Contrairement à l'opinion populaire, Shôren ne trouvait pas son père difficile à aimer.
Le fait que Stannis Baratheon l'ait engendrée ne jouait aucun rôle là-dedans : si, comme le prétendait l'Etoile à Sept Pointes, il était naturel d'aimer les membres de sa famille, pourquoi donc la mère de Shôren n'aimait-elle pas sa fille ? Pourquoi Shôren elle-même détestait son horrible cousin Joffrey ?
Quand on examinait la question sous cet angle, la voilà qui s'effondrait. C'était Stannis qui avait appris cela à Shôren.
C'était une des raisons pour lesquelles elle aimait son père : il lui montrait le monde sous un angle qu'elle comprenait, un angle qui l'intéressait. Il lui disait de réfléchir, pas de prier comme le faisait mère, et ne la disputait pas quand elle le contredisait. Et pourtant, elle savait qu'il n'aimait pas la contradiction.
Son caractère, c'était une autre raison de l'aimer. Ou plutôt sa personnalité. Stannis Baratheon n'avait pas une personnalité très compliquée, il accomplissait son devoir de son mieux et attendait la même conduite des autres. Une fois cerné cela, c'était facile de vivre avec lui. On savait à quoi s'attendre, il ne s'agissait pas d'un monstre, après tout.
Et les Sept savaient pourtant que Stannis avait une allure terrifiante, vu sa taille massive et ses traits guère beaux toujours déformés par une grimace. Une vraie gargouille, sauf que celle-là n'effrayait nullement Shôren. En fait, cela avait tendance à la rassurer : devant pareil adversaire, quel ennemi hostile n'aurait pas tourné les talons ? Les pères devaient protéger leurs enfants, et la grimace de Stannis remplissait la besogne à merveille.
Alors oui, Shôren aimait son père sans difficultés. Ce n'était pas comme s'il ne lui avait pas donné de raisons pour cela.
