Prologue
Le soir tombait doucement sur New York et une légère brise apportait enfin un peu de fraîcheur dans cette journée caniculaire. Les allées et les pelouses de Central Parc étaient pleines de monde. De nombreuses familles étaient venues profiter de cette légère baisse de température, ce qui donnait au parc un air de cour de récréation.
Les plus jeunes profitaient des aires de jeux, explorant leurs limites en escaladant les structures, dévalant les toboggans, traversant des ponts de singes ou se balançant de plus en plus haut sur les balançoires.
Sur les pelouses, des matchs de football, de baseball et de volleyball se déroulaient aussi sérieusement que s'ils avaient été organisés officiellement. Partout, des parents encourageaient fièrement leurs progénitures, riant parfois de la gêne qu'ils provoquaient chez leurs chères petites têtes blondes.
Un petit garçon déambulait au milieu de cette joyeuse agitation. Il observait le monde qui l'entourait avec curiosité. Le parc lui semblait légèrement différent, pourtant il y était venu la veille. Il était impossible que les jardiniers de la ville aient fait autant de modifications en une journée.
Il fouilla ses poches en apercevant un marchand de glaces et sourit en y trouvant quelques pièces.
- Salut mon bonhomme, aurais-tu envie d'une bonne glace ? demanda le marchand lorsqu'il s'approcha.
- Au chocolat s'il vous plait ! Sourit le garçonnet. Deux boules avec un supplément de chantilly !
- Toi, tu sais ce que tu veux, dis-donc !
- C'est important de savoir ce qu'on veut dans la vie.
- Tu as parfaitement raison ! Tiens, voilà ta glace.
L'enfant lui tendit quelques pièces et prit le précieux gobelet.
- Tu es tout seul ? Demanda le marchand.
- Non, bien sûr que non ! Qui laisserait un enfant aussi jeune que moi tout seul ?
- Tu n'imagines pas le nombre de parents insouciants que je vois défiler chaque jour. Alors, qui t'accompagne ?
- Mon père, c'est le grand monsieur là-bas, répondit l'enfant en désignant un homme, qui discutait avec d'autres à une cinquantaine de mètres de là.
- Tu ferais bien de le rejoindre rapidement, il traine de drôles de types dans une ville aussi grande que New York.
L'enfant acquiesça et s'éloigna en dégustant sa crème glacée. Il jeta quelques coups d'œil discrets vers le marchand de glace et bifurqua lorsqu'il fut certain que son attention avait été retenue par d'autres clients.
Il s'installa près des structures de jeux et regarda les autres enfants qui s'amusaient bruyamment.
Soudain, les pleurs d'une fillette attirèrent son attention, un garçon plus âgé l'avait bousculée et sa glace gisait sur le sol.
- Tu ne peux pas regarder où tu vas ? Grogna ce dernier. T'as pas intérêt à te plaindre à maman !
- T'es méchant ! Couina la petite fille.
- C'est à ça que servent les grands frères, à montrer à leur petite sœur que le monde n'est pas rose bonbon ! Railla l'aîné avant de rejoindre ses amis.
La fillette sanglotait toujours devant le désastre de sa glace fondant à ses pieds au milieu de la poussière.
- Tiens prends la mienne, dit une voix derrière elle.
Elle se retourna et découvrit un petit garçon qui lui tendait sa glace au chocolat en souriant.
- J'ai terminé la chantilly, mais il reste encore tout le chocolat ! Expliqua-t-il d'un air désolé.
- C'est gentil, murmura la fillette en prenant la glace.
- Mon dentiste sera fier de moi, plaisanta le jeune garçon en haussant les épaules.
- Je ne t'ai jamais vu ici, tu es venu pour les vacances ?
- Non… Euh… Ma sœur et ma grand-mère vivent ici, on est venu leur rendre visite avec mon père.
- Ta sœur ne vit pas avec vous ?
- Elle est adulte, elle a un travail et même un amoureux je pense.
- Et toi, où vis-tu ?
- On a une maison dans le Maine. On a quitté New York l'an dernier.
- Hé toi ! Cria le grand frère de la fillette.
- Moi ? S'étonna le petit garçon.
- Ouais toi ! Viens jouer au base-ball avec nous au lieu de rester avec cette pleurnicheuse !
- C'est que … Je ne sais pas jouer au baseball.
- Tu ne sais pas ? Mais tout le monde sait jouer au baseball !
- Bobby ! Laisse-le tranquille ! Intervint sa jeune sœur.
- Pas tout le monde, puisque moi je ne sais pas, répliqua le petit garçon. Mon père non plus d'ailleurs.
- Wah ! Il est si nul que ça ton père !
- Bobby !
Le garçonnet se jeta sur ledit Bobby, qui faisait au moins une tête de plus que lui et le précipita au sol.
- Mon père n'est pas nul ! Il a sauvé New York d'une attaque de terroristes ! Cria le jeune garçon hors de lui.
Le plus âgé se releva et jeta un regard dédaigneux au plus jeune, puis attrapa sa sœur par le bras et l'entraîna plus loin.
- Rentrons Lily, il va être l'heure de dîner de toute façon.
La fillette suivit son frère, non sans adresser un petit signe au garçonnet, qui le lui rendit gentiment. L'enfant se retourna et regarda l'heure affichée sur l'une des horloges du parc. Il était temps aussi pour lui de rentrer, avant que son père n'appelle ses amis policiers. Il était presque sûr que bientôt il entendrait les sirènes de leurs voitures.
Il n'avait plus suffisamment d'argent pour prendre un taxi, mais il connaissait bien le chemin, en prenant quelques raccourcis, il serait rapidement de retour auprès de son père.
Passant par une ruelle un peu sombre, il accéléra le pas, tous ses sens en alerte, prêt à réagir au moindre mouvement suspect. Il était courageux, il n'y avait aucun doute là-dessus, mais après tout, il n'avait que cinq ans, il était normal à cet âge de ne pas être rassuré dans ce genre de ruelle. Il pensa à son père et réalisa soudain qu'il ne serait sans doute pas content. Il aurait dû le prévenir qu'il allait se promener tout seul. New York, ça n'était pas le Maine !
Des bruits de pas résonnèrent soudain derrière lui. Une course poursuite ? Son instinct lui intima de se trouver très vite une bonne cachette.
Il observa les lieux et se décida rapidement, il était très fort pour jouer à cache-cache. Il était même plus fort que son père à ce jeu-là, ce qui n'était pas peu dire !
Une fois parfaitement caché, il se concentra sur sa respiration, il devait être le plus discret possible. Maîtrisant ses tremblements du mieux qu'il le pouvait, il attendit que tout cela se passe.
Les bruits de pas se rapprochaient, un homme criait après celui qu'il pourchassait. Depuis sa cachette, l'enfant aperçut le jeune homme qui cherchait à échapper à son poursuivant. Il le vit s'accroupir derrière une poubelle pour reprendre son souffle.
Il aperçut une ombre passer au milieu de la ruelle. Au bout de quelques minutes, le silence revint dans la ruelle.
Se croyant hors de danger, le jeune homme sortit de sa cachette derrière les poubelles. Il regarda prudemment de chaque côté de la ruelle et se croyant seul, il se remit en chemin. Mais son poursuivant n'était pas parti, il s'était simplement dissimulé dans l'ombre, pour mieux surprendre sa proie. Il braqua son arme sur le jeune homme, qui effrayé tenta de fuir, mais trébucha. Son poursuivant s'approcha de lui calmement.
Le jeune homme implora la pitié de l'autre, en vain. Il y eut plusieurs coup de feu, des bruits de pas et le silence régna de nouveau dans la ruelle.
