En ce jour radieux d'août 1981, Murielle Hopkins ressassait le passé. Le dernier enfant Weasley venait de naître. C'était une fille, une toute petite fille du nom de Ginevra. Cela faisait depuis quelques générations déjà que les Weasley n'avaient pas eu de fille. Depuis 1920 si sa mémoire était bonne. Pour la première fois depuis bien longtemps, Murielle s'autorisa un sourire, à peine perceptible, certes, mais un sourire tout de même. Molly et Arthur, qui relevaient la tête à ce moment là, furent surpris mais ne dirent rien. Après tout, il était extrêmement rare de voir la tante Murielle sourire. Cette dernière posa un regard affectueux sur le nouveau-né. Merlin, elle lui rappelait tant sa petite Morgana au même âge. Elle avait la même petite frimousse charmeuse.

Vraiment, à cet instant précis, Murielle était heureuse. Cette naissance lui rappelait tant de bons souvenirs : le moment où elle avait montré sa princesse à son mari, le jour où Morgana avait découvert la magie, le jour où elle reçut sa lettre. Ces quelques moments de bonheur qui la faisaient vibrer.

Murielle s'éloigna des heureux parents et alla vers la fenêtre. Elle se souvenait, oui elle se souvenait de ce temps où elle aussi avait éprouvé cette même joie, la joie d'être mère, celle de l'insouciance de la jeunesse, l'envie de vivre, celle d'être tout simplement elle-même. Oui, elle aussi avait éprouvé ces sentiments, ces émotions, il y a bien longtemps.

A présent, derrière la vieille femme acariâtre se cachait une vieille femme blessée et meurtrie par la guerre, une femme qui vivait avec ses souvenirs. Merlin qu'il était douloureux de repenser à tout ça! Car Murielle aurait voulu oublier, passer à autre chose mais elle ne pouvait pas oublier, elle ne pouvait pas l'oublier. Ce serait la trahir…

Murielle se rembrunit. Cette journée aurait dû être joyeuse mais elle n'avait plus le cœur à ça. Alors Murielle partit. Elle sortit de Sainte-Mangouste. Elle partit rejoindre ses tourments, chez elle, là où l'attendait son secret. Car on aura beau dire, avant l'acariâtre, il y a eu la mère, il y a eu l'épouse, il y a eu la femme aimante et débordant de vie. Mais ça, c'était avant. Avant les massacres, avant la guerre, avant Grindelwald… Et seul, au fin fond du tiroir d'un bureau lugubre, enfermé à double étage, se trouve un paquet de photos poussiéreuses. Et sur l'une d'elle, il y a une petite fille rousse, souriant dans les bras de Murielle, comme un vestige des moments passés.