À Poudlard comme ailleurs dans le monde sorcier il arrive que des choses surprenantes aient lieu. Celle qui se produisit en mille neuf cents quatre-vingts sema un certain émoi dans une partie de la population de la vieille école. Cet événement qui ne s'est jamais produit auparavant et ne se reproduira sans doute jamais plus eut lieu lors de la rentrée des premières années.

Ainsi ce jour-là de septembre un fantôme fut introduit en catimini à Poudlard. Des fantômes on peut dire qu'il y en avait plein dans le château et il est courant que certains viennent régulièrement effectuer un pèlerinage dans leur ancienne école. Le souci ici n'est donc pas l'arrivée d'un nouvel arrivant, après tout on a l'habitude des vas et viens des occupants des lieux. Non le souci, c'est que jamais un fantôme n'est entré à Poudlard de cette façon. Jamais de mémoire de sorciers, de fantômes mêmes, on avait assisté à un tel spectacle.
Un fantôme introduit à Poudlard comme une marchandise de contrebande il faut avouer que c'est assez incongru.

Ainsi, une petite fille avait emporté dans sa malle un de ses ancêtres comme d'autres amène un chat ou une chouette.
Mais qu'es-ce qui a bien pu conduire à une telle situation ? Qui est donc ce fantôme qui fait jaser les êtres qui hantent Poudlard. On peut dire qu'il avait fait une entrée fracassante. À peine sortit de sa valise il avait entrepris de raconter sa folle aventure à toute la gente fantômesque. Merlin merci les professeurs et élèves ne sont pas au courant de cette affaire. Il ne manquerait plus que d'autres enfants se mettent à prendre les fantômes pour de vulgaires animaux de compagnie.

Mais pourquoi donc ce fantôme a-t-il décidé d'accompagner sa descendante à Poudlard dans l'optique de passer ses sept ans de scolarité avec elle ? Est-ce que chaque année ça sera le même problème ? C'est que faire passer à un fantôme le portail de l'enceinte du collège, alors que celui-ci se cache dans une valise, ça pose quelques soucis aux anciens habitants des lieux. Les fantômes sont des êtres humains, du moins ce qu'il en reste alors un peu de respect diantre. Pour qui se prend cette enfant ? Un contrebandier ?
Si maintenant tous les fantômes doivent se cacher pour visiter Poudlard ça serait fort sympathique que le directeur en avise toute la population afin que chacun puisse prendre ses dispositions. Cacher des fantômes dans des valises d'un point de vue logistique ça devient compliquer et ça risque de provoquer une sacrée esclandre.

Cela fait quelques mois que Jean Sioc'han sieur de Keradennec est rentré à Poudlard caché dans une valise. L'émoi qu'avait provoqué son entrée fracassante a fini par disparaître une fois les présentations en bonne et due forme faite. Et on peut dire que le personnage est à la hauteur de son arrivée saisissante.
Les fantômes une fois sûrs que l'histoire n'a pas été éventée ont vite intégré ce nouveau personnage haut en couleur qui apporte un vent de fraîcheur sur le château hanté. Avec ses histoires pleines d'aventures le gentilhomme était vite devenu un compagnon de choix. Surtout qu'il a le bon ton de partager avec plaisir toutes ses mésaventures romanesques que certains soupçonnent cependant d'enjoliver.

Fils de Liam Sioc'han un sorcier Irlandais expatrié en Bretagne et d'Anne Kervillard puiné d'une famille sorcière de la côte bretonne, il a fait sa scolarité à Poudlard comme son père avant lui. Poudlard son ancienne école s'est émue qu'il en foule le sol après toutes ses années. Il se souvient encore de ses anciens camarades, de ces souterrains qu'il a longtemps arpentés et de cette soif d'aventure qui le poussait à regarder au-loin par-dessus les créneaux de l'enceinte en espérant y voir la mer.
De son pays Leonard natal il a gardé un patois qui ressort à chaque contrariété et un chauvinisme à toute épreuve. Ce même chauvinisme qui le faisait détester ces anglais par dessus tout. A Poudlard il n'était pas le dernier des Irlandais où des Ecossais à provoquer une rixe avec ces Britanniques qui prenaient un malin plaisir à se croire en pays conquis.
De Roscoff, sa ville natale, il a gardé un amour incommensurable de la mer et un sens des affaires fort utile. Comme beaucoup de Roscovites en ce seizième siècle, il était devenu corsaire en plus de reprendre l'affaire d'armateur de son grand-père maternel.

Aussi agile à l'épée qu'avec une baguette et doté d'un courage qui fait honneur à la maison au lion, il a conduit et armé de nombreux navires pour le compte du roi de France Henri II. En ce début de la guerre des courses, il a fait partit des premiers à piller les navires étrangers pour le compte de la couronne française et s'est avec superbe qu'il raconte ses épopées à ses descendants et à toute personne voulant bien l'écouter. Il tire une certaine fierté de voir que grands nombres de ses descendants ont suivi ses traces et ont parcouru grand nombre des mers du globe. Les Sioc'han ont toujours été des aventuriers et la petite dernière de la famille n'est pas en reste.

Mais malgré tout sa progéniture et ses histoires quand le temps passe et que la mort a repris ses droits la vie manque d'aventure pour un corsaire sur le retour. On peut dire que quatre siècles, enfin précisément trois cents quatre-vingt-huit ans, c'est long lorsqu'on ne peut rien faire d'autre que regarder la vie des autres se dérouler devant nos yeux.
Alors, lorsque l'occasion se présente de quitter la cave de la demeure familiale qu'on hante on la saisit au vol. Même si cette chance en or n'est rien d'autre que celle d'aller hanter un vieux château en Écosse rempli d'étudiants en pleines crises d'adolescence, de tableaux pires que des commères et de fantômes pour la plupart acariâtres sans compter un esprit frappeur des plus charmant.
Mais diantre Jean Sioc'han n'avait jamais été homme à réfléchir alors tant pis pour les enfants boutonneux, les pipelettes de tableaux et les grincheux en tout genre il ne va pas rester à se morfondre dans une cave lorsque sa lointaine petite fille lui propose d'embarquer pour de nouvelles aventures. Et pour Peeves il en fera son affaire et gare à lui s'il s'en prend à sa petite fille il pourrait bien être le premier à chasser ce désagréable squatteur du château. Des gars coriaces il en a vu des centaines et certains diablement plus coriace que ce freluquet de pacotille avec son chapeau melon.
Il ne laissera personne lui interdire de s'installer au côté de sa petite Eléonore McKinnon durant ses sept années de scolarité car rien qu'en passant à son départ à Poudlard sans lui il sent un sentiment d'abandon lui étreindre le coeur.
Alors, n'en déplaise aux gens il quittera Roscoff caché dans une malle pour éviter de se faire alpaguer par la mère de la petite et c'est comme une vulgaire marchandise de contrebande qu'il rentrera dans l'enceinte de son ancienne école. À soixante-dix ans et quelques siècles il se sent à nouveau revivre. Enfin s'il est encore possible de parler de résurrection pour un fantôme.