Disclamer : Disons-le une fois pourtoute, les perso sont à JKR, l'histoire est à moi.

Bêta lectrice : Mandy

Bêta correctrice : Archimède que je remercie du fond du coeur

Note: Courte, parce que sinon vous ne lirez pas. C'est un UA sans magie canonique, rating M.

Publication des chapitres de manière... irrégulière, étant donné qu'à l'écriture, ce n'est pas fini, je préfère prendre mon temps avant de publier la suite. Combien de chapitres prévus... j'en ai 19 pour l'instant et je pense qu'il y en aura... une 30ène


1

Tobias Angus Rogue faisait les cents pas dans le vaste cabinet qui lui servait de bureau, les talons de ses bottes claquant sur le marbre lisse, ses mains croisées dans le dos. Quelques mèches de cheveux noir corbeau s'étaient échappées de son catogan et taquinaient librement l'appendice nasal proéminent qui lui servait de nez.

Son air peu avenant en cet instant décourageait ses conseillers d'ouvrir la bouche pour émettre le moindre mot qui pourrait faire trembler les murs du palais et les colères du prince étaient légendaires dans la principauté de Poudlard.

– Mon fils unique... Comment une telle chose peut-elle se produire ? ! éructa-t-il.

– Votre Altesse, commença un vieil homme à la longue barbe d'argent et aux lunettes en demi-lune cachant des yeux bleus pétillant.

– Severus... Dieu, pourquoi ? implora-t-il en levant les yeux vers les voûtes du plafond dont la peinture représentait des angelots du Paradis avec leur bouille ronde et leurs petites ailes.

C'était une volonté d'un de ses ancêtres, fervent catholique, de faire peindre les plafonds des pièces de réception avec des représentations de scènes bibliques. Ses descendants n'avaient pas vu l'utilité de tout faire effacer.

Tobias ne pratiquait pas. Il ne croyait pas non plus mais s'obligeait à assister aux offices car la religion catholique était religion d'État et que chacun allait à l'église le dimanche ainsi que les jours de fête. C'était une pratique séculaire à Poudlard et personne ne se voyait faire autrement.

– Son Altesse n'a pas d'autre choix que de se soumettre, Votre Altesse, répliqua poliment le vieil homme.

Rogue cessa ses allers et retours pour toiser son Conseiller qui ne fléchit pas, se contentant d'incliner légèrement la tête.

– Pourquoi, au nom de Dieu, suis-je puni ainsi ? ! tempêta le prince. Je pensais avoir payé ma dette au Tout-Puissant lorsque Eileen est morte ! Mais non, il faut qu'il en soit décidé autrement ! Tout cela à cause de cette femme, cette maudite femme !

Il crispa le poing, comme s'il voulait le serrer autour du cou de la responsable de tout ses maux.

– Sibylle Trelawney...

– Ne prononcez pas son nom ! ordonna le souverain froidement. Je refuse d'entendre le nom de cette femme ! Ensuite, chacun va oublier ce qu'il s'est passé, ce qui a été dit et mon fils ne sera jamais au courant !

Les Conseillers s'inclinèrent et quittèrent le bureau en prenant bien garde à refermer la lourde porte richement décorée. Le prince se laissa tomber dans son fauteuil et se prit la tête entre les mains. Oublier était plus facile à dire qu'à faire.

Prenant sur lui pour que, malgré tout, les mots honnis de cette Sibylle Trelawney ne soient pas perdus, Tobias prit sa plus belle plume, un parchemin et écrivit.

La feuille fut scellée dans une enveloppe, cachetée avec le sceau princier et placée dans le coffre du cabinet caché derrière une lourde tenture.

0o0

Le temps était maussade, comme l'humeur du prince héritier de la couronne de Poudlard. Son cœur pleurait en même temps que la pluie qui s'abattait sur les parapluies noirs ainsi que sur le cercueil fermé dans lequel reposait le corps de son défunt père.

Severus Tobias Rogue sentit la petite main de sa fiancée sur son bras. Elle le soutenait dans l'épreuve.

Il fréquentait Pansy Parkinson, une femme de haut lignage dont la famille était très proche de l'entourage du prince. Il lui avait fait la cour dès qu'elle avait été assez âgée pour lui convenir et comptait bien l'épouser d'ici quelques mois. Pour l'heure, elle partageait sa couche et cela leur convenait.

Le peuple espérait un mariage prochainement et peut-être un héritier de la couronne. Severus ne souhaitait pas manquer à ses obligations de fournir un descendant.

Selon les tabloïds, Pansy Parkinson serait une princesse parfaite. Elle avait tout pour seconder son futur époux dans son règne et savait parfaitement où se situait sa place. Elle était souvent comparée à celle qui aurait été sa belle-mère si elle avait été encore en vie : Eileen Rogue, née Prince. Une dame d'une grande beauté, promise à un grand avenir, décédée dans la fleur de l'âge alors que son fils n'avait que quatre ans.

Sa mort avait été une tragédie et chaque année, ce jour était synonyme de deuil national pour la Principauté. Son époux n'avait pas repris épouse, ne trouvant personne qui ressemblait de près ou de loin à sa femme décédée.

Severus voyait en Pansy la femme que sa mère aurait souhaité qu'il épouse. Il appréciait la comtesse et pouvait affirmer qu'elle ferait une épouse exemplaire.

Pour l'heure, il n'était pas question de mariage mais d'enterrement. Le prince Severus serrait les dents pour ne pas se laisser aller aux larmes. Il avait l'impression de revivre la mise en terre de sa mère. Cela remontait à près de vingt-cinq ans, toutefois le souvenir était encore vivace dans son esprit.

Ce jour-là, il pleuvait également. Le petit garçon qu'il était avait été obligé de revêtir un costume noir et de mettre une cravate qui l'avait étranglé. Son père ne l'avait pas quitté d'une semelle, restant sans cesse en contact avec lui, comme par peur de le voir s'en aller à son tour.

Aujourd'hui, Severus portait un costume sombre, une cravate qui l'étranglait toujours et la pluie ne paraissait pas vouloir cesser.

L'évêque de Poudlard officiait, protégé lui aussi par un parapluie et chacun écoutait religieusement la cérémonie de mise en terre du défunt.

Les Poudlariens de souche s'étaient rassemblés dans le cimetière, unis avec leur souverain dans ce deuil. Le silence était à peine troublé par les grosses gouttes de pluie qui s'abattaient sur le toit sombre de parapluies déployés au-dessus des têtes. Les caméras du monde entier n'avaient pas pu entrer dans cet endroit de recueillement. Rien ne serait filmé malgré l'importance de l'événement. En revanche, ils seraient présents pour le sacre de Severus qui allait succéder de façon officielle à son père.

Il était déjà le prince de Poudlard depuis quelques semaines, cependant son sacre n'avait pas encore eu lieu et le trône ne pouvait rester vacant.

Severus connaissait son métier. Il y était préparé depuis sa plus tendre enfance, accompagnant son père lors des voyages officiels, étant présent lors des cérémonies. Plus grand, il avait assisté Tobias. Toutefois, le fait d'être le prince et non plus simplement l'héritier de la couronne avait quelque chose d'angoissant. Comme une épée de Damoclès au-dessus de sa tête.

Le cercueil fut descendu dans le caveau des Rogue. Son Altesse Sérénissime, le Prince Tobias serait enterré auprès de son épouse, la princesse Eileen et non loin de ses ancêtres. Bon nombre de Rogue étaient là. Toute la dynastie depuis leur arrivée sur Poudlard.

Alors que la foule quittait peu à peu les lieux, Severus resta devant le caveau, petite bâtisse de pierre érigée pour les princes et princesses de Poudlard. Il refusa d'y mettre un pied. Il avait toujours refusé d'y entrer, trouvant l'atmosphère lugubre. Son père s'y rendait une fois par mois. Lui-même n'avait jamais voulu le suivre, se contentant de l'attendre devant la porte. En vingt-cinq ans, il n'avait pas passé le seuil.

– Severus, souffla la voix tendre de sa compagne, nous y allons ou tu souhaites rester encore un peu ?

Les gardes du corps étaient présents, juste derrière Severus et Pansy. Cependant ils savaient se faire discrets malgré leur stature.

Le prince de Poudlard tapota la main de sa future épouse glissée sous son bras et tourna le dos au caveau. Dans le cimetière, tout le monde était parti.

Pansy et lui remontèrent l'allée caillouteuse lentement. Se presser ne servirait à rien. Ils n'étaient attendus nulle part. Severus n'avait ni frère ni sœur. Son père était enfant unique, comme lui et sa mère. Ainsi il n'avait aucun cousin ou cousine proche ou lointain. Ses grands parents étaient tous les quatre décédés. Sa famille était réduite à sa seule personne.

Une voiture noire aux vitres tintées les attendait à la sortie du cimetière. Un homme en sortit et ouvrit la portière au prince tandis que le chauffeur faisait de même à la comtesse. Les gardes du corps prirent place dans les deux autres voitures qui patientaient également. Le petit cortège quitta l'endroit pour filer, petits drapeaux aux armes de Poudlard au vent, vers le palais princier qui se trouvait à quelques kilomètres de là.

La principauté de Poudlard n'était pas très grande. Vingt kilomètres carré et une population d'environ vingt deux mille habitants. Elle était installée dans une petite enclave entre la frontière anglaise et la frontière écossaise. C'était une ville-État souvent comparée à la principauté de Monaco, enclave située en France puisqu'elles avaient le même statut. Elle était toutefois moins populaire.

Sur ces vingt-deux mille habitants, on comptait à peine trois mille Poudlariens de souche, les autres étant Anglais, Écossais, Irlandais... Les Rogue étaient d'authentiques Poudlariens, nés et morts à Poudlard. Severus n'avait quitté sa ville que pour aller faire des études à Londres durant ses jeunes années. Il avait apprécié la capitale mais était revenu sitôt son diplôme acquis.

– Severus, tout va bien ? s'enquit Pansy de sa voix douce.

– Oui.

Il n'était pas un homme bavard, loin de là. L'emploi des mots n'était pas son fort. On disait souvent de lui qu'il était froid, sec et hautain. Les discours étaient sa bête noire. Il trouvait inutile cet étalage verbal, préférant aller droit au but sans s'embarrasser de tournures de phrases pour dire, au final, la même chose. Autant dire que ses directeurs de cabinet s'arrachaient les cheveux à faire un discours qui lui ressemblait mais qui n'était pas trop abrupte.

Malgré tout l'amour paternel qu'il avait pu recevoir, Severus n'avait jamais eu de véritable conversation avec son père. Il avait été habitué à devoir disserter, débattre avec ses professeurs, il maniait donc la langue avec aisance. Cependant personne ne lui avait appris à moduler les mots afin d'exprimer un sentiment, une pensée en mettant les formes.

– Voudras-tu que je demande à la gouvernante de faire préparer le thé lorsque nous arrivons ?

– Non.

Il ne voulait rien. Rien d'autre que quelques heures seul ou en compagnie de Pansy qui était l'unique personne à savoir quand rester discrète. Les autres, ses domestiques, ne cessaient de le déranger pour un rien. Parfois Severus aurait voulu ne pas être prince et pouvoir s'occuper de lui seul comme lorsqu'il était un simple étudiant vivant dans son petit appartement londonien. Cette époque lui manqua soudainement.

– Bien.

Sa compagne lui sourit. Elle était belle Pansy. Très avec ses yeux clairs et ses cheveux sombres remontés en un chignon des plus sophistiqués. La petite voilette sur son visage donnait à son visage une maturité qu'elle ne paraissait pas avoir au quotidien.

Pansy était une jeune femme calme mais qui était loin de faire ses vingt-sept ans. Comme si elle ne parvenait à vieillir, quoi qu'elle mette d'ailleurs. Tailleur sur mesure, robe de soirée de grand couturier ou alors un simple jean, elle ne faisait pas son âge. Peut-être était-ce dû à ses joues ou au fait qu'elle pouvait se montrer terriblement enfantine, presque immature parfois dans son comportement.

Mais cela importait peu à Severus. Il savait qu'il n'était pas en couple avec une petite fille gâtée. Malgré son éducation et l'argent des Parkinson, Pansy n'avait pas toujours eu ce qu'elle désirait. Elle s'était toujours cantonnée à vivre dans l'ombre de sa sœur aînée Lavande. D'ailleurs, cette dernière avait longtemps été pressentie par ses parents pour être la future épouse du prince.

Les Parkinson avaient fondé de grands espoirs sur Lavande. Ils avaient fait en sorte de mettre la jeune femme sur le chemin de Severus à chacune de leurs entrevues. Néanmoins, ce fut Pansy qui attira son attention.

Cela faisait trois ou quatre ans qu'ils se tournaient autour et un an qu'ils étaient officiellement ensemble.

– Chéri ? l'appela sa dulcinée, le tirant ainsi de ses pensées.

Ce ne fut qu'à cet instant que Severus se rendit compte que les portières de la voiture étaient ouvertes et que derrière les vitres teintées se dressait le palais de Poudlard sous un rideau de pluie. Ils étaient arrivés.

Le souverain s'extirpa de la confortable banquette et fut accueilli par un petit vent froid qui le glaça sur place. Un parapluie le protégeait de l'averse dès sa sortie du véhicule. Il fut ainsi à l'abri des gouttes d'eau jusqu'à son arrivée dans le grand hall, Pansy à sa suite.

Il n'y avait personne pour les accueillir, à part une bardée de domestiques qui les aidèrent à retirer leur manteau. Pas de Tobias. Severus serra les dents à la pensée que son père était vraiment mort.

Jusqu'à aujourd'hui, il avait évité d'y penser, se plongeant à corps perdu dans le travail. Mais il ne put mettre cela de côté. Son père était décédé. Ils venaient tout juste de l'enterrer.

Prenant sur lui, Severus adressa à sa compagne un signe de tête et la laissa vaquer à ses occupations. Il se doutait qu'elle rentrerait chez elle.

Le couple ne vivait pas ensemble. Pas de façon officielle. Pansy avait ses appartements au palais. Toutefois, pour éviter les commérages, elle passait plus de temps chez ses parents qu'avec son amant.

Le prince s'enferma dans le bureau de son père – le sien – et s'assit dans le confortable fauteuil en cuir, sa tête reposant contre l'appui-tête, son regard posé sur le portrait de Tobias Rogue réalisé quelques années auparavant. Severus aurait le sien une fois qu'il serait sacré souverain de Poudlard.

La vie était bien injuste.

0o0

Les beaux jours étaient revenus et avec eux les préparatifs du sacre du prince Severus qui devait avoir lieu dans quelques jours à l'église Sainte Anne, lieu où tous les souverains de Poudlard avaient été couronnés.

Rogue était calme. Il avait fait le deuil de son père et avait du travail par dessus la tête. L'angoisse ou le stress étaient deux émotions qu'il ne connaissait pas. Pour lui, le sacre n'était qu'une cérémonie officielle. Il connaissait le cérémonial presque par cœur et pouvait réciter chaque mot, à la virgule près. Tout avait été minuté, chronométré, programmé, répété, comme une pièce de théâtre. C'était cela après tout, une pièce. Il jouait un rôle, le rôle principal.

Seulement, ce calme ne parvenait pas jusqu'à ses domestiques, ses conseillers ou sa compagne qui devenaient, chaque jour qui passait, plus énervés que la veille. C'était épuisant. Il ne parvenait à trouver la sérénité que dans le silence de son cabinet.

À une semaine de la cérémonie et après les sempiternelles essayages – il y avait toujours quelque chose à propos de sa tenue qui n'allait pas – Severus avait cru qu'il serait tranquille afin de pouvoir consacrer un peu de temps au travail, mais ce fut sans compter sur un domestique qui frappa à la porte.

– Oui ! tonna-t-il, assez surpris.

Il n'attendait rien ni personne. Aucune réunion n'avait été préparée. Ce n'était pas non plus l'heure du déjeuner. En somme, il n'aurait pas dû être dérangé.

La porte dévoila un de ses gardes du corps qui avait un doigt rivé à l'oreillette vissée dans son oreille.

– Votre Altesse, une femme souhaite s'entretenir avec vous.

Encore un importun qui n'avait pas de rendez-vous et qui voulait avoir une entrevue avec le prince de force. S'il redoutait ces personnes, le fait de savoir qu'il s'agissait d'une femme n'augurait rien de bon. Cependant, il se força à garder une allure princière au lieu de s'énerver et de sommer de faire déguerpir l'impudente.

– Qui est-ce ?

– Une certaine Sibylle Trelawney, Votre Altesse.

Ce nom ne lui était pas inconnu. Severus ne dit rien, son cerveau fonctionnant à toute vitesse. Son père lui avait parlé de cette femme, de cette Sibylle et lui avait conseillé d'être très prudent si d'aventure elle se présentait à lui.

Jamais, jusqu'à ce jour, la femme n'était venue à lui. Severus avait cru durant longtemps qu'il ne s'agissait que d'une invention paternelle, une sorte d'être sorti d'on-ne-savait-où qui allait dévorer les enfants. Un conte. Au fur et à mesure des années, il avait presque oublié son existence, avant qu'elle ne se rappelle à lui avec la force d'un boulet de canon.

– Faites-la venir dans le petit salon.

L'autre referma la porte. Severus quitta son cabinet à son tour et s'installa dans le petit salon qui jouxtait son bureau. C'était là qu'il recevait ses invités. C'était une vaste pièce meublée d'un canapé, de plusieurs fauteuils, tous d'époque et refaits. Les murs avaient été tapissés d'un papier peint clair. Les lourds rideaux attachés étaient dans les mêmes tons, décorés de petites fleurs – choix de la princesse Eileen. Un grand miroir placé au-dessus d'une large cheminée en marbre faisait reflet à un autre accroché en face, donnant l'impression que la pièce était deux fois plus grande. Une petite table était dans un coin. C'était là que Son Altesse, la princesse Eileen rédigeait son courrier.

Ce petit salon était autrefois le bureau de sa mère dont son père se servait comme de pièce de réception. Ainsi Eileen était présente pour les affaires d'État.

Sibylle Trelawney fut introduite dans la pièce où Severus se trouvait. Par habitude, il se leva pour accueillir la visiteuse. C'était une femme qui devait avoir une bonne cinquantaine d'années mais Severus ne pouvait jurer de rien.

Elle était étrange. De longs cheveux très clairs, presque blancs, des yeux rouges et une peau laiteuse.

Une albinos.

– Votre Altesse, fit-elle en s'inclinant gauchement.

– Mrs. Installez-vous, je vous en prie, déclara Severus en prenant place dans un des confortables fauteuils.

– Je préfère rester debout. Je ne serai pas longue, Votre Altesse.

– Que me vaut la raison de votre présence ?

Pour toute réponse, Trelawney sortit de son sac gigantesque un journal dont la Une titrait « Mariage princier : la comtesse Pansy Parkinson va devenir princesse ». Severus ne voyait pas ce que l'annonce de son mariage avait à voir avec la présence de la quinquagénaire au palais et plus exactement dans le petit salon.

– Oui ?

– J'ai prévenu votre père il y a une vingtaine d'année. Vous n'étiez qu'un enfant. Et il a refusé de m'écouter, estimant que je ne faisais que délirer !

Severus vit du coin de l'œil ses gardes du corps s'approcher d'eux afin de faire sortir cette folle. Dans d'autres circonstances, il les aurait laissés faire, malgré tout, il était intrigué. D'un signe de main, il stoppa leur avancée.

– Mon père ? Que lui avez-vous dit ?

– Il ne vous a donc rien avoué ? Pourquoi suis-je surprise ? S'il ne m'a pas crue, il n'a pas dû vous faire part de ce que je lui ai appris.

Elle se pencha vers lui, plongeant ses pupilles rubis dans les onyx du prince. La couleur étrange et dérangeante fit légèrement frissonner Severus qui serra les accoudoirs de son fauteuil.

– Épousez donc cette femme et votre pays courra à la ruine et à la désolation. Épousez cette femme et tout ce que votre famille aura construit sera vain ! Dans un an, Poudlard n'existera plus.

– Plaît-il ?

– Votre pays sombrera dans le chaos !

– Le chaos ? Nous avons traversé des guerres, des invasions...

– Ce n'est en rien comparable, pauvre fou ! Vous ignorez les puissances qui sont en jeu !

– Les puissances ?

Tobias avait peut-être eu raison de ne pas écouter les élucubrations de cette femme. Elle était complètement folle.

– Vous ne connaissez donc rien sur l'histoire de Poudlard ?

– Je pense l'être, au contraire.

– Non, vous ne savez rien. Vous n'êtes qu'un ignorant ! Poudlard n'a pas été bâti par vos ancêtres. C'était un lieu saint avant de devenir ce qu'il est. Un endroit où des forces...

– Il suffit ! tonna Rogue. Je ne sais dans quel monde vous vivez mais ici nous sommes dans la réalité. Et dans cette réalité, il n'y a rien qui peut m'empêcher d'épouser la comtesse ! Ramenez-la dehors ! ordonna-t-il à ses gardes du corps.

Ces derniers allèrent appréhender Trelawney mais celle-ci leva la main et ils semblèrent se figer.

– Je ne le dirai qu'une fois, Severus Rogue, fit la femme – et sa voix sembla s'intensifier, de même que son aura. Pansy Parkinson n'est pas pour vous. Ce n'est pas votre destin !

Elle redevint normale mais personne ne bougea dans la pièce. Severus était cloué dans son fauteuil, incapable de remuer ne serait-ce qu'un orteil.

– Votre avenir est tracé dans les astres depuis des millénaires, Severus Rogue. Ne faites pas comme votre père, ne décidez pas de tourner le dos à votre destin !

– Je ne crois pas en...

– Peu m'importe ce que vous croyez ou non ! Je ne suis là que pour vous transmettre ce que je sais ! Libre à vous de faire ce que vous pensez nécessaire. Mais je dis toujours la vérité. Il y a une seule personne qui vous est destinée et ce n'est pas Pansy Parkison. Continuez à vous voiler la face comme le faisait votre père et dans douze mois, votre pays n'existera plus. Vous ne serez plus rien, à part un cadavre pourrissant. Continuez sur cette voie et à la prochaine pleine lune, vous verrez que Poudlard commencera à disparaître !

Deux jours plus tard, Severus déglutit nerveusement en se rendant compte que toutes les plantations du parc avaient disparu, remplacées par de la terre en friche. Il en était de même pour la ville dont les décorations n'étaient plus.

Cela correspondait à la pleine lune. Et le pire était que rien ne pouvait pousser.

Un mois plus tard, les routes d'accès à Poudlard avaient été coupées. Selon les spécialistes, un tremblement de terre aurait été à l'origine de cela. Toutefois, rien n'avait été ressenti et à moins de deux cents mètres de là, il n'y avait eu aucun dégât. Pour aller et venir, il fallait donc passer par des sentiers détournés.

Encore trente jours après, le palais avait commencé à montrer des signes d'effritement. Des lézardes étaient apparues là en une nuit.

– Allez chercher Trelawney ! ordonna Severus à un des gardes du corps lorsqu'il se rendit compte de ces changements qui n'étaient pas pour lui plaire.

Il se mordit cruellement la lèvre sous le regard inquiet de sa fiancée.

– Severus, mon chéri, tu devrais t'asseoir.

– Non ! Pas tant que cette femme ne sera pas devant moi ! Comment savait-elle tout cela ? Comment a-t-elle pu...

Les mots lui manquaient tant la rage qui l'habitait était intense. Pansy replongea dans la lecture de son livre, patientant comme son compagnon dans le petit salon. Elle était au courant de l'affaire et ne comprenait pas davantage ce qu'il pouvait bien se passer.

Elle était également très inquiète des conséquences. Le fait de ne pas être celle qui était destiné à Severus n'était pas pour la rassurer, loin de là. S'il la reniait, elle n'accepterait pas sans rien faire ! Ses parents non plus.

Être princesse ne l'intéressait pas. Ce n'était pas pour cela qu'elle s'était mise en couple avec son amant, c'était parce qu'elle l'aimait. Le reste, le titre, la couronne, n'était qu'un plus qui entraînerait bon nombre de changements dans la vie de Pansy. Bons ou mauvais, ce serait l'avenir qui le lui dirait.

– Je suis d'avis qu'elle s'expliquera.

Il n'y avait plus qu'à espérer.

Une bonne heure plus tard, Sibylle Trelawney passait la porte du petit salon. À leur dernière entrevue, elle portait une robe longue sur des collants épais, des bottines et un affreux cardigan grossièrement tricoté. C'était à se demander si elle ne s'était pas habillée dans une friperie. Aujourd'hui, elle avait sur le dos un pantalon en jean bien trop grand pour elle, le même gilet sur un chemisier à fleurs. Ses cheveux très clairs pendouillaient dans son dos. Une masse capillaire très emmêlée.

– Votre Altesse Sérénissime, fit-elle en esquissant un semblant de révérence. Madame la Comtesse.

– Mrs, répondit poliment Pansy.

– Mrs Trelawney, commença froidement Rogue...

– Si je suis ici, j'en déduis que j'ai fait mouche. Je suis étonnée d'être là si tôt. Je pensais que vous mettriez davantage de temps à me faire revenir.

– Je veux tout ce que vous savez, exigea Severus.

– Mais avec plaisir Votre Altesse, répliqua Trelawney avec un petit sourire. Poudlard a été bâti il y a près de mille ans par quatre êtres qui allient l'eau, la terre, le feu et l'air. Les quatre éléments. Vous avez entendu parler de Rowena Serdaigle, Godric Gryffondor, Salazar Serpentard et Helga Poufsouffle ?

Severus hocha la tête. Il avait eu connaissance de ces noms. Ce n'étaient que des êtres de légende. Ils auraient vécu à l'époque de Merlin lui-même.

– À cette époque, Poudlard n'était qu'un château. Il en reste les ruines sur la butte au nord. Ces quatre personnes n'étaient pas magiciennes ni même sorcières. Ils avaient la maîtrise des éléments. Ils ont tenté d'enseigner cet art à des enfants, sans le moindre succès. À la fin de leur vie, ils ont voulu laisser une trace de leur existence et ont créé un être qui serait comme eux, un élémentaire puisque c'est ainsi que ces personnes sont nommées.

Le prince sentait que cette histoire devenait n'importe quoi et qu'il ferait mieux de mettre fin à cette mascarade. Il ne se retint que parce que les prévisions de cette femme s'étaient avérées justes et qu'il refusait de voir son pays disparaître.

– Et donc ?

– Il est mort, annonça platement Trelawney. Depuis près de mille ans. Il n'a pas eu l'occasion de vivre bien longtemps.

– Pourquoi donc ? voulut savoir Pansy, curieuse.

– Parce qu'il a été tué. Par des gens qui avaient peur de lui. Il était trop différent d'eux pour être pleinement accepté. Par peur sans doute. Les humains n'aiment pas ce qui est différent. Il suffit de voir à une certaine époque la chasse aux sorcières qui fut pratiquée parce que certaines femmes avaient une sorte de dons.

– Quel est le rapport avec mon pays ? fit Severus.

– J'y viens, Votre Altesse. Après sa mort et celle des élémentaires, le château a été laissé en ruines. Personne n'osait y mettre les pieds, la légende voulant que cet endroit soit maudit. Et puis, comme tout le reste, cela sombra dans l'oubli. Les gens avaient quitté l'endroit. Ne restait plus rien que la nature qui avait repris ses droits. Quatre cents ans plus tard, votre ancêtre Alberic Rogue pénétra sur les terres de Poudlard pour en faire son fief sans se douter qu'une certaine magie était encore à l'œuvre. La magie élémentaire. Aujourd'hui, mille ans après, elle exige d'être renforcée. Si elle ne l'est pas, elle sera l'instigatrice de la destruction de la Principauté.

Un long silence suivit cet aveu. Severus avait l'impression d'écouter un conte pour enfants, une histoire à dormir debout. Pourtant, il ne pouvait nier. Quelque chose semblait détruire peu à peu la ville. Si ce que cette femme disait était vrai, alors ils devaient faire quelque chose.

– Admettons que tout ceci soit vrai, dit-il. Que... Comment peut-on renforcer cette magie ?

Il se fit l'impression d'être stupide de poser une telle question. La magie était inexistante dans la réalité. Il ne pouvait nier que certaines forces étranges pouvaient atteindre des personnes et les doter d'un don, toutefois parler de magie et d'endroit avec des pouvoirs, cela le laissait plus que perplexe. Il n'y croyait pas le moins du monde.

– L'être que les quatre élémentaires ont créé est mort. Pas son âme.

– Allons bon, railla Severus en se levant. Je pense que c'est assez. J'en ai assez entendu. Ces histoires à dormir debout...

– Libre à vous de penser que je mens ou que j'invente, Votre Altesse. Je n'ai rien pour vous prouver mes dires. Rien, hormis ce qui se passe ici. Les plantes ne poussent plus. Le palais s'effrite. Le temps est plus frais. Plus les mois vous rapprochant de la date anniversaire de la mort des fondateurs s'écoulent et plus Poudlard risque de redevenir ce qu'elle était autrefois. Une terre où rien ne pousse. Parce que c'est ce qu'elle était avant que les fondateurs ne décident de s'installer ici.

– Cet être, intervint Pansy, vous dites que les humains en ont peur. Pour quelle raison ?

Elle s'attira le regard noir de son fiancé mais n'en eut cure. Cette histoire l'intriguait. Elle n'était pas femme à croire en la magie. Les choses qui sortaient de l'ordinaire la laissaient dubitative. Pourtant, là, elle ne pouvait prétendre que tout ce qu'il se passait était explicable. D'ailleurs des experts s'y étaient cassé les dents.

Trelawney esquissa un petit sourire et soupira. Leur avouer la vérité tout de suite ne servirait à rien. Elle savait qu'aucun des deux ne la croyait. Il valait donc mieux garder le silence sur ce sujet.

– Pour l'heure, ce n'est qu'un humain qui ignore qui il est, éluda-t-elle.

– Parfait ! De mieux en mieux !

– Severus, le tança Pansy, les sourcils froncés. Est-il vivant ?

Sa compagne semblait contaminée par les élucubrations de cette pauvre femme qui ferait bien d'aller consulter un excellent psychiatre. Et lui n'avait pas son mot à dire. Il devait écouter les délires névrosés de cette folle.

– Bien entendu.

– Son âme ? reprit Pansy. Comment une âme peut-elle être dissociée de son corps ?

– En l'extrayant.

Nouveau silence. Pansy cligna des yeux une fois, puis deux, puis trois avant de se mordiller la lèvre, ne sachant pas comment annoncer cela à leur visiteuse.

– Mrs Trelawney, déclara la jeune comtesse qui préférait la franchise à toute autre forme, ce n'est pas...

– Possible ? Sans le moindre doute. Pour de pauvres petits esprits étriqués tels que les vôtres. Vous pensez tous les deux que je ne suis qu'une pauvre folle. C'est ce que pensait votre père, Votre Altesse, lorsque je lui ai révélé votre destin.

– Mon destin ? reprit le prince, soudain épuisé.

Il ne supportait pas savoir sa vie gravée dans le marbre, inscrite quelque part et qu'il suivait le fil qui traçait son existence sans pouvoir s'en éloigner. Que chaque mot ou geste soit prédéfini.

– Quelqu'un d'autre doit être sur le trône, avec vous. Et cette personne est la seule à pouvoir rendre à Poudlard la magie élémentaire qui l'entoure. Cette personne porte en elle l'âme de l'être des quatre fondateurs.

– Qui ?

– C'est un jeune homme de vingt-et-un ans. Il vit à Londres. Lorsque j'ai eu vent de son existence, il venait à peine de naître. J'ai tenté de prévenir votre père, mais il ne m'a pas écoutée.

– Il ? murmura Severus d'une voix blanche, toute couleur ayant déserté son visage.

C'était la seule chose qu'il avait retenue. Le fait que le remplaçant de Pansy soit un homme ! Il avait cru que ce serait une femme. Il n'avait jamais pensé à un homme ! L'idée même le révulsait.

– Oui, asséna Sibylle, loin de se douter du tourment qu'elle infligeait au prince.

La comtesse serra les poings. Elle espérait que toute cette histoire n'était rien de plus qu'un tissu de mensonges. Comment son fiancé pouvait-il être destiné à un homme ? Elle aurait pu accepter qu'il s'agisse d'une femme. Mais un homme...

– Il s'appelle Harry Potter.


À suivre

Alors? Z'en avez pensé quoi?