Chapitre 1 : Croissance accélérée
Je suis né lors d'une nuit pluvieuse, dans un petit appartement au premier étage d'une barre de HLM. On entendait les grognements des zombies au loin, mais la torche qui flamboyait sur l'un des murs éloignait ma peur. J'attendis patiemment que la pluie cesse, que le soleil se lève et que les hommes en vert disparaissent. Mes parents attendaient, eux aussi, immobiles et silencieux. Nous ne nous parlâmes pas : ils m'avaient déjà transmis tout le savoir dont j'allais avoir besoin, lors de ma création : tout était inné. Mais l'ennui arriva rapidement, et j'avais hâte de pouvoir aller discuter avec les autres enfants de village.
Enfin, la lumière apparut à l'extérieur. Tous les villageois sortirent d'un coup de leur logement, les portes s'ouvraient et se fermaient avec frénésie. Je fis très attention à ne pas tomber de mon étage, puis empruntai nerveusement le large escalier de pierre, pressé de découvrir là où j'allais passer ma vie. Ce que je vis d'abord, ce fût une interminable barrière, tellement longue qu'elle semblait pouvoir entourer tout le village. Les quelques zombies qui restaient de la nuit dernière se pressaient contre elle, incapables de s'approcher. Le périmètre intérieur était parsemé de torches, ce qui lui donnait un air de sécurité. Je compris rapidement que nous ne risquions rien, de ce côté de la frontière.
Pour l'instant, le village semblait uniquement constitué de la barre d'immeuble d'où je venais et de quelques petits bâtiments en bois. En me baladant, j'aperçus aussi quelques enclos qui renfermaient des animaux : des moutons et des cochons. À quoi pouvaient-ils servir ? Les gens du village n'utilisaient que les cultures pour s'alimenter. Tout ce qui était d'origine animale nous provenait du commerce et seul les personnes directement impliquées dans ces échanges savaient d'où ces choses venaient exactement. Personnellement, ça ne m'intéressait pas vraiment. Je trouverai bien quelque chose de plus amusant à faire quand je serais grand. Alors que je réfléchissais en contemplant un des moutons qui broutait paisiblement, j'entendis soudain des rires non loin de là.
Me tournant dans leur direction, j'aperçus un groupe d'enfants de mon âge qui couraient entre les herbes. Les premières personnes avec qui j'allais discuter ! Ayant hâte de faire leur connaissance, je les rejoignis aussi vite que possible. Celui qui portait un petit tablier noir et qui semblait le moins timide engagea immédiatement la conversation :
- Salut ! T'es nouveau ici non ? Tu veux jouer au chat avec nous ? On allait commencer.
- Au chat ?
Je ne savais pas ce que c'était : mes parents ne me l'avaient pas expliqué. Un autre enfant qui, lui, portait un tablier blanc, m'informa d'une voix forte :
- Tu connais pas ? C'est LE jeu auquel tout le monde joue pourtant... En gros, quelqu'un est désigné, et il doit essayer de nous attraper. Si on se fait toucher, c'est à nous d'attraper les autres !
- Ah, j'ai compris ! D'accord, je veux bien jouer alors.
- Bon, qui est le chat du coup ? reprit Tablier blanc
- Moi ! Moi ! Je veux !
Celui qui s'était exprimé était un peu plus petit que moi. C'était rare, comme nous faisions à peu près tous la même taille dans le village. Il portait des habits marron déjà tout tachés de terre. Nous ne discutâmes pas d'avantage et la course poursuite commença. Je m'amusais beaucoup ; le jeu dura une grande partie de la matinée. Alors que je m'enfuyais en faisant le tour de la barre d'immeuble, j'aperçus soudain un immense colosse qui marchait vers le centre du village. Je pilai net, ébahi par cette créature que je n'avais encore jamais vu. Tablier blanc, qui me suivait de près, me rentra dedans, me faisant presque tomber sous le choc. Se tenant le nez, il me cria :
- Aïe ! Mais t'es pas bien !? Pourquoi tu t'arrêtes d'un coup ?
- Dis... C'est quoi ce truc...? dis-je en désignant le colosse.
Il parût un peu surpris, se décala pour voir et conclu en haussant les épaules :
- Ah, lui ? Tu le connais pas ? T'es vraiment tout jeune alors. C'est un golem de fer, il s'appelle Lingot. Ouais, les gens qui l'ont nommé n'avaient pas vraiment d'imagination... Mes parents m'ont dit qu'il était apparu tout seul quand le village avait commencé à s'agrandir et qu'il nous protégeait si jamais un monstre s'infiltrait à travers les barrières. Tu peux l'approcher si tu veux, même s'il est un peu bizarre à ne jamais rien dire. Il ne te fera rien.
Tablier blanc semblait lui porter très peu d'intérêt. C'était pourtant une créature très étrange... Il marchait en se balançant, et du lierre montait le long de son gros corps rigide : il semblait vraiment fait de fer... Lentement, je m'approchai pour lui faire face et mieux le voir. Son visage ressemblait beaucoup à celui d'un villageois... Lorsqu'il m'aperçut, il baissa lentement la tête et plongea ses yeux dans les miens : ils étaient emprunts de tendresse et d'affection, enfin c'est ce qu'il me semblait. Cela me dérouta un peu : nous ne nous connaissions pourtant pas... Après quelques secondes restés à se regarder sans rien dire, le colosse leva lentement son bras si long qu'il touchait presque le sol. Ses mouvements étaient lents, mais dégageaient une grande puissance. Je vis alors que dans sa main, il tenait une rose tout juste cueillie. Il me la présenta, resta ainsi sans rien dire, toujours en me regardant droit dans les yeux. Est-ce qu'il me l'offrait ? Je regardai son visage pour m'en assurer, mais il affichait toujours la même expression douce. Il semblait être un guerrier de force brute et pourtant il m'offrait une fleur... J'étais de plus en plus dérouté. Je finis tout de même par lentement m'approcher et récupérai au creux de ma main la rose délicatement tenue par le colosse de fer. Une étincelle de bonheur sembla poindre dans ses yeux. Complètement confus devant la tournure des événements, je pris la décision de partir rejoindre les autres enfants. Lingot me regarda partir sans esquisser un seul mouvement.
À mon retour dans le groupe, Tablier noir vit de suite ce que je tenais dans les mains. Il me dit, admirateur :
- Ouah, à peine arrivé et Lingot t'offre déjà une rose ? Il doit bien t'aimer. Dans notre village, c'est considéré comme un signe de chance !
Je rougis à ce qui semblait être un compliment, même si ce n'était pas vraiment mes compétences qui avaient fait que je le reçoive. Puis le dernier enfant du groupe, qui était habillé en violet, prit la parole d'une voix calme et posée :
- Tu devrais penser à le remercier la prochaine fois que tu le verras. Enfin, s'il comprend ce que l'on dit...
- Bon, on fait quoi, on continue la partie ? demanda Tablier blanc.
- Moi, je ne peux pas, vu l'heure... Désolé les gars, on se voit demain OK ?
C'était Marron qui s'était exprimé. Alors que le reste du groupe approuvait sans hésiter, j'interrogeai du regard Violet.
- Ah, c'est vrai que tu es nouveau. Marron doit aider aux champs tous les après-midis, ses parents veulent faire de lui un fermier.
Je trouvais ça dur, de devoir travailler dès son enfance, et tous les jours en plus... Tablier noir se montra plus pragmatique :
- Bah, on n'y peut rien... Il faut bien qu'il se forme et que le village ait de quoi manger. Toute notre nourriture provient de ces champs après tout.
C'était vrai que l'on ne mangeait pas de viande, qui elle était uniquement dédiée au commerce. Une question me vint à l'esprit alors que je repensais à la discussion qui venait de se déroule, et je leur demandai :
- Vous savez déjà tous ce que vous voulez faire plus tard ?
- Oui, me répondit Violet, comme tu peux le voir, nous portons déjà tous l'habit officiel de notre profession : je veux être clerc, Tablier noir sera armurier et Tablier blanc boucher.
- Tu ne sais pas encore ce que tu veux faire !? me demanda ce dernier, incrédule.
- Non, pas vraiment... J'espère que je trouverai vite quelque chose...
Violet prit un ton consolateur :
- ...Inutile de te précipiter, je suis sûr que tu trouveras bien assez vite une passion.
J'acquiesçai, tout de même un peu inquiété par la réaction de Tablier blanc. Et finalement, nous retournâmes jouer tous les quatre.
Voilà pour le tout premier chapitre de ma toute première fanfiction !
J'espère qu'il vous plaira.
Bonne Lecture !
