Merci à ma bêta Evalyre ...
Disclaimer : rien à moi sauf les délires et Alec.
NB : la fic commence à la fin de l'épisode « from out of the rain »/ « le dernier souffle » .
CHAPITRE ONE
Jack remit la fiole vide dans le coffre sécurisé de l'Institut et alla terminer de ranger son bureau. Ianto venait de quitter la salle des coffres, l'air maussade et Jack supposa qu'il était rentré chez lui. Le jeune homme semblait affecté par cette nouvelle mission plus qu'il ne voulait le montrer mais Jack savait. Ils venaient de sauver un seul enfant, grâce au caméscope du jeune projectionniste de l'Electro, et ce n'était pas assez. Ce n'était jamais assez. Trop de victimes innocentes. Trop peu de vies épargnées.
Un seul souffle de vie restitué après tant d'efforts cumulés. La déception le gagnait comme elle gagnait les autres membres de l'équipe. Mais le maximum avait été tenté. Ianto n'avait rien à se reprocher, aucune raison de culpabiliser.
Jack entendit des pas dans le Hub central. Il regarda à travers la vitre et aperçut Ianto qui s'installait devant un ordinateur. Mais que faisait-il encore à cette heure tardive? Tous les autres étaient rentrés chez eux depuis longtemps et Jack se croyait seul dans le bâtiment. Il observa Ianto quelques secondes. Le dos voûté, il pianotait sur le clavier avec nervosité. Jack descendit le rejoindre. S'il voulait parler, Jack l'écouterait volontiers. Depuis quelques mois, leur relation était au beau fixe. Ils avaient réussi à se retrouver, à se rendre indispensable l'un pour l'autre. Autant dans le travail que sur le plan personnel. Un véritable Eden où le jeune homme aimait s'attarder avec son amant. Son compagnon. Son alter ego. Car Jack était tout cela et même un peu plus. Ianto ne voyait plus que lui. Il ne respirait qu'une seule odeur, qu'une seule et unique présence. Celle de Jack. Et sans se l'avouer, Jack vivait le même sentiment de plénitude. La même obsession de l'autre. Nuit et jour. Et jour après jour. Ils s'aimaient, tout simplement.
Ianto l'entendit arriver.. Il se redressa et se tourna vers lui, les mains posées sur les genoux, le regard perdu.
- Tu sais que tu ne seras pas payé pour les heures supplémentaires…dit Jack en lui massant les épaules.
Ianto releva la tête en arrière et colla son dos contre son amant. Celui-ci baissa la tête pour déposer un baiser sur son front. Ianto soupira.
- Tu cherches quoi sur google?
- Aucune importance…Jack?
- Oui?
- Tu ne trouves pas terrible, frustrant, le fait de ne pas avoir pu sauver plus d'une personne? Lui demanda-t-il d'une voix lasse.
Jack prit le visage de Ianto entre ses mains, et se baissa pour lui parler à l'oreille.
- Si. Mais nous avons fait tout notre possible. Cela ne sert à rien de culpabiliser. Un proverbe juif dit « quand tu sauves un être humain, tu sauves l'humanité entière ».
Jack commença à tripoter les boutons de sa chemise, laissant glisser ses mains un peu plus bas que la décence ne le permettait.
- Non, Jack. Je n'ai pas envie. J'aimerais que tu me parles de cette période de ta vie. Celle où tu voyageais avec cette troupe itinérante.
Jack se redressa, surpris.
- Pourquoi? Que veux-tu savoir?
- Tout. Comment tu vivais à l'époque. Les gens que tu as fréquentés. Ce que tu as découvert à propos des voyageurs de la nuit.
Jack soupira fortement et libéra le corps chaud. Il n'avait nullement envie de parler de lui mais Ianto avait besoin de comprendre pour se sentir moins inutile.
- D'accord. Tu viens?
Jack prit sa main dans la sienne et tous deux s'installèrent sur le sofa. Ianto passa les bras autour de sa taille, et posa la tête sur son épaule. Tel un enfant à qui on promet une histoire avant de se coucher. Il attendit. Jack fouilla dans ses souvenirs et , caressant le bras de son amant, il se mit à raconter une infime bribe de sa vie. Mais il racontait de plus en plus souvent des bribes infimes de sa vie, et mises bout à bout, celles-ci commençaient à remplir une vie ordinaire d'un homme peu ordinaire. Ianto commençait à en savoir bien plus que quiconque sur le mystérieux chef de Torchwood. Jack distillait plus souvent ça et là des anecdotes sur ses vies passées. Á Ianto. Exclusivement.
- C'est loin dans mes souvenirs, tu sais. Tout ce dont je me rappelle avec précision, c'étaient les galères, les difficultés qu'on avait à glaner quelques malheureux badauds autour de notre scène d'infortune. On vivait chichement. Du moins le reste de la troupe vivait chichement. J'étais en infiltration. Je jouais un double rôle.
- Une seconde nature chez toi, soupira Ianto.
Jack sourit.
- C'est vrai. Mais j'étais le clou du spectacle peu révolutionnaire qui se jouait soir après soir, à travers toute la région.
- Rien a changé depuis. Tu es toujours le clou du spectacle.
Jack releva le menton de Ianto, toujours souriant.
- Tu trouves?
Le jeune homme ne répondit pas.
- Tu as raison. Je suis une curiosité pour tout le monde.
- Ce n'est pas ce que je voulais dire, protesta Ianto en se redressant pour le fixer, avec amour.
- Tu veux dire que je suis le spectacle à la mode, encore aujourd'hui?
- Arrête de faire le paon. Continue ton histoire.
Ianto reposa sa tête sur son épaule.
- Soit. Mais toujours est-il que j'étais la curiosité du moment. Je me faisais sauter la cervelle par balle chaque soir et m'effondrais sur la scène branlante avant de me relever frais comme un gardon sous les yeux ébahis de l'assistance.
- L'homme qui ne pouvait pas mourir. Oui je sais.
- Non, Ianto. L'homme qui ressuscitait. C'est bien plus romanesque!
Jack sentit sans le voir le sourire de Ianto.
- Les balles étaient réelles. Mes morts aussi. C'était bien plus spectaculaire, s'emballait le Capitaine.
- Abrège, tu veux bien. Raconte.
- La misère. Le froid. La fatigue. Nos trois compagnes. Mais aussi les soirs de beuveries. Les rencontres instructives. Les nuits d'orgie…
Jack fit une pause. Ianto aurait du réagir à ce détail. Pas du tout!
- Les nuits où pour se réchauffer on se vautrait tous dans la luxure la plus dépravée. Sans savoir qui on contentait, qui nous réchauffait…
- Tu es lourd, Jack.
Jack fut satisfait. Il se mit à rire tandis que Ianto abandonnait ses bras pour s'avachir contre le sofa.
- Quoi? Je te raconte ce dont je me souviens. Qu'est-ce que tu veux savoir au juste? Rouspéta l'immortel, qui ressentait déjà le manque de l'autre contre lui.
- Je veux savoir quelle genre de vie avaient ces saltimbanques. Pas avec qui tu baisais.
- Tu n'es pas intéressé par mes prouesses sexuelles? Je suis déçu…
Ianto lui jeta un regard noir.
- Je connais tes prouesses. Celles que tu exécutes au boulot comme celles que tu improvises au lit.
- Que j'improvise? Non, je suis outré d 'entendre ça.
Jack minaudait encore et encore. Il voulait que Ianto lui parle et non l'inverse. Le jeune homme devait se confier à lui, il en avait tellement plus besoin que lui. Jack s'échina à trouver comment l'amener à lui parler mais il n'y parvenait pas. Un silence s'ensuivit. Une pause que Jack apprécia. Les mots sont parfois vains.
- Tu as déjà été…Tu sais si tu as été père? Fit Ianto, hésitant.
Jack comprit. L' enfant sauvé des griffes des voyageurs de la nuit. Tout lui revint comme une évidence à présent. Ianto avait été bouleversé par cette mission sauvetage. Douloureusement impuissant face aux autres victimes de cette soirée. Et visiblement soulagé, ému aux larmes, par le retour à la vie de ce pauvre chérubin désormais orphelin et seul au monde. La fibre émotionnelle du jeune homme venait de vivre une pénible défaite. Jack s'empara à nouveau des épaules de Ianto et l'invita à reprendre sa place au creux de son épaule attentive et rassurante.
- J'ai dû l'être de nombreuses fois, Ianto. Tu me connais. Généreux dans l'action. Impulsif et endurant. Lui murmura-t-il, très sérieusement. Mais…je n'ai jamais rencontré un seul spécimen de ma progéniture. Je ne suis pas du genre à m'attarder jusqu'au petit déjeuner au lit, ou ailleurs. Ianto?
- Mmm?
- Pourquoi cette question?
Ianto leva les yeux vers lui, l'air vague.
- Je ne sais pas trop. Je voulais savoir. Est-ce que tu aurais aimé connaître l'un d'eux?
Jack inspira profondément. Il ne savait pas quoi répondre. Il ne s'était que trop rarement posé la question lui-même.
- Je suppose que oui. Si ça se trouve, tu es l'un d'eux?
Jack repartait dans la badinerie. Cette conversation prenait une teneur un peu trop sérieuse pour lui. Et vue l'heure tardive, il ne se sentait pas très « métaphysique » pour cela.
- Je connais mon père. Il ne te ressemble pas du tout. Il est petit, trapu, légèrement rondouillard et presque chauve…dit Ianto, amusé.
- Chauve? Quelle horreur! J'espère que tu tiens plus de ta mère et que tu garderas cette adorable tignasse indéfinissable sur le crâne.
Il lui gratta la nuque.
- Oui je tiens plus de ma mère. Sauf pour son goût en matière d'hommes. Elle est médiocre dans ce domaine.
Ianto loucha vers lui, l'œil malicieux.
- Tandis que tu as des goûts de premier ordre sur ce plan. Perfectionniste jusqu'au bout des ongles! S'amusa Jack.
- J'hésite à te donner un surnom définitif. Entre « Monsieur trompe-la-mort » et « Monsieur le père de la vanité ».
- J'aime te savoir ainsi concentré sur moi. Que dirais-tu de « Monsieur -je-veux-mon-Ianto-pour le meilleur et pour le pire »?
Jack s'étonna lui-même. Il voulut s'empresser d'ajouter « non, c'est pour rire » mais Ianto fut plus rapide.
- Quoi?
- C'est ta faute. Tu m'as parlé de père, de mère, d'enfants. Tout ce qui implique mariage. Mais c'était pour rire, Ianto. Dit-il en s'excusant presque.
- Je refuse le mariage. Regarde celui de Gwen. J'aime autant pas.
Ianto s'en tirait avec une pirouette que Jack trouva bienvenue. Ils se mirent à rire doucement. Ianto pour masquer son trouble. Jack, quant à lui, pour ne pas faire resurgir dans son esprit ses authentiques mariages en bonne et due forme.
Le Capitaine reprit le récit de ses aventures au sein de la troupe de pseudo artistes et raconta à Ianto comment il avait failli mourir une fois de trop.
- Ce soir-là il faisait vraiment froid et il pleuvait des cordes. J'exécutai mon tir comme d'habitude et tombai raide mort sur la scène. Seulement j'avais mal calculé la distance qui me séparait du bord de la scène. Il pleuvait si fort que je m'étais instinctivement reculé pour rester à l'abri sous la tenture. Je suis tombé en arrière et ma tête a heurté le piquet en fer rouillé qui supportait le toit en bâche. Et lorsque je revenais doucement à la vie, je n'ai pas eu le temps d'inspirer l'air salvateur et la foudre percuta le poteau en fer et m'électrocuta net. Je sombrais à nouveau dans la mort.
- Et alors? Demanda Ianto, captivé.
- Alors , je suis resté raide mort une bonne partie de la nuit. Les clients avaient exigé leur remboursement et la troupe avait fait chou blanc à cause de moi.
- Tu n'y étais pour rien.
- C'est vrai. Mais je leur ai donné ma part de bénéfices de la semaine pour ne pas me faire virer. J'ai vraiment cru que ma « particularité » pouvait disparaître d'un coup. Un coup double porté à ma personne et j'étais bon pour le sommeil éternel.
- C'est vrai qu'après ton face à face avec Abaddon tu as failli y rester, lui rappela Ianto.
Le jeune homme le regarda fixement.
- Et si ça t'arrivait, un jour? Si tu tombais face à plus fort que toi et que tu mourrais?
Jack lui sourit.
- Non. Je sais de source sûre que cela ne peut pas arriver. Je suis une aberration. Mon existence échappe à toutes les lois physiques et temporelles. Tu aimes une illusion. Un illogisme.
Ianto retourna se reposer sur son épaule.
- Pas si illusoire que ça. Demande à Alec ce qu'il en pense de cette illusion.
La voix du jeune amant était faible, sans colère apparente.
- Je croyais que nous en avions terminé avec lui.
- Je le croyais aussi.
- Pourquoi m'en reparles-tu, Ianto?
Jack se sentit nerveux. Mais Ianto renforça son étreinte autour de sa taille.
- Excuse-moi. Je n'aime pas quand tu parles de toi ainsi. Tu n'es pas une curiosité, ni une erreur de la nature. Je n'ai jamais vu des erreurs aussi réussies.
Soulagé, Jack continua le récit de ses pérégrinations.
- Je me souviens aussi d'une jeune femme. Elizabeth. Elle était contorsionniste et sacrément souple. On passait pas mal de temps ensemble. Elle était belle, drôle et très acoquinée avec le jongleur de la troupe. Comment s'appelait-il? Clive, oui c'est bien ça. Clive. On en est venus aux mains lui et moi. Il pensait que je flirtais avec Liz.
- Et c'était le cas? Fit Ianto un peu trop vite.
- Ma foi, oui. Il fallait bien que je m'enracine au milieu de cette bande de pochtrons.
- C'était la seule raison?
- Eh bien, autant joindre l'utile à l'agréable. Cela ne m'engageait à rien de m'amuser un peu avec elle.
- Je m'en doute. Rien ne t'engage jamais à rien. Persifla Ianto.
- Ça signifie quoi?
- Rien. Continue.
Jack s'énerva.
- Non. Qu'est-ce que tu as voulu dire? Je viens de te demander en mariage et tu persistes à dire que je ne veux pas m'engager?
- Bon, tu as fini de me fatiguer, dit Ianto en se levant. Je rentre me coucher.
Jack resta interdit. Ianto alla chercher son manteau.
- Tu pars?
- Que veux-tu que je fasse d'autre? Lui rétorqua le jeune homme en s'habillant.
- Que tu restes ici, pardi! Tu n'as pas envie de faire un petit jeu?
- Non. Je suis fatigué. Je rentre.
- C'est un comble. On n'est même pas mariés et déjà la routine s'installe dans notre couple!
Ianto sourit malgré lui à la blague. Jack se leva, déçu.
- Bonne nuit. A demain.
Et le Capitaine remonta dans son bureau. Ianto l'observa un instant. Jack n'était pourtant pas en colère contre le jeune homme. Il comprenait que ce dernier ait besoin de calme et de sommeil pour se remettre de ses émotions. Ils auraient tout le temps de « jouer » une autre fois. Bien d'autres fois. Car il fallait être en pleine forme physique pour se lancer dans un tournoi ludique avec le maître de jeux qu'était Jack Harkness. Sinon, c'était moins drôle. Et surtout plus rapide.
Toutefois, Jack constata avec regret qu'il n'avait pas été à la hauteur des attentes de Ianto. Le jeune homme avait quelque chose de précis sur le cœur et Jack ne lui avait pas permis d'en parler. Il s'était lancé dans une histoire à peine divulguée, ponctuée de simples anecdotes sans grand intérêt. Il avait joué la facilité, l'esquive. Peut-être avait-il deviné ce à quoi pensait Ianto et peut-être était-ce là la raison pour laquelle il s'était en quelque sorte préservé en racontant succinctement cette période de sa vie. Il réalisa qu'il ne lui avait même pas parlé des voyageurs de la nuit. Il n'avait même pas évoqué la façon dont ces terribles créatures avaient terrorisé la population d'alors. Semant la panique générale. Responsables de la disparition inexpliquée de tant de victimes. Ianto n'avait pas besoin d'en savoir davantage. Ianto cherchait à savoir ce que lui, Jack, avait réussi ou pas lors de son infiltration. Et il pouvait se l'avouer, il n'avait pas réussi grand chose. Autant oublier cet échec cuisant.
Il était très tard lorsque Jack se prépara pour une bonne mais courte nuit de sommeil. Quelque chose le tracassait sans qu'il ne puisse mettre le doigt dessus. Que voulait savoir Ianto au juste? La vénérable dame âgée qu'ils avaient rencontrée à Providence Park avait dit au jeune homme que les voyageurs de la nuit l'avaient touché. Jack avait bien entendu. Il avait perçu le trouble de Ianto lorsqu'elle avait dit ces mots. Le souvenir de cette visite le fit frissonner. Cette vieille femme les avait percés à jour lui comme Ianto. Sans les connaître. Avait-elle été touchée, elle aussi, par ces démons de l'invisible? Si oui, Jack comprenait pourquoi le jeune homme était si déstabilisé par cette mission. Et pourquoi des doutes profonds le tenaillaient. Jack s'en voulut. Il aurait du retenir Ianto et lui donner les réponses qu'il cherchait.
« Demain est un autre jour. ». Jack avait l'éternité pour réparer son oubli.
- Pourquoi ne pas lui avoir dit la vérité?
- Je ne veux pas qu'il sache tout de moi. Cela ne le concerne pas.
- Vous me l'avez dite, à moi. Il y a une raison à cet aveu?
Alec avait encore piqué au vif. Il était allongé sur l'herbe fraîche dont la senteur épicée leur chatouillait les narines. Il avait ses bras croisés derrière sa nuque. Jack, assis, près de lui, son manteau soigneusement plié à côté, les coudes sur ses genoux, sembla hésiter un instant.
- Je peux tout vous dire, Alec. Je ne sais pas pourquoi mais je pourrai répondre à toutes vos questions…
- Vraiment?
- Demandez-moi ce que vous voulez. Vous verrez bien, fit Jack, qui sentit une main baladeuse sur le bas de son dos. Leurs regards se croisèrent, la main remonta dans son dos. Le visage fin et hâlé de l'expert se rapprocha. Main et visage finirent leur route commune sur la nuque de Jack. Une caresse et un baiser, aussi chaud l'une que l'autre. Jack baissa la tête pour offrir sa peau aux lèvres d'Alec qui plongea sa main dans ses cheveux. Sa bouche gourmande vint lui taquiner le lobe de l'oreille avant de rejoindre la sienne pour un nouveau baiser parfait. Il planta son regard dans le sien, sourit avec malice et posa sa question.
- Es-ce que vous m'aimez plus que vous n'aimez Ianto?
Jack rit avant même d'avoir entendu le prénom « interdit ». Il s'y attendait. Quelle autre question Alec aurait pu vouloir lui poser? Jack lui avait apporté l'occasion en or sur un plateau tout aussi rutilant.
- Quelle originalité, Alec. Si je m'y attendais ! Plaisanta-t-il.
Il passa son bras autour de la taille de l'expert, tâtant avec plaisir le soyeux de sa chemise blanche.
- En ce moment, je n'aime que vous.
Alec, agacé, dégagea le bras de Jack et se leva en grognant. Lui aussi s'attendait à une réponse de ce genre. Une réponse sans queue ni tête digne du beau ténébreux qui le rendait fou de désir et fou d'amour.
- C'est une marotte chez vous, Capitaine Harkness. Parler pour ne rien dire. Ou plutôt ne rien dire tout en parlant. Oui, c'est la même chose au final.
Jack sourit, amusé de voir son amant fouler nerveusement l'herbe. Il balançait ses jambes l'une après l'autre comme s'il jouait au ballon. Mais il revint rapidement vers Jack qui s'était également levé, et ramassait son manteau.
- Alors?
- Alors quoi? Demanda Jack en enfilant son pardessus.
Alec secoua la tête, à la fois sérieux et espiègle.
- Répondez-moi, franchement.
- Je vous réponds si vous répondez à ma question.
- Allez-y. Je n'ai rien à cacher.
- Est-ce que vous m'aimez plus que Claire?
Perplexes et sur le qui-vive, les deux hommes se dévisagèrent. Qui allait céder en premier? Certainement pas Jack. Pas plus qu'Alec. Ces deux-là se ressemblaient trop pour se surprendre l'un l'autre.
- Match nul, concéda Alec, qui ramassa sa veste. Mais je reviens à ma question de tout à l'heure. Qu'est-ce qui vous empêche de dire à Ianto que vous avez une fille et un petit-fils?
- Je lui en parlerai un jour. Cela peut attendre.
- Soit. Mais je vous trouve frileux sur ce coup. Avez-vous peur de perdre de vos charmes si vous lui disiez tout ce qu'il demande à savoir de vous? Le mystère entretient la fascination.
Jack commença à marcher vers la sortie du parc où ils étaient venus se reposer, seuls, tranquilles.
- C'est mon mystère qui vous fascine? Je suis fort marri. Je croyais que vous étiez fou de mon corps d'athlète . De mes talents physiques. De …
- Avez-vous fini de vous pavaner?
Ils gloussèrent, et une fois sortis du parc, arpentèrent le bitume du trottoir qui longeait Clyde Street
- Cela dit, je suis certain de ne pas connaître la totalité de vos talents physiques. Dit Alec lorsqu'ils traversèrent la rue qui les menait à leur hôtel. Vous avez encore beaucoup à m'apprendre, non?
Jack, jusque là absent, perdu dans ses pensées, retrouva son habituel don pour la pitrerie.
- Je ne suis pas d'humeur professorale ce matin. J'ai envie d'être votre élève, pour changer.
Le visage déboussolé de l'expert l'enchanta. Sans aucune hésitation, il prit Alec par la main et pressa le pas. Il avait hâte de commencer la leçon de choses.
- Je suis expert en chimie, Jack.
- C'est parfait. Tout n'est que chimie entre nous, non?
Alec courait presque pour atteindre la cadence des pas de Jack. Il avait certes des jambes aussi longues que les siennes mais son allure tenait plus de la promenade que du sprint olympique. Ils entrèrent dans le hall de l'hôtel. Alec était hors d'haleine. Jack à peine essoufflé. La réception était déserte. Jack s'empara de la clé accrochée au panneau et entraîna son amant au deuxième étage. Dans le monde idyllique de Jack, les classes commençaient toujours par une longue récréation peu scolaire. Mais dans le monde idyllique de Jack, les femmes de ménage n'existaient pas. C'est en apercevant deux d'entre elles, occupées à refaire leur lit qu'il revint à la réalité. La salle de classe était momentanément hors service. Alec refoula un rire nerveux, et grimaça de dépit. Seulement l'élève Harkness avait soif d'apprendre, et sa main dans celle de son amant, il entra sans crier gare dans la chambre.
- Mesdemoiselles, je vous dispense de ménage pour la journée. Veuillez libérer immédiatement cette chambre. Nous devons procéder à une inspection fouillée de la pièce.
Les deux auxiliaires, qui n'étaient plus des demoiselles depuis un certain temps, le fixèrent, dubitatives. Leurs regards rivés sur les deux mains enlacées, elles firent preuve d'une grande vivacité d'esprit et quittèrent la pièce sur un sourire de circonstance. Jack leur rendit leur sourire, avec un clin d'œil en bonus, et referma la porte derrière elles. Alec se mit à rire.
- Vous ne manquez pas de souffle ! Je suis connu ici, Jack. Nous sommes dans ma ville, à Glasgow. Je tiens à rester discret.
- Alors faites en sorte que je ne sois plus excité comme un taureau dès que je suis avec vous!
- Je suis sérieux, Jack, protesta Alec, alors que Jack s'approchait de lui en enlevant son manteau.
Alec recula, réellement sérieux.
- Assis, élève Harkness! Fit-il sur un ton péremptoire.
Jack obéit et s'installa sur le bord du lit à moitié refait.
- Professeur McNeil?
- Oui, élève Harkness?
- Quel est votre fantasme le plus fou?
Jack s'allongea carrément sur le lit, calant l'oreiller confortablement sur sa nuque. Alec commença à faire les cents pas devant lui, l'air absorbé, il jouait encore au maître d'école. Un sourire illumina son beau visage.
- J'aime assez l'idée de vous torturer pour vous abandonner avec les stigmates de ma passion sur tout votre corps!
Jack haussa les sourcils. Alec avait le don de le surprendre malgré tout. Il ne faisait pas dans la demi- mesure. Il optait pour la surenchère mais sans jamais perdre en crédibilité. Et encore moins en sincérité. Personne ne lui avait répondu aussi follement.
- Grand Dieu ! Quelle éloquence ! Vous me prenez pour le Christ?
Alec ne put s'empêcher de rire. La comparaison était des plus blasphématoires mais Dieu existait sans doute. Du moins pour lui, sinon comment expliquer le magnifique hasard qui les avait réunis? Alec fouilla du regard la chambre.
- Vous cherchez quoi? Lui demanda Jack, toujours installé à son aise.
- Quelque chose pour vous crucifier ! Lui dit Alec sans sourciller. Ah, j'ai trouvé!
L'expert ouvrit le tiroir de la table de chevet et en sortit un mouchoir, qu'il enfonça dans la bouche de Jack. Ce dernier secoua la tête mais ne retira pas le tissu pour autant.
- Notre bien-aimé Seigneur a souffert en silence. dans la plus totale miséricorde.
Le sourire aux lèvres, Alec chercha dans sa sacoche son téléphone portable. Il recula contre le mur, face à Jack, et le prit en photo. Jack cracha le mouchoir et se redressa.
- A quoi vous jouez, Alec?
- Mais vous avez raison. Où avais-je la tête? Cela ne rime à rien si ce n'est pas fait dans les règles de l'art.
Il défit sa ceinture et attacha solidement le bras de Jack au barreau du lit. Mais Jack était parfait, car il avait deux bras. Il défit la ceinture de l'immortel et emprisonna l'autre bras.
- C'est loin d'être original, vous savez. Vous n'êtes pas le premier à vous prêter à ce jeu-là.
- Oh mais je n'ai pas fini. Veuillez vous taire Harkness!
Et il lui remit le mouchoir dans la bouche.
Sous les yeux ébahis de Jack, Alec sortit de la chambre, laissant la porte grande ouverte et descendit par l'escalier. Jack sentit son cœur battre de plus en plus vite. A quoi devait-il s'attendre de la part de ce serpent incontrôlable ? De longues et angoissantes minutes s'égrainèrent avant que Jack n'entende à nouveau des pas dans l'escalier. Mais ce qui l'entendit ensuite le paralysa de honte. Alec revenait mais il n'était pas seul !
- J'avoue que c'est un peu délicat, mademoiselle. Quel est votre prénom?
Jack entendit la femme lui répondre qu'elle se prénommait Alice, et il décida de fermer les yeux. Éviter de regarder, Jack le pouvait, mais échapper à la conversation, autre histoire. Alec le paierait cher.
- Vous voyez, disait Alec en entrant dans la chambre, je l'avais laissé là, sur la table. Et il n'y est plus.
- Euh…oui…euh…balbutiait la jeune Alice.
Maudit Alec McNeil. Il le paierait très cher.
- C'est un porte-clé banal mais j'y tenais beaucoup.
- Euh…oui…euh…je comprends bien, monsieur.
Jack, n'y tenant plus, recracha le mouchoir et hurla en ouvrant des yeux qui auraient trucidé Alec si ses prunelles avaient été des lames.
- Alec Mc Neil ! Détachez-moi immédiatement! Alice, cet homme est fou et dangereux. C'est un Docteur Frankenstein à la petite semaine. Il veut me découper en morceaux pour je ne sais quelle sordide expérience !
La jeune Alice restait plantée sur le seuil de la porte, tétanisée. Alec agita les mains pour lui assurer que tout était normal.
- Non, Jack, fit-il en regardant tour à tour le Capitaine et la réceptionniste. C'est juste votre cœur que je veux prendre. Je vous l'ai déjà dit.
Les deux hommes se toisèrent un court instant avant de pouffer de rire. Puis l'expert qui ne perdrait rien pour attendre se retourna vers Alice.
- Je suis désolé, Alice. C'est une farce que je voulais faire à mon ami. Il n'oubliera pas de sitôt cette petite facétie sans méchanceté. N'est-ce pas? Ajouta-t-il en regardant fixement Jack.
- Alice, auriez-vous un petit foulard à nous prêter pour compléter le tableau? C'est pour me bander les yeux. Demanda Jack, totalement remis de ses émotions.
Ce fut au tour d'Alec de rougir sensiblement.
- Jack !
- Euh…non….hum, je suis désolée , je dois vous laisser.
Alice, livide et cramoisie à la fois, disparut en vitesse dans le couloir. Alec referma la porte. Il s'approcha du lit, l'air satisfait, et libéra Jack.
- Quoi? C'est tout? Se plaignit celui-ci.
- Je ne suis pas friand de ce genre de relations.
Alec s'effondra sur lui et l'embrassa sauvagement
- J'ai d'autres armes pour vous torturer. Et il est hors de question que je vous découpe en morceaux, Jack. Je vous préfère entier, tout à moi.
Jack avait déjà oublié de punir l'effronté pour sa blague puérile, il était venu pour apprendre. Et la leçon pouvait enfin commencer.
Jack fit basculer Alec sur la gauche et se retrouva en position de force, sur son amant. Alec agrippa ses hanches comme s'il voulait éviter de se noyer dans l'azur de ces yeux qui le dévoraient. Les hanches de Jack étaient sa bouée d'air neuf , sa bouffée de liberté, de totale plénitude. Leurs souffles chauds et saccadés se parlaient sourdement, se remplissaient tour à tour l'un de l'autre. Jack inspirait. Alec soupirait. Ainsi de suite, dans un langage muet mais bavard. Les deux hommes ne bougeaient pas , ils s'admiraient en silence. Ils se gorgeaient de souvenirs à emporter avec eux quand le moment viendrait, inéluctablement. Leurs bouches se frôlaient, mutines, rieuses, séductrices. Leurs cils papillonnaient en même temps. Jack brisa cet instant de grâce. Jack était plus un homme d'action que de contemplation. Ses hormones le ramenèrent à la réalité.
- Alors, professeur McNeil. Quelle est la leçon du jour? Fit-il dans le souffle de l'autre.
- Je ne sais pas trop. La fusion des corps en ébullition? Osa Alec.
- Pas plus originale que votre blague de tout à l'heure…
- Je sais bien mais …vous m'écrasez Jack! Avoua l'expert qui remonta ses mains sur les épaules du Capitaine tout confus.
Jack se renversa sur le côté.
- Je suis désolé, Alec. S'excusa-t-il en riant.
- C'est moi qui suis censé vous torturer, pas l'inverse, lui rappela Alec en réajustant sa chemise froissée. Jack lui sourit. Il s'allongea sur le dos et scruta le plafond, l'air vague.
- Á quoi pensez-vous? Lui demanda Alec.
- Á vous.
- Vraiment?
Alec se colla contre son flanc, passa son bras autour de son torse, et faisant glisser la bretelle, lui murmura.
- Voilà qui est original. D'habitude l'on pense à quelqu'un lorsque ce quelqu'un est ailleurs…
- Justement. J'ai l'impression que vous n'êtes pas là et que j'enrage de vous espérer.
Alec s'accouda sur l'oreiller et le fixa, troublé.
- Vous êtes sérieux? Je ne comprends pas.
Jack passa une main sur la joue douce d'Alec. Il était si bien. Il aimait la douceur, la présence apaisante de l'expert. Son humour caustique et ses manières appuyées. Il ne pensait plus à faire l'amour. Seul comptait le calme et l'alchimie du moment. Alec l'interrogeait de ses yeux verts éclatants et pénétrants. Mais lui non plus ne cherchait pas à s'adonner à l'acte sexuel.
Alec était bien. Serein.
- Je suis bien là, Jack, je vous assure. Et tant que vous voudrez de moi, je serais là. Je reviens.
- Non, non ! Ne partez pas !
Jack cria de toutes ses forces. Il bondit hors du lit, les bras en avant, pour retenir son amant…son amant Ianto. Ianto?
- Je reviens, je te dis. Le café est prêt.
Jack se balança d'avant en arrière le temps de retrouver l'équilibre. Les yeux grand ouverts, il constata alors, avec stupeur, l'absence d'Alec, la présence de Ianto. L'absence du lit. L'ennuyeuse présence du Hub. Jack n'avait fait qu'un drôle de rêve, si vrai, si fort, qu'il lui avait semblé le vivre intensément.
La jeune Alice n'existait donc pas? Pas plus que les deux femmes de ménage. Alec n'avait pas osé l'humilier en public pour l'exciter un peu plus?
Jack secoua la tête et cligna des yeux plusieurs fois avant de se rendre à l'évidence. Sa montre indiquait presque 7h et demi et Ianto s'approchait de lui , un mug dans les mains et un questionnement dans les yeux.
- Tu vas bien, Jack? Lui demanda-t-il en lui offrant son café.
Jack l'examinait presque scientifiquement, comme s'il se trouvait face à un fantôme, une hallucination. Qui des deux hommes, Ianto ou Alec, était véritablement une hallucination? Le second, hélas pour lui.
Jack tourna le dos au jeune homme. Il prétexta une affaire urgente à régler depuis son bureau.
- Je vais bien merci. Et merci pour le café. Quand tu auras fini ton petit déjeuner, je te confie la rédaction du rapport de l'Electro, ok?
Sans attendre de réponse, Jack referma la porte de son bureau.
Non, cela ne pouvait pas être qu'un simple rêve ! Jack avait encore le goût d'Alec dans la bouche. Il frissonnait encore à ses caresses dans son dos. Il riait à la blague de potache que l'expert lui avait concoctée. Non, impossible. Mais que fait Ianto dans mon rêve? Ou plutôt, où est mon rêve? La sonnerie de son portable acheva de le réveiller. Cette visite au pays des voyageurs de la nuit l'avait lui aussi perturbé.
Gwen aurait un peu de retard, la toute jeune mariée prenait ses aises avec les horaires. Jack l'autorisa à s'occuper de ses démarches administratives et lui assura que le travail l'attendrait. Il but son café d'un coup, histoire de remettre ses idées en vrac dans l'ordre. Quel rêve ! Mais quel rêve !
La journée sembla s'éterniser. Rien de très palpitant hormis le souvenir encore vivace de ce rêve qui tournait en boucle dans sa tête. Jack déambulait sans but précis dans tous les coins et recoins du Hub. Il n'avait qu'une hâte. Se coucher et revivre ce rêve, ou n'importe quel rêve qui le rapprocherait d'Alec, ce damné expert en communication extrasensorielle. Il eut un mal fou à se concentrer sur les rapports en cours. D'autant plus qu'il dut travailler avec Ianto la plupart du temps. Ils avaient mené cette mission en étroite collaboration, il fut logique de la coucher sur papier avec l'aide de son amant.
Le remords, la honte et la confusion ne le quittèrent pas de la journée. Tous ses sens lui firent rudement défaut. Il ne voyait pas Ianto. Ne l'entendait pas. Ne le désirait pas. Il était perdu dans une dimension parallèle. Tout lui sembla si opaque, si peu réel qu'il en vint à se demander si la Faille ne l'avait pas tout bonnement englouti durant son sommeil. Mais il ne se leurrait pas, car si tel avait été le cas, Alec serait encore là, tout près de lui, offert et tentateur. Roublard et trouble-fête. Malheureusement rien ne vint le troubler pendant cette drôle de journée interminable et soporifique.
Même la voix faible et l'expression triste de Ianto ne l'émurent pas outre mesure. Jack se rappela pourtant leur conversation de la veille. Le malaise du jeune homme face à cette menace invisible et croupissante dans quelques vieux rouleaux de pellicules de films, et qui pouvait frapper à nouveau à tout moment. C'était là la dernière préoccupation du chef de Torchwood. Pour la première fois depuis bien longtemps, Jack ne brillait guère par sa présence. Tout glissait sur lui comme l'eau sur les plumes d'un canard. Personne n'osa le questionner malgré cela. Ianto connaissait le Jack des mauvais jours et se gardait bien de l'enquiquiner avec des questions indiscrètes. Le jeune homme ne comprendrait pas de toute manière. Jack lui-même ne comprenait plus rien à ce qu'il lui arrivait.
Il se réfugia de nombreuses fois sur le toit du Hub pour inciter le soleil à se coucher plus tôt que prévu. Pour qu'il puisse sans éveiller la curiosité de ses employés les renvoyer tous chez eux et reprendre le fabuleux mirage de l'esprit là où il l'avait laissé. Jack souriait de béatitude face à l'immensité de la ville qui se couchait à ses pieds. Quel pouvoir inutile, ridicule que le sien s'il ne pouvait pas remonter le temps d'une seule nuit? Il méprisait son immortalité. Et il l'aurait volontiers échangé contre un autre don. Celui d'ubiquité, par exemple. Jack se sentait capable de se partager en deux, voire plus, et ainsi contenter tous ses démons. Aussi longue que sa vie, son besoin d'amour était infini, intarissable, exigeant.
Son corps exigeait celui d'Alec, sans relâche. Son esprit s'acharnait à sombrer de nouveau dans un autre songe troublant.^
Oui Alec est agaçant mais Jack ne peut pas s'en passer alors quoi?
A suivre. Reviews^^
