Il n'est plus là


L'absence ne fait mal que de ceux que l'on aime

Pierre Corneille.


Noir. Un jour un savant a dit : "chaque couleur correspond à une journée particulière". Et aujourd'hui, c'était le noir. Nous étions habillés de noirs, le regard vide, les mains moites, le cœur lourd, nous étions habillés de noirs. En ce deux mai, nous enterrions un ami pour certains, un élève pour d'autres, un fils pour une famille, et moi, j'enterrais un amant, et mon cœur avec.

Cela fait deux mois qu'il est parti. Et j'ai l'impression que c'était hier puisque j'ai toujours aussi mal. En même temps, je trouve que cela fait une éternité. Le temps est inexistant face à sa disparition, face à son absence.

Pendant ces deux mois j'ai essayé d'aller de l'avant. Je me disais : "Je ne penserai plus à lui, je ne parlerai plus en son nom". Mais il y avait en moi comme un feu dévorant, au plus profond de mon être. Je m'épuisais à le maîtriser, sans y réussir. Je l'aimais plus que de raison.

Parfois, je me remémore nos souvenirs, ceux où nous jouions dans la neige, ceux où nous liions près du feu, ceux où je l'embrasse... Et à chaque fois, je sens mon cœur se serrer et les larmes me monter aux yeux. Alors je me souviens qu'il me disait toujours de sécher mes larmes car lorsque je deviendrai sa femme, lorsque je porterai son nom, je ferai partie de sa famille et dans sa famille, on ne pleure pas. Et à chaque, comme toujours, je le frappe faiblement de mes petits poings à l'épaule, il rigole, je l'embrasse pour qu'il se taise et on passe une nuit d'amour fabuleusement splendide.

Seulement, cette fois, il n'est plus là pour me dire ça, je ne le frappe pas, il ne rigole pas, je ne l'embrasse pas et il ne me fait pas l'amour.

Seulement, cette fois, il n'est plus là. Et c'est ça le plus dur. Il n'est plus là pour répondre à mes pics. Il n'est plus là pour me regarder rire. Il n'est plus là pour partager ma vie. Il n'est plus là pour m'aimer. Il n'est plus là.