Salut tout le monde!

Après un (long) moment sans écrire, j'ai eu cette idée de johnlock...

Cette fic se situe juste après la saison 2, et j'ai fait abstraction des suivantes (on évite ainsi Mary, qui est quand même un gros barrage à l'union de ce duo ^^).

Bien évidemment, les personnages ne m'appartiennent pas (hélas), je n'ai fait que les utiliser pour cette histoire qui, j'espère, vous plaira.

Ceci n'est que le premier chapitre, j'en posterai un par semaine.

Bonne lecture!

-Alaskea-


Une tasse de café dont la tiédeur se répand dans sa main.

Les dernières bribes de son sommeil s'accrochant encore à son esprit embrumé.

Il essaie de se rappeler de son rêve. Sourcils froncés. N'y arrive pas. Pose sa tasse. Comme toujours, le café sera froid, et comme toujours, John le boira sans se plaindre, sans grimacer, sans sucre. Il déplie le journal de ce matin, que Mrs Hudson a déposé sur le pas de la porte. Il fait mine de reprendre sa tasse, mais suspend son geste. Il me fixe:

"Sherlock? Que se passe-t-il?"

J'aimerais lui dire tant de choses.

Tu as des yeux magnifiques.

Je n'apprécie mon nom que lorsque c'est toi qui le prononce.

Si tu savais comme j'aime les deux petites fossettes au coin de ta bouche.

"Tu as du café sur la moustache. C'est répugnant."

Stupide.

Il s'essuie d'un revers de manche et reporte son attention sur son journal.

Il ne fera plus cas de moi avant d'avoir épluché cet amas d'encre sur du papier narrant des lambeaux de vies aussi insignifiantes que ceux à qui elles appartiennent.

Stupide.

Soudain, il reprend:

"Un homme lambda a été retrouvé découpé en morceaux sur les bords de la Tamise. Son identité reste...

- Inintéressant, je coupe.

- Bien... Voyons... Une femme d'une soixantaine d'années dit recevoir des lettres de son défunt mari. Voici son ré...

- Inintéressant.

- Sherlock! J'essaie de trouver un mystère pour t'occuper. Tu t'ennuies. Inutile de le nier. Et tu sais bien que cela te mets dans des états... exécrables."

Je pousse un soupir de lassitude. John a raison. Il me connait trop - hélas. Je m'ennuie, et mon brillant esprit s'occupe avec tout et n'importe quoi. Des hypothèses, des calculs, des schémas, des visages de succèdent dans ma boîte crânienne en surchauffe, avec un désagréable bourdonnement. Je m'en veux d'afficher cet air supérieur, ce masque, avec quiconque, même en présence de John. Je n'arrive pas à lui laisser ne serait-ce qu'entrevoir ma véritable personnalité. Je lui mens. Constamment. Et lui, qui me suit partout, tel un chien fidèle. Alors que le réel chien, c'est moi.

Moi, qui le rabaisse.

Moi, qui me sers de lui.

Moi, qui suis trop lâche pour lui montrer mes émotions, mes sentiments.

Le bourdonnement omniprésent dans ma tête s'intensifie, jusqu'à devenir un véritable grondement.

Il me faut ma dose de nicotine. Pour, durant quelques minutes, ne se concentrer que sur la fumée descendant le long de ma trachée, emplissant mes poumons. Pour m'occuper l'esprit et pour faire cesser ce bruit de fond l'espace de quelques pauvres instants. Je respire excessivement lentement pour me calmer. John s'en rend compte:

"Sherlock? Tout va bien?"

Il sait parfaitement que non, ça ne va pas, et que c'est sa faute. C'est lui qui jette mes cigarettes à peine achetées. Pour "protéger ma santé".

Stupide.

Il sait parfaitement que j'en ai besoin, que j'en suis dépendant.

Stupide.

"D'accord. Bien. Mr Holmes ne parlera pas tant qu'il n'aura pas entre les lèvres l'une de ses chères cigarettes. Je vois."

Je ferme les yeux et serre les dents:

"John Watson. J'essaie désespérément de garder mon calme. L'envie va passer d'un instant à l'autre. Mais si tu continues tes remarques sarcastiques de très mauvais goût, je craint que je ne vais devoir me calmer d'une autre manière..."

Lentement, mes muscles décrispent, un à un. Ma respiration devient moins saccadée.

Je réouvre mes yeux.

"... En t'apprenant par exemple à raser cette horrible moustache."

Je prends une profonde inspiration, et tente de retrouver mon état normal. Enfin, mon état qui se rapproche le plus de la normalité. J'ai l'impression que le monde entier me répète encore et encore que je suis quelqu'un d'étrange. Je ne vois pas ce qu'ils entendent par là mais passons. Disons simplement mon taux d'originalité est nettement supérieur à la moyenne.

J'ai retrouvé mon calme, et pour le montrer à John, je le regarde, l'oeil pétillant.

Je vois dans ses yeux qu'il comprend que mon besoin en nicotine est passé - du moins, pour le moment. Il fait comme s'il n'avait rien remarqué:

"Laisse ma moustache tranquille, je te prie.

- Je ne laisserai ta moustache tranquille que lorsqu'elle sera rasée."

John lève les yeux au ciel et repend sa lecture.

La journée passe, les tasses de café s'enchaînent, faute d'avoir une meilleure occupation. Nous échangeons parfois quelques paroles creuses, afin de rappeler notre présence à l'autre -à nous-mêmes?- rompant ainsi le silence rassurant. C'est une journée banale, sans élément perturbateur, sans intérêt particulier.

Le soir tombe doucement, comme un rideau qui se baisse, annonçant la fin du spectacle ennuyeux qu'est notre journée, l'obscurité gagnant du terrain et créant mille nuances de couleurs dans le ciel.

Mon téléphone vibre dans ma poche.

Un message.

De Mycroft.

Mon... frère.

C'est pour le moins inhabituel. Nous ne sommes -comment dire- pas en très bons termes lui et moi. Que me veut-il?

"Isole-toi au plus vite et appelle-moi. C'est urgent."

De plus en plus étrange... Mais il avait piqué ma curiosité. Je prétexte un mal de tête dû à la respiration trop appuyée de John -ce qui n'est qu'un demi-mensonge, ce type respire tellement fort que c'en est assommant- pour pouvoir m'éclipser dans ma chambre. Une fois ma porte verrouillée et un disque (de l'opéra me semble-t-il) mit pour étouffer ma conversation avec Mycroft au cas où traîneraient des oreilles indiscrètes, je compose son numéro.

Une sonnerie. Deux sonneries. Il décroche.

"Sherlock.

-Mycroft.

-Ne nous embarrassons pas avec des politesses que nous détestons détestons aussi bien l'un que l'autre. Je n'aime pas tourner autour du pot.

-C'est pourtant ce que tu es en train de faire. Tu m'ennuies déjà.

-Il faut que tu viennes au plus vite à mon bureau, reprit-il, comme s'il ne m'avais pas entendu."

J'éclate de rire. Il va sans dire que c'était l'un de ces rires forcés, dépourvus d'humour, ne servant qu'à faire comprendre à la personne d'en face que ce qu'il dit est tellement grotesque que c'en devient comique.

" ...

-Mycroft, mon cher, très cher frère. Crois-tu vraiment que je vais payer l'un de ces tacots puants et inconfortables, au conducteur affable et malhonnête pour qu'il me conduise à ton superbe bureau afin que tu me serves ton baratin sur tes services sois-disant secrets, dont je me fiche royalement, et tout ceci agrémenté de tes postillons et de ton sourire crispé que tu réserves aux..

-L'un de mes chauffeurs t'attends en bas.

-Mais ce n'est pas la question!

-Sherlock, c'est Moriarty."

Moriarty. Ce nom résonne en moi comme une cruelle promesse de terribles souffrance. Un frisson de terreur mêlé d'excitation parcourt ma colonne vertébrale. Moriarty.

En voyant que je n'allais pas répondre, Mycroft ajoute:

"Inutile de préciser que John n'est pas convié à la fête."

John. Oh mon Dieu, John. Il ne faut pas qu'il soupçonne quoi que ce soit. Pour sa sécurité. Il doit rester en dehors de tout ça. Pour sa survie.

Je murmure un faible "J'arrive" à Mycroft et raccroche. Les émotions et les doutes se bousculent dans ma tête et mes idées s'entrechoquent. Je reste assis, les bras ballant.

La majorité, je dirai même la totalité des gens connaissant mon existence me pensent fort, inébranlable, insensible. C'est faux. Le Sherlock Holmes que tout le monde connais -crois connaître- n'est qu'une légende. Le vrai est minable, pathétique. Personne ne me voit dans mes moments de doutes, d'appréhensions. Tout le monde me voit comme un cerveau résolvant des mystères à la pelle avec insolence et prétention. Certes, c'est ce que je fais, mais il n'y a pas une fois, pas une seconde dans ma vie où je ne me demande pas: "Et si je me trompais?"

Vous me croyez sans peur? C'est faux. J'ai peur pour moi, pour les -rares- personnes que j'aime, pour et à cause de tout. En ce moment même j'ai peur. Je doute. Mais bon Dieu, j'ai hâte, tellement hâte de me confronter de nouveau à mon rival, mon démon. Moriarty.

J'ai hâte, oui, de retrouver cet infâme personnage qui m'avait tant et tant tourmenté. C'est un adversaire redoutable, un adversaire à ma taille. Mon intelligence et mon génie seraient confrontés aux siens, et seraient mis à rude épreuve. J'aime les défis. Et celui que Mycroft m'apporte sur un plateau d'argent est ce que je pouvais espérer de mieux, aussi dangereux soit-il.

Car il ne m'avait pas appelé pour me rappeler les horreurs qu'avais commis Moriarty.

Il m'avait appelé pour me conter celles qu'il venait de commettre.