PROLOGUE
A son réveil, il éprouva une désagréable sensation qui lui tordait douloureusement le creux de l'estomac. Une peur viscérale lui broyait les entrailles, une peur qu'il avait déjà ressentie par le passé. C'était une émotion tellement intense qu'il était incapable d'ignorer cette souffrance, de l'éloigner loin de son cœur. Mais pourquoi, pourquoi remontait-elle en d'énormes lames de panique pour venir l'envahir? La température sombre et monotone semblant s'éterniser sur la ville était-elle responsable du retour de ces mauvais souvenirs? Tournant légèrement la tête, il écouta la pluie frapper contre la fenêtre glissant ensuite sur la vitre comme des larmes sur une joue. Le ciel, bas et lourd de nuages, n'était plus qu'un mur de grisaille opaque s'opposant aux rayons du soleil. Encore engourdi par le sommeil, il s'enfonça plus profondément dans la chaleur de son matelas essayant de faire le vide dans son esprit mais trop de pensées s'y bousculaient et s'entrechoquaient pour trouver enfin la paix. Il s'efforça, en vain, de refermer les yeux mais il était incontestablement trop troublé pour s'assoupir à nouveau. Un rapide coup d'œil à son cadran lui indiquait que seulement dix minutes s'étaient écoulées depuis son éveil. Toute cette agitation en lui risquait de le consumer et de le transformer en poussière. Il se devait absolument de bouger sinon il risquait de devenir complètement fou. Avec peu d'entrain il décida de quitter le cocon sécurisant de son lit.
Lorsqu'il déposa son pied sur le plancher, sa froideur créa un doux frisson qui parcourra tout son corps. D'un pas léger il longea le corridor jusqu'à la salle de bain. S'immobilisant devant le miroir, il observa le reflet de son visage aux traits tirés par la fatigue. Ici et là quelques mèches bleutées parsemaient sa chevelure ébène et ses yeux couleurs onyx contrastaient énormément avec son teint pâle. Les doux contours de sa silhouette pouvaient, à son grand désespoir, le confondre avec la gente féminine. Ce physique plutôt androgyne a toujours été une source de douleur. Durant sa scolarité, il ne cessait pas de se faire ridiculiser, pour se protéger il était devenu une personne très solitaire, distante envers les autres. Sa vie sociale se résumait à rien et sa vie amoureuse était encore plus triste. Malgré sa petite taille et son apparence plutôt fragile, il démontrait un caractère inflexible ne se laissant pas impressionner par quiconque. Une petite surprise attendait tous ceux qui se sentaient assez courageux pour confronter se regard qui tue. Sous cette fausse douceur se cachait un expert en arts martiaux depuis sa première année et sa force en surprenait plusieurs. Cependant à l'Université il rencontra la seule personne qui avait réussi à susciter son intérêt par sa ténacité à détruire son épaisse carapace. En y repensant encore aujourd'hui un sourire étira ses lèvres.
Avec un soupir il s'aspergea plusieurs fois le visage avec de l'eau froide dans l'espoir de chasser les derniers vestiges de ce rêve étrange qu'il avait fait. Rêve qui lui avait semblé si réel, comme une petite lueur dans la noirceur de cette période qui était tombée dans l'oubli. Refusant vigoureusement de replonger dans ses sombres pensées, il termina tranquillement sa toilette méditant sur l'horaire chargé qui l'attendait aujourd'hui. Quelques instants plus tard, il quitta son logement pour débuter une nouvelle journée.
