Titre : Le principe de l'ataraxie

Auteur : Mokoshna

Manga : Naruto

Crédits : Naruto est la propriété de Masashi Kishimoto. A force de le taper je vais finir par développer un réflexe conditionné devant un clavier.

Avertissements : Yaoi, du NarutoXSasuke, mais pas seulement. Qui peut savoir jusqu'où cette fic va me mener ?

Commentaires artistiquement idiots de l'auteur : Cette fic est un caprice personnel. J'avais envie d'écrire quelque chose de différent de ce que je fais d'habitude et je n'arrivais pas à me replonger dans l'écriture de mes autres fics, alors voilà. Je voulais une fic toute bête sur la recherche du bonheur. Donc exit les couples étranges, les personnages secondaires à la pelle, les situations cocasses et/ou aventureuses à chaque coin de forêt. Je ne sais pas combien de temps ça va durer. Après tout, je suis incapable de laisser mes persos tranquilles.

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Prologue

Ataraxie : Tranquillité, impassibilité d'une âme devenue maîtresse d'elle-même au prix de la sagesse acquise soit par la modération dans la recherche des plaisirs (Épicurisme), soit par l'appréciation exacte de la valeur des choses (Stoïcisme), soit par la suspension du jugement (Pyrrhonisme et Scepticisme).

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Sasuke rangea précautionneusement le rapport de mission qu'un jonin lui avait remis cinq minutes plus tôt, le classant parmi les missions finies de classe A. Un de ses collègues attendait déjà que le jeune homme veuille bien s'occuper de lui, un rouleau à la main et le regard morne des jours de deuil. Sa veste était maculée de sang et il avait une immense éraflure sur la joue qui laisserait sans doute une cicatrice, mais la tenue du rapport primait sur ce détail...

- Tout s'est bien passé ? demanda Sasuke d'une voix monocorde, sachant pertinemment que ce n'était pas le cas.

- Non. Je suis le seul survivant de mon groupe. Mais au moins les plans sont saufs.

- Bon travail, répliqua-t-il sans émotion. Désolé pour vos camarades.

- Ce sont les risques du métier.

Il s'inclina bien bas, ses longs cheveux noirs sales battant le bout de la table. Sasuke lui donna un avis de fin de mission accompagné d'une permission de trois jours, le temps qu'il récupère et brûle ses morts (s'il restait une dépouille, autrement leurs noms prendraient place sur la plaque commémorative du village).

- Au suivant.

Le même schéma, à quelques détails près, se répéta jusqu'à l'heure de la fermeture. Le village était dans une passe sensible ; plusieurs conflits nouveaux provoqués par l'arrivée sur l'échiquier politique mondial d'Orochimaru et de ses forces agitaient l'équilibre déjà instable des relations entre les différents pays du continent. Le travail ne manquait pas, même pour ceux qui ne partaient pas au front.

De ce fait, Sasuke fut le dernier à s'en aller parmi les fonctionnaires assignés au traitement des missions. Il remit les éléments de son bureau en place, vérifia la bonne tenue des dossiers et des locaux, puis il ferma ceux-ci à double tour et confia les clés et la garde aux bons soins du gardien de nuit qui attendait son départ pour prendre son service. Il avait encore une inspection à faire dans la salle des archives, tâche qu'il réitérait chaque semaine pour vérifier que rien n'avait été dérobé ou même consulté à son insu. Quand cela fut fait, il put enfin songer à rentrer chez lui.

Il était presque minuit lorsque Naruto entendit une clé tinter dans la serrure. Il avait attendu le retour de son ami en regardant la télévision, nonchalamment étendu sur le sofa du salon. La petite télévision que Sasuke avait ramenée de son ancien appartement émettait une lueur blafarde en éclairant approximativement la pièce. Naruto n'avait pas jugé bon de laisser la lumière principale allumée.

- Tu vas t'abîmer les yeux comme ça, lui fit remarquer le jeune homme brun en entrant.

- Bah, je boufferai plus de carottes demain. Il y a un plateau-repas sur la table si tu veux, je l'ai acheté tout à l'heure au supermarché.

- Merci. C'est quoi ?

- Du curry. J'avais envie de changer. T'as qu'à le réchauffer au micro-ondes.

Sur ces mots, il éteignit le poste d'un geste lent et se dirigea vers leur chambre en baillant. Sasuke prit le chemin de la cuisine, où il trouva effectivement le plat couvert que lui avait décrit son compagnon. Le réchauffer ne prit qu'une minute ; il le mangea sans un mot, lentement, les yeux rivés sur les missions qu'il avait reçues ce jour-là et qu'il devrait redistribuer le lendemain selon les hommes disponibles et leurs capacités.

Lorsqu'il eut fini, il était déjà plus d'une heure du matin. Il se dépêcha de ranger ses affaires soigneusement pour le lendemain : dossiers et vêtements furent mis à leur place habituelle et il laissa même une petite note pour lui rappeler d'acheter du dentifrice en revenant du travail (il avait remarqué en se brossant les dents que leur dernier tube était sur le point de rendre l'âme). Puis il se coucha, tranquillement, auprès d'un Naruto qui ronflait déjà depuis un moment. Il avait mis un bas de pyjama bleu de la même coupe que celui de son ami (sauf que Naruto avait insisté pour en prendre un orange). Sasuke lui tournait le dos. Naruto se blottit contre lui et cala son bras sous son corps en grommelant, lança l'autre bras par-dessus son épaule libre et bloqua complètement les mouvements de son compagnon, tout ça sans se réveiller.

Sasuke plongea rapidement dans un sommeil sans rêve.

Le réveil fut semblable à tous ceux qu'il avait eu chaque matin depuis des mois. Une sonnerie faible lui indiqua qu'il était l'heure ; il ouvrit les yeux en remarquant qu'une fois encore, Naruto était parti avant lui en laissant sa place froide. Sasuke fit le lit en silence et avala rapidement le petit déjeuner frugal à base de céréales qu'il se prépara (il ne se sentait pas d'humeur à se faire un vrai repas et de toute manière il n'en avait pas le temps).

Il arriva au moment où Genma ouvrait la porte de la salle principale. Son collègue le salua d'un hochement de tête amical, auquel il répondit plus par réflexe que par réelle estime de l'autre homme. Il s'installa sans un mot à sa place et attendit l'arrivée des premiers rapports.

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Il ne savait plus depuis combien de temps il acceptait les dossiers et les rangeait avec soin, ni combien de personnes il avait déjà vu passer. Lorsque Sasuke leva les yeux, ce fut à cause d'une main fine mais ferme, zébrée de cicatrices, qui se planta devant son nez alors qu'il était en train de corriger les fautes du rapport d'un jeune gennin maladroit. Il la reconnut immédiatement.

- Sakura, murmura-t-il en souriant faiblement.

- Il est midi, fit la voix neutre de son amie. On va manger ?

- J'arrive.

Elle hocha la tête et le laissa mettre de l'ordre à sa place. Plusieurs autres fonctionnaires avaient déjà quitté leur poste pour déjeuner. Ils partirent sans s'adresser un regard, se dirigeant par habitude vers la cafétéria du bâtiment. Sasuke remarqua néanmoins que la jeune femme semblait avoir... changé. Il n'en était pas sûr, mais le flux de chakra, qu'il percevait à présent instinctivement chez ses camarades ninja, semblait différent chez elle ; comme s'il avait été sublimé tout en étant assez instable...

- Je suis enceinte, fit-elle sans détour en voyant les deux virgules de son sharingan s'agiter dans ses yeux. Je viens de l'apprendre ce matin.

S'il fut étonné, il n'en laissa rien paraître et se contenta de détourner le regard. Ils arrivèrent bientôt devant la cafétéria. Fort heureusement, la file n'était pas très conséquente ; ils prirent rapidement des sandwiches et une boisson et s'installèrent sur une table un peu à l'écart. Sasuke mâcha son pain garni sans enthousiasme ; il lui semblait que son sandwich avait un goût de caoutchouc.

- De qui ? finit-il par demander. Je croyais que tu avais pris tes précautions.

- Il y a quand même des accidents. D'après ce que m'a dit le médico-nin qui m'a examiné sur l'âge du foetus, ça doit être celui de ce type que Tsunade m'a envoyé tuer il y a deux mois.

- Tu ne t'en es pas rendu compte avant ?

- Mon corps a souvent des perturbations de ce genre, alors je ne fais plus trop attention. Ils avaient bien vérifié à mon retour de mission, mais apparemment la fille qui m'a examinée était nouvelle et elle a fait une erreur.

- C'est... regrettable.

- Oui.

Le morceau qu'il avala à cet instant eut énormément de mal à passer.

- Je crois que je vais le garder.

Il leva les yeux vers elle.

- Tu en es sûre ?

- J'en ai déjà discuté avec Tsunade. Je serai relevée de mes fonctions jusqu'à la naissance du bébé, sauf si l'on a besoin d'une femme enceinte d'ici-là. Mon enfant serait pris en charge par le village. Il vivra bien ; Tsunade m'a dit que je recevrai une prime spéciale.

- Tu... vas t'en occuper ?

- Je ne sais pas. Peut-être.

- Tu ne veux pas ?

- Je ne sais pas.

Elle secoua la tête avec force ; le sourire un peu fou qu'elle avait glaça le coeur de Sasuke.

- Je ne voulais pas l'avoir, ce gamin, mais je ne peux pas non plus permettre qu'il meure juste parce qu'il n'a pas été conçu par amour...

- Je sais.

- Et si je l'élève seule, qu'est-ce que je lui dirais si un jour il me demande où est son père ? Que je l'ai tué après avoir couché avec lui parce que c'était plus facile de lui faire baisser sa garde comme ça ? Il va me haïr, j'en suis sûre.

- Pas forcément...

- Si, je le sais. Je n'ai pas envie de l'avoir...

- Alors pourquoi ?

- Je te l'ai déjà dit !

Elle se retenait de ne pas pleurer, mais malgré sa réserve certains avaient remarqué son état agité, bien qu'ils ne fassent rien pour le montrer. La sempiternelle politesse hypocrite des habitants reprenait le dessus quoi qu'il arrive, se dit Sasuke d'un air amer. Lorsque le bruit de la grossesse de Sakura atteindra les oreilles des marchands de ragots du village, nul doute que certains se demanderont non sans malice s'il n'est pas l'auteur de l'heureux événement. Après tout, Sasuke Uchiha et Sakura Haruno étaient extrêmement proches, malgré le fait que Sasuke sorte avec Naruto. Il connaissait les choses qui se disaient déjà dans son dos. Sasuke Uchiha, le dernier membre de la famille Uchiha. L'ancien déserteur que Naruto Uzumaki avait ramené de force à l'âge de treize ans. L'actuel petit ami de celui-ci, mais il s'entendait également bien avec Sakura, le troisième membre de leur équipe lorsqu'ils étaient encore gennin. Tout le monde savait que la jeune fille était encore amoureuse de lui mais avait abandonné après que Naruto ait déclaré au reste du village que Sasuke était à lui et à lui seul. Personne ne s'était plaint ; après tout, Naruto avait bien veillé à l'annoncer après avoir tué l'un de leurs criminels les plus recherchés, le fameux Itachi Uchiha de l'organisation Akatsuki...

- Je t'envie, fit brusquement la voix cassée de Sakura alors qu'il se remémorait ces souvenirs pénibles. Toi au moins, tu as Naruto pour te protéger. Moi, je n'ai personne.

- Il y a bien Rock Lee... fit-il du tac au tac.

- Tu crois qu'il voudra encore d'une fille-mère qui a tué le père de son bébé ? J'en doute...

- Tu n'auras qu'à dire qu'il est le sien...

- Je ne peux pas faire ça à Lee !

- Ce serait une bonne solution.

Sakura serra les poings.

- C'est exactement ce que m'a dit Tsunade. Je pensais... que je pouvais te faire confiance.

- Je suis désolé. Que voulais-tu que je fasse ?

- Je ne sais pas...

Une larme brillante glissa de son oeil droit et alla rouler jusqu'à son menton, doucement.

- Je ne peux pas dire qu'il s'agit du mien, finit par admettre Sasuke.

Il aurait voulu éviter la voie directe mais au vu de la réaction de la jeune fille, il n'en était plus question.

- Et pourquoi pas ? Nous sommes si proches !

- Naruto ne me le pardonnera jamais !

- On lui dira la vérité ! Je suis sûre qu'il comprendra.

- Je n'en doute pas. Le connaissant, il se proposera même comme le père.

- Alors pourquoi pas ?

- Sakura, je sors avec Naruto.

- Et tu l'aimes ?

Il marqua un arrêt, ce qu'elle ne manqua pas de relever.

- Tu ne peux même pas me répondre ? Ou alors c'est non ? C'est ça, n'est-ce pas ?

- Je n'ai jamais dit ça.

- Alors dis-moi que tu l'aimes !

Elle avait un peu haussé la voix et plusieurs regards curieux s'étaient fixés sur eux. Sasuke se racla la gorge et les bruits de mastication suspendus reprirent comme par enchantement.

- On en a déjà discuté, je crois, fit-il d'une voix énervée.

- Je m'en souviens parfaitement. Je me souviens que tu ne m'as jamais vraiment donné de réponse.

Il attrapa précipitamment son plateau et commença à partir.

- La pause est presque terminée. Je dois retourner travailler, dit-il d'un ton sec, et sa voix claqua au-dessus de la tête de Sakura comme une voile de navire en pleine tempête, la faisant trembler légèrement.

- Sasuke, je suis désolée... murmura-t-elle d'un air désespéré. Ne pars pas...

- Moi aussi, je suis désolé, Sakura, mais je ne peux rien pour toi. Je souhaite que tu résolves ton problème de la meilleure manière possible, mais je crains que ça ne puisse pas passer par moi. Bonne chance et au revoir.

Il partit sans un regard en arrière. Le petit cri que poussa Sakura se perdit dans le brouhaha des conversations qui montèrent à ce moment-là.

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- Tu rentres tôt, dit Naruto alors qu'il passait le seuil de la porte.

Son ami était planté devant le tapis de l'entrée, un air nonchalant sur le visage. Il portait encore ses habits de travail. Sa voix était posée mais Sasuke le connaissait suffisamment pour savoir qu'il n'était pas dans son état normal. Là, ses doigts qui trituraient distraitement sa veste, ils étaient la marque de sa nervosité. Il se mordait très légèrement la lèvre inférieure à intervalles réguliers : il brûlait d'envie de lui poser une question importante. Ce n'était pas très dur de deviner laquelle.

- Et toi, tu es revenu tôt, fit-il en se dirigeant vers la cuisine.

Il attrapa une canette de thé glacé dans le réfrigérateur et la but lentement, devant les yeux frustrés de Naruto. Il avait enlevé sa veste et son haut en passant à cause de la chaleur ; son ami fut un instant distrait par les gouttes de sueur qui perlaient de son torse, glissant délicieusement vers l'extrémité supérieure de son pantalon, très bas sur ses hanches...

- Oh, il n'y avait pas tant de travail que ça... fit-il distraitement en se léchant les lèvres.

Menteur, pensa immédiatement Sasuke. Tout le monde est débordé dans le village, même les étudiants les plus mal notés, alors un héros de Konoha...

- Ah bon.

- Et toi ? reprit nerveusement Naruto. Comment s'est passée ta journée ?

- Bien. Comme d'habitude.

- Ah. Et... il ne s'est rien passé alors ?

Sasuke finit sa boisson et jeta la canette vide dans la poubelle. Il n'avait pas mis de sac plastique ; le morceau d'aluminium tinta en tombant au fond.

- Rien de spécial, non.

- Tu n'as vu personne ? A part tes collègues, bien sûr.

- La moitié du village, peut-être. Ça fait partie de mon travail, tu te souviens ?

- Oui, bien sûr...

Il semblait gêné. Sasuke eut un peu pitié de lui.

- J'ai vu Shikamaru aujourd'hui.

- Ah bon ?

- Oui, il m'a dit qu'une cousine d'Ino t'avait vu à la cafétéria de l'académie avec Sakura aujourd'hui...

- Oui, on va quelquefois manger là tous les deux si on a le temps.

- Oui, je sais, mais...

- Mais ?

- Il a dit aussi que vous... enfin, que vous aviez l'air euh...

- Agités ?

- Quelque chose comme ça.

- Hmm.

- Sasuke !

- Naruto.

- Tu sais que je t'aime, n'est-ce pas ?

- Je crois avoir deviné.

Naruto détourna les yeux.

- Tout va bien, alors ?

- C'est une question ?

- Oui. Non. Je...

Son ami se précipita sur lui et agrippa son bras en le serrant fort. L'air grave, il plongea ses yeux dans ceux de Sasuke, semblant chercher quelque chose, un trouble peut-être, ou bien une confirmation, il n'était pas sûr ... Il ne vit que son reflet sur la surface glacée du regard de son amant. Sasuke baissa les yeux vers son bras.

- Tu me fais mal, chuchota-t-il d'une voix morne.

- Désolé.

Il le lâcha sans conviction, mettant une distance entre eux. Sasuke observa pensivement le tremblement de ses mains, ses yeux affolés qui passaient d'un objet à un autre sans croiser la vision de son amant, son souffle haletant qui promettait un sanglot, lui qui était si chaud lorsqu'il se posait sur sa nuque et sur les autres parties de son corps...

- Tu ne me l'as jamais dit, poursuivit soudainement Naruto.

- Tu ne me l'as jamais demandé.

- Et si je te le demande ?

Son regard avait pris une teinte déterminée et misérable. Sasuke émit un petit rire méprisant.

- Et que veux-tu que je te réponde ?

- La vérité.

Sasuke secoua la tête.

- Je suis fatigué. Je vais aller me coucher.

- Sans prendre de bain ?

- Non. Libre à toi de me rejoindre ou pas.

- Mais...

- Bonne nuit, Naruto.

Il s'éloigna en silence. Naruto se demanda longtemps à quel instant il avait perdu le contrôle de la conversation... ou s'il l'avait jamais eu.

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Sasuke se réveilla au milieu de la nuit. Il était seul ; Naruto n'avait même pas pensé à se coucher. Il devait errer à présent dans les rues du village, en bonne compagnie peut-être...

A qui voulait-il faire croire ça ? Ce n'était pas le genre de Naruto d'être aussi inconstant. Il était sans doute chez Iruka ou un autre de ses amis, en train de se morfondre... En train de se demander ce qu'il avait fait de mal pour que Sasuke s'éloigne de lui... Ou il prévoyait de se faire pardonner le lendemain ? Ça aussi, ça lui ressemblait bien. Il était peut-être chez Ino, à commander le plus gros bouquet de fleurs de tout le pays du Feu, avec un mot d'excuse et une invitation au restaurant... Ou alors il avait contacté Tsunade pour lui demander quelques jours de congés pour eux deux, le temps qu'ils aillent se détendre dans des sources thermales ou un quelconque voyage qui les réconcilierait rapidement...

Le lendemain, Naruto irait lui-même voir Sakura pour lui demander des explications. Elle les lui donnerait ; avec les années, elle avait perdu toute volonté face à son ancien rival en amour et dans sa grande générosité, il se proposerait en tant que père de l'enfant, elle accepterait, et ce bébé serait une sorte de gamin de substitution pour eux deux. Naruto s'en occuperait merveilleusement bien ; en fait, Sasuke était persuadé qu'il ferait un très bon père, lui qui n'avait jamais eu de famille véritable auparavant... Et avec la promotion certaine de Naruto en tant que Rokudaime, l'avenir de l'enfant était assuré. Tous les rêves que Naruto avait jamais eu étaient bien en passe de se réaliser.

Sasuke étouffait, dans cette pièce. Il lui fallait de l'air.

Il avait gardé son pantalon de la veille, avec lequel il avait encore dormi d'un sommeil sans rêve. Il sortit doucement de l'appartement, sans chaussures, sans haut, le regard vide et orienté vers le ciel. Il fallait qu'il voie le ciel. Il était sûr qu'il irait mieux ; le ciel, là où était le vent, libre... Ce vent qu'il n'entendait plus souffler depuis des mois.

Sasuke monta un à un les marches qui le menaient au toit. Personne ne le croisa ; ses voisins étaient déjà partis travailler ou se trouvaient à l'école pour les plus jeunes... Une par une, les marches diminuèrent et il se retrouva devant la porte accédant au toit de l'immeuble, plusieurs étages plus haut. Elle était fermée, mais forcer la serrure ne fut pas un problème.

On avait installé sur la surface plane des barres reliées par un fil en nylon servant à étendre le linge mouillé pour les ménagères ayant des draps conséquents à faire sécher. Sasuke entraperçut entre deux morceaux de tissu d'un blanc immaculé, une tache de bleu qui n'était pas sans lui rappeler les yeux de Naruto...

Le ciment frais apaisa ses pieds brûlants recouverts de poussière. La brise qui lui siffla aux oreilles fut une bénédiction ; les draps claquaient, mais le ciel était là, tout autour de lui, bleu, immense, infini... Il en eut la chair de poule, mais c'était peut-être dû au vent ? Il se rapprocha du ciel. Celui-ci était barré par un grillage grossier qui ressemblait au treillis qui recouvrait quelquefois la peau de Naruto. Sasuke détestait ce treillis. Il avait beau être un élément courant des vêtements ninja, il n'arrivait pas à s'y faire. Il avait toujours l'impression qu'il ne servait qu'à emprisonner la peau et le corps. C'est pourquoi il se dépêchait de l'arracher du corps de Naruto à chaque fois qu'il rentrait habillé de la sorte. Son ami ne s'en était jamais plaint, au contraire ; on aurait dit qu'il s'amusait à en porter le plus possible...

Le grillage disparut aussi vite que les treillis de ses souvenirs. Il était là, ce bleu infini, ses yeux qui le regardaient toujours avec angoisse et pitié, comme s'il avait peur que son ami disparaisse à chaque instant, comme s'il avait décidé de prendre sur lui tous les péchés que Sasuke avait commis jusque-là, tout ce qu'il avait encore à expier vis-à-vis du village...

Le vent qui lui battait les flancs était vraiment agréable. Sasuke fit un pas, puis encore un autre, et un autre... Naruto était devant lui et l'attendait. Il tendit le bras.

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Mme Sakamoto était une dame respectable d'un âge certain qui vivait seule avec quelques chats et le petit-fils de dix ans dont elle avait eu la charge après que les parents de celui-ci furent tués à la guerre. Le petit Shinosuke était à l'académie à cette heure ; il avait décidé très tôt qu'il suivrait les traces de ses parents et deviendrait ninja, au grand désespoir de sa grand-mère, mais elle n'avait pas son mot à dire. Elle avait décidé depuis des années qu'elle ne discuterait pas les choix de ses enfants, jamais, même si pour ça elle devait les perdre un à un.

Elle s'occupait habituellement du ménage le matin, faisait une pause pour déjeuner, sortait l'après-midi faire des courses pour préparer le dîner que Shinosuke et elle partageraient le soir même. Sa vie était réglée comme du papier à musique, et elle en était satisfaite. Elle avait toujours vécu comme cela, et mourrait certainement de cette manière, en accomplissant ses dernières tâches ménagères, le sourire aux lèvres. Elle savait pertinemment que sa vie n'était guère passionnante en comparaison de celles de tous les shinobi qui vivaient au village ; mais elle avait appris depuis longtemps à ne plus s'en faire. Depuis son enfance à vrai dire, lorsque son professeur d'académie lui avait dit qu'elle ne serait jamais un bon ninja, qu'elle n'avait pas les capacités pour cela. Elle s'était résignée à une vie sans éclat de mère de famille ordinaire. Elle ne s'en plaignait pas. Des gens comme elle, il y en avait des centaines et elle se disait avec philosophie qu'il en fallait aussi. Autrement, à quoi verrait-on que les gens exceptionnels l'étaient ?

Comme ces gentils garçons qui vivaient au deuxième étage. Elle avait encore un peu honte à cause de Naruto, le garçon blond, qu'elle avait considéré comme un paria au même titre que ses autres compatriotes. Tout ça parce qu'on lui avait mis dans le corps un démon, à un âge où il n'était même pas capable de reconnaître son environnement. Comme les autres, elle avait eu peur que le démon se réveille un jour et se mette à dévaster le village encore une fois. Elle avait perdu son mari dans cette affaire ; donc quelque part, c'était la faute de ce gamin blond espiègle, n'est-ce pas ? Elle l'avait cru si longtemps qu'il lui fallut encore quelques années avant qu'elle ne se rende compte à quel point elle avait été injuste et cruelle. Mais le gamin semblait lui avoir pardonné ; de temps en temps, il l'aidait même à porter ses courses jusqu'à chez elle, quand ils se croisaient dans les couloirs de l'immeuble...

A cause de cela, elle avait décidé de ne plus juger ses pairs. Plus jamais. Ainsi, elle essaierait de comprendre et de voir le bon côté de chaque enfant de Konoha.

C'est pourquoi, lorsque ce Sasuke Uchiha était venu s'installer chez Naruto, elle n'avait pas poussé les hurlements d'horreur que certaines jeunes mères de famille avaient émis en se rendant compte qu'un ancien traître déserteur avait emménagé avec leur héros national, la fierté de leur immeuble. Elle était venu apporter des nouilles pour lui souhaiter la bienvenue. Naruto avait accepté ce cadeau avec enthousiasme. Elle l'avait observé longuement, ce Sasuke ; elle avait vu que Naruto semblait particulièrement heureux en sa présence, là où il avait été juste poli devant les autres...

Elle les quitta en leur promettant de leur apporter des douceurs à chaque fois qu'il en resterait de ses séances de pâtisserie.

Il était encore le matin, elle n'allait pas tarder à se faire un repas frugal avant de partir faire ses courses. Elle avait déjà nourri ses chats ; il ne lui restait plus qu'à étendre les sous-vêtements de Shinosuke qu'elle venait de laver au balcon, et elle aurait fini. La journée s'annonçait magnifique ; l'été était déjà avancé, mais un vent frais soufflait un peu partout depuis le matin en apportant du réconfort aux gens. C'était une journée idéale pour la lessive.

Quelque chose de lourd siffla près d'elle, alors qu'elle tournait le dos au ciel. Puis un bruit sourd et horrible, comme un craquement en contrebas, attira son attention.

Elle baissa les yeux vers le sol, situé cinq étages plus bas. Elle ne distinguait pas très bien la cause du bruit à cause de son âge et des branches hautes du cerisier qui avait été planté devant l'immeuble, mais il lui semblait que quelque chose était tombé d'un étage supérieur...

C'est alors qu'elle entendit un cri strident, poussé par la petite Kaori du premier étage. Elle n'avait que vingt ans et venait de s'installer avec son mari. Elle n'était pas sûre, mais il lui semblait qu'elle hurlait autre chose... Le nom de Uchiha ? Et pourquoi mentionnait-elle du sang ?

Curieuse, elle mit ses chaussures et sortit.

A suivre...

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Voilà, c'était le prologue. Personnellement, je trouve qu'il ne se passe rien, et c'est voulu. C'est pas un super argument de vente (enfin pour que les lecteurs continuent à lire), mais c'est comme ça.

Je continue mes autres fics, pas de problème, mais je voulais écrire celle-là. Voilà, une autre de plus sur la liste, pour changer.