La rédaction/correction de cette fiction est déjà terminée. La publication sera tous les dimanches, merci donc de ne pas venir me demander de publier la suite rapidement : elle est programmée. Il y aura 15 chapitres.
Si vous souhaitez accéder à toutes les chansons mentionnées dans cette fic (qui seront donc de bonne qualité/celles que je veux que vous écoutiez car parfois c'est particulier), j'ai fait une playlist youtube qui les réunit. Facile de la trouver : il vous suffit de taper « And I won't stop running Papy-1412 » sur Youtube, et vous l'aurez.
Un gros gros gros gros merci à mon amie sasunarufann, correctrice de toujours, pour la correction!
Have a good read!
And I won't stop running
1. The sound of silence (Simon & Garfunkel)
D'un pas à la fois lourd et rageur, Sousuke traversait la foule de Namba, ses épaules cognant régulièrement les parapluies de jeunes filles bien plus petites que lui. Il tombait un crachin diffus, qui venait rafraîchir l'atmosphère de ce mois de juillet étouffant, mais pas ses pensées sombres. Les sourcils froncés, il fixait le sol, les flaques qui s'agrandissaient, et voyait les gouttes qui tombaient de ses cheveux, car il n'avait pas de quoi se protéger et qu'il se fichait d'être mouillé.
Comme une vague, un souvenir de ce qu'il s'était passé une heure plus tôt lui tomba dessus. Une nouvelle bousculade amena son bras pour le cogner contre sa cuisse, et notamment sa poche où se trouvait la seule chose qu'il ne voulait pas voir à cet instant.
Sa vision vira rouge. Il serra la mâchoire, prit le petit carnet, et, d'un mouvement brusque qui éclaboussa certaines personnes autour de lui, le jeta dans la rivière. Il le vit faire un petit arc, s'ouvrir et planer, jusqu'à sombrer dans les eaux du Dotonbori. Alors qu'il haletait sous sa colère, la foule s'écarta instinctivement de lui.
Une main tomba néanmoins sur son épaule, suivie d'une voix traînante, désapprobatrice :
« Hey, Monsieur, qu'est-ce que vous faites, là? On ne jette pas d'ordures dans le fleuve, enfin! »
Le policier, semblant se retenir de claquer des dents sous sa cape de pluie, avait l'air plus fatigué et blasé qu'en colère, et faisait simplement son boulot. Mais ce n'était vraiment pas le moment de voir la police pour Sousuke, qui siffla, comme si cela le justifiait :
« Je suis policier. »
L'homme en uniforme haussa un sourcil, descendit ses yeux et, le trouvant habillé comme tout salaryman revenant de Umeda, marmonna :
« Si c'est le cas, montrez-moi votre carnet de police. »
Il s'écoula une seconde, durant laquelle Sousuke se dit qu'il aurait mieux fait de se jeter, lui-même, dans le fleuve.
« C'est lui que je viens de jeter. »
/
Il sortit de garde à vue cinq heures plus tard, alors que la nuit était déjà tombée sur la ville de Naniwa. Il sentait la pluie, la sueur, et voulait juste rentrer chez lui, peut-être boire un coup pour oublier cette journée entière, et la prune qu'il avait reçue, malgré avoir été identifié comme ancien Assistant Inspecteur Yamazaki Sousuke, démis de ses fonctions plus tôt dans la journée.
Il quitta alors rapidement les bâtiments de la police préfectorale d'Osaka, et grimpa dans l'Osaka Loop pour descendre chez lui à Shinimamiya, dans l'espoir qu'à cette heure de la soirée, il n'y aurait pas trop de monde. Grommelant dans sa barbe, il arriva enfin dans sa rue, passa au konbini et prit une bouteille d'eau dans le distributeur à 50Y avant de grimper chez lui. Il s'arrêta en sursaut une fois, quand le vieux Philippin habitant pas loin poussa un cri avant d'abattre son balai sur un cafard venant de l'hôtel pourri du coin, réputé pour sa crasse infâme, puis put enfin monter jusqu'à son appartement.
Sousuke s'effondra sur son futon, fixant ensuite le mur de son pauvre trois-pièces de célibataire, faisant à peine six tatamis, dont un pour son placard à porte coulissante, et deux pour sa salle de bain. Une misère dont il se satisfaisait jusque-là, mais dont il ne savait comment il paierait le prochain loyer.
Son portable vibra soudain dans sa poche, et il fut surpris que celui-ci n'ait pas rendu l'âme après avoir vu la pluie de près. Il haussa un sourcil en voyant qui l'appelait, et décrocha, restant allongé sur son futon.
« Rin.
– Salut, tu dormais?
– Je viens de rentrer, non. »
Il fut un instant tenté de profiter de l'appel pour vomir ses peines. A bientôt trente ans, alors qu'ils ne vivaient plus dans la même ville, qu'ils ne se parlaient presque qu'au téléphone, et rarement en plus de ça; il imagina être pour une fois celui qui se plaint. Mais les mots ne sortirent pas, car il ne voulait pas encore plus se déprimer en le faisant, et parce que la drama queen qu'était son meilleur ami ne réagirait pas calmement, tout ce dont il n'avait pas besoin présentement.
« Désolé d'avance, mais en fait je voulais te demander un gros gros service... merde, c'est compliqué-
– Crache le morceau, mais si tu me demandes du fric c'est mort; et en plus je sais que toi t'en as.
– Nan, c'est pas ça- » il se coupa brusquement. « Il y a un problème avec Haru, et j'ai besoin d'un pote flic sur le coup, de préférence un à qui je peux faire confiance... »
Sousuke se sentit soudain avoir froid. Il déglutit, plongea son visage dans son coussin pour retenir l'énorme soupir qui voulait lui échapper, car ça y est, il commençait à réaliser la merde dans laquelle il était et les larmes lui montaient aux yeux.
« Bordel, Rin, je... déjà, je pourrais rien faire vu que je suis pas un flic de Tokyo...
– Je te demande pas de nous aider spécialement, mais tu dois bien avoir des contacts-
– Et en plus de ça, le coupa-t-il, cassant. Je suis plus flic tout court. Là, aujourd'hui, t'as vraiment pas appelé au bon moment. Je viens tout juste de perdre mon job. »
Il entendit Rin prendre une inspiration tremblante, pris de court, voire outré, et il ne tarda pas à le montrer en laissant sa colère exploser :
« Comment ça!? Ils ont osé te virer? Tu bosses pour eux depuis plus de dix ans, tu venais d'avoir une promotion-!
– Non, ça faisait huit ans, mais peu importe; c'est moi qui ai démissionné. Je... » il passa une main sur ses yeux. « C'est compliqué. Laisse tomber. En tout cas je suis désolé mais je peux pas t'aider, et j'ai... comme qui dirait beaucoup d'autres problèmes là. »
Le silence retentit de l'autre côté. Sousuke attendit, car ce n'était pas dans les habitudes de Rin de se taire pendant des heures, mais quand il ne dit rien au bout d'une dizaine de secondes, il pressa :
« Rin? T'es encore là? »
Un bruit sourd résonna au bout du fil, et il manqua sursauter. Cependant, il n'eut pas le temps de dire un mot qu'il entendit :
« Mec. Viens à Tokyo. T'occupe pas de quoique ce soit, prends le plus d'affaires et rejoins-moi demain. Je t'expliquerai tout. »
Sousuke se contenta de rester silencieux. Le nageur ajouta alors :
« Je pourrais peut-être même t'aider?
– Je veux pas que tu me fasses la charité, Rin, commença-t-il à gronder, n'appréciant pas vers où se dirigeaient les phrases de son ami, qui ne s'en occupa pas.
– C'est pas ça. Viens, et tu verras toi-même. J'ai besoin de toi, là, même si tu bosses plus dans la police. Sérieux. T'as assez pour le Shinkansen quand même, nan?
– Je suis pas à ce point sur la paille.
– Super. On se voit demain. »
La conversation se termina sur des bips, qui retentirent dans l'oreille d'un Sousuke abasourdi. Il fixa l'écran de son portable, le cœur battant, tandis que la pluie revenait frapper sa vitre.
/
Cela faisait des années qu'il n'avait pas mis un pied à Tokyo. Il aurait peut-être dû, lorsqu'il y repensait. Combien d'anniversaires ratés, combien d'occasions aurait-il pu saisir pour se sortir de la bulle qu'il s'était construite, pour cette vie tout juste médiocre, qu'il persistait à garder par peur de voir à nouveau tout s'écrouler.
Et peu importe combien il l'avait souhaité. C'était trop tard. D'un coup, effondré, écrasé, réduit au stade de poussière, il ne pouvait que descendre du train et passer les portes de la gare de Tokyo, ses bonsaïs vert coupés au millimètre contrastant avec les briques rouges. Un beau paysage, si seulement à moins de vingt mètres des travaux ne venaient pas couvrir la route pour aménager plus de grattes ciels, semblables à ceux qui poussaient autour du quartier. Ceux-ci mangeaient tout sur leur passage, tant que le Palais Impérial, à moins de deux cents mètres, ne semblait n'être plus qu'un simple sanctuaire bien entretenu, à côté de la modernité et des immeubles si grands qu'on en blêmirait.
Ainsi, son regard fixé au sol, Sousuke se dirigea diligemment vers le parc en bout d'avenue, celle menant vers les demeures Impériales. Il s'assit sur un banc à la forme artistique, une sphère blanche dont le sommet était plat, et observa les touristes, avec leurs t-shirts, casquette et sac assorti; se dirigeant vers le monument pas loin. Tandis qu'ils passaient sur le petit pont enjambant un filet d'eau artificiel, Sousuke trouva dommage d'en être arrivé à remplacer de beaux jardins verts par du béton gris, froid.
Pour oublier la vue de jeunes gens se prenant en photo devant une banale fontaine, bien qu'architecturale, il sortit son portable et l'amena à son oreille une fois le numéro de Rin composé. Celui-ci répondit rapidement, et lui dit de l'attendre sur la voie près du parking du Palais, qu'il arriverait sous peu.
La belle Toyota qui s'arrêta au feu ne lui laissa pas trop de doute, et il raffermit sa prise sur son sac de sport avant de rapidement grimper sur la place passager, jetant ensuite ses affaires sur la banquette arrière.
« Ça fait combien de temps que t'étais pas venu ici? lança Rin une fois qu'ils se furent salués.
– Aucune idée, haussa-t-il les épaules. J'en avais pas besoin, Osaka est déjà bien assez grande.
– Je préfère quand même Tokyo.
– Cette ville est bien trop clean, trop carrée, moi ça me met mal à l'aise.
– Tu dis ça, mais va à Kabuki-chô ou Ueno et ose me dire que c'est clean! »
Sousuke se fichait comme d'une guigne de la rivalité entre les deux capitales du Japon, le nord contre le sud, une culture contre une autre, et de manière générale les gens d'Osaka qui l'ouvraient bien plus souvent que ceux de Tokyo. Il suffisait de passer dans la rue, d'entendre des commerçants, comme ceux proches de son appartement, toujours dehors, assis sur un cageot en plastique à s'en fumer une, tout en laissant leur voix forte, et leur accent traverser les rues; pour sentir la différence.
Un peu de nostalgie le recouvrit, et Sousuke secoua la tête, se demandant ce qui lui prenait alors qu'il y a moins de cinq heures il était chez lui, et qu'il y retournerait certainement d'ici un ou deux jours. Il n'avait aucune idée du problème de Haru, mais ça ne devait pas être bien grave, Rin avait tendance à exagérer quand il s'agissait du brun, de toute façon.
Il laissa alors ses souvenirs l'envahir, ceux du vieux de l'épicerie du district d'à côté, qui ramassait les ordures et lui filait quelques claques amicales sur la joue lorsqu'il venait l'aider le samedi après-midi, les repas de midi à manger des okonomiyakis avec ses collègues, ou encore sa première paie, qui lui avait permis de s'acheter son premier ordinateur.
Puis il se concentra enfin sur la raison de sa venue, s'étant débarrassé de ce moment de mélancolie. Il se disait que cela le divertirait certainement, d'entendre Rin lui demander d'enquêter sur un type louche avec lequel sortirait son collègue nageur et ex-petit ami. Il pourrait l'emmerder car il était toujours aussi jaloux même à trente ans, et quand il finirait par bouder, Sousuke lui dirait qu'il se faisait du mal et que ça emmerdait autant Haru que lui.
Mais ce ne fut pas la réaction de Rin lorsqu'il lui demanda le problème. Il avait beau soudain paraître en colère, pas contre Sousuke heureusement, ce n'était pas de la jalousie. C'était plus profond, et cela venait de sentiments douloureux mais puissants, existant depuis des décennies et qui peinaient à disparaître malgré la rupture déjà vieille.
« Haru est super bizarre. Sauf qu'il persiste à dire que tout va bien, et je sais que non.
– Qu'est-ce qui te fait dire ça?
– Je l'ai vu, lorsqu'on est sortis du van pour l'enregistrement du commentaire sur notre course à Tokyo, en vue des prochains JO. Il arrêtait pas de se retourner et avait l'air super stressé.
– Tu tires vite des conclusions à ce que je vois.
– Nan, insista-t-il, assez sérieux pour ne pas s'agacer et répliquer solennellement. C'est pas que lui. Il n'en a même pas parlé à Makoto, qui s'inquiète aussi. En plus, son agent est super bizarre, et il le surprotège. Il a même mis un garde du corps pour lorsqu'il est convoqué en tant que spécialiste sur un plateau. Haru déteste ce genre de choses, s'il laisse ça se produire c'est parce qu'il a une bonne raison. »
Ceci lui fit un peu mieux accepter l'hypothèse. Sousuke, en tout cas, se réajusta sur son siège et laissa de l'inquiétude courir le long de son dos, car il avait beau ne pas être proche de Haru, surtout après tant d'années sans le voir à part à la télévision, il ne voudrait jamais le voir en danger.
« Ok, d'accord. Mais moi, dans tout ça? »
Rin grimaça, tout en accélérant pour s'insérer sur la voie rapide qui les mènerait vers Ginza, là où le désormais bien friqué Rin avait fini par s'installer. Haru y avait aussi terminé, il y a un ou deux ans, visiblement pour placer son argent. Sousuke s'était dit qu'il avait peut-être juste voulu se rapprocher de Rin.
« S'il n'en parle ni à moi, ni à Makoto, je pensais au moins que les flics sauraient quelque chose, si jamais son agence avait porté plainte.
– Ouais, mais je t'ai dit que c'était pas de mon recours, et qu'en plus j'y bosse plus.
– Je sais ce que tu as dit... » grogna-t-il, fermant une seconde les yeux avant de se recentrer sur la route. Il déglutit, et parvint à ajouter : « Je suis désolé de t'avoir menti, mais je savais pas quoi faire d'autre... et puis si de toute façon t'as plus de boulot, autant que tu sois pas tout seul- »
Sousuke souffla brusquement, car il aurait dû s'y attendre. Il avait eu un bref espoir, mais ce n'était que Rin et ses pauvres manipulations pour le ramener dans la capitale, avec lui. Il ne lui en voulait pas tellement, étant donné que de base il n'avait pas eu beaucoup d'attentes, mais il demeura agacé, plus contre lui-même que contre son meilleur ami.
« Même si je vais parler à Haru, à quoi ça servira? siffla-t-il, persistant à regarder le paysage filant via la vitre, appuyant sa mâchoire sur son poing. On est pas les meilleurs potes, il a aucune raison de m'en parler à moi, et il se doutera que c'est toi qui me l'a demandé.
– Écoute, on essaiera! perdit-il patience, visiblement trop anxieux pour se permettre de peser le pour et le contre de ses idées. Y a un truc qui se passe, et je refuse de devoir rester derrière. En plus de ça, si t'es là, tu pourrais tenter de te trouver un job ici, non? Le mieux à faire serait de voir tout ça comme un coup du destin, cette coïncidence pourrait juste vouloir dire que tu devais venir ici. »
Sousuke ne répondit pas, Rin savait très bien ce qu'il pensait du destin, que s'il en avait un, celui-ci était définitivement maudit. Et il refusait absolument d'imaginer que ce qu'il lui était arrivé puisse avoir été écrit.
Son poing se referma lorsqu'il se rappela de ses années lycée, puis de cette convocation de son supérieur, des cris qui avaient été balancés, de la sensation de n'avoir rien fait d'utile pendant des années, de sa colère qui l'avait fait tout bonnement gueuler qu'il s'en allait, avant de descendre rédiger sa lettre de démission, qu'il avait ensuite promptement jetée sur le bureau de la secrétaire en chef avant de réunir ses affaires et de se barrer. Le mélange d'angoisse et de rage qui l'avait empêché de dormir vint resserrer son ventre, mais il ne dit rien, car il n'avait pas envie d'en parler à Rin, maintenant.
Les minutes s'écoulèrent alors, et son meilleur ami ne tenta pas de l'obliger à parler, car il savait que l'avoir forcé à venir était un coup bas, qu'il faudrait attendre un peu pour qu'il lui pardonne. En attendant, il conduisit à travers la ville, et finit par se garer chez lui en lui disant qu'ils iraient voir Haru le lendemain, qu'il pouvait faire comme chez lui.
Mais quand Rin dut partir pour un entraînement, étant assistant de l'équipe nationale, Sousuke se retrouva seul dans cet appartement, cette ville, et échoua à nouveau à dénicher le sommeil. Il erra dans les pièces, s'ennuyant à mourir sans Rin pour parler de tout et de rien, car il était vrai que cela lui changeait un peu les idées et qu'il appréciait. Il aurait pu cuisiner quelque chose, mais se serait senti coupable de gâcher de la nourriture qu'il ne souhaiterait pas manger ensuite.
Il pensa à Haru, à la dernière fois qu'il lui avait parlé. Il fixa son visage sur les quelques cadres qu'avait Rin dans son appartement, puis resta debout plusieurs minutes, à se demander ce que cela ferait si son vieux rival était vraiment en danger. Il ne put se l'imaginer, et la simple idée de le découvrir un jour lui glaça le sang.
Il connaissait le nageur comme le type un peu paumé, ou bien volontairement blasé, dans un coin, qui ne disait rien. Il ne l'avait jamais vu en proie à la panique, ou à une expression qui agrandirait ses yeux, lui ferait perdre des couleurs. Il ne connaissait vraiment pas cet homme, voilà la conclusion qu'il atteignit. Pas après lui avoir parlé une heure à tout casser en trente ans, alors même qu'il était le grand amour de son meilleur ami. Sousuke était un inconnu, qui n'avait pas le droit de se mêler de ses affaires, et Rin avait juste voulu le faire revenir dans la capitale, près de lui.
Mais cela n'empêcha pas le sentiment un peu dérangeant au fond de son ventre de subsister. Cette crainte, froide, de voir le masque indifférent que portait habituellement Nanase Haruka tomber. Parce qu'il ne voulait pas assister à cela, et qu'il n'était pas non plus assez égoïste pour ignorer ce qu'il pouvait lui arriver.
Cela prit quelques heures, mais il se dit finalement qu'il était là pour une raison, que Rin lui ait menti ou non. Il sortit de l'appartement en jogging et tongs, jouant avec la clé que lui avait prêtée son ami. Ses pas traversèrent les rues, tandis qu'il tentait de se souvenir de l'immeuble où habitait Haru. Il n'était pas bien tard, alors il aurait pu demander son numéro à Rin pour l'appeler, mais il se rendit compte qu'il n'avait pas beaucoup de batterie, et qu'il avait oublié son chargeur à Osaka. Il essaya d'oublier l'appréhension présente dans son ventre, qui s'intensifiait au fur et à mesure qu'il repérait l'immeuble, puis cherchait le numéro d'appartement, et profitait du fait que quelqu'un sorte pour lui tenir la porte d'entrée.
Finalement, il se trouva sur le bon palier, et Sousuke se dit qu'il serait sans doute mal vu à surgir en pleine soirée sans s'être annoncé, quand ils ne s'étaient pas vus depuis très longtemps, et qu'il n'était pas au courant de son bref retour. Mais pas près de se préoccuper de ce genre de choses, car il ne pouvait empêcher ce qu'il aimait surnommer ses simples manies d'angoissé, mais qui s'apparentaient aussi à un mauvais pressentiment; il se contenta de toquer.
C'était jusqu'à voir que le battant n'était pas fermé. Et que la serrure semblait avoir été crochetée.
Il entra lorsqu'aucune réponse ne lui parvint, et haussa la voix, s'éclaircissant la gorge pour être audible et ne pas laisser les battements de son cœur le troubler, ni les souvenirs de scènes de crimes l'atteindre :
« Eh, Haru, t'es là? »
Il pénétra dans l'appartement, referma derrière lui. Puis il s'approcha doucement, n'osant plus parler. Le silence de mort qui planait fut soudain entrecoupé par sa respiration qu'il trouva lourde, oppressante. Il entendit un bruit dans le salon, manqua sursauter. Un léger temps plana, alors qu'il se demandait s'il avait rêvé.
Mais des pas s'approchèrent rapidement, puis la porte menant au salon s'ouvrit, le faisant brusquement se tourner vers elle. Il n'eut pas le temps de dire un mot. Une main attrapa le devant de son t-shirt et le poussa avec violence vers un mur du genkan. Instinctivement, ses mains vinrent attraper les épaules du plus petit, et dans les brèves secondes où Haru était tout à coup apparu devant lui, il entraperçut son visage.
Et il avait eu raison. C'était tout ce qu'il n'aurait jamais voulu voir.
De la panique sourde tirait ses traits, déjà pâles, des traces de cernes assombrissant les yeux écarquillés. Les mèches noires plus courtes qu'autrefois contournaient son visage et une mèche collait à sa tempe. Il fit mal à Sousuke avec la force qu'il appliquait contre le haut de son torse, et si l'ancien policier ne les vit pas, il sut sentir la tension dans ses mains, ses poignets tremblants enfoncés dans sa poitrine.
Ils n'échangèrent pas un mot, pas même quand la bile envahit la bouche de Sousuke, pas même quand Haru se rendit compte de qui était en face de lui. Ils se sondèrent du regard, alors que les pupilles bleues du nageur reprenaient une taille normale, et qu'il lâchait un léger souffle, comme soulagé. Après ce qui sembla être des heures, sa poigne se desserra.
« Sousuke...? »
Sa voix était faible, et il y discernait malgré tout une certaine angoisse mêlée à la surprise. Mais Sousuke ne put rien répondre, ni même s'y attarder, quand il vit enfin par delà le battant qu'avait franchi Haru. Et qu'il aperçut les meubles au sol, les coussins déchirés, les tiroirs renversés, les papiers jonchant le parquet.
Un lourd silence terrifié remplaça l'incompréhension, car Haru ne pouvait plus se cacher, et parce que Sousuke ne pouvait plus imaginer une seule seconde que cette histoire puisse être le fruit de la paranoïa de son meilleur ami. Son pressentiment avait été juste. Et peu importe ses propres problèmes, peu importe qu'ils soient des inconnus, il ne pouvait décidément pas passer son chemin.
« ...c'est quoi ce bordel, Haru? »
À suivre...
"Fools" said I, "You do not know
Silence like a cancer grows
Hear my words that I might teach you
Take my arms that I might reach you"
But my words like silent raindrops fell
And echoed in the wells of silence
Ceux qui m'ont suivie sur d'autres fics sauront peut-être l'amour particulier que j'ai pour les vieux groupes de rock (notamment des 60-70s'). Ils sauront aussi que j'adore les voyages. C'est pour cette raison que j'ai voulu combiner les deux dans cette fic, d'une manière que vous comprendrez rapidement.
En tout cas, je vous invite évidemment à écouter les chansons mentionnés en titres ainsi que dans les chapitres, dont la musique correspond à l'ambiance dudit chap, et les paroles ont aussi un rapport avec ce qu'il s'y passe. Si je peux vous faire découvrir certaines de mes chansons préférées grâce à cela, je serai plus qu'heureuse. Je tâcherai au passage de faire un petit point sur chacune de ces chansons à la fin des chaps; pas sur leur rapport avec celui-ci, les paroles parlent d'elles-même, mais juste papoter dessus.
Pour ce chapitre, vous avez donc une chanson bien connue : The sound of silence, qui est là pour son parallèle avec la fin du chapitre évidemment.
Les quatre albums qui ont accompagné l'écriture sont les soundtrack de Good Morning England, de La vie privée de Walter Mitty, l'album de Bon Iver, Emma, forever ago, ainsi que l'album de cover de Ninja Sex Party Under the covers.
La naissance de cette fic vient de nombreuses frustrations que j'ai en lisant du Free. Car je shippe vraiment, vraiment beaucoup Haru et Sousuke. A cause de High Speed qui montre qu'ils s'entendaient bien, mais aussi avec l'OAV, et juste leurs personnalités qui sont très compatibles de mon point de vue.
Ainsi, en lisant du SouMako, ou du RinHaru, à chaque fois que ceux-ci finissent, à un moment, par interagir, je peux pas m'empêcher de rager quand je les vois juste se haïr. Car je ne pense pas qu'ils se haïssent, je ne pense pas qu'ils s'entendraient mal, au contraire, juste qu'ils sont mal à l'aise, et qu'il faudrait peu pour briser la glace qui s'est installée dans Eternal Summer.
Alors, je l'avoue, même en écrivant ma propre fic SouMako (J'avance), j'ai eu des pulsions SouHaru oh combien violentes. J'ai voulu, au chapitre 3 de la part II, précisément, finir avec un bon SouHaru, avant de me dire que Rin ne le pardonnerait jamais à Sousuke; et dans ce cas-ci Makoto non plus.
Et cette idée, j'ai eu foutrement envie de la développer. Je me dis que de voir Sousuke tomber amoureux de Haru alors qu'il sait (ou seulement pense?) que Rin a aussi des sentiments pour celui-ci pourrait être ultra intéressant à écrire, et à développer. Et en voilà la preuve. J'en ai fait une fic de 15 chapitres.
Je rassure tout le monde : ce n'est pas une fic pleine d'angst où Rin et Sousuke vont se déchirer et se battre pour Haru. Ils ont quand même dépassé l'école élémentaire et savent que l'amour ne se gagne/mérite pas (pas mal de mangakas ne sont d'ailleurs toujours pas au courant). Ce qui m'intéressait c'était la réaction de Sousuke face à cet amour « interdit », et la manière dont il pourrait accepter des sentiments qu'il pense ne pas avoir le droit d'avoir, et dont il a même peur. D'ailleurs, on restera essentiellement centrés sur Haru et Sousuke, et Rin demeurera plus mineur dans ses apparitions, bien que majeur dans l'histoire.
Je vous souhaite d'apprécier cette fic autant que j'ai aimé plonger dans cette idée de l'amour interdit, sans pour autant parler de sexualité (thème que j'ai bien abordé dans d'autres fics)! Bonne lecture!
