Vous avez déjà vécus ces matins où vous vous réveillez, écrasez le réveil et regardez le plafond en souhaitant vous rendormir? Ces jours où le soleil brille à travers la fenêtre de votre chambre incitant tous les petits oiseaux à faire les idiots à l'extérieur, les écureuils à grignoter des noisettes et les adorables colocataires à faire de grands signes et dire « Bonjour ! ». Où tout semble en harmonie avec le monde ?
Et vous n'en avez rien à faire.
C'est ma matinée… Chaque matin. Malheureusement pour moi-
"Georgia! Lève-toi et profite, marmotte!" s'exclama joyeusement Daisy avec un grand sourire en attrapant les couvertures et les arrachant du lit de sa colocataire. Elle s'approcha de la fenêtre pour ouvrir les rideaux et puis quitta la chambre en laissant la porte grande ouverte, "Der Waffle Haus nous attend tout comme nos âmes. Je te donne une bonne demi-heure pour te préparer."
Je n'ai pas la chance ou le luxe d'avoir une paresseuse pour colocataire qui me permettrait de dire "fout le camp" à ces fichus oiseaux ou à ce fichu soleil rayonnant dans la pièce. N'importe qui dirait qu'elle a une voix d'ange et le visage qui va avec… Ils ne vivent pas avec elle.
"Merci, Daisy," ronchonna George en remettant les couvertures sur elle, "Ca fait donc vingt-sept minutes que j'aurais pu passer à dormir."
Après trente secondes à regarder le dessous des draps, George grogna et sorti du lit. Il n'y avait rien à part ses vêtements de tous les jours, mais elle ne s'en préoccupa pas. C'était son jour de repos à Happy Time et depuis quelques temps elle appréciait ces jours sans travail, du moins, juste celui de faucheur. Aussi morbide que cela pouvait paraître, ces jours étaient les plus relaxants.
George enfila son jeans qui traînait sur le dossier de sa chaise, ses chaussures, un débardeur propre et un sweat-shirt de son armoire. La salle de bain était vide ce qui signifiait qu'elle n'aurait aucun problème à se brosser les cheveux et se laver les dents. Ensuite elle marcha en direction de Daisy, toujours aussi fraîche que d'habitude, dans la cuisine. Elle marchait partout à travers la pièce avec un grand sourire, ses cheveux déjà brossés et son visage déjà maquillé. Pas étonnant que George ait eut la salle de bain principale rien que pour elle ce matin.
"S'il te plait dit moi que le café est prêt," se plaignit George tandis qu'elle s'asseyait sur le comptoir.
"Serais-je aussi fraîche que je le suis maintenant si ce n'était pas le cas?" Daisy donna sa tasse à la jeune faucheuse et s'assit à côté d'elle.
"Oui, et ça me rend malade," George but une gorgée de son café avec une mine renfrognée. Comment avait-elle terminée avec une personne aussi rayonnante comme colocataire ?
"Allons, Georgia," Daisy posa sa tasse à côté de l'évier et se tourna vers la cafetière, "Le soleil brille et c'est une nouvelle journée. Tu ferais mieux de l'apprécier tant que tu le peux."
Même en pensant que c'est un jour de repos, c'est encore un de ces jours dont vous sentez qu'il va changer quelque chose auquel vous êtes habitué. La dernière chose dont j'ai besoin. Le monde chargeait son pistolet 'Je vais te baiser' encore une fois sur moi.
"Pourquoi es-tu d'humeur si légère aujourd'hui?" George but le reste de son café et tira sur le bas de son sweat-shirt, "C'en est presque effrayant."
"Je vais bien, j'ai juste envie d'être d'humeur légère ce matin c'est tout. C'est bizarre, comme si j'avais besoin d'acclamer quelqu'un aujourd'hui."
George leva les yeux et montra la porte d'un coup de tête, "Tu m'as réveillée, tu viens?"
"Bien sûr," Daisy attrapa l'une de ce qu'elle aimait appeler ses plus 'belles' vestes et parti après elle.
A Der Waffle Haus, Rube était assis dans son coin, semblant quelque peu distrait de son agenda. L'élastique de celui-ci était enlevé; il était ouvert et les mains du faucheur étaient posées par-dessus. Mason était en face de lui avec une paille pendant misérablement du côté droit de sa bouche.
Apparemment il attendait que l'on remplisse à nouveau de jus ou quoiqu'il ait commandé dans le verre maintenant vide à sa gauche. Il n'y avait pas encore signe de Roxy, autrement ils auraient le fin mot de l'histoire sur ce qui préoccupait Rube. Daisy et George prirent leur temps pour approcher de la table juste au cas où ce n'était qu'une humeur de Rube. Daisy prit l'initiative d'aller les rejoindre et sourit aux deux hommes.
"Bonjour vous deux, qu'est-ce qui nous vaut de nous lever?" elle se glissa à côté de Mason qui lui fit un de ces sourires qui lui étaient uniquement réservés ces derniers jours.
"Bonjour ma belle," l'accueillit-il puis regarda George, "Salut Georgie-girl. Tu passes un bon congé ?"
"Ca va," elle haussa les épaules et regarda les places qui s'offraient à elle. Le choix habituel à vrai dire.
En fait, c'est plus un choix douloureux. Mais ce n'est qu'un siège à Der Waffle Haus, pas la décision de lancer une bombe sur Hiroshima. Qu'est-ce qui va pas chez moi aujourd'hui?
"Il y a un problème p'tite tête?" Rube la ramena à la réalité et ferma son agenda, remettant l'élastique autour de celui-ci.
"Non, pas vraiment," elle secoua la tête.
"Alors assied-toi. Tu vas me rendre nerveux à rester là, comme si tu avais fait quelque chose dont je n'avais pas encore entendu parler," il récupéra sa veste du siège et la plaça de l'autre côté de la banquette. George soupira et su que son choix avait été fait pour elle. Elle s'assit à côté de Rube juste quand Kiffany vint avec son calepin et la commande de Mason dans les mains.
"Okay, le groupe est presque au complet," elle sourit, "Maintenant, qu'est-ce que je vous sers ce matin?"
"Je prendrais un numéro six," Daisy sourit sans même jeter un œil au menu et dirigea son regard vers Mason.
"Tu peux m'avancer?" la supplia-t-il.
"D'accord," elle leva les yeux au ciel et soupira.
"Dans ce cas, je voudrais un numéro cinq et s'il vous plait ne radinez pas sur les fruits, Kiffany, mon amour," sourit-il en lui tendant les deux menus qui étaient de leur côté de la table.
"Et vous deux?" elle se tourna vers George et Rube.
"Je ne sais pas ce que je veux aujourd'hui," soupira George en tapotant le menu "Je ne trouve rien qui me fasse vraiment envie ce matin."
"Alors je vais commander," Rube attrapa les deux menus et les tendit à Kiffany, "Deux Banana Bonanzas. Une assiette de bacon extra extra croustillant et une tasse de café pour moi et un jus d'orange pour ma p'tite tête."
"Je reviens tout de suite," Kiffany sourit et prit tous les menus pour les poser sur le comptoir avec la commande.
"'Ta' p'tite tête, hein?" plaisanta George en frappant gentiment son bras, "Merci, Rube."
"N'en parle plus," il lui jeta un rapide coup d'œil, "Il semble que tu ais besoin d'une grande tasse de café ce matin en tout cas. Tu as l'air crevée."
"Merci…" elle leva les yeux au ciel puis concentra son attention sur une trace de sauce sur la table.
Après quelques minutes Kiffany leur amena leur commande et ils mangèrent en silence, sauf Daisy qui parlait du temps et des habituels 'vous saviez' de Mason à propos des différents orifices dans lesquels on
pouvait cacher de la drogue. Au bout d'un moment, George abandonna l'idée de terminer son petit déjeuner.
"Tu sais, Roxy n'apprécierait pas cette conversation si elle était là, Mason," Fit remarquer George à son ami.
Tout comme mon estomac.
"Mais elle n'est pas là n'est-ce pas?" il lui fit un grand sourire et lui tira la langue.
"Ouais, c'est mature."
"Okay tout le monde, on se met au travail," Rube prit une grande inspiration et sortit les post-it, "Un pour tout le monde aujourd'hui."
Il en colla un sur la table pour Daisy et un pour Mason mais n'en sortit pas pour George et lui.
"Et j'attends toujours pour le mien," dit George avec un soupir.
"Toi tu attends avec moi. Roxy, toi et moi avons un travail de groupe aujourd'hui. Dans pas très longtemps d'ailleurs," il vérifia sa montre et ensuite regarda Mason et Daisy comme s'ils étaient là simplement pour l'agacer, "Vous n'avez pas un boulot à faire vous deux?"
Les deux en question regardèrent leur post-it et commencèrent à se lever, Daisy paya sa part de la note avant de s'éloigner. George se tourna vers Rube alors que ses yeux fixaient encore une fois son agenda.
"Alors, qu'allons-nous faucher aujourd'hui?" demanda-t-elle après avoir pris une gorge de jus d'orange, "Un bus de retraités ? Une fête au meurtre ? Une explosion de laboratoire ? J'ai entendu dire qu'ils en avait ouvert un autre à la place du précédent il y a quelques mois."
"Rien de tout ça," il lui fit un de ses sourires tristes qu'il lui faisait de temps en temps. D'habitude, c'était quand il y avait une merde qui lui tombait dessus. Il y avait quelque chose avec cette « fauche ». Il savait ce que c'était, mais il n'avait pas l'intention de le lui dire tout de suite, et le connaissant assez, elle n'allait pas essayer de l'y pousser.
Depuis que Mason était parti, elle avait décidé de redonner une chance à son petit déjeuner. Même avec les sièges vides de l'autre côté de la table elle n'avait pas bougé pour s'y installer. Rube ne lui demanda pas de changer de place, et elle n'avait pas envie de se lever. Après tout, c'était lui qui lui avait dit s'assoir là. Et puis elle ferait mieux de laisser ses sièges libres pour Roxy, où qu'elle soit maintenant.
"Pourquoi Roxy est en retard?" se demanda George à elle-même plus qu'à Rube.
"Réunion de son département," répondit Rube, "On a parlé plus tôt. Elle arrive bientôt."
C'était elle qui habituellement était assise à côté de Rube quand George arrivait. George s'était toujours demandé quelle était leur relation. Dans un sens, elle ne voulait pas savoir, mais en même temps elle ne serait pas surprise s'ils se voyaient en secret sous la couverture ou quelque chose dans ce goût là. Penser à Rube en rendez-vous galant. Bizarre et pour une quelconque raison, cela rendait George un peu perdue et…
En colère?
"De quoi avez-vous parlé?" demanda-t-elle, essayant de paraître décontractée.
"Certaines choses."
"Quel genre de choses?"
"Des choses de personnes âgées. Pourquoi mes conversations t'intéressent à ce point?"
"C'est pas le cas," elle haussa les épaules.
"Qu'est-ce qui se passe dans ta petite tête? Quelque chose te tracasse," il s'appuya contre le dossier de son siège et croisa les bras.
George le regarda avec un air qui semblait dire à la fois 'c'est quoi ton problème?' et 'qu'est-ce que j'ai fait ce coup-ci?'. C'était étrange dans un sens de le voir prêt à lui poser des questions et à la réconforter. Il agissait comme s'il allait l'écouter. Il allait l'écouter.
Est-ce que je devrais avoir peur?
"Rien, j't'assure," elle faisait tourner son verre de jus d'orange entre ses mains, "Juste une nouvelle journée. Je n'arrive pas à me focaliser sur quelque chose en particulier. Je passe d'un sujet à l'autre. C'est normal?"
"Tout change," il soupira et joua avec l'élastique autour de son poignet, "Rien ne semble rester pareil après un temps."
"Et c'est supposé vouloir dire quelque chose, Rube? Quelque chose va changer?" elle le regarda acquiescer.
"Tout change un jour, p'tite tête," il lui fit un demi-sourire et prit sa main, "Soit juste heureuse que ce soit quelque chose que tu aurais fait pour une fois."
"Ouais, c'est un vrai soulagement," elle leva les yeux au ciel pour ensuite les poser sur la main de Rube sur la sienne.
Elle ne l'avait jamais vu comme ça. Même lorsque Betty avait disparut ou la fois où elle était rentré chez elle après qu'il le lui ait formellement interdit, il n'avait jamais agit comme ça. Ses yeux comme morts, ses sombres pensées. Elle avait eut peur de ça quand elle était encore une nouvelle faucheuse. Il y avait presque trois ans maintenant. Elle n'avait plus peur à présent, au contraire. Il était l'une des personnes les plus rassurantes et apaisantes qu'elle connaissait, même quand elle merdait. Quelques secondes de silence, elle sentit sa main commencer à s'éloigner de la sienne, mais avant qu'il n'ait pu la retirer complètement, elle posa son autre main sur la sienne. Il la regarda dans les yeux et elle lui fit l'un de ses rares sourires. Il lui semblait qu'il en avait besoin.
"Est-ce que j'interromps quelque chose?" Roxy s'installa sur la banquette face à eux et posa son chapeau à côté. Elle sourit imperceptiblement à Rube avant de reprendre son air habituel.
Super timing, Roxy.
"Rien que tu n'ai déjà vu," Rube enleva sa main d'entre celles de George et décolla le post-it au dos de son agenda.
"Pour toi," il tendit la bout de papier à Roxy et se tourna vers George, "Et tu auras le tien plus tard. Je te colle comme de la glue aujourd'hui."
"Quelle chance."
"J'ai le temps pour un café?" Roxy jeta un coup d'œil vers le comptoir où Kiffany faisait un peu de rangement.
"Pas aujourd'hui. On est assez en retard comme ça," Rube attrapa sa veste de la banquette et fit signe à George de se lever. Elle fit ce qu'il demandait et Roxy soupira pour finalement les suivre.
"Ne me dit pas qu'ils doivent escalader un mur de six mètres," s'exclama George alors qu'elle voyait les cadets de l'académie de police faire leurs exercices. La dernière chose dont elle avait besoin, c'était bien d'un cadet lui racontant à quel point son dernier jour était triste. Que ce soit une militaire, flic ou quoi que ce soit d'autre.
"Non, seulement un de deux mètres," soupira Roxy tandis qu'elle se souvenait ses propres entraînements de police.
"Génial," elle détourna les yeux pendant que Roxy regardait son post-it puis se mit à la recherché du nom indiqué sur celui-ci parmi les noms imprimés sur le dos des uniformes des cadets.
"Voyons voir," murmura Roxy observant toujours les noms des cadets, "Je cherche Q. B. Corplet."
"Et qu'est-ce qu'on cherche, patron? Ou plutôt qui?" demanda George alors que Rube restait à côté d'elle et regardait Roxy puis le ciel comme s'il attendait un signe.
"Attend un peu."
"Attend, attend, attend," soupira-t-elle presque pour l'embêter, "C'est tout ce que je vais entendre de toi aujourd'hui?"
"Cadet Corplet! Venez ici!" cria Roxy depuis le bord du terrain d'entraînement, appelant une cadet de police qui ne semblait même pas majeure. Le cadet arrêta de courir avec ses camarades pour observer l'officier en uniforme et vint immédiatement la rejoindre. Ses cheveux châtains étaient noués en un chignon serré et le haut de son corps n'était cache que par une brassière, son haut d'uniforme attaché autour de sa taille.
"Oui, M'dame?" demanda-t-elle avec attention.
"Repos, cadet."
La jeune cadet se détendit un peu.
"Quel est votre temps au tour?"
"Quarante-cinq secondes mais ça continue de diminuer, m'dame!"
"Bien," elle donna une légère tape dans le dos du cadet et lui prit son âme, "La dernière fois que vous avez nettoyées vos bottes?"
"Ce matin, m'dame."
"Quelle heure?"
"Six heures, m'dame."
"Six heures? Vous êtes sûre?"
"Oui, m'dame."
"Vous êtes sûre?"
"Oui, m'dame!"
Roxy regarda dans les yeux du cadet tandis que celle-ci redressait la tête, ne regardant jamais Roxy, "Bon travail, cadet. Rejoignez votre classe. Vous avez encore du travail à faire."
"Oui, m'dame. Merci m'dame."
Et c'est ainsi que s'en fut la jeune Cadet Corplet, inconsciente du fait qu'elle ne finirait jamais l'académie de police.
Roxy revint aux côtés de Rube et George pour se retourner vers le cadet, "C'est une honte."
"Quoi donc?" demanda Rube.
"Elle aurait fait un excellent policier," soupira Roxy, "Je me demande comment elle fait. On dirait que ça lui convient."
Sans aucun avertissement, l'un des tanks d'entrainement fit une embardée, passa à travers le mur de bois pour finalement se diriger vers le groupe de cadet en train de courir. Le cadet Corplet était la dernière du groupe, et était la seule dans la trajectoire du véhicule. Elle n'entendit même pas les appels et les cris de ses commandants ou camarades. Et elle n'entendit jamais le klaxon de la voiture frénétiquement pressé par le cadet paniqué derrière le volant.
"Est-ce que tu avais prévu ça, Roxy?"
Pas de réponse ?
"Roxy?" George se tourna vers l'endroit où se trouvait son amie, mais ne trouva que du vent et Rube, "Où est-elle passée ? Elle a une âme à conduire à destination."
"Pas aujourd'hui," déclara doucement Rube, "Aujourd'hui, c'est notre travail."
"Mais c'était- " et finalement, elle comprit. Roxy était partie, "Elle a rempli son quota, c'est ça?"
"Ouais."
Vous vous souvenez de ce pistolet 'Je vais te baiser' dont je parlais?
Click.
Bang.
"Tu le savais ce matin, pas vrai?"
"Oui," soupira-t-il encore, et il commença à marcher vers la nouvelle âme qui se tenait à côté de ce qui avait été son corps. Rube se mit à côté d'elle et regarda par dessus les têtes de ses camarades et instructeurs, "Pas vraiment ce que tu croyais qui arriverait hein?"
"Pas exactement, mais toujours mieux que d'être tuée par un suspect, je pense," répondit la récemment décédée Q.B. Corplet en regardant son corps, puis Rube, "J'en déduis que si vous pouvez me voir et tout, vous êtes supposés m'emmener vers une quelconque destination finale?"
"Pas tout en fait," George les avait rejoint et posa une main sur l'épaule du cadet, "Ton cas est un petit peu différent. Comme les notrel'ontété."
"Viens, fillette," Rube l'entraîna vers sa voiture, une main dans son dos, "Nous avons beaucoup de choses à se dire. On t'expliquera dans la voiture."
"Oui, monsieur," accepta-t-elle en jetant un dernier regard à son corps avant de les suivre. Elle commença à trottiner, puis à courir aussi vite que quelques minutes auparavant.
"Monsieur? Elle doit se croire encore à l'académie," dit George tandis que Rube hochait de la tête.
"Ca me fera des vacances," ajouta Rube, "Tu ferais mieux de prendre exemple."
Une fois de retour à Der Waffle Haus, George s'assit encore une fois à côté de Rube tandis que Q.B. Corplet s'installa face à eux, essayant d'attraper une serviette mais sa main se contenta de passer à travers.
"Tu es sûre que tu ne veux pas aller à tes funérailles?" demanda Rube alors que la jeune fille lâchait un soupir en voyant sa main passer à travers la table, "Nous avions le temps. On l'a toujours d'ailleurs. Tes parents auront certainement tout réglé rapidement."
"Ils ont toujours fait les choses trop vite quand il sont ensemble. Je ne voulais pas, et ne veux toujours pas y aller parce que je ne veux pas voir ma famille et mes amis pleurer. C'était assez étrange de voir mon autopsie. Mais je pourrais leur dire au revoir à un moment ou à un autre, n'est-ce pas?" demanda-t-elle doucement, "D'après vous deux, j'aurais un corps bientôt. C'est bien ça, monsieur?"
"Chacun d'entre nous l'a voulu," Rube jeta un coup d'œil à George, "Je-"
"Ce n'est pas permis," répondit rapidement George. Elle se rappelait la dernière fois qu'elle avait vu sa famille. Elle aurait eut dix-neuf ans si elle avait toujours été en vie à l'époque. La dernière fois qu'elle avait vu sa sœur s'éloigner d'elle ce jour de Novembre. Dans ce cimetière, "Et crois-moi, ça n'en vaut pas la peine. Garde les souvenirs que tu as d'eux."
"J'en conclus que vous en avez fait l'expérience m'dame?" demanda la jeune femme.
"Nous l'avons fait tout les deux," ajouta Rube et George lui lança un regard perdu. Il ne parlait jamais de la vie et de la famille qu'il avait laissée derrière lui.
"Mais ça n'aurait jamais dû arriver," elle regarda autour d'elle dans l'attente d'une réponse, "J'ai seulement dix-sept ans! Ce n'est pas juste! Je n'ai même jamais bu d'alcool!"
"Tu n'étais pas la seule," George croisa les bras dans une attitude boudeuse et Rube sourit.
"Qu'est-ce que tu en sais? Tu as quoi? Dix-huit ans, peut-être?" la jeune cadet se leva et se mit à lui crier dessus, "Quel droit as-tu de me parlais comme si tu avais la science infuse?"
"Trois ans en tant que faucheuse, c'est dire. Si j'étais toujours vivante, j'aurais eut vingt et un ans, mademoiselle Je-Sais-Tout," George n'avait même pas bronché face au cadet, "Maintenant assieds-toi et respire."
"Quand est-ce que j'aurais un corps, monsieur?" demanda-t-elle tandis qu'elle se rasseyait.
"Quand tu auras accepté le fait d'être morte et que tu seras prête à nous rejoindre," Rube pris une gorgée de son café, "Alors fait un break et accepte-le."
"Fait un break," elle commença à rire d'elle-même et remis ses cheveux en arrière, "D'accord…"
"Et arête de m'appeler monsieur," Rube prit une profonde inspiration, "Ca commence à devenir agaçant. Tu n'es plus à l'académie. Tu es morte."
George repensa à son premier jour morte et posa une main sur celle de l'autre fille. Elle avait besoin de quelque chose qu'elle ne pouvait pas encore ressentir. Quelque chose qu'elle ne pouvait pas encore attraper. Elle leva les yeux et refoula ses larmes.
"Merci," elle inspira un bon coup et gloussa encore un peu, "Il n'y a pas moyen que vous preniez quelqu'un d'autre, hein?"
"Non, tu t'y colles, fillette," Rube s'appuya dans son coin, "Et bienvenue au club des faucheurs."
"Quoi?" la jeune fille leva les yeux et vit une serveuse se tenir près d'elle.
"Et qu'est-ce que je peux vous servir à vous deux et votre nouvelle amie?"
"Pourquoi pas des Banana Bonanzas et du café pour tout le monde, Kiffany?" Rube sourit.
"Et une assiette de bacon extra, extra, extra croustillant?" ajouta George souriant à son tour à Rube. Il la remercia du regard et hocha la tête à Kiffany.
"C'est noté," répondit Kiffany en écrivant la commande, "Et bienvenue parmi eux, chérie. Parmi les meilleures personnes au monde."
Cadet Corplet regarda à nouveau George et Rube, "Elle peut voir les morts aussi?"
"Non, elle est humaine," le sourire de Rube disparu, "Il semblerait que tu ais accepté."
"Génial…" elle mit sa tête entre ses mains, "Je suppose que c'est comme une sorte de club?"
"Presque, considères-le plutôt comme un service public," répondit George, "Et laisse-moi être un peu plus sympa que Rube l'était pour mon premier jour et te proposer un endroit pour vivre. Tu peux venir avec Daisy et moi."
"Daisy?" elle ricana au prénom.
"Et elle porte très bien son nom," approuva George.
"Charmant."
"Tu es sûre que c'est la chose à faire? Daisy n'est même pas au courant pour la nouvelle," demanda Rube tandis que Kiffany revenait avec leurs assiettes, "Et ne le sera probablement pas avant plusieurs jours."
"C'est bon, je trouverai un endroit où camper jusqu'à ce qu'elle soit prévenue," elle soupira et remercia Kiffany alors qu'elle regardait les pancakes devant elle.
"Au fait, quel est ton prénom?" demanda George, "Nous avons seulement ton nom de famille. A moins que tu préfères qu'on t'appelle 'Corplet' ou 'Cadet' tout le temps. Ou bien Q. B.? "
"Quinn," répondit-t-elle et tendit sa main en direction de George, "Et pas la femme médecin."
"Compris," assura George et elle lui serra la main. Rube eut un sourire satisfait et s'attaqua à ses pancakes et son bacon.
"J'ai cru comprendre qu'on n'était pas les seuls," déclara Quinn alors qu'elle prenait sa première bouchée, "Cette Daisy en est une aussi, pas vrai ?"
"Et Mason, tu les connaîtras dans quelques jours," George bu quelques gorges de son café et remarqua que Quinn n'avait pas touché au sien, "La café n'est pas bon?"
"Je ne suis pas une amatrice de caféine," expliqua Quinn.
"Il va falloir t'y habituer," grogna Rube la bouche pleines de pancake, "Tu en auras besoin."
"Oh, de mieux en mieux," Quinn leva les yeux au ciel et regarda son estomac.
"Quoi?"
"Vous ne m'aviez pas dit que certaines « choses » continueraient à me préoccuper," elle se leva et regarda rapidement autour d'elle, "Les toilettes?"
George et Rube lui montrèrent l'accès aux toilettes d'un seul mouvement, et Quinn s'éloigna. George soupira et regarda son patron qui avait un morceau de Banana Bonanza au coin de la bouche.
"Quoi?" demanda-t-il en remarquant son regard.
"Ça va?"
"A Propos?"
"Roxy."
"C'était son tour de partir. Je ne peux rien y faire au même titre que toi, p'tite tête," il avala ce qu'il avait dans la bouche et posa sa fourchette, "Je suis désolé de ne pas te l'avoir dit plus tôt."
"Aucun de nous n'avait de post-it aujourd'hui, pas vrai?" demanda-t-elle. Il fit non de la tête, "Je m'en doutais."
"Je sais que tu t'en rendrais compte."
"Je serais venue si tu me l'avais demandé," George prit une serviette et essuya le coin de la bouche de Rube. Puis elle prit sa main et la serra en signe de réconfort.
"Je sais."
Elle sourit alors qu'elle le sentait serrer sa main en retour.
Malgré le mauvais pressentiment de ce matin, je n'ai pas réussi à me blinder assez, et la perte de Roxy n'en est que plus douloureuse. Perdre une autre amie. On pourrait croire que je m'y suis habituée. Après tout, c'était ce que j'aurais dû espérer. Peut-être qu'une partie de cette douleur ne venait pas du fait que j'étais concernée, mais parce que Rube aussi souffrait. Et c'était la chose la plus terrifiante que de voir cette unique larme couler le long de sa joue.
