Salut à tous ! Voici ma toute nouvelle fanfiction Merthur. J'ai re-regardé l'intégrale de la série il y a pas longtemps et ça m'a donné envie d'écrire cette histoire. Comme d'habitude, il s'agit de Merthur, avec une aventure et pas mal de magie, j'espère que le tout vous plaira.

Bonne lecture!

CHAPITRE I

LES CHOIX QUE NOUS FAISONS

Merlin avait du mal à rester en selle. Il n'avait qu'une seule envie : retourner au château et partager un déjeuner copieux avec Gaius.

- Rappelle-moi pourquoi nous sommes obligés de faire ça, déjà, souffla-t-il à Gauvain, qui chevauchait à ses côtés.

Ils patrouillaient depuis déjà plusieurs heures. Si l'on avait voulu les attaquer, ils le sauraient sûrement depuis longtemps.

- Afin que Camelot ne soit pas envahi, Merlin, déclara Arthur d'un ton clairement condescendant.

Merlin leva les yeux au ciel mais jugea bon de ne rien répliquer. Il était vrai qu'Arthur lui accordait certaines libertés, mais Merlin avait dû apprendre à ne pas en abuser.

- Je dois avouer que je suis d'accord avec Merlin, intervint Gauvain.

Arthur se tourna vers ses chevaliers, Léon, Elyan et Perceval, qui hochaient tous la tête en signe d'assentiment, lorsque des bruits de pas au-dessus d'eux lui firent lever la tête. Le roi sortit son épée de son fourreau et talonna sa monture.

- Avec moi ! s'écria-t-il, et les chevaliers le suivirent dans la bataille.

Merlin resta en retrait, mais il trouvait cela de plus en plus difficile. Un simple mouvement de la main lui aurait permis de se débarrasser de cette troupe – mais il ne pouvait cependant pas se permettre d'être découvert. Il suivait Arthur des yeux, prêt à intervenir s'il le jugeait nécessaire.

Alors que les chevaliers poursuivaient leurs ennemis au galop, Sir Léon se fit désarçonner et tomba lourdement au sol. Merlin glissa à bas de son cheval et se précipita au près du chevalier.

- Comment va-t-il ? demanda Arthur en s'approchant d'eux.

- Il a perdu connaissance, déclara Merlin.

Arthur fit signe aux chevaliers de le rejoindre.

- Nous allons nous réfugier dans cette caverne un moment, c'est plus prudent.

- Ils se sont enfuis comme des lâches, souligna Gauvain, apparemment déçu de ne pas avoir eu droit à plus d'action.

Elyan et Perceval soulevèrent Léon et tous se dirigèrent vers la caverne qu'Arthur avait désignée. Quelques branchages en dissimulaient l'entrée ils y seraient à l'abri en attendant que Sir Léon revienne à lui. Les chevaliers s'assirent lourdement sur le sol de la caverne tandis que Merlin se figea à l'entrée. Il pouvait sentir un pouvoir étrange émaner de ces murs. Il ne pouvait décrire le sentiment qui l'envahit alors, un mélange de respect et de crainte, l'impression de s'aventurer sur un territoire inconnu tout en ayant l'impression d'être rentré chez lui. Il se rappela l'Antre de Cristal ne put réprimer un frisson d'angoisse. Ils n'auraient pas dû se trouver ici.

Sir Léon reprit connaissance au moment où Merlin s'apprêtait à protester mais il était déjà trop tard. Arthur, de toute évidence blessé à la jambe, venait de s'appuyer contre l'un des murs de la caverne. Une voix s'éleva alors dans l'obscurité. Son écho retentit contre les murs de pierre.

- Arthur Pendragon.

- Le roi des temps présents et à venir.

Tous levèrent la tête, sans pouvoir déterminer l'origine des voix. Arthur leva son épée.

- Le roi des temps présents et à venir, répéta une troisième et dernière voix. Ton règne touche à sa fin.

- La sorcière veut ta perte.

- Morgane ? interrogea Arthur alors que Merlin sentait sa propre anxiété faire surface.

- Pourquoi l'en empêcherions nous ? continuèrent-elles à l'unisson.

- Ne veut-elle pas restaurer la magie ? demanda l'une.

- Nous n'aurions plus à nous cacher, déclara l'autre.

- Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ? s'exclama le roi.

Les chevaliers échangèrent des regards anxieux, ils semblaient cependant prêts à se jeter dans la bataille si nécessaire.

- Les prophéties sont claires.

- Arthur Pendragon.

- Le roi des temps présents et à venir unira le royaume d'Albion.

Cette expression attira l'attention de Merlin. Qui étaient ces femmes qui semblaient tant savoir des prophéties ?

- La sorcière conduira le royaume à sa perte.

- Elle a déjà commencé.

- Laisse-nous te montrer le chemin à suivre.

Arthur tourna discrètement la tête vers Merlin, et celui-ci lui adressa un signe de négation tout aussi discret. Il espérait qu'Arthur parvienne à lire dans ses yeux la méfiance qu'il éprouvait.

- Tu as déjà laissé passer de nombreuses chances, Arthur Pendragon.

- Tu ne peux pas en laisser passer de nouvelles.

- Que voulez-vous dire ? s'exclama Arthur, de toute évidence énervé de ne pas comprendre la situation dans laquelle il se trouvait.

- Il existe de nombreuses voies.

- Toutes ne conduisent pas au même endroit.

- Certaines mènent directement à ta perte.

Merlin détourna soudainement les yeux, qui n'avaient pas quitté Arthur, pour tenter de localiser l'origine des voix.

- Certaines mènent directement à l'anéantissement de ce royaume.

- D'autres font de ce royaume le plus grand de tous les royaumes.

- Nous savons tout.

- Nous voyons tout.

- Nous ne pouvons pas permettre l'avènement de la sorcière.

- Elle n'apportera que ruine et destruction.

- Où voulez-vous en venir ? ne put s'empêcher de demander Merlin.

- Emrys ! Emrys ! Emrys !

L'écho des trois voix se répercuta contre les murs de pierre. Merlin porta les mains à ses oreilles, il avait l'impression que sa tête allait exploser. Entre les larmes qui lui montaient aux yeux, il parvint à voir Arthur se précipiter vers lui. Le roi s'agenouilla et posa une main sur son épaule ce fut à ce moment que Merlin se rendit compte qu'il était tombé à genoux sous l'effet de la douleur.

- Merlin ? souffla Arthur avec inquiétude.

- Emrys. Il est de ton devoir de protéger le roi.

- Pour le bien d'Albion.

- Et l'avènement de la magie.

Il sentit la main d'Arthur quitter son épaule. Merlin refoula les larmes de douleur qui menaçaient de tomber et se releva lentement.

- Pourquoi nous dire ceci ? interrogea-t-il d'un ton dur.

- Le temps est venu pour toi de choisir.

- Tu as déjà laissé passer trop d'occasions.

- Emrys.

- Ceci pourrait bien être ta dernière chance.

- Ta dernière chance de faire le bon choix.

- Pour le bien d'Albion.

- Et de ton roi.

La caverne retomba dans le silence en un instant. Merlin pouvait sentir tous les regards rivés sur lui, mais seule la réaction d'Arthur avait de l'importance à ses yeux. Il ne voyait aucun moyen de se sortir de ce mauvais pas cette fois. Il leva lentement les yeux vers Arthur. Le roi semblait avoir été frappé par la foudre. Il recula de deux pas et se retrouva acculé contre la paroi. Une lumière intense inonda soudain la caverne et l'attention du sorcier fut détournée pendant un instant. Des images se mirent à défiler devant leurs yeux. Ils virent une armée en marche prête à envahir Camelot, avec à sa tête Morgane et Agravain. Les champs et les récoltes brûlés, les soulèvements parmi la population, les chevaliers exécutés un par un, un éclat de lumière rouge, Morgane se lançant à la recherche d'Arthur, Merlin pleurant alors qu'il tenait le corps sans vie d'Arthur contre lui.

- Non ! s'exclama Merlin et la vision disparut.

- Tu peux encore empêcher ces évènements de ce produire, Emrys.

- Trouve la sorcière avant qu'elle ne déchaine une magie qu'elle-même ne peut contrôler.

- Pour le futur d'Albion.

- Et de ton roi.

- Sonde ton cœur, Emrys, tu sauras que nous disons la vérité.

- Pourquoi me dire tout cela ? demanda Merlin en faisant son possible pour empêcher sa voix de trembler.

- La sorcière causera la ruine de la magie.

- Nous sommes nées de la magie.

- Tout comme toi, Emrys.

- Nous ne nous laisserons pas détruire.

- Regarde Emrys, tout n'est pas encore perdu.

De nouvelles scènes apparurent alors devant leurs yeux. Le petit Mordred arrêté « Will n'était pas sorcier, c'est moi » Merlin aidant Morgane à maitriser ses pouvoirs. Merlin commençait à peine à comprendre les implications de ce que lui disaient ces femmes. Une sensation de malaise l'envahissait peu à peu.

- Tous ces choix t'ont conduit où tu te trouves à présent.

- Une impasse.

- Que tu aurais pu éviter.

- Avec du courage.

- De la témérité.

Une nouvelle vision se dessina sous leurs yeux : « Balinor était mon père, je suis le dernier des Seigneurs des Dragons, » se vit-il dire à Arthur avec une lueur de défi dans le regard.

- Tu es terrifié à l'idée qu'il te rejette.

- N'aie pas peur, Emrys.

- Il n'est pas encore trop tard.

Merlin écarquilla les yeux de surprise en apercevant la vision suivante. Il en vint presque à oublier la présence des chevaliers autour de lui. Il n'avait plus d'yeux que pour le petit dragon blanc, Aithusa, voletant dans l'atelier de Gaius, en plein cœur de Camelot.

- Il existe une infinité de possibilités, Emrys.

- Toutes ne conduisent pas à la destruction ou à la mort.

Merlin vit avec surprise Aithusa enroulée à ses pieds alors qu'il se tenait aux côtés d'Arthur dans la salle du trône. Ils semblaient assister à une audience et Merlin portait une longue cape rouge brodée d'or ils virent ensuite Merlin se servant de la magie pour protéger Arthur d'une force invisible puis les appartements d'Arthur. Merlin lui tendait une épée qu'il reconnut comme Excalibur.

« - Promets-moi d'être prudent, s'entendit-il dire.

- Tu me connais, Merlin, répondit Arthur avec un sourire désarmant.

- Justement. »

Le jeune sorcier se sentit soudain mal à l'aise devant la familiarité évidente dont faisaient preuve leurs doubles. Arthur serra l'épaule de Merlin avant de s'éloigner, et Merlin le reteint par le bras avant de l'embrasser longuement.

Gauvain étouffa un éclat de rire et la scène changea de nouveau.

Un traité de paix avec les Sidhes un banquet en compagnie de la reine Annis, de Lord Godwyn et d'autres dignitaires que Merlin ne reconnut pas.

La caverne retomba dans l'obscurité, mais Merlin en avait assez vu. Il ne pouvait pas permettre que Morgane l'emporte. Il se devait de protéger ce futur qu'il venait d'entrevoir.

Le jeune sorcier n'osa pas se tourner vers Arthur. Il ne tenait pas à voir le dégoût et la crainte dans ses yeux.

- Tu peux encore sauver Albion, et ton roi.

- Emrys.

- Il te suffit de faire le bon choix.

Les voix se turent tout à coup.

- Attendez ! s'écria Merlin. Dites-moi ce que je dois faire, souffla-t-il en tombant à genoux sur le sol de pierre. Dites-moi ce que je dois faire…

Il sentit une larme rouler lentement le long de sa joue. Il ne voyait ni ne sentait plus rien autour de lui. Un immense désespoir l'avait envahi.

Gauvain posa une main sur son épaule et l'aida à se relever avec précaution. Le jeune sorcier ne croisa le regard d'aucun des chevaliers. Ils sortirent de la caverne en silence.

ooo

La nuit était tombée sur la forêt, et Merlin se rendit compte qu'ils avaient passé des heures dans la caverne sans même le savoir. Leurs chevaux avaient pris la fuite depuis longtemps, et ils se trouvaient à plusieurs heures de marche Camelot.

Les chevaliers établirent le campement en silence. Aucun d'eux n'avait dit un mot par crainte d'irriter encore plus Arthur. Le roi semblait dans un état second. Il était resté silencieux depuis qu'ils avaient quitté la caverne. Même Gauvain, toujours prêt à intervenir, n'avait rien trouvé à dire pour détendre l'atmosphère qui les étouffait tous.

Merlin s'agenouilla devant la pile de bois qu'il avait ramassé et entreprit d'allumer un feu. Ses mains tremblantes ne lui facilitaient pas la tâche.

- Pourquoi n'utilises-tu pas la magie ? lança soudain Gauvain.

Sa remarque les fit tous sursauter. Merlin leva la tête vers son ami d'un geste brusque et constata que le chevalier lui adressait un sourire amusé. Merlin aperçut tour à tour l'air curieux d'Elyan, l'expression neutre de Perceval, et le regard légèrement méfiant de Sir Léon. Mais seule la réaction d'Arthur lui importait. Il chercha son roi des yeux et finit par croiser son regard dur. Il lui en voulait encore, c'était évident. Mais il ne l'avait pas encore fait exécuter…

- Forbearnan, souffla-t-il, et les bûches s'embrasèrent.

Le jeune sorcier ne put s'empêcher de sourire. Il entendit un bruit sourd qui le fit sursauter et se retourna vivement.

Arthur venait de donner un coup de pied rageur dans une souche avant de s'éloigner à grands pas. Merlin se releva d'un bond pour se lancer à sa poursuite, mais Elyan le retint par le bras.

- Il va lui falloir du temps pour encaisser, dit-il simplement.

Merlin hocha la tête et se laissa tomber sur une souche près du feu. Les chevaliers l'imitèrent et le crépitement du feu fut le seul bruit autour d'eux pendant un long moment.

- Qu'est-ce que tu comptes faire ? demanda finalement Gauvain.

Merlin laissa échapper un soupire résigné.

- Je vais me lancer à la recherche d'Aithusa, dit-il. Je n'aurais jamais dû la laisser seule, je dois la retrouver avant Morgane.

- Aithusa ? demanda Perceval.

- Le dragon blanc, expliqua Merlin. Elle a un rôle à jouer dans le plan de Morgane, je dois découvrir lequel.

- Je viens avec toi, déclara Gauvain sans une once d'hésitation.

- C'est trop dangereux, je dois y aller seul, objecta le jeune sorcier.

- Il est hors de question que tu y ailles seul, Merlin.

Tous se tournèrent vers Arthur, qui venait de revenir les bras chargés de bois. Il déposa les bûches près du feu avant de s'asseoir à l'opposé de Merlin. Ils avaient déjà assez de bois pour alimenter le feu toute la nuit, mais personne ne le fit remarquer.

Merlin dévisagea longuement le roi. Il éprouvait un grand soulagement à le voir de retour, même si Arthur semblait toujours aussi en colère contre lui.

- Tu as beaucoup de chose à expliquer, Merlin. A commencer par cette caverne.

- Est-ce qu'elle montrait l'avenir ? demanda immédiatement Gauvain.

- Je pense qu'il s'agit plutôt de possibilités… commença Merlin.

- Qu'est-ce que tu veux dire par là ? interrogea Arthur, clairement à bout de patience.

- Eh bien, d'après ce qu'ont dit ces femmes, les différents choix que nous faisons au cours d'une vie nous mènent sur des chemins différents, et je pense que nous avons vu quelques-uns de ces chemins.

- Donc ce n'était pas le futur ? demanda Elyan.

Merlin secoua la tête.

- Pas le nôtre, en tout cas. Cependant, le fait que Morgane cherche à prendre le contrôle de Camelot encore et encore est inquiétant. Elle représente une réelle menace pour nous et…

- Pour Camelot, le corrigea Arthur d'un ton dur.

Merlin le dévisagea.

- Sire ? hésita Léon.

- Morgane représente une menace pour Camelot, pourquoi te soucier du sort d'un royaume où les gens comme toi sont exécutés ?

La remarque fit l'effet d'un coup de poignard pour Merlin. Arthur ne l'avait peut-être pas fait exécuter sur le champ mais il était clair à présent qu'il estimait que Merlin n'avait pas sa place à Camelot. Plutôt que de se lancer dans une explication qu'Arthur n'avait certainement pas envie d'entendre, Merlin déclara simplement :

- Morgane est dangereuse et je suis le seul qui puisse l'arrêter.

Le roi détourna les yeux. Merlin eut cependant le temps d'apercevoir son regard blessé.

- Est-ce que tu sais quel pouvoir Morgane essaie de déchainer ? intervint Elyan.

Merlin secoua la tête. Il avait essayé de trouver un indice dans les visions mais l'unique élément qui puisse l'aider était l'objet rouge et brillant qu'il avait entraperçu. Peut-être Gaius pourrait-il l'aider sur ce point.

- Et pour le dragon ? reprit Arthur après un instant de silence. Je croyais que tous avaient disparu.

- En fait… il se pourrait que l'œuf que vous étiez allé chercher n'ait pas été détruit tout compte fait.

Le roi paraissait furax. Merlin croisa le regard désolé de Gauvain et de Perceval. Il laissa échapper un soupire et décida de leur raconter ce qu'il s'était réellement passé dans la tour ce jour-là.

- C'est toi qui as volé la clé du coffre ! accusa Arthur.

- Je n'avais pas le choix ! Il était de mon devoir de la secourir !

- Et regarde où ça nous a conduit !

- Arthur ! le réprimanda Sir Léon.

Merlin se tourna vers Léon avec surprise. Arthur sembla se renfrogner un peu plus.

- Je vois où repose votre loyauté, remarqua-t-il d'un ton amer.

Un lourd silence tomba alors sur eux, seulement brisé par le crépitement du feu. Gauvain finit par se proposer pour le premier tour de garde et s'éloigna du campement.

Merlin resta prostré près du feu, se demandant comment il aurait pu éviter cette situation. Il ne voulait pas perdre la confiance et l'amitié d'Arthur. Mais il était trop tard pour ça. Arthur ne lui pardonnerait probablement jamais de lui avoir caché la vérité. Le jeune sorcier se prit le visage dans les mains. Il ferma les yeux un instant, et les rouvrit aussitôt. L'intense lueur rouge était gravée dans son esprit, et ne pas en connaître la signification était une pure torture.

Il se leva et rejoignit Gauvain qui était assis contre un arbre, la main sur la garde de son épée. Merlin se laissa tomber à côté de lui.

- Je suis désolé, dit-il. Je ne pouvais rien dire.

- Je comprends, tu essayais simplement de rester en vie.

- J'essayais de vous protéger, répliqua Merlin. Toi, Gwen, Arthur… Je ne voulais pas vous mettre en danger. Moins vous en savez, mieux vous vous portez.

Gauvain n'avait pas l'air totalement convaincu par ses arguments, mais il hocha tout de même la tête.

- Je peux te poser une question ? (Merlin acquiesça.) Pourquoi es-tu venu à Camelot alors que la pratique de la magie y est interdite ?

- Ma mère m'a envoyé chez Gaius parce que les habitants de mon village commençaient à avoir des soupçons à mon sujet. Elle pensait que Gaius pourrait m'aider à mieux contrôler mes pouvoirs. Puis j'ai appris que mon destin était de protéger Arthur contre les forces du mal et l'aider à construire le plus grand de tous les royaumes. Je ne pouvais pas partir.

- Ta place est aux côtés d'Arthur, dit Gauvain.

Merlin hocha la tête. Il se sentait étrangement soulagé de pouvoir enfin partager ce poids avec un ami. Gauvain s'étira bruyamment avant de reprendre :

- En parlant de notre roi adoré… cette vision dans la caverne explique bien des choses.

Merlin savait exactement de quelle vision le chevalier voulait parler. Il se sentit rougir.

- Que veux-tu dire ? demanda-t-il d'un ton hésitant.

- Je comprends pourquoi il agit ainsi avec toi. Tu n'es pas un simple servant, tu es aussi son ami. Et dieu sait s'il a besoin d'amis moitié aussi fidèles que toi.

- Je ne suis pas sûr qu'il soit de ton avis.

- Accorde-lui un peu de temps, lui conseilla Gauvain avec un sourire encourageant. Il finira par comprendre.

- J'espère que tu as raison.

ooo

Après un petit-déjeuner frugal, Arthur leur ordonna de lever le camp. Merlin resta en retrait et les observa un moment, cherchant en lui le courage de parler.

- Je ne rentre pas avec vous, déclara-t-il enfin.

- Ne sois pas ridicule, Merlin, lança Arthur sans même se retourner.

- Je dois découvrir ce que manigance Morgane.

- Tu ne peux pas l'affronter seul !

- Ce ne serait pas la première fois !

Arthur se figea, et Merlin s'en voulut de se montrer si dur envers lui. Mais il ne pouvait pas se payer le luxe d'hésiter, il devait arrêter Morgane coûte que coûte et protéger Arthur, même au prix de sa propre vie.

- Je ne vais pas te laisser y aller seul, répéta le roi d'un ton plus calme.

- Vous devez rentrer à Camelot, Agravain…

- Alors tu rentres à Camelot avec nous.

- Arthur…

- La discussion est close.

Le roi tourna les talons et se mit en route. Merlin aperçut les regards gênés des chevaliers, le roi se montrait encore plus entêté qu'en temps normal. Il laissa échapper un soupir résigné et leur emboita le pas.

Ils marchèrent en silence pendant plusieurs heures. Quand enfin ils arrivèrent en vue du château, Arthur s'adressa à ses chevaliers.

- Pas un mot sur ce qu'il vient de se passer, c'est compris ? Je ne veux pas éveiller les soupçons d'Agravain, alors tâchez de vous comporter avec lui comme si de rien n'était.

Les chevaliers hochèrent la tête, trop intimidés par le regard menaçant d'Arthur pour même formuler une réponse.

- Bien, dit Arthur avant de se remettre en marche.

Le roi se rendit immédiatement en salle du conseil afin d'informer ses membres du bilan de leur patrouille. Merlin en profita pour s'éclipser et se rendit chez Gaius. Il entra dans l'atelier en trombes, ce qui surprit le vieil homme et la fiole qu'il tenait alla se fracasser au sol.

- Merlin ! s'exclama-t-il.

- Gaius, il est arrivé quelque chose pendant la patrouille.

Voyant l'air affolé de son jeune protégé, Gaius abandonna sa potion et fit signe à Merlin de s'asseoir. Le sorcier lui raconta alors ce qu'il s'était passé dans la caverne, en omettant tout de même certains détails qui le faisaient encore rougir.

- Et cette lumière que tu as vue ? demanda Gaius.

- Je n'avais jamais rien vu de semblable, dit-il. C'était une lumière rouge incandescente, on aurait dit qu'elle provenait d'une sorte de talisman.

- Est-ce que tu as pu le voir ?

Merlin hocha la tête et prit la plume que Gaius lui tendit. Il tenta de reproduire les inscriptions sur la bordure du talisman avec le plus de précision possible.

- Je pense qu'il joue un rôle important dans le plan de Morgane. Je pense aussi qu'elle n'a pas encore pu mettre la main dessus.

- J'ai déjà vu ce symbole, se rappela Gaius.

Il se dirigea vers les étagères et y prit quelques livres. Ensemble, ils cherchèrent le symbole pendant des heures, et Merlin perdait un peu plus espoir à chaque page tournée.

- Là ! s'exclama-t-il soudain.

- L'Œil de Taranis, lut Gaius. Tu es bien sûr qu'il s'agit du même symbole ?

- Certain. Celui de la vision était rouge sang et il brillait d'une lumière intense.

- Il est écrit que l'Œil requiert le souffle d'un dragon pour être activé, il permet alors à son possesseur de contrôler la magie de tous les mondes.

- Que ce que ça signifie ? interrogea Merlin.

- Je ne sais pas, mon garçon. Mais connaissant Morgane, nous devons nous attendre au pire.

- Les femmes dans la caverne ont dit que Morgane allait déchainer un pouvoir qu'elle-même ne pouvait pas contrôler. « La magie de tous les mondes » ? Je ne comprends pas ce que ça signifie.

- Peut-être devrais-tu poser cette question à un expert en matière de magie, proposa Gaius.

Merlin hocha lentement la tête avant de lever les yeux vers la fenêtre la nuit était sur le point de tomber, il n'aurait pas à attendre bien longtemps.

ooo

Lorsque la nuit tomba sur Camelot, Merlin était prêt. Il sortit de l'atelier de Gaius en prenant garde à ne pas faire de bruit. Le jeune sorcier pensait réussir à sortir du château sans se faire repérer lorsqu'il aperçut une silhouette si dirigeant vers lui.

- Merlin, chuchota Arthur en arrivant à sa hauteur.

Le jeune sorcier remercia le ciel qu'Arthur se montre discret pour une fois.

- J'ai comme l'impression que tu ne te rendais pas dans mes appartements comme tu le devrais.

- Ecoutez, Arthur…

- Où vas-tu comme ça ?

- Je ne peux rien dire.

- Merlin… lui dit le roi d'un ton menaçant. Tu peux me dire ce que tu mijotes tout de suite ou bien en chemin, de toute manière je viens avec toi.

Merlin poussa un soupir irrité. Il se remit en marche sans dire un mot et Arthur lui emboita le pas. Présenter Arthur au Grand Dragon n'était certainement pas une bonne idée mais peut-être qu'ainsi Merlin parviendrait à déclencher une réaction de la part de son roi. Ne pas savoir ce que pensait Arthur, attendre ainsi d'être jeté en prison, ou pire, était une véritable torture.

Ils quittèrent le château dans un silence tendu. Merlin emprunta son chemin habituel en prenant soin d'éviter les gardes il sentait le regard insistant d'Arthur sur sa nuque mais n'osa pas se retourner. Il ne voulait pas croiser le regard du roi et voir la haine, le dégoût et le sentiment de trahison qu'il était certain d'y trouver.

Lorsqu'ils arrivèrent enfin dans la clairière, Merlin se tourna vers Arthur. Il espérait que le roi puisse lire dans son regard le regret qui l'assaillait, puis il leva les yeux vers le ciel et appela le Grand Dragon.

- O drakon, e mala soi ftengometh tesd'hup anankes ! Erkheo !

Sa voix ne trembla pas un seul instant. Après quelques instants, il entendit des battements d'ailes se rapprocher. Le jeune homme sentit Arthur reculer brusquement lorsque le dragon se posa dans la clairière.

- Il va bien falloir que tu te décides à tout m'expliquer, marmonna Arthur.

Merlin remarqua cependant que la main du roi s'éloignait lentement de la garde de son épée où elle s'était posée.

- Jeune sorcier, je me demandais à quel moment tu viendrais me consulter, déclara le Dragon de sa voix grave.

Merlin se renfrogna. Décidément, il n'aimait pas l'attitude condescendante du dragon.

- Ah, continua le Grand Dragon sans attendre de réponse. Arthur Pendragon, le roi des temps présents et à venir.

Le dragon approcha lentement son visage d'Arthur, mais le roi ne recula pas. Il soutint son regard sans ciller.

- Je suppose que je ne vous ai pas vraiment tué, déclara-t-il. Un autre mensonge, ajouta-t-il d'un ton dur à l'attention de Merlin. Y a-t-il une seule chose que j'ai accomplie par moi-même depuis ton arrivée ?

- Arthur, je…

- Merlin vous a été d'une aide précieuse, Arthur. Sans lui vous ne seriez même plus en vie à l'heure qu'il est. Vous aurez besoin de lui si vous tenez à sauver votre royaume.

- Morgane prépare quelque chose, déclara Merlin. Je ne sais pas en quoi consiste son plan, mais elle va déchainer une force bien trop puissante pour elle.

- Tu dois à tout prix empêcher la sorcière de parvenir à ses fins.

- Mais comment ? Elle est à la recherche de l'Œil de Taranis, il est peut-être d'ores et déjà en sa possession ! Et je ne sais pas quel est son rôle dans le plan de Morgane.

- L'Œil de Taranis est un artéfact très puissant, l'informa le dragon. Une fois touché par le souffle d'un dragon, il donne à celui qui le possède le pouvoir d'ouvrir un portail entre les mondes afin d'y puiser davantage de magie.

- Pourquoi créer un tel objet ? s'exclama Merlin.

- Il y a de cela plusieurs siècles, une guerre faisait rage entre les sorciers. De nombreux artefacts comme celui-ci ont alors été créés. Mais au vue du risque encouru par la magie elle-même et le monde, ils ont été pour la plupart détruits à la fin de la guerre.

Une guerre entre les sorciers ? Voilà une chose que Merlin avait du mal à concevoir.

- Que puis-je faire ?

- Tu n'as d'autre choix que de l'arrêter et de détruire l'Œil une bonne fois pour toute.

- Mais comment ?

- Je l'ignore, Merlin. Arrête Morgane avant qu'elle ne déchaine le pouvoir de l'Œil et tu auras une chance de sauver Camelot… et ton roi, ajouta la créature.

Le dragon n'était pas le premier à se servir d'Arthur comme motivation. Ces créatures magiques pensaient-elles vraiment que l'idée de sauver Camelot ne lui suffisait pas ?

- Où peut-on trouver Morgane ? demanda Arthur.

Merlin fut tellement surpris qu'il manqua se tordre le cou en tournant la tête vers Arthur.

Le dragon laissa échapper ce qui ressemblait fort à un gloussement avant de répondre :

- Morgane n'est jamais loin de vous, Arthur. Si je ne m'abuse, elle a un espion dans le château en ce moment même.

Arthur se renfrogna. Merlin n'eut aucun mal à deviner ses pensées à ce moment-là : le roi remettait en doute sa capacité à juger de la nature humaine. Après tout, trois de ses proches l'avaient trahi…

- Trouve la sorcière, Merlin. Mais prends garde. Ses pouvoirs grandissent un peu plus chaque jour. Tu ne pourras pas l'affronter seul.

ooo

- Alors ? commença Arthur une fois la porte de ses appartements fermée. Qu'est-ce que nous allons faire ?

Merlin le dévisagea, clairement surpris.

- Je pensais que…

- Que quoi ? s'exclama Arthur, à bout de patience.

- Que vous ne voudriez pas m'aider, dit finalement Merlin.

- Ça n'a rien à voir avec toi ou moi, ça nous dépasse totalement. Je ne laisserai pas ce royaume tomber entre les mains de Morgane, est-ce que c'est clair ?

- Oui, Sire, répondit Merlin en se dirigeant vers la cheminée pour y ajouter une bûche.

- Merlin… se radoucit le roi. Assieds-toi, dis-moi ce que tu comptes faire.