Cette histoire est la première d'une longue série. J'ai signé au LJ pour la communauté des 30 interdits, donc je vais devoir en faire un paquet, mais je ne sais pas si je les mettrai toutes ici. Ca dependra du niveau de... enfin vous voyez quoi. Celle-ci est plutot gentillette, donc je la poste sans état d'âme. C'est pour le thème 2, nuit.


Non-dits

« Va-t-en… J'en ai assez. Sors ma vie, je ne veux plus te voir. » Sa voix était étonnamment calme. Posée, mesurée, douce. A peine un murmure. Elle n'était pas agressive, ni même énervée.
Ils étaient là tous les deux, au pied de son immeuble, comme tous les soirs. Il faisait sombre, il faisait froid. La rue était calme et silencieuse. Une nuit comme les autres.
Elle baissait la tête, le regard rivé sur ses pieds et il détesta la voir ainsi. Ses cheveux la protégeaient, il ne pouvait même pas deviner son visage.
Regarde-moi.
Il voulait l'entendre crier, hurler, le traiter d'imbécile, de maniaque de la gâchette, ou de n'importe quoi d'autre encore. Il pouvait tout entendre, mais pas ça.
Comme il ne bougeait pas, elle parla un peu plus fort.
« Je n'ai pas besoin de garde du corps, et si vraiment quelqu'un doit me surveiller, Wraith fera parfaitement l'affaire. Tu n'as plus aucune raison de rester. »
Son sang se glaça. Les mots étaient durs, incisifs, ils le martelaient bien plus forts que tous les coups qu'il avait reçus au combat.
Elle ne pouvait pas être sérieuse…
« Chidori… » Regarde-moi.
Il se rapprocha un peu, hésitant, ne sachant pas vraiment ce qu'il devait faire. Jamais il ne s'était senti aussi vide.
Il avait du mal à respirer, sa gorge était nouée et son cœur battait de façon anarchique.
Elle restait immobile, les yeux toujours collés au sol. Il la vit trembler un peu, ses épaules tressautaient légèrement.
Pourquoi ?
Regarde-moi, explique-moi…
Il était perdu, dépassé par cette situation grotesque, incapable de la quitter même si elle le lui demandait.
Wraith ne saurait pas la protéger, il n'était pas assez attentif.
Et il ne voulait pas partir. Il aimait cette vie, ce lycée, ces trajets qu'ils faisaient tous les soirs, leur repas ensemble, après des heures à réviser un contrôle.
Tout le temps qu'il passait avec elle.
Il aimait être avec elle.
Non, il l'aimait, elle.
C'était là depuis longtemps, mais maintenant, c'était une évidence.
Il ne pouvait pas partir, parce qu'il ne voulait pas.
Il voulait rester avec elle.
Pas simplement comme un garde du corps ou un protecteur, mais comme un garçon normal, un camarade de classe, un ami, un... quelque chose.
N'importe quoi.
Il ne trouvait pas le mot qu'il cherchait. Il ne connaissait pas le mot qu'il cherchait.
Il n'était pas comme Shinji ou Onodera.
Il était plus proche d'elle.
Il voulait être plus proche d'elle.
Il était toujours en face d'elle, seulement un peu plus près, immobile et silencieux.
Kaname soupira et redressa la tête. Malgré l'obscurité, il voyait bien que ses yeux brillaient un peu trop, et ses joues étaient rougies, mais avec le froid ça n'avait rien d'étonnant.
« Rentre chez toi, Sosuke. »
Il la regarda fixement, attendant la suite, une explication, un commentaire. Qu'elle revienne sur sa décision.
« Rentre chez toi. C'est tout. »
« Mais je… » Il tendit la main vers elle mais elle l'évita.
« Laisse-moi. » Sa voix restait douce, mais il sentait la menace derrière ses mots.
Il soupira et baissa la tête.
« Je peux pas… »
Elle se mit à rire, mais un rire froid, sans joie.
« Mais bien sûr que si. Tu l'as déjà fait. Tu rentres chez toi, tu prends tes affaires et tu cours rejoindre tes vrais amis, là-bas au fond du Pacifique. » Sa voix se perdait dans le silence de la rue. Il resta planté là, à attendre, sans un mot, mortifié.

Oui, il l'avait déjà fait.
Il était parti, sans même la prévenir, ni lui dire au revoir. Simplement pour obéir aux ordres.
Et il avait détesté ça.
Il avait détesté ce sentiment d'abandon, de trahison.
Ce froid qui courait dans ses veines.
Cette solitude.
Ce vide.
Le même qu'il avait ressenti quand Gauron lui avait dit qu'elle était morte. Le même qu'il ressentait maintenant.
Encore une fois, il répéta les mêmes mots, mais en la regardant droit dans les yeux.
« Je ne peux pas. »
Sa volonté vacilla.
Et si…
Non, elle ne devait pas espérer.
Il ne pouvait pas parce que c'était sa mission.
« Ne t'inquiète pas pour tes supérieurs, je les préviendrais. Tu n'auras pas d'ennui. »
« Non. » Simple. Catégorique. Ferme.

S'ils étaient dans un film, ce serait le moment où il l'aurait embrassée.
Il lui aurait montré tout ce qu'il ressentait par des gestes, mettant dans son baiser tout ce qu'il n'arrivait à dire avec des mots.
C'était un homme de terrain, un homme d'action, pas un négociateur ou un diplomate.
Il ne connaissait pas les bonnes tournures, ni la façon d'expliquer ces choses-là.

Tout ce qu'il pouvait faire en cet instant c'était la prendre dans ses bras, coller son corps au sien, découvrir ses lèvres, mordiller sa peau, s'imprégner de son odeur et peut-être même, pour être sûr de la convaincre, la caresser, apprendre ses formes, lui faire ressentir le brasier qu'elle éveillait en lui.
Même là, dans la rue, il se fichait du danger, des voyeurs ou du froid.
Il faisait nuit, la rue n'était pas tellement éclairée, ils étaient tranquilles. I
l pouvait la prendre ici et maintenant sans se soucier du reste.
Parce qu'une fois qu'il aurait commencé à la toucher, il serait incapable de s'arrêter.
Il attendait depuis trop longtemps.
Sa bouche sur la sienne, ses lèvres sa joue, dans son cou.
Ses mains sur ses hanches, sur son dos, dans ses cheveux.
Ses jambes contre les siennes, entre les siennes.
Défaire son manteau, glisser sous son uniforme, relever sa jupe.
L'embrasser encore.
Lui montrer qu'il ne pouvait pas la quitter, la laisser, l'abandonner encore une fois.
Découvrir son corps du bout des doigts, dans cette nuit froide.
Détacher sa ceinture, ouvrir son pantalon.
Se perdre en elle.
Il n'avait même pas à se soucier des conséquences, puisque dans les films, ce genre d'histoire se finit toujours bien.
Il pouvait lui faire l'amour comme ça, juste lui et elle, lui en elle, sans barrière, sans limite, sans interdit.
Simplement l'avoir à lui comme il était à elle.
Lui faire comprendre qu'elle comptait plus que tout le reste.
Ecouter sa respiration s'accélérer.
Le souffle court, sans la lâcher, s'enfoncer un peu plus.
L'entendre gémir ou crier. Plus fort.
Et pouvoir se dire que pour une fois, c'était bon signe.
Que c'était grâce à lui.

Mais ils n'étaient pas dans un film et il était incapable de faire quoi que ce soit.
Il se contenta de la regarder, rougissant de ce qu'il avait pensé, les yeux peut-être un peu plus ouverts qu'à l'ordinaire.
Curieusement, elle rougissait elle-aussi. Comme si elle avait pu voir dans son regard passer toutes ses rêveries.
Elle entrouvrit la bouche, croyant pouvoir parler, mais aucun son en sortit.
Le temps était suspendu. En silence, ils se remettaient de ce qu'ils n'avaient pas vécu.
Puis une sonnerie résonna et Sosuke attrapa son portable.
Il réagissait par automatisme, décrochant et écoutant son interlocuteur sans vraiment y prêter attention. Il était toujours concentré sur Kaname et jamais ses yeux ne quittèrent les siens.
Puis il referma l'appareil et lui dit calmement : « Je dois y aller. »
Elle hocha la tête, montrant qu'elle avait compris, mais elle ne bougeait pas elle non plus.
« Je reviendrai bientôt… » Sa voix hésitait, il semblait lui demander la permission.
Elle cligna plusieurs fois de yeux et sembla renouer avec la réalité.
« OK. Sois prudent. »
« Aucun problème. » Et après un bref signe de tête en guise de salut, il disparut dans la nuit.


J'espère que vous avez aimé, parce que moi, pour une fois, j'en suis assez contente :D.