Ichigo Kurosaki, Shinigami remplaçant, trancha d'un mouvement fluide un tentacule qui s'approchait un peu trop près de lui. Il eut à peine le temps d'esquiver un autre tentacule que trois doigts aiguisés s'enfoncèrent dans son épaule gauche. Serrant les dents à cause de la douleur, Ichigo les coupa, les retira de son épaule, et profita de l'effet de surprise pour trancher le masque blanc de Hollow en face de lui. Puis, sans un regard pour la créature qui commençait à disparaître, il se tourna vers sa partenaire, Rukia, qui se tenait, raide comme un piquet, à côté d'une autre version d'Ichigo, allongée face contre terre. Elle n'était pas en Shinigami, et semblait bouleversée.

- Ces Hollows sont tellement faibles que c'en est écœurant, marmonna Ichigo en récupérant son corps.

Cette remarque lui valut une magnifique bosse sur le haut du crâne. Apparemment, Rukia avait repris ses esprits.

- Maieuh ! s'exclama-t-il tandis que Rukia secouait sa main. T'as frappé un blessé, là !

- La vache, Ichigo, t'as le crâne solide ! M'étonnes pas que Nii-sama n'ait pas réussi à te tuer. Avec une tête aussi dure, et si peu remplie, ça t'aurait pas manqué !

- Je t'emmerde, Rukia.

Rukia sourit tristement. Ces temps-ci, les jurons d'Ichigo commençaient à évoluer. Malheureusement pas dans le bon sens... elle fit un sort de Kidô pour guérir la plaie à l'épaule du garçon en face d'elle, tout en continuant à commenter.

- Charmant Ichigo. T'en as d'autres, comme ça ? On ne dit pas que les garçons doivent être polis devant les filles ?

- Tu devrais arrêter les romans du Moyen-âge ou de la Renaissance, Rukia. Ça te réussit encore moins.

Rukia tiqua et retira ses mains de son épaule. Ce gamin avait le don de l'énerver.

- Guéri. Et derrière toi, gamin, soupira-t-elle. Tu as un nouveau pote.

En effet, derrière le garçon venait d'apparaître un homme âgé avec d'épaisses lunettes qui s'amusait à leur faire des grimaces, pensant qu'ils ne le voyaient pas. En entendant les paroles de Rukia, il cessa aussitôt ses gamineries et fronça les sourcils.

- Et merde, j'ai failli l'oublier. T'aurais pas pu me le dire avant ?

- ça aurait gâché la surprise...

Rageusement, Ichigo redevint un Shinigami, expédia l'âme à la Soul Society avant d'intégrer de nouveau son corps. Il vacilla un instant, puis maugréa que passer de Shinigami à humain autant de fois en si peu de temps n'était pas bon pour sa santé.

- Franchement, Ichigo, tu te plains que les Hollows soient faciles. Mais au moins, ça te permet de pas perdre la main. Au cas où un Arrancar pointerait le bout de son nez... non ?

- Tu devrais éviter le sujet. Avec la poisse qui nous caractérise, ils vont débarquer.

- Dans ce cas, t'auras une excellente raison de te lever la nuit. Et je suis sûre que Zangetsu serait ravi de s'amuser un peu.

- Pff... Bon, on rentre, je me les caille et demain, on a cours.

- Merde, c'est vrai. J'avais oublié.

- Moi pas ! Encore que les profs sont habitués à ce que je dorme en cours, maintenant. Mais ces putains de Hollows ont pris l'habitude de débarquer en plein milieu de la nuit, rien que pour me gâcher ma jeunesse. Si au moins ils débarquaient dans la journée ! J'aurais une bonne raison de sécher.

Tout en continuant de pérorer sur les Hollows, Ichigo se dirigea vers la clinique, ne semblant pas de rendre compte que Rukia n'était plus avec lui. La jeune femme le suivait, mais ne disait rien, elle semblait perdue dans ses pensées.

Cela faisait quelques temps qu'elle paraissait « s'absenter » pendant des périodes de plus en plus longues. Depuis qu'ils étaient revenus du Hueco Mundo, en fait. Le souvenir de Kaien-dono... le revoir, même si ce n'était pas vraiment lui, lui avait fait un choc plus important qu'elle ne l'aurait envisagé. Et, comble de la malchance, elle l'avait tué. Encore une fois. Même si elle savait parfaitement que ce n'était pas lui, juste un Espada qui avait aspiré ses pouvoirs, elle ne pouvait s'empêcher de penser qu'elle l'avait tué de sang-froid. Elle avait eu l'impression de revivre cette nuit-là. En fait, Ukitake et la pluie en moins, c'était la même chose. A part le fait qu'elle avait failli mourir, empalée sur le Zanpakutôh fictif de son ancien vice capitaine.

Sans s'en apercevoir, elle commençait à revoir son cauchemar, ce cauchemar qui la hantait presque toutes les nuits. Penser à Kaien-dono raviva ces souvenirs, et elle commença une fois de plus à revoir toute la scène.

Sans vraiment s'en rendre compte, Rukia s'était arrêtée, en plein milieu d'une rue. Elle était immobile, bien droite, la tête baissée, les poings serrés. Ce fut seulement à ce moment qu'Ichigo se rendit compte qu'il y avait un problème. Il s'arrêta dans sa tirade, et posa doucement sa main sur l'épaule de la jeune femme.

- Rukia ?

Pas de réponse. Il lui secoua doucement l'épaule, sans obtenir de réaction.

- Rukia, ça va ?

Toujours pas de réponse. Baissant le regard pour tenter de croiser le sien, il vit deux taches plus sombres sur le béton clair.

Rukia pleurait.

C'était la première fois qu'Ichigo voyait Rukia pleurer. Ça n'arrivait jamais. Il ne la croyait pas capable de faire une telle chose. Sur ce plan-là, il l'imaginait un peu comme son frère, Byakuya, froide et ne montrant jamais une telle perte de contrôle. Même lorsqu'elle avait failli être transpercée par le Sogyoukou, elle avait gardé les yeux grands ouverts. Sans la moindre larme. Ses grands yeux bleu nuit, qui étaient parfois couverts par quelques nuages annonçant une tempête, mais jamais une pluie. Ils restaient presque toujours lumineux, remplis d'étoiles.

Si Rukia pleurait, c'était qu'elle avait un très gros problème.

Soudain, sans prévenir, Rukia se jeta dans ses bras et le serra contre elle en sanglotant.

Surpris, Ichigo faillit la repousser, mais son corps réagit plus vite que son esprit, et il l'entoura de ses bras.

- Rukia, qu'est-ce qui se passe ?

La seule réponse qu'il obtint fut de sentir le visage de son amie se presser contre lui, tandis que ses doigts agrippaient son T-shirt avec force. Il sentit également le tissu devenir de plus en plus humide.

- Pleure, Rukia, ça soulage. Je suis là, ne t'inquiète pas.

Bon, sang, c'est qu'elle allait le faire chialer, en plus ! Mais il lui avait promis un nombre incalculable de fois qu'il serait toujours là pour elle, et il n'allait certainement pas se défiler pour une crise de larme. Il serra un peu plus le petit corps chaud contre lui, et entendit les sanglots étouffés de son amie. Soudain, les jambes de Rukia se dérobèrent et Ichigo, surpris, fut entraîné dans la chute. Ils se retrouvèrent tous les deux agenouillés par terre. Rukia ne parvenait pas à se calmer.

D'une main maladroite, Ichigo lui caressa les cheveux. Décidément, Rukia n'allait vraiment pas bien. Il continua à débiter tout un tas d'âneries pour tenter de la calmer, et le flot de ses larmes finit par se tarir.

Rukia revivait cette nuit avec plus d'intensité que jamais. Elle revoyait le ciel se couvrir de nuages... la pluie commencer à tomber... Kaien-dono qui se bat pour son honneur et celui de sa femme... il tombe, perd son Zanpakutôh... Rukia veut l'aider, mais Ukitake la retient... il lui explique l'enjeu du combat, et elle obéit... incapable de réagir face au tourment qu'elle lit dans les yeux de son vice capitaine... soudain, Kaien-dono tombe, il est touché... Pitié, pas lui... je vous en prie... pas lui... elle fuit... elle ne peut pas supporter de voir son supérieur faillir... Ukitake vomit du sang, ce n'est pas le moment, mais il n'y peut rien... elle est désespérée... elle ne sait plus quoi faire... Pitié, pas lui, pas lui... sans réfléchir, elle revient sur ses pas...pitié, sauvez-le... Kaien-dono... Ukitake-taicho... sans qu'elle ne puisse réagir, Kaien-dono lui tombe dessus... dans un réflexe défensif, Rukia a levé son Zanpakutôh...

Et c'est le noir total... hormis la pluie, son œil ne voit que du rouge... elle hurle... ou pas... elle ne sait pas, elle ne sait plus... elle sent une main familière dans son dos, un voix chaude et profonde, une voix qu'elle aime, la remercier... elle sent le sourire dans sa voix... mais elle voit la pointe d'un Zanpakutôh dépasser de son kimono... elle sait que c'est le sien, mais elle ne peut pas l'accepter... pas lui... je vous en prie... tout devient confus... elle tombe à genoux...

- Merci... murmure une voix à son oreille.

Puis plus rien. Elle recule, veut retirer son Zanpakutôh de son vice capitaine pour le regarder une dernière fois, mais lorsqu'elle parvient à voir ses yeux, elle sait qu'il est trop tard... sa vue se brouille... à cause de quoi ? La pluie, qui continue de tomber avec une intensité nouvelle ? Le sang, qui imbibe lentement son kimono ? Les larmes, qu'elle ne sent pas couler ? Elle ne sait plus où elle en est...

Elle releva la tête, et croisa le regard noisette du garçon en face d'elle. Il semblait complètement perdu. Inquiet.

Rukia ne sait plus où elle est. Qui est devant elle ? Kaien-dono ? Ou Ichigo, ce garçon aux cheveux orange qui lui ressemble tellement ?

Et soudain, la réalité s'imprime dans son esprit, comme si on lui avait collé une photo devant les yeux. Elle a tué Kaien-dono. Même si elle l'aimait. Et au Hueco Mundo, elle l'a tué de nouveau. De sang-froid.

- Kaien-dono ! hurla-t-elle dans la nuit.

- Rukia ?

Ichigo la serra doucement contre lui. Il n'aimait pas la voir souffrir.

Rukia ne cherchait plus à retenir ses larmes.

Sans chercher à comprendre, Ichigo la prit doucement dans ses bras, et la ramena chez lui. Il passa par la fenêtre ouverte, et essaya de la déposer dans son placard, mais la jeune fille s'accrochait à lui comme un naufragé à une bouée de sauvetage.

- Ne me laisse pas... ne pars pas...

- Je ne partirais jamais, Rukia... je serais toujours là pour toi...

Sans plus se poser de question ni même quitter ses fringues, Ichigo se coucha dans son lit, et serra Rukia contre lui.

- Je te l'ai promis, Rukia, je serais toujours là pour toi... je te protégerai...

Et il s'endormit, rompu par la fatigue.

Tite note de l'auteur…

J'ai déjà publié cette fic, petits veinards que vous êtes, vous aurez pas à attendre trois mois entre chaque mise à jour.

Si j'y pense comme il faut - et que j'y arrive, ce site est d'un merdique... - je mettrai un nouveau chapitre en ligne toutes les semaines.

Bonne lecture… et puis… vous voyez le petit bouton vert en bas, là ? Les auteurs aiment bien quand les gens appuient dessus… juste au cas où… ^^

Bsx !