L'être humain. Une vermine hypocrite et égoïste qui ne cherche qu'à acquérir son petit confort personnel sans se soucier du sort de ses semblables. Ce n'est qu'un monstre s'épanouissant dans la violence et le sang, faisant souffrir tout être vivant et détruisant son propre monde qui avait pourtant eu la bonté de l'accueillir. Entendre parler d'humanité le dégoutait au plus haut point. La planète devait être débarrassée de ces vers grouillants à sa surface, que ces choses immondes soient anéantie. Ecrasés ou brulés, cela lui importait peu tant qu'ils meurent tous. Cependant, il consentait à avouer que parmi ces vers, il y avait quelques chenilles pouvant un jour devenir papillon. Mais elles étaient si rares et qui sait combien de temps nécessite la métamorphose ?
Il secoua la tête pour chasser ces idées de son esprit. Inutile de cogiter là-dessus, leur heure viendra bien assez tôt Dans quelques mois à peine, sa majesté reviendra parmi eux, ce n'est qu'une question de temps. Il jeta un œil distrait vers la douce lueur verte des chiffres numériques qui éclairait doucement la pénombre de sa chambre. 14H05. Sachant qu'il aimait prendre ses aises au levé et que son service devait commencer à 15H30, il valait mieux qu'il se lève maintenant. Il se dégagea de ses couverture et fis craquer les os de son dos en s'étirant. La lumière de sa salle de bain l'éblouis. Il se débarrassa de ses vêtements pour prendre une douche, celle qu'il n'avait pas prise avant de s'endormir, épuisé. Il avait terminé plus tard que d'habitude. Habituellement, il travaille de 15h30 à 6h30 sauf en temps de grande guerre ou après le passage d'un catastrophe naturelle qui apportaient leur lots de travail. Ce matin, il avait finis à 8h30 à cause d'une bourde d'un collègue.
« Quel con celui-là. » pensa-t-il avec une vague lueur de colère dans ses yeux émeraude « il a vraiment eu de la chance que le procureur était de bonne humeur »
Ses longs cheveux secs et coiffés, il se dirigea vers la salle à manger vêtu d'une tenue moulante d'un noir profond, dévoilant des muscles finement ciselés. Plusieurs personnes mangeaient dans la salle. Déjeuner, Diner ou souper ? Il n'en savait rien, chacun avait un horaire différent et il ne retenait que le sien et celui de ceux qui travaillait avec lui.
Il s'avança dans la salle. Elle était gigantesque aux voute de cathédrale gothique et aux lustres si grands qu'il se demandait comment le plafond supportait leurs poids. De large table d'ébène y était alignée et des rideaux de velours noir et rouge étaient suspendus par intermittence aux murs afin de tenter de limiter l'écho. Par soucis de facilité et étant donné le nombre de personnes, les cuisines avaient adopté le système des cantines. A une large table mis à part s'afférait les servants et cuisiniers. Tous étaient vêtu de noir, costar pour les hommes, robe pour les femmes, et leurs visage étaient voilés. Il s'approcha d'eux afin d'y commander son déjeuner.
« Un bol de céréales »
La femme acquiesça. Le déjeuner servis, elle le lui donna sur un plateau et s'inclina respectueusement. Une voix grave résonna soudainement dans son dos.
« Alors, c'est tout ? Ma parole, Neil, mon ami, tu comptes rester un gringalet toute ta vie ? »
Le géant qui avait prononcé ces paroles avait également cru bon de les accompagner d'une tape amicale, et également un peu brutal, dans son dos. Le bol sursauta sous l'impact et aspergea de lait ses mèches châtain. L'homme éclata de rire tandis qu'il saisissait la serviette que l'un des servants lui tendait.
« Mea-culpa, Neil.
Y'a pas de mal Yvan. Tenez, reprenez ce plateau et resservez-moi. »
La servant repris le plateau et s'éclipsa en cuisine tandis que le géant cria à sa suite.
« Et surtout, n'hésitez pas à lui rajouter une assiette de bacon, ou deux.
-Yvaaan, s'il te plait.
-Quoi ? Je ne sais pas à quand remonte ta dernière rencontre avec un miroir mais je peux t'assurer que t'es un gringalet
-61 kilo pour 182 centimètres est à mon goût très convenable.
-Allez, essaye de faire bonne figure avec nous. Regarde Gigant et Rock, eux ils sont forts et en pleine forme. Toi, on a du mal à croire que tu tiendrais une journée entière durant la prochaine guerre sainte. »
Il leva les yeux vers la voute. Rock et Gigant étaient ses deux collègues, avec Yvan. A l'instar de ce dernier ils mesuraient plus de 190 centimètres et pesaient plus de 100 kg. A côté d'eux, c'est sûr, il dénotait. Mais il avait confiance en lui et savait que malgré son apparence, admet-on le tout de même, un peu fragile, il était loin d'être faible, lui, Neil du Kirin, de l'étoile céleste du meurtre.
La servante revint avec un plateau encombré par un déjeuner anglais assez copieux et bien loin du bol de céréales qu'il avait commandé. La servante s'inclina et fis un signe complice à Yvan, qui riait aux éclats devant sa mine déconfite avant de faire la même commande avec des portions doubles.
Il alla trouver un lieu où s'installer. Il fulminait intérieurement ce qui n'échappa guère à l'un de ses collègues.
« C'est agaçant lorsque les autres se mêle de ton alimentation, n'est-ce pas ? Je te comprends. »
Le ton était amusé mais guère moqueur. Il appartenait à un jeune homme également assez malingre avec qui Neil n'avait jamais eu l'occasion de faire plus ample connaissance. Les yeux fuchsia empli de malice, Myu du papillon, psychokinésiste au service de Rhadamanthe, regarda le kirin s'installer avec lui. Bien qu'ils fussent sous les ordres du même juge, ils ne se connaissaient pas personnellement ne travaillant pas dans la même zone. Neil n'avait entendu que quelques échos comme quoi il était végétarien ce qui expliquerait son empathie vis-à-vis de lui qui subit quelque contrainte alimentaire de la part de ses collègues. Il en profita pour en apprendre d'avantage sur cet étrange collègue qui, selon quelques racontars, ne serait pas humain.
« Ne m'en parle pas, je subis ça tous les jours. Nous n'avons pas souvent l'occasion de nous rencontrer. Je suis Neil du Kirin.
-Quand à moi, repris le géant qui venait d'arriver, je suis Yvan du troll.
-Myu du papillon, mais vous le savez déjà. Et certaine rumeur peuvent s'avérer vrai, Neil, je ne suis effectivement pas humain et, non, je ne te dirais pas ce que je suis en réalité.
-Je suppose que tu as lu dans mes pensées pour ainsi répondre aux questions que je me posais. Tu pourrais arrêter s'il te plait ?
-Evidemment. Désolé, c'est une mauvaise habitude que j'ai là. Je te connaissais également, Neil du Kirin. Qui ne te connais pas dans les enfers, toi qui es le plus jeune d'entre nous. Mais c'est surtout parce que tu ressors fortement parmi tes collègues de la 3ème prison.
-Tu vois, Neil, je ne suis pas le seul à penser que tu es un gringalet, argumenta le troll en martelant son dos une fois de plus, faisant soupirer le kirin d'exaspération.
-Il n'a jamais dit ça.
-Ne fais pas l'enfant et mange, ça va refroidir. »
Le troll entama son déjeuner tandis qu'il regarda le sien, une moue sur le visage qui fit ricaner le papillon. Il y a beaucoup de chose qui ne lui plait pas. Assez difficile sur les bords, il fait des efforts constants pour honorer ce qu'on lui sert même si, pour certain légumes, il en est totalement incapable. Mais il sait que son collègue, même s'il le prend avec le sourire, s'inquiète sincèrement pour sa santé et, refusant de le décevoir, il fit un effort et entama son déjeuner.
Un puissant cosmos fit son apparition dans la salle. Le seigneur juge Rhadamanthe de la Wyverne, étoile céleste de la violence, titan au service des enfers, venait de faire son apparition. Contrairement aux autres spectres, les juges n'ont pas de poste fixe aux enfers même si le tribunal occupe une bonne part de leur temps. Ils sont réquisitionnés suivant les besoins, les problèmes, et les caprices de Pandore. De part ce fait, ils n'avaient pas d'horaire fixe.
La Wyverne jeta un coup d'œil à une table à l'écart des autres et exclusivement réservé aux juges. Vide, comme d'habitude. Minos et Eaque préféraient déjeuner dans leur temple situé respectivement à Tolomea et à Antinora. Il soupira d'aise. Au moins il n'aurait pas à endurer ses deux collègues. Les trois juges se supportaient avec difficulté, entre eux durait comme une rivalité existant depuis des temps immémoriaux. Le juge commanda son repas et s'installa auprès de ses hommes, les premiers qu'il reconnut, à savoir Yvan, Neil et Myu. Des trois juges, Rhadamanthe était le plus proche de ses hommes et ceux-ci le lui rendait bien. La wyverne jeta un regard étonné à l'assiette du Kirin. Il le connaissait assez bien pour savoir qu'il n'aurait jamais mangé ça de son plein grés et, à la mine réjouie du troll, il de vina que ce dernier y était pour quelque chose.
« Je vois qu'on a pris en main ton alimentation. Ce n'est pas plus mal.
-Tu vois, je ne suis pas le seul à le penser ! Ria Yvan en administrant pour une troisième fois un tape dans le dos qui eut raison des nerfs du jeune spectre.
-Non mais c'est fini cette manie ! S'énerva-t-il avant qu'un regard noir du juge ne le rappel à l'ordre. Désolé seigneur juge, je me suis laissé emporter.
-Apprends à te maitriser, lui reprocha la wyverne. Par ailleurs, j'aimerais que tu accélères le rythme, tu prends ton service à 15h30 si je ne m'abuse et tu n'as pas encore ton surplis.
-Je sais, seigneur Rhadamanthe. »
Le juge esquissa un sourire. Neil est, malgré les apparences, un redoutable combattant. Mais c'est également un gamin ayant grandis trop vite, encore en pleine crise d'adolescence. Il s'énerve rapidement, surtout au pied du lit, et râle souvent. Cependant, il courbe l'échine sans rechigner face à lui. Le Kirin n'a pas encore dix-huit ans, c'est le plus jeune de ses subordonnés voir même des 108 spectres ainsi que le seul à ne pas avoir été enrôlé après sa majorité. Voici bientôt quatre ans qu'il séjourne aux enfers. Trop vite confronté au monde adulte, il a souvent les yeux dans le vide caressant une cicatrice au-dessus de son arcade sourcilière droite en mémoire d'un passé révolu, enterré sous la centre et le sang.
