Et le Ciel nous pleurera un jour...
CHAPITRE 1 : L'acier reflète le Styx de l'émeraude
Il ouvrit les yeux brutalement, sortant de la torpeur d'un sommeil sans rêves, d'un néant à la perfection ensorcelante, véritable prison de son âme, véritable sauveuse de son être. La sueur qui perlait son front collait certaines de ses boucles blondes. Sa respiration était rapide, saccadée, son cœur battait à tout rompre, saccagé. Assis sur son séant, Draughar Malefoy essayait de reprendre pied avec la réalité, de se délivrer des mains cruelles de ce sommeil sombre, dangereux, implacable. Lorsqu'il reprit possession de ses moyens, il jeta un rapide coup d'œil à son réveil. Il était temps d'y aller. A demi-nu, il chancela jusque dans la salle de bain où il s'appuya lourdement sur le lavabo. Il contempla son reflet. Sa chevelure sauvage dorée ne cachait pas la dévastation qui habillait ses traits. L'expression de ses yeux, tout comme la couleur de ses iris, étaient sans couleur, morne, sans vie. Une nuit de plus comme celle-ci et il ne donnait pas cher de sa peau. Il enfonça sa main dans le nécessaire à potion installé tout près. Il fouilla, dans un geste affolé l'intérieur de la sacoche en cuir, renversant les fioles qui s'entrechoquaient les unes contre les autres dans un bruit cristallin. Lorsque sa main se referma sur un minuscule flacon. Il regarda le contenu bleu, et sans ménagement fit sauter le bouchon, qui finit sa course sur le sol carrelé, rebondissant. Sadiquement. Le son, trop strident, trop vif sonna dans sa tête, comme autant de poignards perçant ses tympans. Il ne put contenir une grimace et eut un râle douloureux, plaquant ses mains sur ses oreilles. Il ravala difficilement sa salive et but d'une traite le liquide bleuté.
Peu à peu, il sentit ses forces revenir, s'installer dans chacun de ses muscles. Son sang circulait de nouveau normalement. Toujours agrippé au lavabo, il prit une grande inspiration. D'un pas, désormais assuré, il s'installa dans la douche. L'eau agissait comme une rédemption, nettoyant les vestiges d'un corps maltraité par les substances qu'il ingérait quotidiennement depuis deux mois, afin de se libérer de la folie qui encerclait ses tripes. Afin de maîtriser l'incontrôlable. Dompter l'indomptable. Expugner l'intenable.
A cette pensée, il rit, mais ce rire était désespéré, las. Vie normale... Cela n'avait jamais existé pour Draughar Malefoy.
Il sortit de la douche, un soupçon revigoré. Il enfila un sweat-shirt noir et un jean et rangea toutes ses affaires dans sa valise qu'il avait ensorcelé quelques années plus tôt. Il la ferma et mit son masque. Le masque implacable, imperturbable. Il sortit.
La gare était un lieu sinistre, se transformant à la nuit levée en plaque tournante de la drogue pour les villes voisines. Le sol était jonché de prospectus divers, d'ordures et même de seringues utilisées. Draughar Malefoy, assis sur un banc de pierre, qui ne semblait nullement ému par l'état déplorable du lieu, referma dans un bruit sec le journal qu'il lisait. Un journal aux images qui bougeaient toutes seules. La Gazette des Sorciers avait fait sa Une sur le premier ministre dont la photo se voulait rassurante. Ce dernier, dans sa robe de sorcier, serrait la main d'une autre sorcière, un sourire amical aux lèvres, et saluait de son autre main les journalistes.
«Le premier ministre assure que le monde magique n'est nullement en danger par le soi-disant retour de Vous-Savez-Qui annoncé par le directeur de Poudlard Albus Dumbledore deux mois auparavant».
Les yeux aciers fixaient le titre d'un air pensif, quand, dans un geste colérique le jeune homme froissa le journal de ses mains, tout en soupirant rageusement. Il se leva. Il regarda le ciel qui était tapissé de gros nuages noirs menaçant les habitants de la Terre d'une pluie torrentielle. Il regarda l'heure, encore une fois, et jeta d'un geste las le journal au sol, rejoignant ainsi, une pile d'ordure amassée non loin. Il prit sa valise dans laquelle il pouvait rangé toute sa vie. Mais était-ce réellement une vie ? Désabusé. Dégoûté. Une goutte de pluie tomba sur son nez, qui eut l'effet sur lui d'une lame invisible, glacée. Laissant au diable ses sensations physiques tortueuses il se mit en branle. Il s'engouffra dans le tunnel qui menait au quai souhaité. La gare était déserte la journée, les habitants de la ville l'évitant comme la peste, préférant conduire leurs proches dans leurs étranges machines moldues jusqu'à la prochaine gare. Mais le grand blond ne semblait pas partager ces inquiétudes inutiles, les siennes étaient d'un tout autre ordre.
Il arrivait en bas de l'escalier. Quand ses pupilles se rétrécirent violemment, son cœur manqua un battement : il n'était plus seul. Instinctif, il serra un peu plus fort sa baguette située dans sa poche. Il continua néanmoins sa marche, inébranlable, jusqu'au prochain escalier. Mais il se refusa de poser le pied sur la première marche. Il fit volte-face tout en lâchant sa valise qui s'écrasa au sol dans un bruit épouvantable et cria «Expelliarmus !». Un bruit de baguette tombant au sol se fit entendre au loin. Malefoy aperçut alors l'homme qui jouait le rôle de scrutateur. Portant une robe de sorcier prune, il avait été propulsé sur un mur orné de graffitis, sous la violence du sort de désarmement. Ce dernier lui lança un regard amer.
- Impressionnant, Draughar Malefoy, grinça-t-il entre ses dents.
Le jeune homme sentit une décharge électrique glisser lentement le long de ses membres. Il contracta la mâchoire pour oublier la douleur que lui procurait cette sensation dans le profond de sa chair. Il sentit la colère poindre dans son sang, le submergeant tel un venin mortel.
- Pourquoi me suiviez-vous ?
La question avait été prononcé à voix basse, dans un sifflement. Il s'avança à pas lent vers l'homme.
- Je travaille pour le ministre de la magie. Vous êtes prié de me suivre au ministère afin que l'on vous...
Mais sa phrase mourut sur ses lèvres. Draughar Malefoy était désormais à un mètre de lui, et quelque chose dans sa présence lui glaçait le sang, se sentant gravement menacé.
- Le ministère hein ? chuchota le jeune homme, les yeux fermés, la tête penchée sur le côté, comme s'il essayait de mieux faire rentrer ce qu'il venait d'entendre dans son oreille.
- Oui, dit l'homme du ministère en avalant difficilement sa salive.
Draughar rouvrit les yeux, son regard fit blêmir d'effroi le sorcier à la robe prune. Un regard ne laissant transparaître qu'une dureté plus froide encore que l'acier. Il leva sa baguette.
- Avada Kedavra.
Le sort éclaira le tunnel d'une verte, l'espace d'une seconde, les iris grises de Malefoy devinrent émeraudes. L'homme s'écrasa au sol, parmi les cadavres de canettes de bière. Le blond le regarda quelques secondes, absorbé par le vide, ses iris redevenues implacables. Il cracha à côté du corps, tout d'un coup écœuré. Il retourna à sa valise. Il avait un train à prendre Poudlard et pour rien au monde il ne l'aurait raté.
