Bienvenue, bienvenue dans Les Trois Chambres Bordéliques !

Aujourd'hui, nous vous accueillons dans la Chambre d'Émeraude.

(Nous informons nos aimables visiteurs que ce texte est issu du topic Le Bordel du Cœur de l'Aurore du Forum de Tous les Périls.)

Le thème du jour était : Usopp & Bouteille à la mer.

Nous vous souhaitons une bonne lecture !


#1 : Beck et les buveurs de lait.


— Le soleil se couchait sur l'horizon, lentement. Il baignait la mer de ses rayons orangés qui se teintait de ces belles couleurs. La vue était à couper le souffle, sans un seul navire. Rien que la nature à l'état brute. Tu aurais dû voir ça !

— Ça a l'air magnifique, Usopp !

— Les mouettes volaient au-dessus de la plage, elles caquetaient, elles guettaient le moindre morceau de nourriture. Mais rien, elles devaient se contenter des poissons qu'elles pêchaient. Leurs cris s'associaient à la marée, les vagues venaient lécher la plage, déposant quelques coquillages sur le rivage.

Je m'arrête, fais une courte pause. J'observe Kaya, m'assure que mon histoire la subjugue. Elle sourit, se penche par la fenêtre, avide d'en savoir davantage. Elle adore tellement mes histoires qu'une simple introduction la fascine. Elle a hâte que je continue.

Elle sourit, et c'est tout ce qui m'importe.

Assis sur une branche, pile en face d'elle, je vérifie mon équilibre, garde le dos bien droit pour conserver une certaine prestance. J'adopte un air confiant, préparant avec soin mes effets.

— A l'époque, je n'avais que six ans ! C'était quelques temps après avoir vaincu l'immense poisson rouge, j'étais reparti en mer, prêt à affronter ma destinée !

— Et tu es arrivé sur cette plage, c'est ça ?

— Oui ! J'ai amarré mon bateau de l'autre côté de l'île. Elle n'était pas bien grande en fait, et j'en ai rapidement fait le tour. Mais sa flore valait le coup d'œil ! Une jungle dense, qui ne s'arrêtait que pour laisser place à la plage de sable blanc.

— Oh ! Et tu as affronté d'horribles créatures ? Dis, Usopp !

— Si cela n'avait été que ça, je n'aurais rien à te raconter, voyons ! C'est encore plus palpitant !

Les yeux de Kaya brillent d'émerveillement. Elle veut découvrir ce qui a pu m'arriver sur cette île, sur cette plage. Alors je souris, attendant encore quelques secondes avant de reprendre.

— Pendant que le soleil se couchait au loin, j'avançai sur cette plage. Les embruns marins me saisissaient, j'avais envie de rester là un moment. Alors je m'approchai de l'eau, et je m'installai sur le sable. Je profitais de cet instant paisible. Et c'est là que je la vis !

— Et ? Et ? Qu'est-ce que tu as vu, Usopp !

— Une bouteille ! Une bouteille avait été jetée à la mer, et elle est apparue juste sous mes yeux.

— Oh ! Il y avait un message à l'intérieur ?

— Bien sûr ! Attends, je vais m'en rappeler…

Je fais mine de me concentrer, de chercher les mots exacts de ce message. Puis mon visage s'éclaire, comme pris d'une illumination. Je modifie ma voix pour la faire plus rocailleuse, digne d'un petit vieux.

« Ah ! J'ignore si cela fonctionnera, si quelqu'un trouvera un jour cette lettre. Hé hé, peut-être que mon trésor restera inconnu de tous finalement. »

— Un trésor !

Elle s'excuse aussitôt de m'avoir interrompue alors que j'essaie de me rappeler le contenu de cette lettre. Je lui souris pour la pardonner.

« Mais toi, qui lis ces lignes ! Ah ! Peut-être seras-tu digne de dégotter le légendaire trésor du vieux Beck ! Qui est Beck, te demandes-tu ? C'est moi, pardi ! Ah, il est loin le temps où les jeunes gens se souvenaient encore de mes exploits. J'étais un pirate, un vrai ! voguant bien avant l'arrivée de ce Roger. Un buveur de lait, si tu veux mon avis… Mais je sais bien que tout cela ne t'importe que peu. Je suis sûr que tu lis ce message en diagonale depuis que tu as vu le mot trésor écrit. Tout ce que tu veux, c'est savoir comment le trouver. Je ne peux pas t'en vouloir, je connais ces frissons de la chasse au trésor, cette envie de découvrir des coffres remplis d'or ! Malheureusement, je suis bien trop vieux désormais, et la mort me guette d'un instant à un autre. Alors écoute-moi bien, ou plutôt lis très attentivement ce qui va suivre, marin d'eau douce… Car par Davy Jones, sans cela, tu ne dégotteras jamais mon trésor ! »

Je fais une pause, reprends mon souffle. Kaya ne souffle mot, elle attend. Elle est pendue à mes lèvres. Je pourrais lui dire ce que je veux qu'elle me croirait. Cette sensation est grisante.

« Un poisson ne sait rien de sa destinée. Il aura beau remonter le courant, il ne connaîtra rien des autres rivières, de l'océan. Pourtant, l'arbre hurleur sera son salut. Lui seul contient la clef de la destinée ! L'eau éclaboussera alors l'aigle de pierre, révélant l'antre du néant.

Et si jamais tu es aussi stupide qu'un poisson hors de l'eau, alors souviens-toi que le problème n'est pas le problème en lui-même. Le problème est ton attitude par rapport à ce problème. Tu comprends ?

Allez, à la revoyure, marin d'eau douce !

Beck. »

J'observe Kaya avec attention. Elle réfléchit à cette énigme, essayant de déchiffrer les mots mystérieux de Beck. Elle s'imagine à ma place, se projette sur cette île en quête de ce fameux trésor. Alors je la laisse faire avec un léger sourire. Je pourrais passer des heures à la regarder tant elle est adorable.

— Oh je sais ! Ce sont des métaphores qui indiquent le chemin à suivre ! Hm ça veut dire que cette histoire de poisson… Tu as dû remonter un cours d'eau, jusqu'à ce fameux arbre hurleur !

— C'est ça ! Je suis sûr que tu aurais trouvé ce trésor en moins de deux, Kaya !

Elle m'adresse un large sourire qui me met du baume au cœur. Jamais je ne cesserai de lui redonner la joie de vivre, malgré sa maladie.

— Heureusement pour moi, il n'y avait qu'une rivière sur cette petite île, alors la trouver n'a pas été bien difficile. Je l'ai donc remontée, aux aguets. Je ne savais pas à quoi ressemblait cet arbre hurleur, mais mon instinct me disait que je ne pouvais pas le louper.

— A quoi ressemblait-il ?

— A un arbre comme à un autre ! Non, la clef était de tendre l'oreille, et aussi de passer par là au bon moment.

— Vraiment ?

— Il y avait un petit oiseau, de cette taille-là.

Je joins mes deux mains pour lui montrer. Cet oiseau hurleur aurait pu tenir entre mes deux mains.

— Mais il hurlait si fort ! On l'entendait de toute la jungle, et même de la plage !

Elle n'en revient pas, et je souris encore.

— Et ensuite, comment tu as fait Usopp ?

— J'ai découvert que l'arbre était creux, et il contenait une petite boîte métallique. Je l'ai donc récupérée et elle contenait une clef.

— La clef du coffre !

— Exactement. Mais fallait-il encore que je trouve le coffre, ce qui a été une autre paire de manches !

À nouveau, elle se met à réfléchir en quête d'une réponse. Je la laisse faire, lui donnant sa chance. Kaya est brillante après tout.

— Un aigle de pierre… Qu'est-ce que cela peut être… Quelle était la phrase, déjà ?

« L'eau éclaboussera alors l'aigle de pierre, révélant l'antre du néant. »

— Hm, de l'eau… Oh ! Tu as dû verser de l'eau sur un rocher !

Mon sourire s'élargit. Elle est la meilleure.

— Trouver ce trésor aurait été d'une facilité pour toi ! Il y avait plusieurs rochers à côté de l'arbre hurleur, alors avec ma gourde, je les ai tous arrosés. Et sur l'un d'eux est apparu le dessin d'un aigle !

— Ouah ! Mais… Et l'antre du néant ?

— C'était un trou ! Il fallait pousser le rocher, et on découvrait en-dessous l'entrée d'un tunnel.

— Ce Beck était vraiment ingénieux !

— C'est un pirate, Kaya ! Bien sûr qu'il était ingénieux !

Elle rit aux éclats, et je limite dans la foulée.

— Et ensuite, Usopp ? Raconte !

— Je me suis aventuré dans ce tunnel avec une torche, car je n'y voyais même pas à trois mètres ! C'était très sombre, mais j'ai persévéré. Et alors que j'avançais, j'ai trébuché sur un lourd objet en bois, à moitié enterré.

— Le coffre ! s'écrie-t-elle avec enthousiasme.

— Oui ! Je l'ai déterré, et j'ai pu l'ouvrir avec la clef trouvée dans l'arbre.

— Et qu'est-ce qu'il y avait à l'intérieur ? Usopp !

Je la laisse mariner un peu, elle insiste en riant. Elle mime des gestes, comme quoi elle m'ébourifferait les cheveux si elle avait été assise à côté de moi pour me faire payer que je la fasse attendre.

— Le coffre était très lourd… finement orné. Alors je l'ai ouvert, lentement, fébrile à l'idée de découvrir ce trésor. Et quel trésor !

— Usopp !

— Des pièces d'or et des gemmes ! C'était magnifique ! Le coffre en était plein, il y en avait pour plusieurs millions de berrys.

— Mais c'est superbe ! Et tu as réussi à trouver ce trésor tout seul ! Tu es vraiment génial Usopp !

— Hé hé je suis un fier guerrier des mers après tout !

Nous rions encore, appréciant avec plaisir ce faux souvenir. Mais Kaya sourit, et c'est le plus important. Tant pis si je mens.

— Usopp, raconte-moi une autre histoire !

Tant que je peux faire sourire Kaya, je suis prêt à faire n'importe quoi.


Et au loin, dans ce petit village de Syrupp, une âme erre sur la plage, maugréant contre vents et marées. Elle serre dans sa main un papier déchiré et chiffonné. Dans l'autre elle tient une bouteille contenant une lettre.

Pourquoi a-t-elle décidé de courir après le fameux trésor de Beck déjà ? La raison lui échappe complètement.

Mais elle l'a trouvé, ce trésor, après avoir lutté pour déchiffrer cette stupide énigme. Une fois dans cette soi-disant « antre du néant », trouver le coffre n'a pas été bien compliqué. En revanche, la récompense a été bien différence de ce à quoi cette personne s'attendait.

Dans le coffre, pas la moindre pièce d'or. Pas le moindre joyau. Rien. Nada. Que de la poussière et une autre lettre.

Une simple lettre, signée Beck.

Bravo pour être arrivé jusque là, marin d'eau douce !

Tu es donc digne de recevoir cette noble mission.

Fais une bonne action : fais une liste des cons.

Beck.


Dès que j'ai eu ce prompt, j'ai rapidement eu l'idée, et c'était très drôle à écrire. Puis forcément, comme à mon habitude, des références se sont glissées automatiquement sous ma plume (je compte quatre œuvres différentes en tout !).

Concernant la fin d'ailleurs, c'est un parallèle au fait que toutes les histoires mensongères que raconte Usopp finissent par se réaliser. J'ai trouvé ça drôle d'y faire une mention.

Et puis soyez sympa, laissez un peu de nourriture que constitue la review pour l'auteur !

See ya !