Bonjour à tous !
Je reviens après une longue absence avec mon premier one-shot. Devant la taille qu'il fait, j'ai décidé de le découper en quatre parties pour rendre votre lecture plus facile :)
J'espère vraiment qu'il vous plaira : l'idée était de me remettre tranquillement à l'écriture avant de reprendre mes deux autres fics que j'ai lâchement abandonné ^^''' Encore désolée de la longue attente, je vais essayer de m'organiser différemment cette année pour pouvoir poster de façon plus régulière, promis ! :)
Sur ce, bonne lecture !
Disclaimer : Les personnages et l'univers de Naruto appartiennent à l'illustre Masashi Kishimoto, je ne fais que jouer avec.
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« Nul châtiment n'est pire que le remords. », Sénèque
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La respiration haletante de la jeune fille brisait le silence et le calme de la nuit. Les cheveux collés sur ses tempes à cause de la sueur, elle s'agitait frénétiquement sous ses draps, semblant mener un combat sans fin. Sans fin car cette fois son adversaire n'était nul autre que son esprit tourmenté qui avait donné naissance à un cauchemar apparemment des plus violents.
- Non…
« Je t'avais prévenue Sakura… »
- Non, s'il te plaît…
« Tu as fait ton choix en toute connaissance de cause. »
- Non, je ne…Pitié, je ne voulais pas…
« Tu es pathétique ma chère. Tu as choisi et maintenant il est temps d'assumer ta décision. »
- Non, non, Kabuto ne fais pas ça…
« Tes stupides remords ne m'intéressent pas. Mais… Je t'avoue que je serais curieux de savoir comment réagiraient tes amis s'ils étaient au courant… Qu'en penses-tu ? »
- Il ne faut pas qu'ils… Non, arr- Non ! Non, non ! Arrête !
Ce fût le hurlement strident qu'elle poussa qui lui permit d'échapper à son horrible cauchemar. Sakura se redressa brusquement dans son lit, la respiration laborieuse et ses poings crispés sur son drap. Jetant plusieurs coups d'œil apeurés autour d'elle, elle se détendit imperceptiblement lorsqu'elle comprit qu'elle se trouvait dans sa chambre, en sécurité, loin des horreurs de la guerre. Ramenant ses genoux contre sa poitrine, elle les entoura de ses deux bras fins, se créant ainsi un bouclier illusoire contre le mal qui la tourmentait.
Cela faisait deux ans que la guerre était terminée et deux ans qu'elle faisait régulièrement ce cauchemar, la fréquence augmentant lorsque s'approchait le jour qui marquait l'anniversaire de la fin de la quatrième grande guerre ninja. Si ses amis ainsi que les autres personnes qui avaient été touchées par la guerre semblaient s'être tous plus ou moins bien remis des horreurs qu'ils avaient vécues et étaient passés à autre chose, la jeune femme se sentait incapable d'aller de l'avant et se renfermait de plus en plus sur elle-même. Elle en était presque arrivée à être contente du départ de Sasuke, ne souhaitant surtout pas que ce dernier la voit dans cet état.
Les événements qui s'étaient déroulés lors des combats la hantaient, tout comme ils hantaient les autres ninjas ayant participé à la guerre, mais ce qui la rongeait profondément c'était le secret qu'elle n'avait pu révéler à personne à cause de la honte qui la tenaillait. Cet horrible secret qu'elle gardait depuis maintenant deux ans et qui était la cause de la solitude qu'elle s'imposait. Elle ne méritait ni la compassion, ni le pardon de ses amis. Et elle méritait encore moins le soulagement qu'aurait pu lui offrir la confession. Elle méritait seulement le tourment et la torture qu'elle vivait : la meurtrière qu'elle était n'avait aucun droit de se plaindre de son sort.
- Une meurtrière hein… souffla-t-elle avec un rictus amer.
En réalité, si elle gardait aussi farouchement son secret, c'était aussi pour ne pas lire la déception ou le dégoût dans le regard de ses amis. Elle savait que c'était lâche de sa part mais elle ne se sentait pas capable de supporter les regards dégoûtés de ses amis en plus du poids de son acte répugnant. Seulement, rongée par les remords et les regrets, elle avait fini par s'éloigner petit à petit de ces amis qui lui étaient si précieux, se sentant trop salie par le crime qu'elle avait commis pour rester en leur compagnie. Elle se rendait bien compte qu'elle était paradoxale mais, prisonnière d'un cycle de culpabilité infini, elle ne savait pas quoi faire d'autre.
Détournant le regard de son reflet qu'elle distinguait dans la fenêtre qui lui faisait face, ses yeux se fixèrent sur le réveil qui trônait sur sa table de chevet. Cinq heures trois. Elle pouvait dire adieu à la fin de sa nuit : jamais encore elle n'avait pu se rendormir après avoir fait ce cauchemar. Elle soupira longuement. Elle avait quelques temps auparavant demandé des jours de congé à Tsunade, afin de fuir le plus loin possible de l'hôpital, et à Kakashi, pour éviter les missions. Elle passait donc ses journées enfermée chez elle, perdue dans ses pensées, ou seule, s'entraînant dans des coins reculés de la forêt entourant Konoha. Sakura était un très bon élément qui ne comptait jamais ses heures, son maître avait donc hésité seulement quelques secondes avant de lui accorder ses congés, pensant qu'un peu de repos ne pourrait qu'être bénéfique à sa fidèle disciple. Elle avait en effet remarqué le comportement étrange de la jeune femme depuis peu et comme personne ne connaissait les raisons de sa nouvelle attitude, Tsunade avait pensé que Sakura avait peut-être seulement besoin d'un peu de solitude. Kakashi avait raisonné de la même façon et la jeune femme s'était vu accorder un long mois de vacances. Ils étaient malheureusement bien loin de se douter du mal qui rongeait l'unique membre féminin de l'équipe sept.
En effet, si la jeune femme voulait éviter le plus possible de rester à l'hôpital c'était tout simplement parce qu'elle n'arrivait presque plus à soigner les patients qui s'y trouvaient. Et si elle ne voulait pas aller en mission, c'était tout simplement parce qu'elle ne voulait pas avoir la vie de ses coéquipiers entre ses mains alors qu'elle était incapable de les soigner. Les rares soins qu'elle avait réussis lui avaient demandé une intense concentration ainsi qu'une quantité de chakra anormalement élevée au vue de la faible gravité des blessures. Le monde connaissant désormais la paix, l'hôpital n'était plus autant fréquenté qu'auparavant et les plaies à traiter se résumaient maintenant essentiellement à des contusions, des coupures superficielles et quelques entorses. Quant aux missions, elles étaient moins risquées depuis que les villages avaient instauré la grande alliance. Dans cette situation, Sakura avait réussi à faire illusion et pu persuader tout le monde qu'elle n'avait, a priori, aucun problème. C'était cependant loin d'être le cas.
Depuis la fin de la guerre, la jeune femme ne pouvait plus voir ses mains autrement que tâchées de sang et avait par conséquent de plus en plus de mal à se considérer comme un médecin. Tsunade lui avait toujours dit que, contrairement aux autres jutsu, le ninjutsu médical était fortement influencé par les sentiments de son utilisateur et il semblait que le dégoût qu'elle s'inspirait l'avait menée à ne plus être capable d'utiliser ses talents de ninja médical. Perdre ce qu'elle avait durement travaillé pendant de longues années pour pouvoir se hisser au niveau de son maître, ce qui lui avait permis de pouvoir être à la hauteur de ses coéquipiers lors de la guerre, et surtout, ce qui faisait d'elle ce qu'elle était, l'avait d'abord plongée dans une profonde colère mais c'était bien l'anéantissement qui avait suivi qui perdurait depuis. En perdant le talent pour lequel on l'avait reconnue, Sakura avait eu l'impression de perdre une partie d'elle-même et la douleur qu'elle avait ressentie avait semblé serrer son cœur à l'en faire exploser. Désormais, c'était surtout la honte qui dominait et la jeune femme avait l'impression que c'était là la punition qui lui était imputée pour son crime : après tout, qui était-elle pour se plaindre d'un châtiment si dérisoire en regard de ce qu'elle avait fait ?
Se sentant brusquement oppressée entre les quatre murs de son appartement qu'elle n'avait pas quitté depuis plusieurs jours, Sakura décida de partir s'entraîner pour la journée et se prépara rapidement. S'être levée tôt ne la desservirait finalement pas puisqu'elle avait peu de chances de croiser une connaissance à une heure si peu avancée de la journée. Passant le pas de sa porte, elle prit la direction de la forêt sous un ciel orangé, zébré d'un rose apaisant et délicat. La journée s'annonçait magnifique mais la jeune fille était à des lieues de cette constatation, les yeux rivés droit devant elle et son esprit seulement concentré sur sa destination.
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Quelques heures plus tard
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Essoufflée et pleine de sueur, Sakura s'écroula sur le sol, les bras en croix et les yeux tournés vers le ciel qu'elle entrevoyait dans les quelques espaces laissés libres par les arbres au feuillage épais. La journée était déjà bien entamée et le soleil déclinait tranquillement, marquant la fin de son entraînement. La jeune fille ne possédait plus que quelques gouttes de chakra et peinait encore quelque peu à retrouver son souffle. Le terrain qui l'entourait comptait plusieurs arbres assez amochés voire complètement déracinés : si Sakura n'était plus capable d'utiliser le ninjustu médical, elle avait rapidement décidé qu'elle devait compenser son problème et avait choisi de travailler ce qui avait toujours été son point faible : le taijutsu. Elle avait dès lors commencé un entraînement titanesque basé sur les quelques informations que Lee laissait parfois échapper quant à son propre entraînement. Ce dernier voyant sa motivation et sa détermination lui avait rapidement proposé de la rejoindre régulièrement afin de pouvoir s'affronter et progresser ensemble.
Si la jeune femme avait d'abord refusé sa proposition, elle avait fini par accepter lorsqu'elle s'était rendue compte que les missions ne seraient pas éternellement faciles et sans danger et qu'elle aurait une nouvelle fois la vie de ses camarades entre ses mains un jour ou l'autre. Désormais incapable de les soigner s'ils étaient gravement blessés, elle devait absolument devenir plus forte afin de pouvoir les protéger, mais ce d'une façon différente d'auparavant. De plus, Lee était si concentré lors de leurs sessions d'entraînement qu'elle ne risquait aucune question personnelle qui pourrait la mettre dans l'embarras et l'obliger à mentir à son ami.
Ayant enfin repris une respiration normale, Sakura se redressa et jeta un coup d'œil aux alentours. Etant donné l'heure tardive qu'il était, Lee ne se montrerait sans doute pas. Elle décida donc de rentrer chez elle afin de prendre une bonne douche et pouvoir profiter de quelques heures de sommeil. Coinçant les quelques mèches de cheveux qui barraient son visage derrière ses oreilles, Sakura se mit en route silencieusement, appréciant le calme et la tranquillité inhérents à la clairière où elle se trouvait.
Elle était seulement à quelques mètres de son immeuble lorsque Saï sortit par la porte d'entrée du bâtiment. La repérant immédiatement, il se dirigea vers elle sans que Sakura ne réagisse. Parler avec Saï ne la dérangeait pas. En effet, l'absence quasi-totale de connaissance des sentiments humains de l'ancien membre de la Racine était une bénédiction pour Sakura. Elle pouvait rester elle-même avec lui sans risquer qu'il ne lui demande si elle allait bien et qu'elle se retrouve à devoir lui mentir avec le sourire pour dissimuler ses problèmes. De fait, il était avec Lee la personne qu'elle côtoyait le plus en ce moment, au grand dam d'Ino et de Naruto qui ne comprenaient pas pourquoi elle s'obstinait à les éviter ainsi.
Faisant fi des salutations, Saï aborda directement la raison de sa venue.
- Kakashi-sama nous demande.
Fronçant les sourcils à cette déclaration, Sakura jeta un rapide coup d'œil à sa tenue. Le froncement s'intensifia lorsqu'elle arriva à la conclusion qu'elle était actuellement dans un état déplorable : ses vêtements étaient tâchés de transpiration et déchirés par endroits, ses cheveux sales et quelques coupures s'étalaient sur ses bras et ses jambes.
- Tout de suite ?
Saï qui avait suivi son regard alors qu'elle s'inspectait lui lança un regard critique.
- On a encore une vingtaine de minutes devant nous, tu ferais mieux d'aller t'arranger un peu. En plus, tu empestes.
Sakura lui lança un regard noir : lui et son manque de tact !
- Ça va, je crois que j'ai compris Saï, souffla-t-elle laconiquement. Je n'en ai pas pour longtemps, tu montes avec moi ou je te rejoins après ?
- Je vais monter : la vue par la fenêtre de ta chambre est agréable à cette heure-ci et je devrais avoir le temps de tracer quelques esquisses pendant que tu te prépares.
- Très bien, suis-moi alors.
Alors qu'ils montaient tous deux les escaliers en silence, Sakura aperçut la couverture d'un livre dans la besace de son camarade.
- Encore un nouveau livre ? demanda-t-elle, partagée entre l'amusement et le désappointement que Saï puisse toujours croire qu'il pourrait comprendre les sentiments grâce à cela.
- Oui, Ino m'a invité à manger chez elle demain alors je voulais savoir ce que l'on fait dans ces cas là, répondit tranquillement Saï alors que le regard de Sakura s'éclairait.
« Alors comme ça, Ino continue à prendre les devants ? songea-t-elle, heureuse pour son amie ».
- Apparemment, il faut apporter un cadeau à l'hôte : lorsqu'il s'agit d'une femme, le livre conseille d'apporter des fleurs parce que les femmes apprécient ces choses là, récita sagement le jeune homme brun.
- Ça me semble être une bonne idée, d'autant qu'avec une mère fleuriste Ino adore les fleurs. Mais elle en voit beaucoup du coup… Tu devrais peut-être lui apporter un de tes dessins ? Un portrait d'elle par exemple ? Elle serait ravie à mon avis ! Et, lorsque tu arrives, n'oublie pas de lui faire un compliment sur sa coiffure ou sa tenue, elle sera- Mais ! Qu'est-ce que tu fais au juste ?
Saï arrêta d'écrire et releva les yeux du carnet qu'il tenait dans sa main gauche avant de regarder Sakura comme s'il avait un doute concernant ses facultés mentales.
- Eh bien, je prends des notes, articula-t-il lentement, d'une manière qui laissait supposer qu'il s'adressait à un enfant.
- Fais-moi passer pour une demeurée en plus ! Je vois bien ce que tu fais, ce que je ne comprends pas c'est pourquoi tu le fais, répondit Sakura, exaspérée par le comportement de son coéquipier.
Saï ne lui posait peut-être aucune question embarrassante mais elle avait tendance à oublier à quel point le jeune homme pouvait être fatigant dans certains cas.
- Ce n'est pas ce que tu m'avais demandé, souligna-t-il avant de répondre lorsqu'il sentit l'humeur de la jeune femme s'assombrir rapidement. Je prends des notes afin de pouvoir les relire avant de voir Ino pour ne rien oublier.
- Ooh Saï… soupira Sakura. Ce n'est pas comme si tu devais absolument suivre ces conseils comme s'ils étaient des règles. Ecoute, tu sais quoi ? reprit-elle avec le sourire. Le plus important c'est que tu sois toi-même : c'est comme ça qu'Ino t'apprécie. Et tu verras que tout se passera- Bon sang Saï ! Arrête de tout noter dans ce fichu carnet !
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Quinze minutes plus tard
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Saï et Sakura marchaient rapidement lorsqu'ils aperçurent enfin le palais du Hokage. La jeune femme avait beau eu faire aussi vite que possible, s'ils ne se dépêchaient pas ils finiraient par être en retard. Et tous deux savaient que si Kakashi ne se privait pas d'être en retard, il n'aimait pas les retardataires. N'ayant aucune envie de subir les foudres de leur supérieur, les deux ninjas se hâtèrent et finir par frapper à la porte du bureau où ils étaient convoqués à l'heure exacte où ils devaient arriver.
Après avoir entendu un « Entrez ! », Saï ouvrit la porte et s'effaça afin de laisser passer sa coéquipière. « Encore quelque chose qu'il aura lu dans un de ses livres ! Songea cette dernière, oscillant entre l'amusement et l'exaspération. »
- Ah ! Sakura, Saï ! Parfait, je vous attendais ! s'exclama Kakashi, assis devant un bureau dont le bois avait été presque entièrement recouvert par une montagne de paperasse, sans doute administrative (celle que Kakashi appréciait le moins).
- Kakashi-sama, répondirent en chœur les deux ninjas tout en s'inclinant brièvement.
- Je suis désolé de faire appel à toi pendant tes vacances Sakura mais j'ai besoin de vous pour une mission qui requière vos compétences. Il faudra faire preuve d'analyse et, surtout, de discrétion donc Naruto ne fera pas partie de l'équipe pour cette fois mais je ne m'inquiète pas : je sais que votre duo marche très bien, termina Kakashi, un sourire dans la voix.
En entendant les paroles de son ancien maître, Sakura blanchit brusquement avant de reprendre un air neutre. Elle avait un mauvais pressentiment qui ne tarda malheureusement pas à se vérifier.
- Il s'agit d'une mission de rang A : c'est une mission d'infiltration au pays des fleurs. Depuis quelques temps, une rumeur concernant un groupe de bandits assez fort et bien organisé circule. J'aimerais que vous alliez voir ce qu'il en est et, si la rumeur se vérifie, que vous infiltriez le groupe afin de réunir des informations en vue d'envoyer une équipe à même de les neutraliser. La mission devrait durer entre deux et trois semaines. Vous avez des questions ? termina-t-il.
- Quand devons-nous partir ? demanda Saï alors que Sakura restait muette.
- Demain, à l'aube.
- Très bien, je n'ai pas d'autre question.
Kakashi tourna la tête vers son ancienne élève qui n'avait pas encore réagi.
- Sakura, tu as des questions sur la mission ?
- Je… Euh, non, non… C'est bon, je n'ai pas de question, bredouilla-t-elle sous le regard légèrement étonné du ninja copieur.
- Tout va bien Sakura ?
- Oui. Oui, tout va bien. Je suis seulement un peu fatiguée, mentit la jeune femme en évitant le regard scrutateur de Kakashi.
- Bien…Dans ce cas, je vous souhaite bonne chance ! Soyez prudents et n'hésitez pas à demander de l'aide si les choses tournent mal, recommanda tranquillement l'Hokage.
- Oui Kakashi-sama ! répondirent les deux ninjas.
De retour dans les rues de Konoha, après que Saï ait pris congé, Sakura se hâta de rentrer chez elle tout en réfléchissant à ce qu'il venait de se passer.
« Une mission d'infiltration de rang A de longue durée et nous sommes seulement tous les deux ? Il faut que tout se passe bien. Tout doit absolument bien se passer. S'il vous plaît, faîtes que tout se passe bien, se répétait en boucle la jeune femme. »
A peine arrivée chez elle, Sakura prépara son sac pour la mission qu'elle venait de recevoir. Entassant plusieurs vêtements et quelques rations de survie, elle prit aussi sa trousse médicale qu'elle remplit de bandages, de crèmes cicatrisantes et de médicaments au cas où les choses tournent mal. Elle savait que Kakashi suivait à la lettre l'ancienne politique de Tsunade : chaque équipe qui partait en mission devait avoir autant que faire se pouvait un ninja médecin afin de pouvoir intervenir à tout moment si la vie d'un ninja était menacée. Nul doute que l'Hokage ne les aurait jamais laissés partir s'il avait été au courant de ses problèmes. A défaut de pouvoir utiliser le ninjutsu médical, Sakura avait tout de même quelques connaissances médicales ne requérant pas l'usage de chakra et elle devait s'efforcer de rester le pseudo-médecin de leur duo. Se fixant dans le miroir de sa salle de bains, elle décida de teindre en brun sa chevelure rose, beaucoup trop voyante pour une mission d'infiltration. De plus, depuis la fin de la guerre, elle avait gagné une certaine notoriété et de nombreuses personnes savaient que la disciple de Tsunade possédait une chevelure assortie au nom qu'elle portait : elle prenait le risque d'être beaucoup trop repérable si elle ne la camouflait pas. Une fois ses affaires préparées et ses cheveux recouverts de teinture brune, la jeune femme mangea un léger repas avant de se coucher, espérant dormir cette fois d'un sommeil sans rêve.
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Le lendemain matin, portes du village de Konoha
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Alors qu'elle arrivait au point de rendez-vous dont ils avaient convenus la veille, Sakura discerna la silhouette de Saï qui se dessinait dans le soleil timide de l'aube. Hâtant le pas, elle le rejoignit rapidement. Saï lui jeta un bref coup d'œil, s'attardant quelques secondes sur ses cheveux bruns, avant de prendre la parole.
- J'ai réfléchi à notre couverture et-
- Bonjour Sakura, comment vas-tu ? l'interrompit la jeune fille.
- Pardon ? répondit Saï, médusé du comportement de sa coéquipière.
- Tu vois, c'est vraiment bête mais chez les gens civilisés on se salue plutôt que d'agir comme un homme des cavernes. Finalement, heureusement que ton rendez-vous avec Ino doit être décalé ! Je crois que tu as besoin de revoir un peu tes manières, sinon, quoique tu lui apportes comme cadeau, tu risques de le prendre en pleine figure.
- Et pourquoi cela ?
- Eh bien tout simplement parce qu'Ino est un modèle de délicatesse depuis toujours, ricana Sakura avant de blêmir soudainement. Surtout, ne lui répète jamais ça Saï ! s'exclama-t-elle en secouant son coéquipier comme un prunier.
- Oo- Oui, balbutia le pauvre jeune homme qui ne comprenait décidément pas ce qui pouvait bien se passer dans la tête de sa coéquipière.
- Parfait ! Au fait, tu voulais me parler de quelque chose concernant notre couverture non ?
- Je me demande qui est la personne civilisée et qui est l'homme des cavernes ici… marmonna Saï avant de reprendre. Je disais que j'ai réfléchi et ce qui me semble le plus sûr est de se faire passer pour un groupe de mercenaires indépendants.
- Ce qui veut dire…
- Exactement : pas de ninjutsu. On emploie uniquement le taïjutsu à moins d'une situation d'urgence. Je pense que l'on aura l'air moins suspect ainsi et puis cela nous permettra de garder quelques atouts dans notre manche.
« A vrai dire, cette décision m'arrange vraiment : si on ne doit pas utiliser le ninjutsu, je risque moins de lui paraître suspecte ou de me retrouver obligée à lui expliquer ce qui m'arrive, songea Sakura. »
- Ça me semble être une bonne idée. D'autres points à aborder avant de partir ? demanda-t-elle.
- Non, c'était le plus important. Nous verrons les détails en chemin.
- C'est parti alors !
Les deux ninjas dépassèrent tranquillement les portes du village avant de prendre de la vitesse et de sauter sur les branches des premiers arbres à leurs portées. Le trajet serait rapide, leur destination se trouvant à moins d'un jour de voyage.
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Deux semaines plus tard, pays des fleurs, forêt de Hanaki
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Le corps secoué de tremblements qu'elle ne parvenait pas à réprimer, Sakura essaya de rassembler ses pensées. « Pense de façon rationnelle. Rationnelle. » se répéta-t-elle à la façon d'un mantra. La mission avait plutôt bien débutée : ils avaient rapidement trouvé le groupe de criminels dont Kakashi leur avait parlé et avaient décidé d'observer son fonctionnement pendant deux ou trois jours avant d'aller se présenter au chef de l'organisation criminelle. Ils avaient profité de ce temps d'observation pour élaborer plusieurs plans et revoir ensemble les détails de leurs couvertures. A force de répéter entre eux, leur discours était rodé et semblait naturel : Sakura et Saï étaient sûrs d'eux, leurs véritables identités ne risquaient pas d'être dévoilées.
Après deux jours d'observation et de discussions tactiques, se jugeant suffisamment prêts, ils étaient allés se présenter au chef du groupe, lui proposant leurs services. Après un rapide combat pour estimer leurs capacités, ce dernier avait immédiatement accepté, ne doutant pas de l'utilité future de ses deux nouvelles recrues qu'il jugeait redoutables. Saï et Sakura avaient passé les premiers jours à gagner progressivement la confiance de Takatsuka, le chef du groupe, et des autres membres avant de commencer réellement leur mission. Lorsqu'ils avaient jugé que personne ne semblait les trouver suspects, ils avaient discrètement commencé à fouiner, espionnant une conversation au détour d'un couloir, posant quelques questions innocentes au sujet des opérations mises en place par Takatsuka…
Un peu plus d'une semaine après le début de leur infiltration, ils avaient réunis la majeure partie des informations qui leur étaient nécessaires et ils ne leurs manquaient plus que quelques détails quant à une opération d'envergure que Takatsuka souhaitait mener d'ici quelques temps. C'était en essayant de rassembler les derniers éléments qu'ils leur manquaient que Sakura assista à une conversation qui lui glaça le sang et obtint ainsi l'information qu'ils désiraient. Elle s'était immédiatement reprise et était partie en quête de son coéquipier pour le mettre au courant de ce qu'elle venait d'apprendre : l'opération importante que tous organisaient depuis plusieurs jours déjà consistaient en un kidnapping massif des enfants du village voisin que Takatsuka comptait revendre en tant qu'esclaves au plus offrant. Sans le savoir, il s'était vanté devant la jeune femme de posséder une liste d'acheteurs qui ferait pâlir de jalousie ses adversaires et ferait de lui un homme riche.
Une fois Saï mis au courant, les deux shinobis avaient décidé de prévenir immédiatement Kakashi et de faire discrètement évacuer les villageois pour les mettre en sécurité le temps que Konoha envoie une équipe pour s'occuper du groupe de criminels. Malheureusement, alors qu'il ne restait plus que quelques personnes à évacuer, ils s'étaient fait surprendre par quelques uns des criminels qui avaient immédiatement donné l'alerte. Saï et Sakura s'étaient alors retrouvés obligés de se battre, ne pouvant se permettre d'attendre des renforts. S'ils partaient avec un avantage car ils étaient plus puissants que leurs adversaires, le fait que ces dernies soient largement supérieurs en nombre et que les deux shinobis doivent se battre tout en protégeant les villageois encore présents avaient rendu le combat plus délicat que prévu.
Ils avaient rapidement maîtrisé leurs premiers adversaires mais les quelques uns encore debout avaient commencé à viser non pas les deux ninjas mais les quelques villageois qui n'avaient pas encore eu le temps de s'abriter, essayant de pousser Saï et Sakura à faire une erreur. Leur tactique avait payée quand Saï, déconcentré par le cri d'un jeune garçon, avait baissé sa garde et ainsi écopé d'une blessure assez sérieuse à l'abdomen. Sakura s'était alors débarrassée le plus vite possible de ses derniers adversaires afin d'aller à la rescousse de son coéquipier. Presque arrivée aux côtés de Saï, elle avait vu un de leurs ennemis, inconscient jusqu'alors, s'avancer vers le jeune homme, un sabre dans la main. Horrifiée, elle n'avait eu que le temps de se jeter entre la lame et le corps de son coéquipier tout en dirigeant son dernier kunaï vers la poitrine de leur assaillant qui n'était plus qu'à quelques centimètres d'eux. Surpris par son intervention, l'homme dévia légèrement le sabre de sa trajectoire initiale avant de recevoir le kunaï en plein cœur. Mais, alors qu'il s'effondrait sur le sol, le sabre toujours en main, l'acier de la lame mordit la chair de la jeune femme, faisait apparaître une longue et profonde estafilade sur la peau blanche de sa hanche.
Serrant les dents sous la douleur aiguë, Sakura commença immédiatement à ausculter son coéquipier tout en essayant de voir s'il était conscient.
- Saï ? Saï, tu m'entends ? Saï ? S-
- Oui, oui, je t'entends Sakura. Désolé, je n'ai pas pu l'éviter.
- Mais de quoi tu t'excuses idiot ! Tu as voulu faire passer la sécurité d'un enfant avant la tienne, personne ne peut t'en vouloir pour ça Saï. Moi encore moins ! répliqua la jeune femme, un sourire affectueux sur les lèvres. Bon, c'est plutôt bon signe que tu sois conscient mais la blessure n'est pas très belle : c'est assez profond et la lame n'est passée loin des organes vitaux. Il faut rapidement arrêter l'hémorragie et désinfecter en profondeur pour que tu ne risques pas de faire une septicémie sur le chemin du retour.
- Je m'en remets à toi alors.
Avisant une fillette qui s'était approchée quand elle avait vu que le combat était terminé et qui ne semblait être pas trop apeurée, Sakura lui fit signe d'approcher. Une fois la petite près d'elle, elle lui posa quelques questions.
- Je m'appelle Sakura et toi ?
- Hotaru.
- Okay Hotaru-chan, je vais certainement avoir un peu besoin de ton aide. Tu ne crains pas trop la vue du sang ?
- J'aide toujours maman à soigner papa quand il se fait mal au travail alors j'ai pas peur.
- C'est vraiment gentil et courageux de ta part ça, la félicita Sakura. Très bien, approche-toi un peu plus, je vais avoir besoin que tu appuies fort sur la plaie de mon ami. Tu peux faire ça pour moi s'il te plaît ?
- J'appuie fort comment ?
- Autant que tu peux, d'accord ?
Hotaru acquiesça, déjà concentrée sur la tâche qu'on lui avait demandé de remplir. Pendant qu'elle maintenait la compression, Sakura, elle, réfléchissait à toute vitesse.
« Il faut absolument que j'arrive à refermer la plaie avec le ninjutsu médical. Je peux globalement désinfecter avec des produits mais le ninjutsu médical est plus sûr pour ça et la blessure est trop profonde pour que je prenne le risque de seulement la recoudre. Il faut que ça marche ! J'ai été stupide. Et égoïste ! Comment est-ce que j'ai pu croire que quelques bandages suffiraient si on avait un problème ? La vie de Saï est entre mes mains et je ne peux même pas avoir la certitude de pouvoir le sauver. Quelle sorte de ninja médical fait passer sa fierté avant la sécurité de ses coéquipiers ? se flagella Sakura. Si on arrive à s'en sortir, il faut absolument que je puisse de nouveau réussir à guérir mes équipiers. Je me fiche de ne pas pouvoir me guérir mais il faut que je puisse soigner les autres ! Sinon, j'avouerai tout à Kakashi-sensei… se promit-elle tout en sortant son matériel de sa sacoche médicale. »
Relevant la tête de sa sacoche, elle prépara plusieurs compresses et un puissant désinfectant avant de s'adresser à ses deux compagnons.
- Saï, je vais désinfecter avec des produits avant de le faire avec mon chakra. Je suis désolée, ça risque de ne pas être agréable mais je ne peux pas prendre le moindre risque que la plaie s'infecte et comme je n'ai pas assez confiance en mon ninjutsu médical, je préfère désinfecter un maximum avant, termina-t-elle mentalement.
- Okay, fais ce qu'il faut : je te fais confiance, répondit faiblement Saï, la voix voilée de douleur.
« Je te fais confiance. »
« Je te fais confiance. »
« Je te fais confiance. »
La réponse innocente du jeune homme résonna dans la tête de Sakura, galvanisant encore davantage sa détermination.
« Il croit en moi. Il croit en moi ! Je n'ai pas le droit à l'erreur, je dois y arriver. Je vais te soigner Saï, je te le promets ! »
- Hotaru-chan, tu peux enlever ta main maintenant.
- D'accord. Je peux faire autre chose pour t'aider ?
- Tu peux tremper une compresse dans l'eau et tamponner un peu son front avec, répondit Sakura en commençant à désinfecter la blessure de son ami.
Saï laissa échapper un gémissement de douleur, faisant sursauter Hotaru. Alors qu'elle recommençait à éponger le front du jeune homme, elle fronça les sourcils et s'adressa à Sakura.
- Hm… Dis ?
- Oui ?
- Il va pas aller au ciel hein ? Ma maman elle dit que mamie elle est allée au ciel mais depuis qu'elle y est moi je ne peux plus la voir. Et toi tu vas être triste si tu ne peux plus le voir non ?
- Je serai triste si je ne peux plus le voir, oui, mais il va rester ici. Je ne le laisserai pas aller au ciel et toi, tu es en train de m'aider à l'empêcher de partir loin tu comprends ? répondit la jeune femme sans s'arrêter de désinfecter la plaie.
- Oui, c'est bien alors ! s'exclama joyeusement la petite fille avant de se reconcentrer sur ce qu'elle faisait.
Sakura esquissa un léger sourire en direction de la fillette avant de fixer de nouveau son regard sur la blessure de Saï : elle venait de terminer de désinfecter et elle devait maintenant faire ce qu'elle redoutait le plus : refermer la plaie à l'aide de chakra médical.
« Ça suffit, tu n'as pas le choix ! se morigéna-t-elle. Tu as promis ! Maintenant, arrête de douter et fais ce que tu dois faire ! »
Elle secoua la tête pour chasser toutes les pensées parasites, les doutes et la peur qui la tenaillaient, se concentrant uniquement sur ce quelle devait accomplir. La tâche fût longue et ardue, la cicatrisation lui prenant presque trois fois plus de temps que d'habitude mais elle finit tant bien que mal par réussir à refermer entièrement la blessure. Essoufflée, elle se rendit rapidement compte que l'opération lui avait coûté beaucoup plus de chakra que ce qu'il fallait en temps normal. La question de sa blessure ne se posait plus : si, dans le meilleur des cas, elle avait été capable de se soigner (ce dont elle doutait fortement au vu de ses échecs des précédentes semaines), la quantité de chakra qu'il lui restait était nettement insuffisante. De plus, elle devait en économiser suffisamment pour pouvoir rentrer au village.
Elle recouvrit la plaie de quelques bandages pour protéger la peau fine qu'elle venait de régénérer pour refermer l'entaille avant de jeter un œil à la fillette qui l'avait aidée.
- Je te remercie Hotaru-chan, tu m'as vraiment beaucoup aidée, dit Sakura en souriant à l'enfant.
- Ma maman elle dit toujours qu'il faut aider les gens quand ils ont besoin, récita fièrement Hotaru.
- Ta maman a l'air d'être quelqu'un de très bien, complimenta Sakura.
- Oh oui, ma maman c'est la meilleure des mamans tu sais ! Elle est belle et elle sent bon et elle raconte plein d'histoires et-
- Hotaru !
Le cri avait surgit dans le dos de Sakura. Cette dernière repéra un soulagement sans nom chez la personne à l'origine de l'exclamation : à tous les coups, il s'agissait de la mère de la petite à ses côtés. La jeune femme tourna la tête pour voir arriver près d'elles une femme d'une trentaine d'années. Cette dernière se précipita vers la fillette et la pris dans ses bras avant de la sermonner gentiment.
- Enfin, je t'avais dit de ne pas t'éloigner ma puce ! Maman a vraiment eu peur.
- Pardon maman… Mais tu sais moi j'ai même pas eu peur ! Parce que s'il y avait encore des méchants, Sakura-nee-chan elle m'aurait protégée, pas vrai ? s'assura la fillette en tournant la tête vers la jeune femme.
- Bien sûr Hotaru-chan, sourit Sakura. Mais tu sais, ta maman a raison, tu ne devrais pas t'éloigner comme ça, ça peut être dangereux.
- D'accord, d'accord… Je ne m'éloignerai plus alors maman, promis la fillette avec un sourire angélique, les mains derrière le dos.
- Ne crois surtout pas que je ne sais pas que tu es en train de croiser les doigts derrière ton dos petite chipie ! déclara sa mère en lui pinçant le bout du nez.
Sakura laissa échapper un rire léger : la fillette semblait pleine de vie et les événements récents n'avaient apparemment pas entaché sa joie vivre. Elle se tourna ensuite vers la mère de la petite.
- Votre fille a été d'une grande aide : c'est une petite fille très courageuse, vous devez être fière d'elle, lui dit-elle avec un sourire.
- C'est vrai oui, mais ne lui dites pas trop sinon elle n'hésitera pas à en profiter, répondit-elle avec un sourire complice. Je m'appelle Kaede, rajouta-t-elle. Je tenais à vous remercier pour ce que vous avez fait au nom de tout le village, nous vous devons la vie. Merci beaucoup, termina-t-elle en s'inclinant.
- Oh, non, redressez-vous Kaede-san, je vous en prie ! dit Sakura en agitant les mains devant elle, gênée devant tant de gratitude. C'était tout à fait normal !
- Vous avez mis vos vies en jeu pour nous, nous ne l'oublierons pas. Si vous souhaitez vous reposer quelques jours avant de rentrer chez vous, nous pouvons vous loger et vous fournir de la nourriture ainsi que des médicaments pour votre ami, proposa Kaede.
- Ce serait très généreux de votre part Kaede-san, je vous remercie de votre aide, dit Sakura en s'inclinant.
- C'est tout à fait naturel Sakura-san. Vous logerez chez moi, nous allons vous aider à déplacer votre ami. Si vous avez besoin de la moindre chose, n'hésitez pas à me demander.
- Je pense avoir tout ce qu'il faut comme médicaments mais je ne vous cache pas que nous n'avons pas mangé depuis ce matin et-
- Gaourgbllbll…
La jeune femme s'interrompit avant de rougir en maudissant son estomac qui avait décidé de manifester bruyamment son mécontentement. Devant la gêne de la jeune femme, Kaede transforma son rire en une légère quinte de toux avant de terminer la phrase de Sakura.
- Et vous commencez à avoir faim c'est ça ? termina-t-elle gentiment.
Sakura hocha la tête timidement et allait remercier son interlocutrice pour sa délicatesse quand son coéquipier qu'elle n'avait pas remarqué, se posta à côté d'elle, soutenu par deux villageois.
- Eh bien, c'était vraiment féminin comme bruit ça ! Je comprends mieux pourquoi tu es amie avec Ino : vous avez le même sens de la délicatesse en fait ! s'exclama sans aucun tact son coéquipier, un grand sourire hypocrite vissé sur les lèvres.
- Saï… gronda Sakura d'une voix basse et menaçante. Tu te souviens de notre discussion d'il y a quelques mois sur la notion de tact et la façon dont elle s'est finie ?
Le jeune homme se figea avant de reculer de trois bons pas et de toussoter.
- Je- Je vais aller m'allonger un peu avant le repas… dit-il, semblant encore plus pâle que d'habitude.
- Oui, tu devrais faire ça, confirma la jeune femme avec un sourire ironique pendant que son ami se dirigeait vers la maison de Kaede sous les rires de cette dernière.
- Si je peux me permettre, comment cette discussion a-t-elle finie ? demanda Kaede, un sourire dans la voix.
- Mal pour lui, assura Sakura en riant alors qu'elles atteignaient la maison où ils logeraient pour la nuit.
- J'ai l'impression que vous ne m'en direz pas plus ! s'exclama Kaede. Je vous laisse monter à l'étage, c'est la première porte à droite. Je vous appelle lorsque le repas est prêt, termina-t-elle en souriant.
- Encore merci Kaede-san, vous nous êtes d'une grande aide.
- Je vous en prie Sakura-san.
Sur ces remerciements, Sakura s'engagea dans les escaliers avant de se retrouver face à la porte de la chambre que Kaede leur prêtait. Elle ouvrit doucement la porte et découvrit une pièce aux murs clairs, meublée d'une petite table de chevet coincée entre deux lits simples et d'une commode accolée au mur. Son coéquipier était allongé sur l'un des lits, plongé dans le sommeil, la respiration et le visage paisibles.
« Il avait beau faire le fanfaron tout à l'heure, au final il était vraiment fatigué, songea Sakura, amusée. »
Profitant du fait que son coéquipier soit endormi, elle ôta son haut et se tortilla afin de pouvoir observer la plaie qui recouvrait sa hanche gauche. Elle était moins profonde que la blessure de Saï mais elle devait tout de même trouver un moyen de stopper la légère hémorragie. Réfléchissant rapidement, elle choisit de désinfecter la plaie en profondeur et de la recouvrir d'un bandage serré. De toute façon, elle n'avait pas beaucoup d'autres solutions : elle ne voulait pas refermer la plaie sans utiliser de chakra médical, qui était un désinfectant plus efficace et plus sûr, pour ne pas risquer d'enfermer un germe sous sa peau. Elle soigna rapidement et comme elle pu sa blessure et lorsque Saï se réveilla, elle était en train de ranger le matériel qu'elle avait utilisé dans sa sacoche. Comme il ne disait rien et se contentait de la fixer d'un air songeur, elle choisit le premier sujet qui lui passait par la tête pour lancer la discussion et rompre ce silence pesant.
- Juste à l'heure ! Je pense que Kaede-san ne devrait pas tarder à nous appeler. Tu te sens bien ? Pas de fièvre ou de douleurs ? enchaîna-t-elle à toute vitesse.
- Non, rien de tout ça. Mais quelque chose me travaille depuis tout à l'heure. J'ai repensé à ce que tu m'avais dit et maintenant je me demande pourquoi un ninja médical, l'un des meilleurs qui plus est, choisirait de désinfecter une plaie avec un produit plutôt qu'avec du chakra médical qui est bien plus efficace ?
Incapable de répondre, Sakura demeura muette.
- Autre chose : je t'ai vu soigner Naruto et les autres des centaines de fois. Tu m'as aussi soigné à de nombreuses reprises. Et pourtant je ne t'ai jamais vue utiliser autant de temps et de chakra pour refermer une simple plaie, qu'elle soit peu profonde ou non. Alors tu vois, maintenant je commence à me poser quelques questions Sakura.
- La jeune femme n'entendit presque pas la dernière phrase de son ami tant les battements de son cœur étaient assourdissants. Comment avait-elle pu oublier que les membres de la Racine étaient formés à observer et analyser tout ce qu'ils voyaient ? Il ne comprenait peut-être pas très bien les sentiments humains mais le fait de ne pas comprendre ne l'empêchait absolument pas absolument pas de raisonner de façon logique. A vrai dire, si Sakura condamnait les agissements de Danzo et trouvait intolérable la façon dont il avait entraîné les membres de la Racine, elle avait toujours trouvé la logique froide de son coéquipier exceptionnelle lorsqu'il s'en servait lors d'une mission. Son manque d'expérience dans les relations humaines ne desservait aucunement son intelligence et ses capacités d'analyse : en fait, Sakura trouvait presque qu'elle était, dans certaines situations, un avantage plutôt qu'un inconvénient. Le jeune homme faisait toujours preuve de calme et réfléchissait sans s'embarrasser de sentiments : c'était en partie ce qui expliquait qu'il soit si souvent choisi comme capitaine d'équipe et qu'il soit un atout considérable lors de missions complexes. Elle avait largement sous-estimé Saï et elle s'apprêtait à en payer le prix. Loin de faire cas de ce qu'elle ressentait, Saï continua son discours, inflexible.
- Mais la question la plus importante qui me vient c'est celle-ci : est-ce que tu es encore capable de soigner quelqu'un ?
- Je- Tu as bien vu que oui ! Je t'ai, je t'ai soigné… Je t'ai soigné, répéta-t-elle, désespérée.
- Mais tu avais si peu confiance en tes capacités que tu as préféré désinfecter avant et que tu as fait un bandage après. La plaie était complètement refermée Sakura ! Est-ce que tu craignais qu'elle ne se rouvre ?
- Je… Non, c'était juste… bredouilla la jeune femme, perdue.
- Apparemment, j'ai mis dans le mille, déclara calmement le jeune homme. Si tu crois que je n'ai pas vu que ton comportement avait changé depuis quelques mois, c'est que tu me prends vraiment pour un imbécile. J'ai bien vu l'impact qu'avait eu la guerre sur les autres mais personne n'a réagit comme toi. Et surtout, tout le monde va mieux maintenant, les autres ont pu avancer alors pourquoi plus le temps passe plus tu sembles aller mal ? De ce que j'ai pu observer, c'est plutôt l'inverse qui se produit en général.
Il avait tout compris. Elle avait eu tort de penser que s'il remarquait quelque chose, il ne pourrait néanmoins pas comprendre. Elle devait tout lui dire, tout lui expliquer. Ou tout du moins, une partie.
- Ecoute Saï, c'est… C'est vrai que je ne vais pas très bien depuis quelques temps et qu'à cause de ça j'ai du mal à contrôler le chakra médical mais… Je te promets que je vais faire quelque chose pour ça ! J'ai bien conscience que j'ai agi en égoïste aujourd'hui et que ma fierté a mis ta vie en danger mais… Je vais faire en sorte de remédier à mon problème, je te le promets ! Je ne ferai plus passer ma fierté avant la sécurité de mes coéquipiers alors… S'il te plaît Saï, il faut que tu gardes ça pour toi. Je t'en supplie, ne le dis à personne. Je… Je ne peux pas t'expliquer mais fais-moi confiance s'il te plaît. Ne dis rien… supplia Sakura, désespérée.
...
Le jeune homme fixa longuement sa coéquipière qu'il connaissait depuis quatre ans maintenant. Elle lui avait toujours semblé être quelqu'un d'attentionné et de dévoué à son métier. Il savait aussi que l'on pouvait lui faire confiance et qu'elle ferait n'importe quoi pour ses amis. Et pour cette mission, il avait une nouvelle fois placé sa vie entre ses mains, sans aucun doute, parce que Naruto et elle lui avaient appris qu'une équipe ne pouvait fonctionner sans confiance. Alors, parce qu'ils avaient passé quatre longues années à construire une confiance quasi inébranlable et parce qu'elle était, comme elle aimait lui répéter, l'une de ses premières amies, il décida de faire un acte de foi.
- Très bien, je ne dirai rien, je t'en fais la promesse.
...
Le silence pesant qui s'était installé pendant la réflexion de Saï avait presque paralysé Sakura. Prisonnière de la crainte et de l'anxiété, la jeune femme n'avait pas esquissé le moindre mouvement durant ce laps de temps et avait à peine pu respirer. Lorsque le jeune homme avait parlé, Sakura avait enfin pu prendre une longue et profonde respiration. Elle ne pourrait sans doute jamais assez le remercier pour lui accorder sa confiance après tout ce qui s'était passé.
- Saï ! Je, je ne sais pas comment te-
- J'ai une condition Sakura, la coupa calmement Saï.
- Laquelle ?
- C'est à ton tour de me promettre quelque chose. Avant ta prochaine mission, tu devras me prouver que tu as retrouvé tes capacités médicales et si ce n'est pas le cas, je veux que tu ailles en parler à Kakashi-sama.
La jeune femme le fixa quelques secondes. C'était plus ou moins ce qu'elle s'était promis un peu plus tôt, elle n'y voyait donc aucun inconvénient.
- Je te le promets, dit-elle tout en soutenant son regard avec détermination.
- Bien. Dans ce cas, passons à autre chose. Tu as bien dit que Kaede-san devrait bientôt-
- Saï ? l'interrompit-elle.
- Hm ?
- Merci.
Et cette fois, ce ne fût pas de la détermination que Saï lut dans les yeux de sa coéquipière mais bel et bien une profonde gratitude.
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