Courte vignette qui, je l'espère, vous plaira !

Elle se base sur le manga plutôt que sur le DA. Ma vision d'un court passage.

Bonne lecture !


La douleur. La douleur est partout. Elle la sent s'insinuer dans les moindres recoins de son corps. Mais surtout dans les tréfonds de son cœur. Ses tourments d'amour impossible et à sens unique pour Fersen. Elle a pourtant tenté de le bannir de ses pensées. En vain. Le maudit suédois y règne en maître. Et elle s'en veut de sa faiblesse.

Elle en est là de ses pensées torturées quand des bras, soudain, l'emprisonnent. André. Un étau de fer. Elle est paralysée, immobile, attendant la suite. Puis, il pose ses lèvres sur les siennes. Sans prévenir. Sans autorisation. Il lui donne son premier baiser. Le baiser d'un homme à une femme. Pas celui d'un ami à un frère de cœur. Celui d'un amant à sa maîtresse.

Pourquoi ? Pourquoi elle ? Et comment ose-t-il ? Comment peut-il lui voler un baiser de la sorte ? Profitant de sa faiblesse passagère et des affres de son cœur pour Fersen.

Mais il y met de la douceur le bougre ! Malgré les circonstances, elle sent la tendresse de son geste. Un brin de désespoir. Sa bouche est une caresse sur la sienne. Et elle sait qu'elle ne peut lui en porter rigueur. Ses lèvres sont chaudes et fortes, délicates et tendres, malgré la saveur résiduelle et avinée qu'elle peut encore y goûter. Et sa main sous sa nuque, pour imprimer davantage ce baiser sur sa peau. Ce geste injustifié témoigne à la fois de sa force et de sa volonté de prolonger cet instant.

Pourtant, ses lèvres quittent déjà les siennes, lui laissant l'occasion de reprendre son souffle. Et ses bras la serrent contre son torse. Elle subit, sans chercher à se débattre, l'étreinte vigoureuse de son ami, l'esprit en ébullition, mais les paupières closes. Et malgré elle, elle sent la brûlure des larmes se former sous leur refuge.

Son cœur saigne et soupire pour un homme. Mais ses yeux pleurent et sont le témoin de l'émoi qu'un autre a provoqué en elle. L'espace d'un instant, le temps d'un baiser volé, André a substitué l'image de celui qui la hante. L'espace d'un instant, par ce premier baiser, il a réveillé l'émoi de ce cœur de femme qu'elle étouffe avec tant de hargne. L'espace d'un instant, en la portant dans ses bras, il a pris sur ses épaules le poids des tourments qui agitent ses pensées.

Un instant volé, suspendu dans le temps, avec les étoiles pour seuls témoins, et qui sera oublié dès le soleil levé. Mais un secret jalousement gardé, les larmes d'une femme, versées dans l'émotion d'un moment de tendresse, un premier baiser donné par celui qui veille sur elle avec la rigueur d'un ange gardien. Le seul, en vérité, à qui elle est heureuse d'avoir accordé cette faveur.

Plus tard, alors qu'il la déposera sur son lit, la pensant inconsciente, elle passera ses doigts sur ses lèvres, comme pour imprimer la marque de celles d'André, avant de sombrer dans un sommeil sans rêves. Et elle se réveillera le lendemain, comme chaque matin, Oscar François de Jarjayes, colonel de la garde royale. Taisant à André qu'elle se remémorait du moindre détail de ce souvenir, le chérissant secrètement, tout en le classant dans la catégorie « sans suite ».

Mais pour l'heure, elle se laisse bercer, portée par les bras puissants d'André, tel un enfant –une femme–, quelques perles salées roulant silencieusement dans son cou.

- Les étoiles sont belles… Je vais te ramener en te portant ainsi jusqu'au petit matin.


Scène reprise dans le manga, à la fin du chapitre 3 du premier tome, alors qu'André reconduit Oscar après une bagarre dans une taverne où elle a demandé à André de l'emmener pour oublier les tourments de son amour pour Fersen tardant à revenir des Amériques. (baiser inexistant dans le DA, à mon grand regret...)