Cela fait déjà plus d'un an et plus de trente chapitres que Learn to crawl perdure. J'aimerais remercier les lecteurs encore présents pour leur fidélité et leur soutien. Mais ce tome est plus particulière dédié :
A Alixe. J'aurais embauché un publicitaire qu'il ne m'aurait pas mieux promu.
« Chimène
Rodrigue, qui l'eût cru ?
Don Rodrigue
Chimène, qui l'eût dit ?
Chimène
Que notre heur fût si proche, et sitôt se perdît ? »
Extrait de la scène IV de l'acte III du Cid, par Corneille
1 : Omissions
« Maître, permettez moi de combattre pour vous au Continent Interdit. »
« Je suis heureux de voir que ta fidélité n'a pas diminué au cours des années, Lucius, dit Voldemort, mais j'ai déjà choisi ceux qui iront là-bas. Je t'assignerai sans doute une autre mission plus tard. »
Le visage de Lucius Malfoy resta impassible. Seules ses mâchoires serrées trahissaient l'amertume de sa déception. Mais cela, Voldemort ne le vit pas. Il congédia son serviteur d'un geste de main et resta plongé dans ses pensées.
La situation était mauvaise, aussi mauvaise qu'elle l'avait été du temps d'Harry Potter. Ses indics l'avaient informé du sortilège de Feudeymon à Little-Paradise et Voldemort ne se faisait guère d'illusions sur le sort du diamant disparu. Deux Horcruxes s'étaient donc déjà envolés, en restait quatre.
Mais ces quatre-là n'avaient-ils pas déjà été détruits ? Voldemort savait que Ti'lan était vivant et que l'Horcruxe du Continent Interdit était intact. Quant à la statue et à l'arc, il avait envoyé deux de ses âmes damnées à Venise et à Honshû pour vérifier s'ils étaient bien intacts et authentiques.
Voldemort avait imposé à ses deux Ombres, ses espions les plus fidèles, la discrétion la plus absolue. Il aurait pu leur donner des hommes, des moyens, mais démarrer une enquête officielle aurait signalé à ses ennemis qu'il était au courant de leurs agissements.
Il fallait qu'ils demeurent dans l'ignorance.
Car, tôt ou tard, ils se rendraient au Continent Interdit pour y chercher l'Horcruxe. Et Voldemort avait prévu pour eux la plus délicieuse des surprises. Un piège élégant et mortel.
Le Seigneur des Ténèbres savait très bien ce qui était sur toutes les lèvres de ses plus proches serviteurs, même si personne n'osait le dire devant lui :
« Et s'ils étaient toute une armée ? »
« Alors, nous aurons toute une armée pour les combattre. », dit Voldemort à haute voix.
Il souriait.
« Un cadeau pour le Prince et la Princesse. », dit la servante italienne.
Ses deux yeux noirs brillaient comme des escarboucles dans un visage rond et doré comme une miche de pain bien cuite.
« Merci, Angelica. », dit Eméra en prenant le paquet, qui semblait tout droit sorti d'une image d'Épinal. Il était soigneusement emballé dans du papier de couleur vive et entouré d'un magnifique ruban.
Eméra chercha la carte d'un air distrait et son visage s'éclaira en la lisant. Tout de suite, le contenu du paquet lui semblait plus intéressant.
« Ti'lan !, appela t-elle. Un paquet est arrivé par le courrier du soir et il est de la part de Stanislas. »
« Mmmhhouu mmmreeeeehhh mmeehhh. »
Ce qui voulait dire deux choses : Ouvre-le et Je suis en train de me laver les dents.
Eméra dénoua donc le ruban et déchira la papier-cadeau. En dessous, il y avait une boîte en carton d'un brun sale. Eméra s'apprêtait à l'ouvrir quand elle s'aperçut qu'une note s'était échappée du papier cadeau.
Chers Ti'lan et Eméra,
Je suis désolé d'avoir dû dissimuler ce paquet important sous cette allure à la fois innocente et tape-à-l'œil mais le meilleur moyen de m'assurer qu'il n'allait pas être ouvert était de le faire passer pour le cadeau d'un haut noble à d'autres hauts nobles.
Je vous prie instamment de :
- ne pas ouvrir ce paquet
- le placer quelque part dans votre appartement à un endroit facile d'accès et de ne pas le changer de place.
- vous arranger pour que votre appartement soit vide le 13 octobre à 11h.
Je sais que ces requêtes peuvent vous sembler très étranges mais vous comprendrez tout à notre arrivée à Venise. Elle est prévue pour le 15 octobre.
Stanislas
« Il n'y a que deux explications : ou Stanislas a un plan très élaboré dont nous ignorons tout, ou il a complètement perdu la boule. », dit Ti'lan.
Il était sorti de la salle de bain et avait lu la lettre par-dessus l'épaule d'Eméra, une main passée autour de sa taille.
« En tout cas, je ferais mieux de poser ce paquet sur l'étagère du salon, bien en évidence. », dit Eméra en se dégageant doucement de l'étreinte de Ti'lan.
Il se laissa tomber sur le lit et attendit le retour d'Eméra.
« Dis, tu ne serais pas préoccupée par quelque chose ? », lui demanda t-il alors qu'elle se glissait sous les draps.
« Hé bien… »
Eméra soupira. Elle avait reproché tant de fois à Ti'lan d'avoir des secrets et, maintenant, c'était elle qui lui cachait des choses.
« Tu te rappelles de ce que tu m'as dit il y a une semaine ? À propos de l'idée de la mort qui ne te quittait plus ? Je pense que, maintenant, je comprends. Quand tu m'en as parlé pour la première fois, je ne réalisais pas. »
« Tu n'aurais jamais dû connaître ça, dit Ti'lan en passant la main dans les cheveux d'Eméra. C'est ma… »
« Non, ne sois pas désolé ! Je ne regrette rien du tout. »
Ti'lan ne répondit rien. Il avait une impression très étrange sur laquelle il essayait de mettre un nom.
« Nous sommes heureux ensemble, n'est-ce pas ? », dit Eméra avec un sourire doux, ce qui était rare chez elle.
Ti'lan comprit alors ce qui le chiffonnait : les paroles d'Eméra auraient très bien pu sortir de sa bouche. Tous ces sentiments qu'elles exprimaient… La peur de la mort, l'absence de regrets, le bonheur d'être ensemble… Tous ces sentiments étaient les siens !
Ti'lan se souvint des conséquences du rituel qu'Eméra avait réalisé, parmi lesquelles une empathie accrue. En effet, elle s'était tellement accrue qu'ils partageaient quasiment les mêmes sentiments !
Dans ce cas, il valait mieux éviter qu'Eméra partage ses malheurs :
« Bien sûr que oui. C'est pour cela… Je pense que ça serait mieux d'oublier ces soucis pour l'instant. »
« Je suis d'accord. », dit Eméra en poussant un soupir de soulagement intérieur.
Elle eut un éclair de culpabilité en réalisant qu'elle se réjouissait de l'ignorance de Ti'lan mais elle chassa rapidement ce sentiment. D'une certaine manière, elle avait été sincère.
Elle ne voulait absolument penser à ça pour l'instant.
Le lendemain matin, au réveil, Ti'lan découvrit un visage familier. Aussitôt, au lieu de sortir du lit, il rabattit les couvertures sur Eméra et lui le plus haut possible.
« Alors, on se décide enfin à profiter de la vie ! »
« Deimos… qu'est-ce que tu fais assis sur mon lit à huit heures du matin ? »
« J'ai décidé de me lever tôt pour vous réveiller, Eméra et toi. Je n'ai pu résister à l'idée d'assister au réveil de deux jeunes amants. »
« Comment diable… as-tu su ? »
« Justement, je me sens trahi. Tu ne m'as rien dit ! À moi, ton meilleur ami ! »
« Parce que je savais que, si je te prévenais à l'avance, j'aurais droit à une blague débile à ton retour !, s'exclama Ti'lan. Alors, comment as-tu su ? »
« Ma Lila adorée et moi n'avons aucun secret l'un pour l'autre. »
« Lila ? Qui est Lila ? Ah, tu veux dire Dalila. Tu sors avec elle ? Tu ne m'as rien dit non plus. »
« Je voulais te faire la surprise. »
À ce moment, Dalila entra, habillée en suivante. Elle était calme et discrète, comme à l'accoutumée.
« Je suis désolée, Ti'lan. Deimos a lu les lettres qu'Eméra m'avait envoyées. »
Ti'lan fronça les sourcils et jeta un regard perçant à son meilleur ami, tandis que Dalila s'asseyait au chevet d'Eméra. Elle posa une main légère sur son épaule. Eméra sursauta et ouvrit aussitôt les yeux. Elle n'était pas endormie mais faisait semblant de dormir en attendant que Deimos parte. Elle n'avait jamais vraiment apprécié le sens de l'humour du loup-garou.
« Dalila, tu es là ! », s'exclama t-elle.
« Salut, Eméra. Je t'ai apporté quelques papiers. Tu n'as plus qu'à signer et je suis de retour à ton « service ». »
« Je le ferai avec plaisir mais d'abord… est-ce que vous pourriez sortir tous les deux le temps qu'on s'habille, Ti'lan et moi ? Dalila, je t'invite à petit-déjeuner avec nous. On se retrouvera là-bas. »
« Moi, je m'invite, dit Deimos. Je sens que Ti'lan a quelque chose à me dire et qu'il attrapera une rage de dent s'il se retient trop longtemps en gardant les mâchoires serrées. »
Il sortit nonchalamment de la pièce, suivi par Dalila.
« Qu'est-ce que tu as à lui dire ? », demanda Eméra.
« Je veux lui demander si sa relation avec Dalila est sérieuse. Il a tout de même lu les lettres que tu lui avais envoyées. »
Eméra eut un mouvement de recul et fit la grimace.
« Tu penses qu'il va te répondre ? Je veux dire honnêtement ? »
« Non. »
En effet, lorsque que Ti'lan lui posa la question au petit-déjeuner, Deimos y répondit par une autre :
« Est-ce qu'elle a l'air sérieuse ? »
« Oh, je t'en prie, Deimos, je ne suis pas abusé par tes blagues et ce surnom idiot dont tu affabules Dalila. Tu n'as jamais ouvert le courrier d'une de tes petites amies auparavant. »
« Tu n'as jamais été un peu obsédé par Eméra ? »
« Je l'ai souvent observée de loin et, une fois, je me suis laissé aller à la suivre parce qu'elle me manquait… »
Deimos le regarda d'un air roublard.
« …mais je n'aurais jamais fouillé dans ses affaires !, conclut Ti'lan avec véhémence. Tu sais ce que je pense, Deimos ? »
« Non, répondit-il en mimant une bâillement, et ça ne doit pas être intéressant du tout. »
« Je pense que tu es amoureux de Dalila, obsédé par elle, et que tu essaies de faire passer votre relation pour une farce. »
Ils se turent un instant. Deimos semblait concentré sur les bavardages de Dalila et Eméra à l'autre bout de la table mais ses yeux étaient dans le vague.
« Tu attends que je fasse un commentaire sur ta théorie ? », dit-il finalement.
« Non. Tu peux te murer dans le silence si tu veux ; il est on ne peut plus éloquent. »
Ti'lan se rendit soudain compte que, pour la première fois depuis qu'ils se connaissaient, il avait peur pour Deimos.
À ce moment-là, Angelica entra dans la pièce, le courrier du matin posé sur son plateau. Elle faillit le renverser en apercevant Deimos. C'était Angelica qui aurait dû réveiller Ti'lan et Eméra mais Deimos l'avait convaincue, avec son plus grand sourire, qu'il la remplacerait parfaitement ce matin-là. Angelica ne s'en était pas encore remise.
Tout en la regardant se diriger vers Eméra d'un pas chancelant, Ti'lan se dit que, même si Deimos ne s'était qu'amusé à lui faire peur, il représentait bel et bien un danger pour les humains. Or, il n'y a pire fureur que celle d'un animal blessé. Si Deimos avait le cœur brisé, il ne serait pas le seul à souffrir.
Alors que Ti'lan commençait à s'inquiéter pour Dalila, Eméra les héla d'une voix forte. Elle tenait une lettre à la main.
« Ça vient de la coopérative Proserpine's Garden. Vous vous souvenez, l'une des couvertures utilisées par la Confrérie du Chaos ? »
La lettre en elle-même, très formelle et d'une politesse exquise, proposait à Ti'lan et Eméra des produits de l'Alliance de l'Est ainsi que des « marchandises exceptionnellement acheminées du Japon ». Elle donnait également l'adresse du « comptoir vénitien » de la coopérative.
« Ça, ça veut dire que Kévin et Rosemary sont arrivés et qu'ils se planquent, dit Deimos. Il ne manque plus que l'intello et sa copine. Je pensais que notre premier de la classe serait le premier à arriver. »
« Il nous a envoyé une lettre. Il sera là dans cinq jours. », dit Ti'lan.
Il échangea avec Eméra un regard éloquent. Même s'ils étaient heureux de retrouver leurs meilleurs amis respectifs, ils allaient s'efforcer de passer beaucoup de temps en tête à tête. Chacun de ces moments leur était d'autant plus précieux que le temps leur était compté.
Dans cinq jours, la chasse recommencerait.
« C'est tellement bon de vous revoir après un mois et demi !, s'exclama Lucy, totalement enchantée. Et cette ville est magnifique ! Tu ne trouves pas, Stanislas ? »
« Je suppose qu'elle a un grand intérêt historique. », répondit celui-ci. Il avait un peu perdu de sa pâleur mais il était toujours aussi guindé, et le charme sucré de Venise n'opérait guère sur lui.
« Et si on allait directement au sujet qui nous occupe ? », proposa Kévin.
Eméra, Ti'lan, Deimos et Dalila, qui habitaient tous dans le même hôtel de luxe, avaient convié Kévin et Rosemary à leur table. En effet, l'arrivée de Stanislas et Lucy avait admirablement coïncidé avec l'heure du dîner.
« Hé bien, à propos du Con… », commença Stanislas.
Il n'acheva pas sa phrase. Angelica venait d'entrer dans la pièce. Tout le monde remarqua qu'elle avait pâli derrière son bronzage.
« Quelqu'un veut vous voir, Prince. »
« J'espère que c'est pas ton père. », fit remarquer Deimos, sarcastique.
Ti'lan savait qu'Angelica, conformément à ses instructions, ne l'aurait pas dérangé si l'hôte n'était pas des plus importants. Il se leva donc sans répliquer à la remarque de Deimos et la suivit.
En voyant l'homme confortablement assis sur un fauteuil, il comprit les raisons de la petite frayeur d'Angelica. Ce n'était certes pas Voldemort en personne mais c'était tout de même un Mangemort du premier cercle, un porteur de la Marque. L'un des rares que Ti'lan ne trouvait pas totalement antipathique.
« Prince. », dit l'homme en se levant immédiatement à son arrivée.
D'une soixantaine d'années, donc encore dans la force de l'âge pour un sorcier, il avait de longs cheveux blonds pâles et des yeux d'un gris perçant.
« M. Malfoy. », répondit Ti'lan en souriant.
Même parmi les Mangemorts, Lucius Malfoy était une célébrité. Il avait, comme qui dirait, une histoire personnelle plutôt chargée.
Son fils, Drago Malfoy, pourtant appelé à lui succéder, n'avait pas supporté le « travail » de Mangemort et avait rejoint le camp d'Harry Potter durant la Seconde Guerre. Narcissa Malfoy, une mère très dévouée, avait suivi son fils. Lucius Malfoy n'avait pas voulu ou pas pu les rejoindre à l'époque.
Quoi qu'il en soit, Drago et Narcissa Malfoy périrent lors de la Seconde Guerre et beaucoup s'attendirent à ce que Lucius soit exécuté pour la trahison de sa femme et de son fils. Mais Voldemort lui avait à la place imposé une punition originale : l'interdiction de se remarier et d'avoir des enfants.
Lucius était le dernier des Malfoy. S'il n'avait pas d'héritier, le nom, les terres et les biens des Malfoy disparaîtraient à jamais. Pour une lignée de Sang-pur, c'était la pire des destinées et, pour Lucius, sans doute la pire des humiliations.
« Qu'est-ce qui vous amène ici ? »
« Le Seigneur des Ténèbres m'a confié une lettre à vous remettre en mains propres. », dit Lucius en lui tendant un rouleau de parchemin.
Ti'lan le prit mais ne l'ouvrit pas immédiatement. Voldemort n'aurait jamais envoyé un Mangemort du premier cercle faire le travail d'un simple coursier.
« Mais ce n'est pas ce qui vous amène à Venise, je suppose… », suggéra t-il élégamment. Il prit bien soin de laisser sa phrase en suspens, montrant clairement qu'il attendait une réponse.
« En effet, certains d'entre nous ont une mission à Venise. »
« Quelle sorte de mission ? »
« Le Seigneur des Ténèbres nous a demandé la plus grande discrétion. »
« Je puis vous assurer de ma plus grande discrétion alors, à moins que le Seigneur des Ténèbres ne vous ait expressément signalé de ne rien me dire, j'aimerais savoir quelle est votre mission. », dit Ti'lan d'un ton ferme.
« Protéger un certain objet. Une statue. La Walkyrie, d'Armando Vecellio. Il paraît que c'est un chef d'œuvre. », dit Malfoy en souriant.
« Jamais vu, mentit Ti'lan, souriant lui aussi. Merci, M. Malfoy. Au revoir. »
Lucius Malfoy s'apprêtait à dire quelque chose d'autre mais il se ravisa. Severus avait raison. Il valait mieux que ces enfants ignorent ce qui les attendait sur le Continent Interdit. Avec les informations que Ti'lan lui avait arrachées, ils savaient déjà que Voldemort était au courant de la destruction des Horcruxes. Et ils ne tomberaient pas, inconscients, dans son piège.
« De mauvaises nouvelles ? », demanda Stanislas en voyant l'air sombre de Ti'lan.
« De très mauvaises nouvelles : Voldemort sait que quelqu'un détruit ses Horcruxes. Il les fait surveiller. »
Il leur raconta brièvement son entrevue avec Lucius Malfoy.
« C'est malheureux, dit Stanislas, mais il fallait s'y attendre. Nous avons laissé trop de traces de nos agissements. Il faut espérer que Voldemort n'ait que des soupçons pour l'instant et qu'il se tienne à une attitude défensive, comme faire surveiller les Horcruxes qu'il croit intacts. »
« Mais même s'il se contente d'être sur la défensive, il y aura quand même une garde de Mangemorts autour du Horcruxe. Et on ne pourra pas les tuer sans confirmer les soupçons de Voldemort. », dit Deimos.
« Il faudra qu'on les assomme et qu'on modifie leur mémoire. Ce sera ennuyeux mais pas impossible. »
« J'ai oublié de vous annoncer la suite des mauvaises nouvelles, dit Ti'lan. Vous ne pouvez pas compter sur Eméra et moi : Voldemort m'ordonne de revenir à Poudlard immédiatement et il n'accorde qu'une journée de plus à Eméra, pour dire convenablement adieu aux Vénitiens. »
Ti'lan et Eméra échangèrent un regard. Ce qu'il ne disait pas, c'était pourquoi Voldemort voulait qu'il rentre à tout prix. Il tenait probablement à mettre son Horcruxe de fils à l'abri.
« J'avais prévu des problèmes de ce genre, dit Stanislas en sortant d'un geste brutal le Retourneur de Temps de son col, mais avec ceci, nous allons remonter trois jours en arrière et pouvoir partir ensemble au Continent Interdit. »
« Et ensuite ?, dit Rosemary assez sèchement. Qu'allons nous faire si nous ne savons rien de ce qui nous attend là-bas ? »
« Le Continent Interdit est un endroit très secret. Il n'y aucun document écrit qui en parle. Néanmoins, j'ai écrit à mon père pour savoir s'il n'avait pas quelques informations à ce sujet. Il m'a répondu que le Continent Interdit était entouré d'une barrière magique. Une alarme se déclenche dans une sorte de poste de garde quand quelqu'un la traverse. »
« Comment peut-on désamorcer l'alarme ? », demanda Eméra.
« C'est impossible ou, du moins, bien trop compliqué pour nous. J'ai pensé qu'on pourrait peut-être passer en déclenchant l'alarme. D'après mon père, il n'y a pas beaucoup de Mangemorts au poste de garde donc nous pourrons les battre. »
« Mais peut-être qu'il y en aura plus maintenant que Voldemort sait que nous détruisons les Horcruxes. », dit Lucy.
« Je pense plutôt que ces Mangemorts seront au plus près du Horcruxe mais même s'ils nous attendent à l'entrée, nous devrons les affronter tôt ou tard. »
« Est-ce que ton père t'a dit pourquoi il n'y avait presque plus de Mangemorts au poste de garde ? », dit soudain Kévin.
« Il a juste dit que « les expériences du Seigneur des Ténèbres sur le Continent Interdit sont terminées. ». »
« C'est assez sibyllin. », fit remarquer Ti'lan.
« Ton père n'aurait pas pu être plus clair ? », demanda Deimos.
« Il l'aurait été s'il avait pu ! Mais c'est trop risqué pour lui de me révéler des informations confidentielles dans des lettres que tout le monde peut ouvrir. »
« Je suppose que, pour les même raisons, tu ne lui as pas écrit que tu étais contre Voldemort. »
« Non, mais je suis sûr qu'il comprendra. Ce n'est pas comme s'il était vraiment attaché à Voldemort.
Mais, bon, reprenons. Une fois franchi la barrière et vaincu les gardes, nous fouillerons le poste de garde à la recherche du Horcruxe et, s'il n'y est pas, d'informations sur les autres lieux aménagés par Voldemort. Tout le monde sait qu'il y a au moins une prison. J'espère vraiment que le Horcruxe sera caché dans l'une de ses installations car si nous devons fouiller le reste du Continent, nous nous en sortirons jamais. »
« Quand partons-nous ? »
« Demain à 11h précises. Rendez-vous à moins dix. Soyez déjà prêts, car nous ne pouvons pas nous permettre d'être en retard. »
« Tout le monde est prêt ? Bon, Eméra, Ti'lan, où est-ce que vous avez mis le paquet que je vous avais envoyé ?
Eméra les conduisit jusqu'à l'étagère du salon. Stanislas ouvrit la boîte et montra son contenu à tous : elle était vide.
« Je ne l'ai pas ouverte ! »
« Non. C'est nous qui l'avons ouverte le 13 octobre à 11h. »
« Alors c'est pour ça que tu voulais que l'appartement soit vide ! Pour que personne ne nous voie remonter le temps et prendre ce qu'il y avait dans la boîte. Qu'est-ce qu'il y avait dedans en fait ? », demanda Eméra.
« Tu vas le voir tout de suite. »
Stanislas allongea la chaîne du Retourneur de Temps pour la passer autour de leurs huit cous puis retourna le sablier soixante-douze fois.
Ils se retrouvèrent exactement au même endroit, mais trois jours plus tôt. Stanislas reprit la boîte et en sortit une vieille chaussure.
« Ce n'est pas une simple chaussure, répondit-il à la question muette des autres, c'est un Portoloin. »
Autrefois, la création de Portoloins était contrôlée par le Ministère. Désormais, elle était contrôlée par Voldemort. C'était bien pourquoi Ceux-qui-doivent-ramper n'avaient jamais utilisé de Portoloins privés.
« Le Portoloin était notre seule option pour aller au Continent Interdit, expliqua Stanislas. Néanmoins, je n'en ai pas créé un ; ça aurait été trop risqué. Celui-là est un Portoloin public que j'ai un peu trafiqué. Je l'ai programmé pour partir au Continent Interdit dans… une minute. »
Ils attrapèrent tous le Portoloin et Stanislas eut juste le temps de reposer la boîte vide sur l'étagère avant de disparaître dans un tourbillon de couleurs et de sons.
Ils atterrirent quelque part à l'extérieur, près d'une côte, d'après l'odeur de l'air marin. Le paysage était encore plongé dans la pénombre du petit matin.
« Le décalage horaire, dit Stanislas. Il n'est encore que six heures du matin ici. »
« Chut !, intima Deimos. Je te rappelle qu'on a déclenché l'alarme et le vent me rapporte l'odeur d'un homme non loin de nous. »
Baguettes levées, les membres de Ceux-qui-doivent-ramper formèrent instinctivement un cercle pour surveiller les environs. Rosemary et Lucy, qui ne connaissaient pas beaucoup de sorts, furent refoulées à l'intérieur.
Pourtant, ce fut Lucy qui aperçut en premier la lumière. Elle avançait vers eux comme la lanterne solitaire d'un Pitiponk. Sauf qu'on arrivait parfois à distinguer une silhouette qui la portait.
Évidemment, les autres hésitèrent. L'attitude de l'homme n'était pas agressive et, seul et bien visible, il ne représentait guère un danger.
Lucy étouffa une exclamation lorsqu'elle reconnut, à la lumière chiche de la lampe, des traits familiers.
« Suivez moi. »
« J'espère que tu sais ce que tu fais, Stanislas. », dit Severus Rogue d'un ton sec.
C'était les premiers mots qu'il lui adressait. Durant tout le trajet à pieds jusqu'au poste de garde, son père avait eu ce que Stanislas appelait sa « tête des mauvais jours ». Stanislas savait qu'il valait mieux attendre qu'il engage la conversation dans ces cas-là.
Il ouvrit la bouche pour se lancer enfin dans des explications mais son père poursuivit :
« Je sais déjà quel ennemi tu t'es choisi. »
« Nous sommes capables de le vaincre. »
« Nous verrons. »
Et ces deux mots avaient une consonance un peu ironique.
Comme l'humeur de son père semblait s'être légèrement améliorée, Stanislas risqua une question :
« Tu n'étais pas censé être dans le Nord de l'Angleterre ? »
« Même les Mangemorts me croient là-bas. En fait, le Seigneur des Ténèbres m'a choisi pour être le gardien de la Station Impero. »
À nom sinistre, endroit sinistre. Le poste de garde était un bâtiment gris sale d'une laideur peu commune. Cependant, l'intérieur était d'une propreté et d'une rigueur militaire. La pièce où Severus Rogue recevait Ceux-qui-doivent-ramper ressemblait d'ailleurs à une cantine pour officiers.
« Est-ce qu'il y a une Station Endoloris et une station Avada Kedavra ? »
« Bien sûr. La Station Endoloris était la fameuse prison que le monde redoute encore. Mais, en fait, c'était bien plus qu'une prison. Plutôt un centre de recherche. En tout cas, ce n'est plus qu'un lieu vide et désaffecté. Les criminels qu'on amène ici sont rapidement exécutés pour maintenir la réputation du Continent Interdit.
Quant à la Station Avada Kedavra, à sa construction juste après la guerre, c'était un entrepôt. Un entrepôt vide. »
« Tu penses qu'il pourrait être dedans ? », dit Eméra en s'adressant à Stanislas.
Les autres membres de Ceux-qui-doivent-ramper, qui avaient préféré laisser Stanislas s'arranger avec le très aimable Severus Rogue, saluèrent mentalement le courage d'Eméra de se lancer ainsi dans la conversation.
« Non, pas possible. Voldemort a dû se dépêcher de reconstituer ses Horcruxes après la guerre. Si la Station Avada Kedavra avait été construite pour abriter un Horcruxe, elle n'aurait pas été vide. Je pense qu'elle était plutôt destinée aux résultats des recherches de Voldemort. »
« C'est aussi ma théorie, dit Rogue. Les deux Stations sont très proches l'une de l'autre. »
« Est-ce que je peux visiter cet endroit ? », dit soudainement Stanislas.
Rogue se leva et son fils sortit à sa suite. Aussitôt, les autres membres de Ceux-qui-doivent-ramper poussèrent un soupir de soulagement.
« Je ne savais pas que le père de Stanislas était aussi sec qu'une trique ! », dit aussitôt Deimos.
« Je le connaissais de vue seulement, dit Ti'lan. Ma première impression est confirmée. »
« Il me met horriblement mal à l'aise ! », dit Lucy.
« Il a donné des informations à Stanislas sans savoir qu'il était contre Voldemort. Maintenant, il le sait, sans que Stanislas le lui ait dit. Je trouve ça louche. », dit carrément Eméra.
Les autres furent forcés d'en convenir.
« Si ça se trouve, Severus Rogue est vraiment du côté de Voldemort. »
« Stanislas semble lui faire confiance. »
« C'est son père. Il ne peut pas être vraiment objectif à son sujet. »
Ils se turent. Stanislas et son père revenaient.
« Le Horcruxe n'est pas ici. S'il n'est pas non plus à la Station Avada Kedavra, il doit être à la Station Endoloris. »
« Je peux vous y conduire. Mes prédécesseurs m'ont montré où c'était. Ils étaient chargés d'escorter les prisonniers jusqu'à la Station Endoloris. Ce n'était pas vraiment des gardes. Les Détraqueurs de la Station Endoloris se chargeaient très bien de garder les prisonniers. Mais la Station Impero était le lien nécessaire entre le monde extérieur et la Station Endoloris. Celle-ci ne pouvait pas être reliée au réseau de cheminées, un prisonnier aurait pu essayer de s'en servir pour s'échapper. Ici, il y a une cheminée. Elle est reliée uniquement à Poudlard. Le Seigneur des Ténèbres s'en servait parfois pour venir au Continent Interdit avant de transplaner à la Station Endoloris. »
« Alors, allons-y. », dit Stanislas, qui semblait le seul à avoir apprécié l'anecdote.
Il prit la main de son père dans sa main gauche et celle de Lucy dans sa main droite. Les autres membres de Ceux-qui-doivent-ramper l'imitèrent et ils disparurent avec un fort bruit de craquement pour réapparaître sur l'aire de transplanage de la Station Endoloris.
Le spectacle qui s'offrait à eux était ahurissant.
Le prochain chapitre s'intitulera "Fait comme un rat" et il sera publié le dernier jour d'août. Vous pouvez retrouver les réponses à vos reviews et de plus amples informations sur Learn to crawl sur le blog learntocrawl (adresse dans mon profil). Je rappelle aussi que l'édition DELUXE de LTC2 est dès maintenant disponible et téléchargeable directement depuis mon profil.
