Si la douleur portait un nom, elle s'appellerait sans doute Malda Patchwer.
Mais si, vous savez bien, cette jeune fille qui semblait toujours traîner péniblement sa carcasse partout où elle allait dans Poudlard.
On ne peut pas dire qu'elle possédait le don de la sociabilité. Etant donc plus encline à la solitude qu'aux rumeurs des foules, les coins et les recoins tranquilles n'avaient pas de secrets pour elle.
Mais quand elle sortait de ses cachettes provisoires, que dire de la triste mine qu'elle abhorrait aux yeux des autres ? Cela l'excusait-elle ? Cela la rendait-elle moins coupable d'être qui elle était ? Comment vivre quand on exècre jusqu'au sang même qui coule dans nos veines, jusqu'à ce trait de caractère qu'elle surprenait parfois malgré elle, jusqu'à cette pointe de folie venimeuse. Et ce spectre aux yeux fiévreux qui la toisait tous les matins de l'autre côté du miroir. Cette figure qui lui lançait ces regards qui n'étaient que trop familiers aux autres…
Aux autres…
Tout cela était comme une malédiction qui accablait et gangrenait les siens depuis trop longtemps. Elle attacha lentement ses cheveux et se regarda une dernière fois dans la glace. Son visage se rapprocha imperceptiblement de celle-ci jusqu'à ce qu'elle fut collé à elle, se retrouvant à fixer intensément cette personne, là, en face. Les reflets du marbre vinrent pendant un instant teinter d'un vert outre-tombe sa peau. Elle mima une expression de colère.
Oui, ainsi elle devait lui ressembler, ce devait être exactement ça, la dernière image qu'ils avaient dut surprendre avant de mourir. Elle songea aux honnêtes sorciers qui frissonnaient sûrement encore dans le confort de leur lit douillet en pensant à cette figure. L'autre se mit à pouffer dans le miroir, rêvant à la pauvre Malda qui devait continuellement vivre avec cette espèce de fantôme. Un truc qui lui collait à la peau, une chose qui malgré ses efforts restait là, à la manière d'un masque hideux vissé à son visage et balançant à la face du monde : « Les vieux démons ne mourront jamais ! » Et cela était vrai.
Elle se redressa. D'un autre côté, objectivement, elle ne voyait pas pourquoi elle devait payer pour des choses qu'elle n'avait pas commise. Comme si elle catalysait, par sa ressemblance avec Elle, toutes les haines et les peurs que le monde magique ne pouvait exprimer de façon plus primaire. Un lynchage sur la place publique, voilà ce qu'il leurs fallait, voilà ce qu'elle était.
En ce rinçant les mains elle se décida enfin à sortir des toilettes. Marchant craintivement dans les couloirs elle endura encore une fois l'atmosphère de dégoût, d'aversion et d'animosité que les autres avaient crée autour d'elle. Pourquoi elle, comment pourrait-elle être coupable alors qu'elle n'avait été, ni de loin ni de près, en contact avec les partisans de « Vous-Savez-Qui » ?
Puis elle se mit à réfléchir. Et si les autres ne la détestaient pas et étaient, au pire, indifférents. Et si elle projetait la haine qu'elle avait d'elle-même sur leur visage. Et si quoiqu'elle décide, une part d'elle avait décidé que Malda allait payer pour tous les crimes de sa mère.
Et si …, soudain la cloche sonna, ramenant Malda a des préoccupations plus terre à terre, le cours de défense contre les forces du mal par exemple qui commençait au moment même à l'autre bout du château.
Elle serra un plus autour d'elle sa cape d'hiver, tentant vainement de construire une barrière plus solide entre elle et ces « autres » puis adoptant un pas vif se hâta vers la salle de classe.
Lorsqu'elle arriva le cours était déjà commencé elle fut donc obligée de traverser toute la classe pour rejoindre sa place au fond, sentant une fois de plus le lourd poids des regards.
L'heure se passa sans encombre, chacun essayant de l'ignorer, se comportant avec le maximum de déférence parce qu'elle était Elle sans être Elle mais un peu Elle quand même parce qu'Elle faisait parti d'elle. Et que ça il fallait bien l'accepter ou du moins essayer de l'oublier.
