Disclaimer : Les personnages de KH utilisés sont les enfants de papa Square Enix et maman Disney, je n'ai (hélas !) aucun lien de parenté avec eux. L'autre personnage est par contre mon petit bébé à moi.

Rate : K+ (le + est pour le langage... enfin et encore.)

Note : Je devrais écrire le chapitre 10 de Ciel et Terre au lieu de poster un nouveau truc ! Surtout que c'est un two shot, alors pourquoi je fais pas les deux morceaux en même temps, hein ? Bonne à rien, celle là...

La vérité c'est que j'ai l'impression que personne ne lit, que personne ne fait gaffe au fait qu'il manque un dernier chapitre, que personne n'attend. Poster sur c'est comme pousser mes gosses sur la scène, depuis les coulisses. J'ai le trac, et eux aussi, j'ai fait ce que j'ai pu pour eux mais maintenant c'est à eux de charmer le public ! Sauf qu'il n'y a pas de public, la sale et vide. Alors ils reviennent vers moi, vers les coulisses, castrés de l'envie d'en sortir à nouveau un jour.

C'est triste, plus ils se cachent moins les gens passent pour les voir, c'est un cercle vicieux. Je suis quand même entrain d'écrire le chapitre 10, parce que je n'écris pas seulement pour qu'on me lise, je veux finir Ciel et Terre, c'est tellement important pour moi. Et je le posterai, bien sûr, pour que ce soit bien fini mais aussi pour les deux trois qui sont là.

Je sais que vous êtes là. Je fais ça pour vous, aussi. Je pense à Neliia, à Clementine, à Plume d'Eau aussi. Bien sûr derrière moi, il y aura toujours Ariani, elle en fait tellement et elle trouve encore le moyen de se dire qu'elle ne va pas assez vite. Je sais que vous êtes là. Merci, les filles.

Ce TS est le kadow d'anniversaire d'Ariani Lee (mais ne vous fiez pas à la date de postage, ça n'a aucun rapport avec son anniversaire)(longue histoire)


- LA PRINCESSE & LA SORCIERE -

– Alors, dit la sorcière recroquevillée sur elle-même, cachée par l'ombre d'un grand capuchon gris. Qu'est-ce que ce sera ?

Il était une fois Roxas. Roxas était en deuxième année de prépa, bien que sa taille suggère plutôt une classe inférieure. Il avait la peau plutôt claire, pour quelqu'un vivant à Lysandros, et des cheveux un peu blonds – et un peu en champ de bataille - mais ses yeux bien bleus ne laissaient pas de doute là dessus. Il était né dans cette ville et y vivrait jusqu'à la fin de ses études, comme c'était le cas pour tous les citoyens mineurs. Pour aller au lycée, il prenait le train aérien, ligne W, de la gare Lysandros à Milo Rive Rouge.

Roxas observait d'un œil mi suspicieux mi inquiet les étagères de bocaux et de poussière, les toiles d'araignées qui reliaient tous les recoins aux poutres apparentes et les formes étranges macérant dans la pénombre ambiante.

– J'ai besoin de me débarrasser de quelqu'un.

#

Cette semaine avait été des plus riches en émotions. Tout avait commencé un lundi soir, quand il avait dit : « Si seulement ils pouvaient avoir un accident de train… »

Il attendait à Milo Rive Rouge le train pour rentrer, accompagné de Namine. Elle pouvait prendre une autre ligne, plus rapide, mais elle préférait faire un détour en utilisant celle-ci, moins malfamée.

– Ils sont toujours après toi ? demanda-t-elle quand un morceau de blanc d'œuf tomba de l'uniforme de Roxas.

– Ouais.

Il n'avait même pas pris la peine de se rincer, il ferait ça chez lui.

– Mais qu'est-ce qu'ils te veulent ?

Roxas éluda d'un geste vague, tout renfrogné. A l'origine, seulement sa place dans la file de la cantine, mais il n'était pas de ceux qui se laissaient marcher sur les pieds, et cette fameuse place, il l'avait défendue bec et ongles. Sauf qu'eux étaient d'un genre détestable et en voyant que Roxas ne se laisserait pas emmerder, s'étaient fait un devoir de lui pourrir la vie. Entreprise laborieuse au début, car le blond le leur rendait bien, mais hélas vite facilitée par l'arrivée d'autres personnes dans le petit groupe.

Et voilà où Roxas en était.

– Si seulement ils pouvaient avoir un accident de train…

Etant donné que les wagons étaient suspendus aux monorails et qu'il n'y avait rien en dessous, ç'aurait été difficile, mais on pouvait rêver.

– Un accident de train, je ne sais pas, répondit Namine, mais… Tu pourrais aller voir une sorcière, non ? Elle te ferait sûrement un charme, ou quelque chose.

– Mmh…

– Ma mère en consulte une, à Lysandros justement.

A Lysandros, les sorcières, c'était pas exactement ce qu'il manquait. Namine tira un bout de papier de son sac et gribouilla une adresse et un petit plan.

– Je crois que c'est là, dit-elle en glissant le mot dans le sac de Roxas

– Hey, balança une voix qui n'avait rien à faire là. Sympa, le look !

Le blond se retourna, très lentement, de façon presque saccadée, comme le font les personnages de cartoon. Il y avait une asperge adossée au mur du bâtiment de la gare.

A cette heure, la gare était déserte, c'était surprenant d'être dérangé par un inconnu. Et très franchement, question look il avait rien à dire. C'était un homme mais à sa silhouette on aurait peut-être pu en douter. Il portait un uniforme de domestique royal et il avait… comment décrire ça ? Ses cheveux… Non, rien, bien trop à dire dessus. Enfin ils étaient rouges, mais c'était un si petit détail au regard du reste.

Roxas ne trouva rien d'élégant à répondre, aussi il se drapa dans (ce qu'il restait de) sa fierté et l'ignora superbement. Namine le détailla un petit moment, en revanche, puis décida brusquement de regarder droit devant elle.

– Hey, insista l'asperge avec un sourire dans la voix, je suis sur le bon quai pour la cité royale ?

Quelque soit la ligne qu'on prenait, l'un de ses terminus était toujours la gare Cité Royale, qui comme son nom l'indiquait abritait la famille royale. Sauf que par rapport à Milo, Lysandros (et Bacchus, la ville de Namine) était à l'opposé.

– Non, abruti, c'est l'autre. C'est marqué partout.

Bizarrement, Roxas trouvait la question d'autant plus énervante que c'était ce mec qui la posait. Le roux haussa les sourcils avec une expression d'abord indéchiffrable, une sorte de surprise un peu inquiétante, avant de lancer un sourire qui se voulait enjôleur. Bêtement.

– T'as pas ta langue dans ta poche, dis-moi !

– N'y vois rien de personnel… Ah, en fait, si !

Bêtement. Il éclata de rire. Roxas essuya du jaune qui menaçait de lui couler dans les yeux. L'effet ''humiliation ayant eu lieu vraiment trop peu de temps avant ce moment'' ne le rendait des plus aimables.

– Tu as un problème avec ma tête ?

– Avec le tout, je dirais !

Pouf pouf, nouvelle crise de rire.

– Tu sais que je suis de la famille royale ?

– Tu m'en diras tant.

– Mais si, mais si !

Toute personne ayant les cheveux rouges faisait cette blague au moins dix fois par jour. Encore plus celles qui allaient vers Cité Royale.

– Comment tu t'appelles ?

Namine tirait sur la manche de Roxas, qui ne s'en aperçut qu'à ce moment là.

– Qu'est-ce que ça peut te foutre ?

– C'est juste histoire de savoir qui je vais faire mettre au trou.

– Bien sûr, allez, casse toi. Ton train arrive.

L'asperge jeta un coup d'œil au loin et détala en constatant qu'en effet, son train arrivait sur le quai d'en face. Namine tirait toujours sur la manche de Roxas, et brusquement ce fait tout simple l'excéda.

– Quoi ?

– Il faisait… vraiment partie de la famille royale.

Ah. Bah tant mieux pour l…

Oh.

Merde

– …tu déconnes.

– J'aimerais bien.

Roxas vit l'asperge monter dans le wagon pile en face de lui juste à temps. Il la regarda partir avec une sueur froide.

#

Le mardi matin, un pot de peinture verte était tombé sur Roxas. Non seulement il avait été repeint, mais en plus il avait fallu l'emmener à l'infirmerie parce que le pot l'avait à moitié assommé – il tombait d'un des étages.

Le mercredi, un professeur vint lui demander si quelqu'un ne le martyrisait pas, et bien que ce fût fort peu à propos, le blond en rit plusieurs minutes. Ça faisait presque deux mois, une chance que quelqu'un le remarque enfin.

Le jeudi, le groupe de brutes lui fit passer le message que s'il le laissait s'en tirer pendant un petit moment, c'était par discrétion, mais qu'il ne s'en tirerait pas à si bon compte en les ayant dénoncés une seconde fois. Et il recroisa l'asperge rouge. Elle lisait un livre devant la gare, assis sur un banc. Roxas essayait de la contourner et de passer discrètement mais se fit remarquer alors qu'elle tournait une page.

– Pas d'œuf, aujourd'hui ?

Lui, il avait pas idée de ce que son statut de prince – ou autre – lui conférait comme prise sur la répartie de Roxas. Qui d'ailleurs ne répondit rien.

– T'as perdu ta langue ?

Pas de coup de poing, c'est passible d'emprisonnement.

– J'ai rien à dire.

Hum… On faisait mieux.

– Ouh, j'en connais un qui m'a cherché sur internet.

– Même pas.

– Ah oui ? C'est ta copine qui t'as dit, alors, non ? Il me semblait bien qu'elle m'avait reconnu.

Maintenant qu'ils étaient à moins de cinq mètres l'un de l'autre, il s'averrait que ce roux à la coiffure ridiculement indescriptible avait aussi des yeux d'un vert chimique.

– C'est… pas ma copine.

C'était compliqué de trouver à répondre quelque chose qui ne soit pas potentiellement irrespectueux.

– Tu flippes à cause de cette histoire de prison ? Je plaisantais tu sais ?

– C'est… Qui plaisante avec ce genre de chose ?

Il haussa les épaules en fermant son livre.

– La famille royale.

Face…

Palm.

– Je t'aime bien, déclara le sang bleu – cocasse, vu ses yeux – d'un ton solennel. Comment tu t'appelles ?

– Roxas Natt.

Le roux lui tendit la main.

– Axel Elko.

Roxas prit sa main pour la serrer et il ajouta :

– C'est extrêmement science fictionnel…

– Quoi ? De se présenter ?

– Et comment ! J'ai pas l'habitude de rencontrer les gens de la population – qui me connaissent pas.

Ni de prendre le train… Ceci expliquait peut-être cela.

– Bon. Ca fait quarante minutes que je t'attends alors j'espère que t'as du temps libre !

– Pardon, quarante minutes ?

– Quoi ?

– Comment dire, un membre de la famille royale est à la gare de mon lycée et m'attend depuis quarante minutes alors qu'on ne se connaît pas et qu'à notre toute première rencontre qui date de moins d'une semaine, j'étais couvert d'œuf et je l'ai insulté.

– Ah ben c'est sûr que présenté comme ça… Je sais pas si t'as l'habitude mais pour moi c'est folklorique, les insultes.

– Et donc t'es revenu pour te faire traiter de crétin ?

Ô diplomatie. D'ailleurs il ne venait pas de lui dire tu ?...

– Si on veut.

– Oh.

C'était une forme de masochisme, ça, non ?

– Entre autres, rajouta le roux avec une sorte de sourire énigmatique. Je te l'ai dit, je t'aime bien.

Roxas haussa les épaules. Il mettait ça sur le compte de sa royalitude.

– Bon alors ? T'es libre ou quoi ?

– Désolé, on est en pleine semaine…

– Et ?

– Eeeeeet, j'ai cours, demain.

A la tête d'Axel, Roxas devinait que sa majesté avait du mal à saisir les contraintes de la vie du petit peuple. De toute façon c'était peut-être mieux comme ça parce que Roxas n'avait pas vraiment envie de lui dire non. Déjà, parce que c'était le prince, et ensuite parce que finalement, maintenant qu'il était calme, ce roux là n'était plus spécialement énervant.

– Alors ça risque d'être compliqué. Enfin, on peut aller manger quelque part mais-

– Non merci, je dois éviter les lieux publics.

– On est dans une gare.

– Oui, et comme tu remarques, y a pas un chat.

Un point pour le prince. Quoiqu'il n'y avait pas un chat pour l'instant. Même si cet instant durait depuis quarante minutes.

– A moins que tu connaisses un endroit désert ?

– Pourquoi il vous faut spécifiquement un endroit désert ? Vous êtes pas le prince ?

L'un des princes, oui (j'ai trois grands frères)

– (Je sais, quand même, je suis pas inculte).

– …mais là officiellement je suis en cours de gestion sociale. J'ai fait le mur.

Roxas haussa les sourcils. C'était du sérieux, la famille royale.

– Dans ce cas, on peut aller dans le parc après la fermeture et manger un McDo.

– Une minute, tu viens pas de me vouvoyer ?

– …

– Aaaah, tu vois ce que j'endure à cause de mon nom de famille ?

– Ok, on reste sur tu.

– Trop aimable. Je crois bien que j'ai mangé qu'une seule fois dans un fast food.

– Pauvre enfant.

Axel lui répondit un nouveau sourire. C'était peut-être un effet du vert chimique de ses yeux mais on aurait dit qu'ils étaient plus lumineux. Il ressemblait vaguement à un chiot qui faisait sa sortie de grand pour la première fois. En se levant, il écarta les bras d'un mouvement théâtral.

– Roxas Natt, tu es mon obligé ! Je te suis.

La soirée serait peut-être un peu longue. En chemin pour le parc, après avoir prévenu sa sœur qu'il rentrerait tard, Roxas eut l'impression de retomber en enfance. Il fallait se cacher à la moindre personne qui passait, ça lui rappelait quand, avec son père, il jouait aux espions dans la rue. A chaque fois, Axel l'empoignait fermement par le poignet ou le coude et le tirait dans un recoin, une ruelle, ou des escaliers. Et à chaque fois, bien sûr, ils s'étouffaient l'un l'autre pour qu'on ne les entende pas rire. Roxas ne l'avait pas reconnu parce que sur les photos et à la télé, il était pas coiffé comme ça – disons plutôt que justement, il y était coiffé, ou du moins il avait les cheveux attachés – mais lui en particulier ne prêtait que peu d'importance à ce genre de chose. Il avait suffit à Namine d'un coup d'œil.

Une fois sur place, il fallut escalader la grille avec discrétion. Le côté silencieux de l'opération manqua de passer à l'as quand les effusions de rire recommencèrent. Bien sûr, une fois à l'intérieur, Roxas dû ressortir pour aller retirer de quoi acheter à manger, puis acheter à manger. Rééscalader avec l'énorme sac dans les mains fut d'autant plus acrobatique. Axel s'était trouvé un banc et profitait de la brise fraîche annonçant la fin de journée, allongé, les bras croisés derrière la tête.

– Qu'est-ce que ça sent ? demanda-t-il quand Roxas arriva, sans ouvrir les yeux.

– La malbouffe, votre majesté.

Le roux pouffa et se redressa pour s'asseoir.

– On mange là ? Sans table et sans couverts ?

– Ouais.

Axel fronça le nez en souriant, avec dans les yeux l'expression de ceux qui accomplissent enfin quelque chose de formellement interdit.

– A te voir, la vie de palais, ça a l'air… pas cool.

Roxas continuait de surveiller un peu son vocabulaire, même si, finalement, Axel était quelqu'un avec qui il était facile de se laisser aller.

– Bah, je suppose que c'est comme toutes les vies. Y a des plus et des moins.

– Comme ?

– Si j'ai envie de rencontrer quelqu'un, je peux le faire convoquer.

– Ah ? T'aurais pu me convoquer aussi, alors, non ?

– Sans ton nom ç'aurait été difficile, et j'ai remarqué que c'était pas du meilleur effet, pour se faire des potes.

Le blond s'installa à côté du prince, posa le sac entre eux et répartit les frites, boissons et burgers. Axel prit le sien et le regarda comme une curiosité, avant de croquer dedans.

– En contrepartie, continua-t-il la bouche pleine, je suis soumis au protocole et tout le toutim – hum, sympa ! Un peu gras. Je dois pouvoir faire la différence entre le couteau à salade et le couteau à fromage.

– Ah ouais.

– Et toi alors ?

Roxas termina sa bouchée, avala une gorgée de coca.

– Moi, répondit-il après un certain temps, baaah… Je dois partager mon appart avec ma sœur, comme aucun de nous n'a trouvé de coloc'… et on galère à trouver un boulot, alors on mange souvent des pâtes.

Une poignée de frites, en levant le nez pour regarder les étoiles.

– Mais bon, on est chez nous, on a plus de comptes à rendre à nos parents, alors je peux découcher sur un coup de tête.

– Tout à l'air si simple… Moi j'aurai toute ma vie des comptes à rendre à l'image publique.

– Ça craint…

Roxas termina son sandwich et s'attaqua aux frites.

– Au fait, dit Axel la bouche toujours pleine, si tu galères financièrement, pourquoi tu m'invites ?

– Parce que t'es un petit peu mon prince. J'en ai eu pour 8,50£ à peu près. Tu veux me rembourser ?

– J'ai pas d'argent sur moi.

Roxas éclata de rire. Son rire n'était pas aussi communicatif que celui d'Axel, mais il l'entraîna malgré tout, et sans problème.

– Alors pourquoi tu demandes ?

– J'ai remarqué que moins les gens ont d'argent, plus ils sont généreux, dans beaucoup de cas.

Le blond haussa les épaules.

– Ça dépend, hein, y a des salops partout.

– Mouais, mais globalement… Je sais pas. C'est peut-être une question de solidarité.

– C'est peut-être plus une question d'ami ou pas ami.

– Huum, tu crois ? Tu donnes les pièces rouges qui traînent dans tes poches aux mendiants, toi ?

– Seulement à ceux qui sont sympa.

– Ben autour de moi, sympa ou pas sympa, c'est pareil. 10£ c'est rien, là d'où je viens, et pourtant j'en connais plus d'un qui préfèreraient les brûler en hiver que d'en faire cadeau à quelqu'un qui en aurait besoin.

Roxas vit passer une étoile filante. Le ciel mauve se tintait d'un bleu d'encre de stylo plume, comme si quelqu'un avait percé une cartouche dans les hautes sphères.

L'image qu'il avait des riches collait assez avec ce que lui confiait Axel. Il termina son coca en méditant là-dessus.

– Y a des trains jusqu'à quand ? S'enquit Axel.

– Oh… tard. Le dernier est à 00h32. Au fait, moi je vis à Lysandros.

– Qu'est-ce que tu fais à Milo alors ?

– Je vais au lycée, je suis en prépa.

– Sérieux ? C'est pas un peu loin ?

– Beaucoup moins que d'ici à Cité Royale, si tu veux mon avis.

Axel soupira, pensif. Roxas tourna les yeux vers lui.

– …t'as toujours pas fini de manger ?!

– Hey, oh, répliqua le prince d'un ton très fier, c'est toi qui va trop vite. C'est pour ça que t'es si petit.

– Je t'… Rhaa, rien.

– Au fait, t'as quel âge ?

– 20 ans tout pile. Et toi, majesté ?

– Majesté, c'est mon père. Appelle-moi Axel.

Il rit un peu, content de lui, et l'ensemble tira un grand sourire à Roxas.

– Okay. Et toi, Axel ?

– 26…

– 26 ans ?

– Quoi ?

– Non, rien… Enfin… Tu les fais pas.

Axel s'éclaircit la gorge avec une lampée de son Ice Tea – Roxas ne savait pas s'il aimait les boissons gazeuses, alors…

– Comment je dois le prendre ?

Pour toute réponse, Roxas lui donna une petite bourrade dans le dos.

Ils restèrent encore ensemble quelques heures, puis la fraîcheur de la nuit et l'heure tardive – l'un avait cours de lendemain, l'autre avait sûrement créé une panique monstrueuse au palais – les firent se séparer, chacun sur un quai.

– Hey ! lança Axel assez fort pour être entendu, quand son train fut annoncé à l'approche. On remettra ça ?

– Si tu veux ! Tu fais quoi le samedi 12 ?

– Ça dépend, tu proposes quoi ?

– On pourrait se trouver de quoi remplir une journée…

– Je fais le mur, alors !

Le roux fut forcé de crier la dernière phrase car son train entrait en gare. Une fois dedans, il s'approcha de la vitre la moins éloignée de Roxas et eu ce geste qui surprit beaucoup le blond : il posa les doigts sur sa bouche, les tendit vers lui, main à plat et paume vers le ciel, et souffla dessus.

Il lui envoya un baiser.

#

« Rester discret » devait être une notion très soumise à l'interprétation personnelle de chacun. Nous étions vendredi et ce midi, une alerte incendie avait éclaté. Un exercice. En revenant dans sa salle de classe, Roxas avait trouvé ses affaires complètement trempées.

Une chance, le mot de Namine était encore lisible, parce que Roxas venait de prendre une décision et celle-ci impliquait l'intervention d'une sorcière.

A Lysandros, il y avait des boutiques de sorcellerie un peu partout, mais globalement elles étaient rassemblées dans un petit quartier. Il en existait de toutes les sortes. Certaines étaient roses et pleines de froufrous en dentelle, d'autres ressemblaient à des supermarchés ou à des boutiques d'antiquités, d'autres encore avaient des allures de salon de thé…

Et pour finir il y avait ça. Un peu à l'écart de la ville, au fond d'une minuscule vallée était plantée une cabane en ruine. Le toit tenait par miracle au dessus de murs troués. Les vitres étaient bouchées par des sacs poubelle noirs. Plus on approchait et plus il faisait sombre, jusqu'à entrer et là brusquement la nuit tombait. C'était exactement comme les clichés les plus stéréotypés qu'on pouvait bien véhiculer sur les sorcières. Cette sorcière là elle-même était un cliché. Tassée au fond de sa cabane, dans une obscurité que même la lumière venant des quelques ouvertures n'arrivaient pas à percer, sous une couche épaisse de tissu sombre, elle semblait être accroupie, voûtée à s'en rendre bossue. Sa tête dépassait d'un cou un peu trop long et il en tombait une pluie de cheveux à la fois raides et emmêlés, très longs, très clairs. Comme délavés par de la javel. Elle ressemblait à une grosse boule grise pourvue d'une tête d'esprit maléfique.

– Entre, petit, dit-elle d'une voix qui, pour le coup, détonnait complètement avec l'ambiance glauque.

C'était une voix… normale. De femme.

La silhouette de Roxas se découpait en ombre dans le grand rectangle lumineux que créait la porte ouverte. Sitôt fut-il entré que celle-ci se referma.

– Ça fait plaisir de voir une tête connue, par ici.

– Pardon ?

– Laisse tomber. Avance !

Roxas hésita très largement avant de faire, allez. Trois pas ?

– Alors, dit la sorcière recroquevillée sur elle-même, cachée par l'ombre d'un grand capuchon gris. Qu'est-ce que ce sera ?

Roxas observait d'un œil mi suspicieux mi inquiet les étagères de bocaux et de poussière, les toiles d'araignées qui reliaient tous les recoins aux poutres apparentes et les formes étranges macérant dans la pénombre ambiante. Est-ce que la mère de Namine consultait vraiment cette sorcière ?

– J'ai besoin de me débarrasser de quelqu'un.

– Gamin, t'es certainement pas assez riche pour acheter une mort.

– Non… Je pensais plutôt à les empêcher de m'approcher.

– Ah ! Ben ça…

Elle bougea.

Le fait même de la voir se mettre en mouvement était surprenant et avait quelque chose de dégoûtant. Ses longs cheveux filasse bougeaient avec raideur à chacun de ses mouvements. En définitive elle ne fit qu'étendre le bras, qui était bien maigre et bien long, mais tout le processus avait semblé complexe et difficile à mettre en œuvre. Elle tira un livre du chaos d'objets, soulevant un nuage de poussière et faisant tomber une avalanche de… choses.

– Alors, souffla-t-elle bruyamment en tournant les pages.

Rien que la vision donnait envie d'éternuer.

– Huuuuuum… Tu dis quoi d'une petite malédiction ?

– Euh…

– Mate moi ça !

Elle fit pivoter le gros volume comme un rien et montra une page à Roxas.

– C'est… écrit en quoi ?

– Ah merde… Bah. Globalement, ça consiste à mettre une distance définie entre toi et les personnes visées.

– C'est plus ou moins ce qu'il me faut…

– Parfait ! Une gare ?

– Hein ?

– Ouais, parfait, parfait. Bon, tu bouges pas.

Et elle se leva. Ou plutôt se déplia. Roxas fut surpris de ne pas entendre son corps craquer de toute part tant le mouvement ne fut pas naturel. On ne voyait pas la silhouette de la sorcière sous son manteau gris, mais on la devinait par endroits, quand elle bougeait, et c'était… c'était incroyablement dérangeant, désagréable à regarder. Elle marcha – on aurait dit que chaque pas lui cassait les jambes – jusqu'à un coin invisible dans le noir, ou elle confectionna quelque chose à l'aide d'ustensiles en métal, à en juger par le bruit, puis se déplaça encore – Roxas s'écarta, il ne voulait surtout pas rester sur son chemin – et fit tinter du verre. Enfin, elle se planta devant le garçon, qui put alors apprécier à quel point elle était immense, lui présenta une sorte de poudre, dans sa main, avant le la lui souffler au visage.

D'une gare de distance

Il faut désormais bannir

Et condamner à l'errance

Toute gent que tu désires.

Puis se redressa.

– Et voilà le travail.

Roxas toussota un peu, en éventant le nuage de poudre qui restait en suspend devant lui.

– Et s'ils ne sont pas sur la même ligne ?

– Ho, hey, répondit la sorcière en se recroquevillant de nouveau, au même endroit, c'est de la magie ! Ils seront bloqués à une gare de la gare qui correspond à la tienne sur leur ligne, c'est tout.

– Okay… ça prend effet quand ?

– Maintenant.

– D'accord. Combien je v-

– Aaaah, déconne pas, Roxas, c'est offert par la maison.

– Ah ? Ben… Merci.

Comme elle lui signifia de partir d'un geste de la main, Roxas sortit, mais une fois dehors, réalisa qu'il ne lui avait jamais donné son nom.