Le temps a passé, inexorable, mais je n'ai rien oublié. Je ne peux rien oublier. Je ne VEUX rien oublier. Mes souvenirs de toi sont ce que je chéris le plus au monde. Rien d'autre n'est aussi précieux à mes yeux. Si je perds tout mais que je les conserve, alors je me garde un peu aussi. Même cette douleur de t'avoir vu mourir, cette souffrance d'avoir senti la vie te fuir dans mes bras, je la chéris parce qu'elle me parle encore de toi. Je dois être un peu maso, mais je passe mon temps libre à arpenter tous ces endroits où je n'allais qu'avec toi et, sans cesse, les souvenirs affluent. Même ceux que j'avais oubliés parce qu'ils remontaient trop loin dans le passé. Un dicton dit qu'on ne réalise la valeur des choses que lorsqu'on les perd. J'ai tant perdu avec ta disparition, que plus jamais je ne serais le même. Pas un jour ne passe sans que je me traite de tous les noms. Dans ta lettre, je crois que tu as minimisé la façon dont tu as du souffrir et je m'en veux. Oui, je m'en veux tellement de ne pas avoir vu, de ne pas avoir compris à temps. Je regrette tellement ce « nous » qui aurait pu être et que j'ai à jamais perdu l'occasion de voir devenir réel. Je n'ai réalisé ce que je ressentais qu'il y a peu de temps. Trop tard. Bien trop tard pour pouvoir te le dire. Mais peut-être que tu le sais. Non pas peut-être. Je pense que tu sais tout. Parce que je ne peux pas me dire que tu es parti pour de bon. Que c'est fini, qu'il n'y a plus rien. Il y a forcément quelque chose, parce qu'une âme comme la tienne, aussi brillante, aussi belle, douce et légère, ne peut pas disparaitre purement et simplement. C'est impossible, même si je ne crois pas à tout ce charabia sur la réincarnation. Je veux penser que tu es là, quelque part, pas loin de moi. Que tu veille peut-être sur moi à ta façon. Souvent, j'ai l'impression que tu es tout près, que ta voix claire va s'adresser à moi comme avant. J'ai l'impression de sentir ta main sur mon épaule, mais tu n'es pas là et pourtant je sens ta présence. C'est difficilement descriptible, cette impression, mais c'est comme… un nuage. C'est vaporeux, ça semble doux et agréable au toucher et on pourrait s'y laisser couler sans aucun problème. C'est ce que j'aurais du faire si j'avais été plus malin. Me laisser couler dans ces sentiments, cette affection, ce bonheur que tu ne demandais qu'à me donner. Mais j'étais trop aveugle ou plutôt, je me mentais à moi-même. Je refusais de voir la réalité en face. De faire face à ce que j'éprouvais pour toi. Et maintenant que je l'ai compris, je ne peux plus te le dire pour voir son merveilleux sourire éclairer tes traits, pour voir les étincelles qui animaient tes yeux quand tu me regardais, danser dans tes prunelles. J'aimerais tant te voir devant moi encore une dernière fois, pour te serrer contre moi et te dire tout ce que j'ai été assez bête pour taire. J'aimerais que tu sois là, parce que je t'aime, Yuya… Je t'aime, mon ange. A jamais.
