Un joyau pour ton cœur


Avertissement :J.K. Rowling est une déesse et tous les personnages lui appartiennent. L'auteur de ce recueil de one-shots est Ellroche, que je remercie pour m'avoir accordé les droits de publication en français.


Pairing: Harry Potter/ Astoria Greengrass


Astoria Greengrass enlaça sa sœur et quitta d'un pas léger la chambre de Daphné. Le couvre-feu ne tomberait pas avant quelques heures, mais il lui restait encore à terminer un devoir pour le cours d'Enchantements. Le professeur Flitwick n'attendait pas moins que le meilleur d'elle, et elle était bien décidée à répondre à ses attentes. Seule une partie de cette détermination se trouvait motivée par sa fierté de Serdaigle; le reste pouvait être attribué à la fierté qu'elle avait en sa propre intelligence et le fait qu'elle travaillait dur – non pas qu'elle se vantât de telles choses. Se tresser des louanges à soi-même constituait sans nul doute une activité des plus frustes.

Juste au moment où elle atteignait le coin du corridor qui la mènerait dans la salle commune des Serpentards, une voix traînante résonna à ses oreilles. Il lui fut aisé de la reconnaître immédiatement comme étant celle de Drago Malefoy.

« Sa sœur est trop plus jolie. »

Elle retint à grand-peine un reniflement très peu seyant à une Lady, en entendant la maîtrise pathétique que Malefoy avait de la langue. Le superlatif ne pouvait en aucun cas précéder un adverbe comparatif. Imbécile ignare.

En roulant des yeux avec commisération, Astoria se prépara à tourner l'angle du couloir afin de pouvoir retourner dans sa propre salle commune. Elle n'avait aucun intérêt à écouter les pensées graveleuses de Malefoy. Elle éprouva de la pitié pour la pauvre fille qui avait réussi – certainement malgré elle – à susciter l'intérêt de ce crétin. Avant qu'elle ne puisse faire un pas de plus, une voix à la tonalité caverneuse – probablement Goyle, supputa-t-elle – s'éleva.

« Tu crois vraiment ? Daphné a de belles jambes pourtant. »

De la bile monta à la gorge d'Astoria alors qu'elle réalisait que Drago Malefoy était en train de parler d'elle. De façon inconsciente, ses bras se replièrent contre sa poitrine comme si le fait de s'étreindre elle-même pouvait contribuer à la dissimuler aux yeux de l'ancien Mangemort. Le fait qu'il se fût évadé d'Azkaban, la prison des sorciers, ne voulait pas dire pour autant qu'il n'était pas un monstre, bien au contraire.

« Mais Astoria est une jolie petite chose. » insista Malefoy, le ton de sa voix révélant de façon manifeste le virage des plus licencieux que ses pensées avaient pris.

Les épaules d'Astoria se mirent à trembler sans qu'elle pût les contrôler et elle ferma les yeux le plus fort qu'elle le pouvait. Savoir que Malefoy désirait la toucher la rendait physiquement malade. Son repas, ingurgité de longues heures plus tôt, se retourna dans son estomac et menaçait de refaire une apparition des plus malvenues. Elle ne pouvait que trop bien imaginer à quel point il se délecterait de mettre sa femme à sa place.

« Alors fais une offre pour elle. » déclara Goyle.

« Je l'ai déjà fait. Père a envoyé une offre préliminaire ce matin-même. J'imagine que ses parents et les miens auront établi un contrat de fiançailles inviolable d'ici à Noël. Et alors, elle sera mienne. »

Astoria inspira lentement tandis qu'elle pressait l'arrière de sa tête contre la pierre froide du mur. Ses parents étaient des Sangs-pur, et les contrats de fiançailles faisaient partie de son mode de vie; cependant, elle n'avait jamais pensé qu'elle aurait à en être la cible. Elle avait toujours été confiante en son intelligence et en son habileté à se sortir de n'importe quelle situation. Et contrairement à la plupart des jeunes sorcières de sang pur, Astoria savait que ses parents tenaient à elle. Mais cela ne voulait pas dire qu'un contrat avec la famille Malefoy ne leur paraîtrait pas attrayant pour autant. En dépit des actes criminels de Lucius Malefoy, ainsi que de la stupidité de Drago, Narcissa Malefoy avait été assez intelligente pour sauver la vie de Potter. Cela leur avait conféré une certaine marge de manœuvre lors des procès et du chaos subséquents à la guerre.

« Peut-être que je demanderai sa sœur alors, et on pourra comparer. » Un vulgaire rire masculin fit place à ce commentaire.

Des larmes perlèrent au coin des yeux d'Astoria, mais elle refusa de les laisser couler. Elle avait sa fierté de Sang-pur. Et, chose plus importante encore, elle avait une volonté indomptable.

D'une façon ou d'une autre, elle contrecarrerait les plans de Malefoy. Elle préférerait de loin se marier à un Né-moldu, qu'à ce sale monstre à la bigoterie exacerbée. Elle pouvait même aller à affirmer qu'elle préférerait se marier à un Moldu … Cette pensée la surprit par son caractère audacieux et elle la repoussa dans un coin de sa tête.

Cela n'allait pas en arriver jusque là. Elle ne laisserait pas les choses en arriver là.

Astoria redressa ses épaules et releva sa tête avec détermination. Quelques mèches de cheveux dorés tombèrent de son front et vinrent effleurer sa joue en de délicates boucles fines.

« Ne le laisse pas l'emporter. » murmura-t-elle. Ses poings fermés se décrispèrent et elle aplanit ses mains sur sa robe, s'assurant de ne donner aucun indice dans son apparence et son langage corporel qui révélerait qu'elle les avait espionnés.

Elle tourna enfin le coin du couloir et sortit à découvert, se faisant violence pour ignorer de son mieux les yeux concupiscents de Malefoy parcourant son corps. Elle n'avait peut-être pas le pouvoir de l'empêcher de la regarder, mais elle trouverait un moyen de garantir que ses mains ne pussent jamais se poser où son regard errait. Elle hocha la tête d'un air régalien à l'intention de tous les autres élèves présents, puis quitta la Salle Commune des Vert et Argent.

Dès que le mur se referma derrière elle, Astoria se mit à marcher avec plus d'empressement; elle était déterminée à mettre autant de distance entre Malefoy et elle que le fait de se trouver dans le même château le lui permettrait. Elle monta d'un air précipité les escaliers qui menaient hors des donjons.

Sa main gauche la démangeait d'anticipation à l'idée de saisir sa baguette magique en bois de bouleau, revenir sur ses pas, et jeter des maléfices à Malefoy jusqu'à ce qu'il crie grâce. Elle n'était pas un jouet, ni une poulinière, ni même un petit animal domestique, qu'on dorlotait. Astoria Greengrass était une puissante sorcière de Sang-pur – seul un parfait idiot doué de cécité oserait la considérer autrement.

Astoria atteignit l'étage principal au moment exact où elle commençait à percevoir les voix de plusieurs Serpentards s'élever de derrière elle. Elle jeta un coup d'œil par-dessus son épaule pour s'apercevoir qu'ils se rendaient en effet tous à la Grande Salle pour le dîner, comme toute personne saine d'esprit du château le ferait à cette heure-ci. User de la magie drainait l'énergie bien plus rapidement qu'une activité physique, et la nourriture constituait le meilleur expédient pour la regagner.

Granger et le Weasley mâle emboîtaient le pas à Longdubat et la Weasley femelle alors qu'ils entraient dans la Grande Salle. Les bras de chacun des couples étaient enlacés, et ils étaient tant affairés à se lancer des regards énamourés qu'ils s'emmêlaient les jambes à chaque pas qu'ils faisaient.

Une soudaine sensation de picotement suscitée par le phénomène commun d'une magie étrangère effleurant la sienne lui fit tourner la tête vers sa droite. Ses yeux se rétrécirent alors qu'ils accrochaient Harry Potter, qui descendait un escalier menant au rez-de-chaussée. Elle était bien trop éloignée pour distinguer correctement ses yeux, mais elle savait qu'ils étaient d'une nuance plus verte que les siens. Les yeux de Potter étaient proches de la couleur émeraude, et on lui avait informée à maintes reprises que les siens étaient de couleur jade.

Elle récita distraitement dans un murmure un vers de sa Ballade Sorcière favorite. « Un joyau pour votre cœur, mon Roi. » Dans le poème, une sorcière de Sang-pur, proposait d'offrir à un monarque à la beauté sans pareille une émeraude de la taille de sa tête, s'il voulait bien faire d'elle sa Reine. Le Roi, refusa. Astoria fondait toujours en larmes lorsqu'elle le lisait, non pas du fait que la sorcière se soit vue rejetée, mais parce que la sorcière avait été assez sotte pour croire – comme beaucoup d'autres – que l'argent pouvait acheter l'amour. Aucun joyau n'avait une valeur équivalente à celui du cœur humain.

La force et la puissance de la magie de Potter effleura de nouveau la sienne, et elle scruta chacun de ses mouvements alors que diverses pensées défilaient à travers son esprit. Potter était similaire au Monarque du poème : puissant, riche, beau, et des plus en vues. Et les personnes qui le désiraient étaient ô combien superficielles et disposées à n'offrir rien d'autre que leur beauté pour se voir accorder la chance d'être la prochaine Lady Potter – un titre fort semblable à celui de la royauté en tous points qui importaient.

Astoria avait perdu le compte du nombre de fois où elle avait entendu un dérivé de 'J'aimerais tant devenir Lady Potter' ou 'Tout le monde me prêterait attention' ou 'Pense au prestige que cela m'apporterait !'.

Les sorcières pavoisaient à propos de sa puissance et de sa richesse, ainsi que de son nom et de ses victoires... mais jamais à propos de l'homme lui-même de façon concrète. Son apparence physique était grandement louée, mais rien n'était jamais dit à propos de sa personnalité, ses rêves, ses espoirs, ou ce qu'elles pourraient apporter à Potter. La question tournait toujours autour de ce qu'il pourrait offrir à son épouse.

« Comme c'est triste. »

Harry Potter n'était pas un homme à prendre en pitié; elle était consciente qu'il ne tolérerait aucunement cela. Cependant, la manière dont sa magie se déployait pour caresser celle des autres révélait à Astoria bien plus que lui-même devait s'en douter, pour avoir grandi avec des Moldus comme il l'avait fait. Sa magie errante et vagabonde hurlait à la lune elle-même son désespoir et sa solitude.

Les Serpentards étaient à présent juste derrière elle, et elle put entendre Malefoy se vanter de choses et d'autres, comme à son habitude. Il n'était pas digne de son temps; il n'était pas le genre de sorcier qui apprécierait à sa juste valeur une partenaire. En fait, il ne ressemblait en rien à Potter. C'était un fait qu'elle avait toujours vaguement reconnu, mais la distinction ne s'était jamais faite aussi claire et prononcée qu'à ce moment précis.

Les jacasseries de Malefoy en vinrent à s'arrêter au bout d'un moment. Puis il s'avança jusqu'à son niveau et prit la parole.

« Lady Greengrass, je suis – »

Astoria se déroba prestement à sa compagnie, sans se soucier le moins du monde du caractère grossier de son acte. Elle pourrait toujours broder la vérité en affirmant qu'elle pensait qu'il s'adressait à Daphné. C'était là une chose des plus plausibles; il n'aurait rien à objecter à cela.

Ses pas la conduisirent du Hall d'entrée jusqu'au pied de l'escalier sur lequel se trouvait Potter.

Même s'il ne s'était pas trouvé d'une marche au-dessus d'elle, elle aurait tout de même eu besoin de lever la tête; il était un peu plus grand qu'elle de quelques centimètres. Ses yeux n'errèrent pas sur les courbes de son corps comme si elle était un jouet avec lequel s'amuser, ce qui ne manqua pas d'augmenter l'estime qu'elle avait pour lui. Il contempla simplement son visage, attendant patiemment qu'elle annonçât les motifs qui l'avait incitée à l'aborder.

Avec audace, Astoria façonna un pan de sa magie en un mince ruban et l'enroula autour de Potter. Elle l'infusa de chaleur, d'heureux souvenirs, et de l'intime conviction que ses parents l'aimaient. Un large sourire apparut sur le visage du jeune homme tandis qu'un léger rougissement colorait ses joues. Ses yeux étincelèrent tels des émeraudes douées de vie. Voilà tout ce que ces sorcières ignorantes auraient dû offrir à un sorcier à la personnalité aussi rare qu'Harry Potter : de la chaleur, du bonheur, de l'attention, et de la vie.

L'estomac noué sous l'effet de la nervosité, Astoria releva les pans de sa robe et effectua une profonde révérence de respect le plus sincère. « Pardonnez mon inconvenance, mon Seigneur. Je n'ai pu souffrir de ressentir tant de douleur sourdre de votre magie – pas quand je me savais capable d'y apporter quelque réconfort.»

Les doigts rugueux de Potter saisirent doucement son menton et la firent relever la tête; une mèche de ses cheveux dorés dansa sur sa peau. « Je vous ai déjà vue auparavant, mais j'ai bien peur de n'avoir jamais eu la fortune de connaître votre nom. »

Un léger sourire courba ses lèvres. « Lady Astoria Greengrass. »

Potter saisit une des mains d'Astoria dans la sienne plus large, et l'aida à se relever sur ses pieds.

« C'est un immense plaisir de vous rencontrer, Lady Astoria. Je suis Lord Potter. » Lorsqu'elle ne lui retourna pas un inepte 'Je sais', son sourire s'élargit. « Et il n'y a rien à pardonner. » répondit-il tandis que la magie d'Astoria recouvrait doucement la sienne.

Quand Harry porta sa main délicate à ses lèvres pour y déposer un baiser sur le dos, elle fut vaguement consciente de la magie de Malefoy fulminant derrière elle alors que son maître grondait et rugissait de rage. Le bruit du sang battant à ses tempes, se faisait fort d'étouffer tout autre son à l'entour. Elle sentit ses joues s'embraser, mais ne détourna pas le regard dans un accès de pudeur. Astoria n'était pas le genre de sorcière qui se rabaissait au point de s'adonner à de frivoles oaristys séducteurs, et Potter n'était pas le genre de sorcier qui méritait d'être traité comme un balai sans cervelle.

« Voudriez-vous vous joindre à moi pour le dîner, Lady Astoria ? » demanda Potter avec douceur.

« J'en serais enchantée. » Une fois qu'il eut descendu la dernière marche et qu'il fut au même niveau qu'elle, Astoria saisit le bras qu'il lui présentait et le laissa l'escorter jusqu'au dîner.

Alors qu'ils passaient les Serpentards, ses yeux s'attardèrent un bref moment sur la forme enragée de Malefoy avant de se porter sur sa sœur. Le regard de Daphné était calculateur, mais pas le moins du monde désapprobateur. Astoria savait que sa sœur écrirait au domicile familial pour informer leurs parents des derniers évènements, détruisant par la même tous les plans de Malefoy visant à l'avoir comme épouse. Cependant, cela ne constituait là qu'une distante et plaisante considération.

La sensation d'agréables picotements causée par l'entremêlement de la magie de Potter d'avec la sienne, mobilisait quant à elle la majorité de son attention. Et bien qu'elle sût qu'elle se verrait bien vite accorder la prérogative de l'appeler 'Harry', elle ne pouvait qu'espérer pouvoir un jour s'adresser à lui en ces termes, « Un joyau pour ton cœur, mon Roi. »

Et le joyau qu'Astoria Greengrass offrirait à Harry Potter ne serait pas une émeraude de la taille de sa tête.

Non.

Elle lui offrirait, elle-même, son propre cœur.

FIN