Chapitre 1 : Une entrevue
Il devait le faire. C'était maintenant ou jamais. Il avait pris sa décision, cela faisait déjà plus d'une semaine. Il savait que c'était la volonté de ses parents également, même s'ils n'avaient pas vraiment l'occasion de le lui dire. S'il ne le faisait pas ce soir, il savait qu'il ne ferait jamais. Ha mais pourquoi était-ce si dur ?! Ce n'était pas compliqué pourtant !
Il savait pourquoi il n'avait fait que repousser cette entrevue. Il savait qu'en faisant ce premier pas, il serait amené à en faire beaucoup d'autres par la suite. Il savait aussi que cela le contraindrait à fréquenter des gens dont il s'était fait un point d'honneur de détester. Il savait que sa vie ne serait plus du tout la même.
Il respira un grand coup. Cela faisait quelques jours que ses amis s'inquiétaient pour lui. Ils voyaient bien qu'il était tracassé, mais il ne leur disait rien. Ils étaient toujours entourés de tous ces bouffons… Ils n'étaient pas capables de faire quelque chose sans devoir lui demander avant s'ils avaient le droit ! Comment, dans ses conditions, aurait-il eu l'occasion de parler à Blaise ou Pansy ? Enfin… Ce n'était pas si grave après tout, une fois son entrevue passée ce soir-là, il se sentira déjà beaucoup mieux et prendra peut-être le temps d'en informer ses deux amis.
C'était déjà la fin du repas, Drago dut prétexter un devoir à faire pour ne pas rentrer en même temps que les autres à la salle commune des Serpentards. Il s'était caché quelques minutes dans un placard à balais, pour être sûr que personne ne le verrait.
- « Merde, mon vieux, mais qu'est-ce que tu fais… T'es pas obligé… »
Il marmonnait pour lui-même, sans vraiment s'en rendre compte. Puis, il se mit à rire de la situation :
- « Idiot. Bien sûr que tu dois le faire. Pour une fois que tu peux jouer les héros et voler son rôle à Saint-Potter… »
Lorsqu'il jugea que le couloir s'était assez dégagé, il sortit et sans que personne n'ait le temps de le voir, il se faufila vers les escaliers et descendit aux cachots. En quelques minutes, il fut devant la porte du maitre des potions. Il se donna encore du courage en se parlant à soi-même, prenant le temps de remettre ses idées en place et puis, sans y réfléchir sinon il allait encore se dégonfler, il toqua à la porte. Ses doigts avaient à peine effleuré le bois, pourtant il entendit clairement le professeur Rogue l'autoriser à entrer. Il entra rapidement dans le local, à nouveau de peur que quelqu'un le voit. Il était trop paranoïaque, il savait que personne ne l'aurait soupçonné de quelque chose s'il allait voir Rogue, tout le monde savait qu'ils s'entendaient bien.
Le professeur était à son bureau, en train de corriger des devoirs. Sa plume volait sur les parchemins, hachurant de temps à autre des lignes ou faisant de grandes croix. Drago n'avait pas bougé, il n'osait pas s'avancer. Rogue le laissa poireauter encore quelques minutes, le temps de ricaner sur deux copies, avant de relever la tête.
- « Ce n'est pas en prenant racine devant ma porte que vous serez plus avancé, M Malefoy. Que puis-je pour vous ? »
Les paroles de Rogue agirent comme un électrochoc sur Drago qui alla alors jusqu'au bureau du professeur, en gardant toutefois ses distance avec celui-ci. Sa gorge était toute sèche, il fermait ses poings afin de stopper le tremblement de ses mains. Il devait absolument se ressaisir, ce comportement n'était pas digne de lui !
Severus Rogue semblait se rendre compte de l'état de son élève et ne prit pas la peine de le calmer, au contraire il souriait sadiquement en se demandant ce qui pouvait bien le mettre dans cet état.
- « Professeur Rogue… Je… J'ai une faveur à vous demander. »
- « Une faveur ? Pensez-vous vraiment, M Malefoy, que cela soit approprié étant donné votre situation ? » Il prenait un malin plaisir à le déstabiliser. Il avait beau apprécier Drago, il n'en restait pas moins un élève.
- « Professeur. Vous devez m'aider ! » Drago commençait à vraiment perdre ses moyens, il voyait que Rogue n'était pas plus ouvert que ça à la conversation, mais il devait absolument faire en sorte que celui-ci s'implique !
- « Et comment ? Vous avez besoin du thème de prochain devoir ? Si c'est cela que vous désirez, je crains devoir vous… »
- « S'IL VOUS PLAIT ! » Il avait crié ses paroles sans faire exprès. Cela fit plisser les yeux de Rogue qui s'était penché sur son bureau, le scrutant de son regard. « S'il vous plait, professeur, vous devez… » Drago respira un grand coup, il ne servait à rien de retarder ce moment encore plus longtemps : « Vous devez me mettre en contact avec l'Ordre du Phénix. »
La conséquence de ses paroles fut immédiate : Rogue parut d'abord surpris avant d'être en colère.
- « Excusez-moi ? Puis-je savoir en quoi cela me concerne ? Vous pensez vraiment que j'ai quelque chose à faire de cela ? »
- « Mais professeur, vous devez… ! »
- « IL SUFFIT ! Je ne dois rien du tout, M Malefoy. » Le ton du professeur était cassant, les yeux de Drago se faisaient suppliant, il était complétement perdu. « Je n'ai rien à voir avec cette bande. Et que je sache, le Maitre vous a fait l'honneur de vous apposer sa marque cet été. Cela ne vous enorgueillit-il pas assez ? » Ces derniers mots étaient clairement sarcastiques. Drago comprenait que Rogue ne puisse pas tout lui révéler maintenant, mais il était désespéré et il était le seul vers qui il osait se tourner.
- « Professeur, vous savez tout comme moi ce que ça signifie réellement. Vous savez qu'il y a… autre chose. » Rogue était sur le point de répliquer lorsque Drago se rapprocha pour poser ses points sur le bureau et reprendre la parole : « Je le fais pour elle ! Il n'y a que moi qui peux le faire… Personne d'autre n'est au courant, vous savez tout ce qu'elle risque ! Si le Maitre des Ténèbres venait à apprendre son existence… Severus, s'il vous plait. Je sais que vous êtes dans l'Ordre. Cela fait des mois que je prépare tout ça, je… » Drago ne savait plus quoi rajouter, il était à bout. Si Rogue lui refusait son aide, il n'avait plus d'autres possibilités.
Rogue resta silencieux quelques minutes, Drago avait rentré la tête entre ses épaules et regardait le sol d'un air abattu. Le silence s'éternisa, jusqu'à ce que Rogue se lève et contourne son bureau pour se placer à côté de Drago. Il attendit que ce dernier daigne relever la tête pour le regarder avant de reprendre la parole.
- « Vous ne devez révéler cela à personne, je dis bien personne. Si quelqu'un est au courant, ne fut-ce que de l'existence de cette entrevue, je vous ferais tuer Drago. » L'interpellé hocha la tête. Il savait qu'on ne rigolait plus, il ne devait pas prendre les mots à la légère. « Vous ne ferez rien. Dans trois semaines, ce sont les vacances de Noël. Vous direz à vos parents dans une lettre que vous ne rentrerez pas au manoir, vous viendrez me rejoindre dans mon bureau et de là on ira la chercher. »
- « Et ensuite ? »
Rogue l'assassinat du regard pour l'avoir interrompu. Drago se mordit la joue intérieure pour se punir de sa maladresse. Il devait absolument réfléchir avant d'agir, les choses devenaient sérieuses et il n'avait pas le droit à l'erreur.
- « Ensuite, je vous conduirai au quartier général de l'Ordre. Et je vous laisserai vous débrouiller avec eux pour expliquer la situation. »
Drago ouvrit grand les yeux de surprise. Il attendit quelques secondes pour être sûr que le maitre des potions n'allait pas se raviser avant de demander :
- « Sérieusement ? Vous n'allez pas leur expliquer ? Vous avez trois semaines pour ça ! »
- « M Malefoy, sachez que ma sécurité et ma position auprès du Lord importent également et que je ne risquerais pas de les mettre en danger pour vos beaux yeux. Donc je vous aiderai à rentrer en contact avec l'Ordre, mais ce sera à vous de faire vos preuves. » Il avait dit tout cela sous un ton froid et menaçant. Drago avait hoché la tête en signe d'assentiment.
- « Maintenant, sortez. » Drago fit demi-tour et au moment de franchir la porte, la main posée sur la poignée, Rogue lui dit encore : « Rien de tout cela n'a eu lieu. Si vous divulguez quoi que ce soit, cela vous coutera cher. » Drago n'eut pas besoin de se retourner pour voir le visage de Rogue et lui répondre. C'était très clair. Il sortit et regagna sa salle commune.
Sur le chemin, il remarqua que cette conversation l'avait délesté d'un poids énorme et il était soulagé d'avoir finalement trouvé une solution viable. Maintenant, un autre problème se présentait à lui : l'Ordre du Phénix. Il allait devoir les convaincre de sa bonne conduite et qu'il était de leur côté plus facile à dire qu'à faire ! Après tout, ce n'est pas comme si ses parents étaient des mangemorts de notoriété publique, que son avant-bras gauche arborait la marque des ténèbres et que, pour couronner le tout, il allait devoir sympathiser avec Potter et sa bande… Non vraiment, se faire accepter allait être une partie de plaisir.
- « Drago ! T'étais où ? Encore un peu et on allait presque partir à ta recherche ! » Les paroles de Pansy firent rire la bande qui l'entourait, mais n'eurent pas le mérite de défroisser le visage de Drago. Il lui fit rapidement comprendre qu'il ne voulait voir personne et alla directement dans son dortoir.
Heureusement pour lui, personne d'autre n'y était et il savait qu'il aurait le temps avant que les garçons n'arrivent. Il sortit alors des parchemins, sa plume ainsi qu'un encrier. Il entama directement la première lettre qu'il destinait à ses parents. Toute la difficulté résidait dans la discrétion… Si sa lettre était interceptée, personne d'autre que sa mère ou son père devait être capable de la comprendre. Il fit plusieurs tentatives avant d'aboutir au résultat final :
Père, mère,
Je ne viendrais pas vous rendre visite à Noël, je préfère me concentrer sur des devoirs qui requièrent toute mon attention ici. Ayez confiance, votre sang est entre de bonnes mains.
Prenez soin de vous,
Drago
Il sourit, fier du résultat. Il la cacheta et la mit immédiatement dans son sac pour l'envoyer à la première heure le lendemain matin. Il se saisit ensuite d'un autre parchemin pour rédiger sa seconde lettre celle-ci lui demanda également beaucoup de réflexion. Au bout de plusieurs essais, il avait finalement trouvé la formulation parfaite, espérant qu'elle serait comprise comme il faut :
N'aie crainte de la nuit celle de Noël ne sera pas réunie. Tout problème trouve rapidement sa solution.
Il savait que c'était complétement alambiqué, mais elle avait trois semaines pour la comprendre. Drago se dit que dans le pire des cas, elle aura une bonne surprise.
