Pourtant, mon âme...


En réalité, que pouvais-je dire de toi? Que pouvais-je dire de moi… Les mots ne vinrent pas, ne venaient pas et ne viendraient pas. Il était ainsi, que depuis peu, mon esprit envahi de brouillard indissipé ne cessait de pousser cette réflexion. Je me demandais, en te voyant rire au loin de tout et de rien, ce que nous aurions pu être, eus-je eu la volonté et le courage de t'aborder; j'étais simplement là, lasse, allongée à ressasser mes envies et mes désirs. Ah… que la vision fût belle à éblouir ma tourmente, en empêchant mes neurones de broyer du noir, tandis que tu ne cessais de jeter quelques regards fugaces dans ma direction. Hélas, mon âme, bien trop occupée à s'égarer dans les méandres de ma mémoire, n'eut la distinction de réaliser que tu t'avançais désormais vers moi que bien en retard; enfin tête à tête, ou du moins, à devoir lever le regard, tu te trouvais ici, devant moi, sans que j'eusse la possibilité incongrue de m'échapper, par peur ou maladresse. Chaque parcelle de ton être semblait radier quand au contraire j'eus, en vain, essayé de me recroqueviller sur moi même comme pour voiler une partie de ma personne, afin de ne pas être mise au jour. Mais toi, tu vus au travers moi, et encore une fois, sans pouvoir m'y préparer, une main vînt soudainement relever ma tête, gentiment, pour me forcer à me plonger dans ces yeux azures que tu apparaissais posséder. Mes forces quittaient inlassablement mon corps, cellules par cellules, sans aucune possibilité d'y remédier ; tu semblais être, à ce moment, mon seul remède. Tes yeux scrutaient toujours mon faciès et, bien que forcée à faire de même, mes orbes se perdirent à ta façon, sur tes lèvres, si invitantes, auxquelles je savais avoir rêvé maintes et maintes fois en me convainquant que jamais il n'était un jour possible que cela arrive.

Ah… et pourtant… et pourtant…

Tes lèvres ensorcelantes ne semblaient pas bouger d'un millimètre alors que ton regard continuait à parcourir ce que j'eus toujours qualifié de moindre… inintéressant. Un brasier envoûtant, peu à peu, chauffait en moi, sous ta scrutation minutieuse et délicate. Le silence ne semblait même pas peser sur cet instant, si vif et pourtant si intense. Une main adroite s'égarait volontairement sur mon épaule, des doigts agiles venant tracer une ligne sur un trajet sagement choisi. Le contact furtif incita un frémissement bien involontaire de mon corps, dont je me sentais perdre le contrôle avec les secondes qui passaient. Je ne sus et ne saurais comment décrire si justement les sentiments qui, de plus en plus, envolaient mon âme; tu étais là et je n'avais pas la capacité d'interpréter ces instants créés par ta simple volonté on ne peut plus téméraire. Si doucement, tes empreintes vinrent se perdre sur les lignes quelque peu tracées de mon visage, si subtilement qu'on aurait pu te voir comme manipulant une poupée frêle et fragile.

Et pourtant… et pourtant…

Mon corps n'eut pas la volonté d'activer une once de mouvement pour te montrer que j'eusse été là, bien que te voyant. Au travers mes paupières maintenant lourdes, de passion très certainement, immobilisée par ta présence, j'appréciai simplement sentir cette connexion que nous semblions partager. Eus-je oublié quelque chose? Difficilement déterminable était la réponse qui resta bien inlassablement sur le bout de mes lèvres, que tu apparaissais scruter. Tes formes élégantes n'auraient cessé de m'étonner positivement, eut la situation été différente. Très méticuleusement, ta main vînt se placer contre la mienne alors que tu verrouillais nos doigts ensemble comme pour sceller un accord discret, caché des yeux du monde. Mes pupilles réagirent en baissant le regard pour apercevoir cet amour muet alors que mes joues se tintèrent devant ce spectacle qui m'attendrit. D'audace ou de hardiesse, ma poigne se serra légèrement, et bien que péniblement, mes prunelles remontaient vers les tiennes, et j'eus cru apercevoir un oscillement dans ton sourire.

Et pourtant… et pourtant…

Tes yeux ne cessaient d'être troublés par quelques larmes incongrues, ce que j'eus été bien loin de comprendre à cet instant. Pourquoi courbais-tu l'échine maintenant, alors que dans ta nature intrigante, tu avais toujours joué la vie? Ma face entre tes mains semblait être ton raccord à ton destin imminent, comme si tu pensais qu'il ne fut pas possible qu'il se joue de toi. Hélas… Hélas, eus-je eu la force de t'avouer cela, peut-être le ciel se serait joué de nous différemment? Mon visage s'illumina devant toi, paralysie oubliée sur le coin de mon esprit, paralysie ingrate qui se moquait bien de mes sensations envers toi. Tes yeux crièrent un peu plus, alors que le silence nous entourait toujours, et je me demandai alors quelle vision fut la tienne à ce moment où mon sourire sembla causer ton désarroi. Quand bien même ces entraves, qui m'immobilisaient, n'eurent pas été là, le vide de ma pensée m'aurait empêché de t'aider.. En te penchant par dessus moi, tes cheveux teintés m'entourèrent comme pour essayer de me rappeler quelques choses, depuis peu, oubliées.

Et pourtant… dis moi...

Pourquoi tes larmes peu à peu se mirent à ruisseler? S'écrasant contre mes joues, je ne sus mettre mot sur la sensation engendrée par ta détresse. Tu avais semblé si sûre de toi, si téméraire à m'approcher alors, comment fut-il possible que tu te trouves dans un tel état de peine? Peu à peu, la réalité, bien cruelle, s'abattait sur mon existence perdue. Sans mémoire, sans compréhension, j'étais là, devant toi que j'aimais, mais ne connaissait pas le nom, ou peut-être avais-je oublié et en poursuivant la réflexion, me rendais compte que moi non plus, je n'aurais pu te dire qui j'étais. En te regardant, tu semblas murmurer mots qui n'atteignirent jamais mes oreilles. Ainsi, une fois encore, mon sourire tenta de se réfléchir pour illustrer tes propos, bien inconnus, mais cette fois, comme un miroir, le tien, malgré ta détresse visible, vînt imiter le mien, et, comme pour mettre fin à mes attentes impatientes… tes lèvres vinrent se recueillir contre les miennes comme pour conclure un marché… bien ingrat.

Enfin, mes yeux se fermèrent, le temps s'arrêta et mon âme, libérée, s'envola.


A/N: Un énormissime merci à IdrewAcow pour son BetaReading, ainsi qu'à Azuria Tayutama qui, avec IdrewAcow, m'ont aidé à trouver le titre de cet OS. Elles sont génialissimes.
Toute critique est la bienvenue, et pour finir, merci pour votre lecture!