l'érection que je ne devrais pas avoir et gémis. Je peux quand même pas faire ça… ici ? Bon essayons d'abord de la calmer : Vince Mc Mahon en tenue de soubrette. Concentration. Vickie Guerrero qui me fait une lap-dance. Ouais ça commence à marcher.

Quelques minutes après d'intenses efforts de débandage, je réussis à la calmer suffisamment pour qu'elle ne se voit plus et ne soit plus douloureuse. Je me laisse alors tomber dans une des chaises de la salle. Soupir. Moi ? Excité par Randy Orton ? Un homme. Un collègue. Marié en plus. Et puis, pourquoi je me pose toutes ces questions de toute façon ? Il n'a pas besoin de le savoir. C'est juste… un délire passager de ma libido débordante qui ne se satisfait plus de ce que je lui fournis. Voilà. Elle a besoin de nouveauté. Je souris. Mais c'est bien sûr. Soudain, l'illumination -enfin- sur ce que m'avait dit -craché serait plus exact en fait- Orton : Nikki Bella est amoureuse de moi ? Pas le temps de penser plus à l'idée que la porte de la salle s'ouvre à la volée sur un Josh échevelé :

« Eh bah, enfin, j'te trouve. Qu'est-ce que tu fais ? Je te signale que Mike et Randy t'attendent pour votre session d'entraînement. »

Ah oui, merde. C'est vrai. L'entraînement.

oOoOoOoOo

Ce n'est pas un entraînement : c'est une torture. Chacun de ses gestes, chacune de ses prises, sa démarche, ses mimiques... : tout me rappelle mon rêve et ce désir jusqu'alors flou devient subitement très concret. Chasser toutes ces pensées érotiques où je vois Orton me supplier de le prendre comme un animal est un véritable combat contre moi-même.

« Putain John, concentre-toi ! S'exclame soudain Mike. T'as failli me décrocher la mâchoire. Finit-il en malaxant la-dite mâchoire, après un coup de poing que j'étais censé faire pour de faux.

- Désolé. Je suis assez distrait aujourd'hui, je tente avec mon plus beau sourire.

- C'est bon, c'est pas grave... Fais attention. C'est tout...

Je dois me concentrer. Je me balance alors dans les cordes : Orton est censé me saisir au vol pour me finir d'un RKO. Mais lorsqu'il me saisit la nuque de ses mains brûlantes et rêches, sans doute capables de caresses délicieusement sexuelles, mon esprit ne peut s'empêcher de vagabonder vers des fantasmes lointains où un Randy Orton ondulant et transpirant sous moi me gémit de m'enfoncer plus fort et plus vite en lui, s'accrochant désespérément à mon dos trempé de sueur, arrachant ma peau de ses doigts, serrant mes hanches de ses cuisses et...

AIE !

Je me suis mal réceptionné pendant le RKO et je me suis cogné violemment l'arcade -et l'érection- sur le ring. Rouge de honte et raide d'excitation, je tente de cacher le tout en me retournant précipitamment vers les vestiaires.

- Je me suis fait assez mal, je vais aller me passer de l'eau sur le visage. Continuez sans moi ! »

Je n'attends pas leurs réactions et me précipite en dehors du ring aussi vite que me le permet cette fichue douleur qui me tiraille l'entre-jambe.

Une fois au calme dans les vestiaires, je constate que cette fois-ci, mon érection ne sera pas aussi simple à calmer que tout à l'heure : je suis vraiment dur. Boh, de toute façon, il n'y personne dans les alentours et au pire, des catcheurs en manque, ici, justement, c'est pas ce qui manque : jamais on ne fera le rapprochement avec Orton. Soupir. Putain, c'est vraiment CE type qui m'excite alors. Ça pouvait pas en être un autre, quitte à ce que ce soit un mec j'aurais préféré quelqu'un comme Mike ou Morrison, je sais pas moi. Mais Orton ? Ce connard condescendant et indifférent ? Corps, je te préviens : je vis cette situation comme une trahison !

J'avise les toilettes des vestiaires et m'y engouffre : c'est le moment de se soulager. Je m'appuie sur la porte et, après avoir ouvert ma braguette, glisse ma main dans mon boxer pour en sortir mon membre gorgé de sang. Un gémissement m'échappe. Doucement, ma main entame un va-et-vient et le contact rugueux de ma paume sur la peau rendue sensible par l'excitation me fait fermer les yeux et appuyer fortement ma tête contre la porte derrière moi. Alors, mes membres deviennent incontrôlables tellement le désir de me satisfaire devient irrépressible. Ma main s'active de plus en plus rapidement et je ne peux empêcher certaines images d'envahir mon esprit embrouillé par le plaisir : celle d'une bouche ouverte sur un cri de plaisir silencieux ou encore celle d'une croupe étroitement collée à mon bas-ventre. Mais pas n'importe quelle bouche, ni n'importe quelle croupe. Juste les lèvres sensuelles et le derrière parfait de Randy Orton. Évidemment. Alors que j'imagine Orton qui me chevauche, les yeux embués de plaisir et mon nom accroché à la bouche, je sens le moment de la jouissance atteindre son paroxysme. J'éjacule alors en prononçant le nom honni et en me laissant glisser sur le sol, vidé de toute force et plein d'une honte que je n'ai jamais connu.

Un rêve. Un unique rêve et voilà que tout ceci tourne à l'obsession. Serais-je en train de devenir fou ?