NE PRONONCE PAS MON NOM…
Bella est belle, intelligente, athlétique. Elle n'a pas de racines et fuit un passé trouble. Elle ferait l'arme parfaite.
L'USS (Undercover Special Section) est une agence secrète du gouvernement spécialisée dans l'antiterrorisme. Edward Cullen en est à sa tête. Il a repéré Bella et la veut dans son équipe.
WHITE THREAT est la plus grosse organisation terroriste mondiale. Personne n'en connaît les membres.
Sur cet échiquier géant, une seule règle : NE PRONONCE PAS MON NOM.
CHAPITRE 1
PDV Bella
NE M'ATTRAPE PAS
Le gars était libidineux et suait comme un porc. J'étais encore en sous-vêtements, me frottant lascivement sur son ventre mou, mes jambes de chaque côté de sa taille épaisse alors qu'il était allongé sur le lit d'une chambre luxueuse de l'hôtel Hampton's _chambre que je n'aurais jamais eu les moyens de me payer, d'ailleurs. Je trouvais le type écœurant et ne comprenait pas qu'on puisse se laisser aller à ce point à 48 ans. C'est vrai, quoi. Il n'était pas très beau mais il était riche. Il aurait largement pu se payer un coach sportif ! À tâtons, il récupéra son verre de liquide ambré hors de prix sur la table de nuit, verre dans lequel j'avais versé le contenu de deux gélules de somnifère avant de commencer mon petit spectacle avec « Monsieur Gras-du-bide».
Comme prévu, l'homme s'effondra moins de trois minutes plus tard, m'épargnant ainsi le supplice d'avoir à coucher avec lui.
Je me levai, me rhabillai et commençai à fouiller dans les poches et l'attaché-case du type afin de récupérer le plus d'argent possible. 3800$ plus tard, j'estimai que la soirée avait été prolifique et quittai la chambre en prenant bien soin d'effacer mes traces. Je positionnai la capuche de mon sweat informe sur la tête et évitai les caméras du couloir pour sortir par les escaliers de secours.
_ Et merde…, jurai-je entre mes dents.
Je venais d'entrer dans mon petit appartement miteux du Bronx. J'avais beau appuyer sur l'interrupteur, la lumière ne viendrait pas. J'avais deux factures d'électricité en retard et la coquette somme volée à « Monsieur Gras-du-bide » ce soir arrivait un peu tard. Dépitée, je progressai lentement dans l'appartement, culbutant un carton qui n'avait rien à faire dans le passage et le pied de la table basse. Quand j'arrivai enfin au niveau du vieux buffet du salon, je fouillai dans le premier tiroir et en retirai une bougie que j'allumai à la hâte.
La vision tamisée de mes 16m² de délabrement avancé plus communément appelés « petit appartement de caractère dans quartier populaire de New-York _prix raisonnable _paiement en liquide à la semaine exigé » réussit à bousiller le peu de moral qui me restait. Bien sûr, j'aurais pu trouver un peu mieux mais, lorsque l'on exerce la très lucrative mais dangereuse profession d'arnaqueuse, les entrées d'argent ont beau être importantes, elles ne sont pas régulières. De plus, pour éviter de se faire attraper par les « mac chicken » il est de bon ton de déménager souvent et de rester discret. Dans le genre de boui-boui où je créchais, le propriétaire ne demandait ni pièce d'identité, ni copies des cinq derniers bulletins de salaire.
Je jetai ma perruque rousse sur le canapé défoncé qui me servait aussi de lit et me changeai. J'enfilai une tenue de sport, me démaquillai, fourrai quelques vêtements et affaires de toilette dans un sac avec une enveloppe contenant mon butin de la soirée puis quittai l'appartement.
Il était plus de 20h et les rues étaient occupées à présent par la couche la plus dangereuse de la population : dealers, mafieux, prostituées, toxicos… L'air était saturé d'odeurs de pizzas, de viandes grillées, d'urine et d'herbe à fumer. L'endroit n'était pas fréquentable mais c'était là que je me sentais chez moi. Parmi les oubliés, les infréquentables, les dépravés de la société. Sous mon apparence plus abordable, je leur ressemblais. Nous ne connaissions ni l'amour, ni le respect. Notre sens des valeurs était en tout point différent des gens « mieux nés ». La survie était notre seul mot d'ordre et personne ne s'en plaignait. C'est comme ça, c'est tout. Ici, le pouvoir s'apparente à l'argent sale et au crime la réussite : rester assez longtemps en vie pour souffler ses quatre-vingts bougies. Bien sûr, si vous choisissiez le pouvoir, vous renonciez à la réussite… et vice-versa.
Après une bonne vingtaine de minutes de marche et quasi autant de sifflements admiratifs sur mon passage, j'entrai dans le « Charlie's men sport center ». Comme son nom l'indiquait, cette salle de sport était réservée aux hommes, mais comme j'étais la petite favorite de Charlie, j'étais l'unique membre féminin autorisé à pénétrer les lieux.
Charlie était un ancien boxeur d'origine irlandaise. La soixantaine, il tenait depuis plus de vingt ans ce centre sportif. Ici, pas de cours de fitness ou de tapis de course. Ce grand hangar était l'endroit culte des sports de combat des bas-fonds new-yorkais. Charlie n'en était pas peu fier. Il avait sorti un bon paquet de petits gars de la rue en leur apprenant à canaliser leur violence, en en faisant des champions ou en leur inculquant des valeurs dont ils ne soupçonnaient même pas l'existence avant de passer le seuil du hangar.
J'étais l'une d'eux.
J'avais 10 ans lorsque j'ai vu ma mère et son copain du moment se faire flinguer par le pharmacien qu'ils braquaient pour lui extorquer de la méthadone. Je n'ai jamais pensé qu'il l'avait fait intentionnellement. Ma mère était une toxico au bout du rouleau, une épave, et son mec n'était pas en meilleure forme. Ils menaçaient le brave gars qui avait dû sacrément flipper. Un coup de panique, il s'était emparé de l'arme apparemment cachée sous le comptoir et avait tiré. Ma mère et son copain étaient bien trop en manque pour réagir à temps. Fin de l'histoire.
En moins de quinze secondes j'étais orpheline, livrée à moi-même. Je suis retournée dans le sous-sol de la vieille usine désaffectée qui nous servait d'abri. J'ai récupéré Bunny, mon petit lapin en peluche usé et gris. Mon seul bien. Il paraît que c'était mon père qui me l'avait offert à la naissance. Je n'aurais pas pu le confirmer, je ne l'avais jamais connu. Il s'était barré quelques mois après. J'ai donc pris Bunny avec moi et j'ai marché sans me retourner. Je ne souviens même pas avoir pleuré. Mais une chose est sûre, j'étais terrorisée et transie de froid. Nous étions mi-novembre et les températures nocturnes ne dépassaient pas les 5°C. J'avais faim. Des heures d'errance dans les rues new-yorkaises.
Et puis, au beau milieu de ce qui était alors un terrain vague, j'ai vu ce grand hangar. Je me suis cachée à l'intérieur, entre deux plaques de polystyrène qui attendaient d'être fixées.
Quand un grand monsieur grincheux aux cheveux brun acajou s'est approché en marmonnant que, décidément, les souris avaient bien grossi ces derniers temps, je tremblais de peur à l'idée du sort qui m'attendait. Il a déplacé la première plaque et m'a tendu un sandwich.
Un mois plus tard j'étais scolarisée et je mangeais à ma fin. Charlie étant un célibataire endurci, c'était moi qui étais en charge du ménage dans la salle de sport. J'y passais tout mon temps. J'y faisais même mes devoirs, fascinée par la technique et la force que dégageaient ces corps puissants et luisants de sueur. Et c'est comme ça que Charlie décida de me donner des cours de boxe et de free fight en échange de mes heures de ménage, histoire _disait-il_ de savoir rendre les coups que la vie me donnerait.
_ Salut Charlie !, m'écriai-je en posant mon sac à l'entrée de son petit bureau où les papiers jonchaient le sol et les étagères branlantes.
_ Bonsoir ma beauté, quel bon vent t'amène ? Besoin de se défouler et de mettre une tannée à un de ces branleurs ou l'envie d'embrasser ton bon vieil irlandais têtu et ventripotent ?
_ Un peu des deux, et non, tu n'es ni vieux ni ventripotent.
_ Tu confirmes donc que je suis irlandais et têtu, je suis rassuré.
Je l'embrassai tendrement sur le front.
_ Charlie, ça te dérange si je dors ici cette nuit ?
_ Non, bien sûr que non, tu as toujours la banquette dans la petite pièce du fond, tu le sais. Bunny t'y attend, me dit-il en souriant. Tu as des soucis ?, reprit-il.
_ Rien de grave, j'ai oublié de payer l'électricité. J'irai directement payer mes factures à la compagnie demain.
_ Si tu as des problèmes d'argent tu sais que…
_ C'est bon, ne t'inquiète pas. C'est juste que l'argent a mis du temps à venir.
_ Qui as-tu plumé cette fois-ci ?
_ Un certain M. Tanner. La quarantaine bedonnante. Promoteur immobilier plein aux as.
Charlie soupira, son air taquin vite remplacé par l'inquiétude.
_ Tu as toujours été au-dessus du lot à l'école. Tu pourrais te trouver un bon petit boulot dans un bureau, te marier et faire deux, trois enfants…
_ J'aime trop la vie que je mène, lui répondis-je ironiquement.
_ C'est bien ce qui me fait peur. Bon, change-toi, j'ai un adversaire à ta taille sur le ring. Il prépare les championnats du district et il pourrait bien te donner du fil à retordre. Un entraînement vigoureux pourrait lui faire du bien.
_ Tu sais que je suis incapable de refuser un défi !
Quarante-trois minutes plus tard, mon truculent adversaire était au tapis mais, bon joueur, m'avait promis une revanche (et un dîner !), histoire de « me mettre la dérouillée de ma vie ».
Epuisée, et surtout calmée après une douche méritée, je me couchai sur la banquette dans la petite pièce du fond en compagnie de mon fidèle Bunny et m'endormis rapidement.
Quelque chose clochait. Je le sentais du fond de mes tripes. Mon instinct de survie hors-norme me criait de courir. Je m'arrêtai au Starbuck situé à une quinzaine de mètres de la grande tour de la « Compagnie d'Electricité New-Yorkaise ». Attendant dans la file, je fis mine de m'intéresser aux pâtisseries du jour joliment écrites à la craie sur le panneau à l'entrée de la boutique. Tout paraissait normal. Un balayeur de la ville, un homme en costume au téléphone en pleine délibération sur le choix du journal à acheter devant le kiosque, trois employés de la compagnie d'électricité dégustant leurs boissons chaudes devant la tour. Allez comprendre pourquoi, le fait que tout paraisse normal était pour moi anormal. C'était plus fort que moi.
Un type plutôt mignon (si on aime le style bodybuilder) me regardait effrontément trois places derrière moi dans la file. Lorsque nos yeux se croisèrent, il me sourit et je lui présentai mon majeur devant le regard désapprobateur d'une « jeune cadre dynamique ». Il parut rire et décrocha à la suite son téléphone que s'était mis à sonner. Quand mon tour vint, je commandai un café macchiato sans sucre et payai.
Je sortis de la boutique, mon café tenu dans les deux mains, histoire de les réchauffer.
Je m'engageais sur le passage piéton déjà sous forte influence lorsque quelqu'un m'agrippa le bras. Surpassée par mes réflexes, j'attrapai son poignet et commençai à le tordre en me tournant vers l'opportun.
Je restai figée devant le grand dragueur baraqué du Starbuck. Après une petite crispation de douleur il se reprit bien vite et raffermit sa prise. Il me broyait littéralement le bras.
_ Je vous déconseille fortement de m'énerver Mlle Swan. Je suis armé et je n'ai pas assez de conscience pour vous épargner en plein rue. Restez tranquille et tout se passera bien, souffla-t-il à mon oreille.
_ Mais bordel, qui êtes-vous ? Qu'est-ce que vous me voulez ? C'est Mario, c'est ça ? Je lui ai payé tout ce que je devais, sans compter les intérêts !
_ Je ne sais pas qui est ce Mario mais il me semble être un personnage intéressant, dit-il avec un sourire en coin.
_ Lâchez-moi ou je me mets à crier, fustigeai-je entre mes dents.
_ Je suis le gouvernement Mlle Swan. La police ne vous sera d'aucune utilité. De plus, elle a autre chose à faire que perdre son temps à sauver une arnaqueuse de première classe, vous ne croyez-pas ?
_ Espèce de salaud…
Nous avions fini de traverser l'artère quand il me fit monter sans ménagement dans une grosse fourgonnette de la Compagnie d'Electricité garée en double-file à côté du passage piéton.
J'atterris brutalement contre le plancher froid en tôle du véhicule. Je levai les yeux.
Trois hommes me toisaient, deux assis face à des ordinateurs qui portaient des casques audio, et un pile poil en face de moi. Même accroupi il avait l'air grand. 1,90m au moins. Les épaules et le torse développés, le ventre sans pli malgré sa position, ses longues jambes musclées moulées dans un jean bleu usé. Mais c'est surtout son visage que je remarquai. Il était viril, une barbe naissante n'arrivait pas à masquer le carré de sa mâchoire. Son nez était fin et droit, sa bouche une ligne fine dessinant un sourire entendu. Ses yeux étaient marron clair, comme le miel. Et ses cheveux savamment décoiffés sans être longs étaient bruns. Si je n'étais pas dans une situation aussi délicate j'en aurais bavé d'envie ! Mais le fait est qu'Apollon ou pas, j'étais sacrément dans la panade.
_ Bonjour Mlle Swan, me dit-il alors d'une voix grave. Je suis Edward Cullen, chef de la cellule USS. Bienvenue en enfer.
