Note de l'auteur.

Bonjour à tous ! C'est la première fiction que je publie sur ce site. Je l'ai déjà publiée sur fanfic-fr sous le pseudo « Hina » et je cherche maintenant à la confronter au lectorat de !

Si review il y a, je répondrai par message privé (du moins aux personnes membres du site) et aux autres directement dans le chapitre suivant ^^

Par ailleurs, pour ceux qui auraient lu ma fiction sur fanfic-fr, il s'agit ici d'une réécriture. Autrement dit, les textes ont changé, ils sont différents, et le seront sans doute aussi de nombreux évènements dans leur enchainement. Donc, à moins que cette réécriture soit un échec, relire ma fiction ne sera pas rébarbatif dans le sens où ce serait du « déjà-vu » lors de ma première version.

Je n'ai plus qu'à vous souhaiter d'apprécier la lecture !

Disclaimer : Les personnages appartiennent à Masashi Kishimoto. Lorsqu'il y aura des personnages inventés par moi-même, je le préciserai avant le chapitre concerné.

Rating M : A cause de certaines scènes à venir qui ne manqueront pas de violence.


The Girl That Never Sleeps

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Rêver de toi, le temps d'un soir.

oOoOo

Treize heures trente.

Fin de son déjeuner chez Per Se. Un claquement de doigt, un bruissement de cashmere. Un regard hautain. Une main aux doigts délicats et manucurés s'empare du livret qu'on lui tend pour y caler une carte de crédit noire et le refermer. Les airs empressés de la jeune femme le laissent penser qu'elle n'a pas besoin de connaitre le montant de l'addition pour la payer... Puis le serveur s'évanouit comme il est apparut. Elle se lève, toute de grâce et de finesse, pour quitter la salle du restaurant. Et tandis qu'à la réception, un homme en redingote l'habille de sa veste en tweed Chanel, son visage lisse, ses lèvres pincées et ses sourcils levés ne trahissent jamais l'effort surhumain qu'elle accomplit pour rentrer son ventre, ni la douleur qu'infligent les talons de ses Jimmy Choo à ses pieds.

Treize heures trente six – heure de son BlackBerry. Elle sort du restaurant par la double porte bleue, traverse la petite cour dallée et n'esquisse que deux pas au grand jour, avant qu'une voiture luxueuse ne se gare juste devant elle, de ce mouvement gracieux et félin qui caractérise les limousines. Et le commun des mortels qui passe par hasard dans la rue, lui, n'a le temps de reconnaitre cette silhouette célébrissime, d'effleurer du regard sa présence irréelle que pendant quelques minutes, avant qu'elle ne soit envolée. Car une fois la portière fermée, son parfum d'étoile s'est déjà évanoui. Oui, à New York, il n'est pas rare de croiser ces ombres factices. Elles glissent sur le trottoir et disparaissent dans les limousines qui s'emboutissent au feu rouge. Elles se cachent au creux de la foule, se mêlent aux millions d'habitants si communs et si différents, si nombreux qu'ils sont anonymes malgré les blasons vivaces de leurs pays qui basanent leurs visages, malgré le brassage de leurs peaux épicées et de leurs odeurs colorées. Ces ombres font oublier jusqu'à leur existence... Et puis un jour, elles apparaissent, brise fugace mais morsure ô combien brûlante sur la peau de ces New Yorkais abusés. Elles leur rappellent à quel point ils sont triviaux et sans intérêt, combien morne est leur vie comparée à la leur, eux, spectateurs à tout jamais d'un bonheur exclusif, inaccessible. Et dans leurs yeux remplis d'une admiration absurde et sans borne, se reflète la vérité entière et cruelle – un rictus coquet étira ses lèvres pulpeuses. La vie de star offre des choses que ces inconnus ne peuvent seulement imaginer...

Son chewing-gum claque sous ses dents et ses yeux de jade décortiquent soigneusement le paysage urbain de la capitale du monde, comme si elle ne le connaissait pas déjà par cœur. Ces bâtiments carrés, cette architecture rigide, ces rues pavées de la gloire des ancêtres colons ; rien ne concorde avec son berceau, avec sa campagne du Vermont qu'elle observait tellement depuis son balcon dans sa jeunesse, et dont elle reniait fermement son attachement depuis bien longtemps. Ce passé était comme un spectre inquiétant que son cerveau refoulait au fin fond de son esprit tourmenté par les sonneries et les vibrations incessantes de son BlackBerry.

Près d'elle, dans la voiture, son assistant est débordé. Des rendez-vous sont bookés avec tout le monde : diners, cocktails, inaugurations, spectacles, réunions, shootings... Tout n'est que dates, heures, vols en avion... New York, Paris, New York, Paris, Los Angeles, New York, Paris... New York, New York, New York ! Comme tout cela lui donne la migraine ! Elle n'est pas là pour se soucier des post-it qui débordent de son agenda, ni des changements rocambolesques de son emploi du temps de ministre ! Non, elle est là uniquement pour admirer et pour être admirée, pour inspirer et pour être inspirée. Frivole rayon de Soleil sur la scène de Broadway, gracieuse petite fleur de printemps qui s'épanouit, qui s'épanouit, qui s'épanouit... Sans jamais faner.

Les réunions s'enchainent, les répétitions au théâtre se prolongent, les fans sont impatients de voir leur idole se reproduire sur scène. L'après-midi passe à une vitesse folle, l'assaut des journalistes n'a pas perdu de sa vigueur, celui des flashes d'appareils photos non plus.

La nuit commence à tomber mais New York est éclairée comme en plein jour. Les spots, les néons aux couleurs criardes brillent d'une lueur aveuglante. Baladée aux quatre coins de Manhattan dans une Jaguar, plus discrète que sa limousine, elle saisit le foulard que lui présente son assistant et en recouvre sa tête avant de le nouer juste sous son menton. La jeune femme saisit une à une les mèches de cheveux rose vif qu'elle arbore afin de mieux les dissimuler sous le tissu satiné. Lorsque le véhicule la dépose près d'un bouiboui asiatique en plein Chinatown et qu'elle en ouvre la portière, une épaisse odeur de canard laqué et d'arôme de soja s'engouffre dans ses narines. Sans plus tarder, la jeune femme claque la portière et entre dans le restaurant pour s'avancer vers la table la plus proche. Vêtue d'une veste moins voyante, l'air plus banal derrière ses lunettes de Soleil encore perchées sur son nez malgré le crépuscule au dehors, elle peut enfin s'octroyer ce qu'une star ne se permet habituellement pas : cette promiscuité, ce contact au corps-à-corps avec cette la grouillante au bar, ces excuses jetées avec indifférence. Taire son indignement lorsqu'on lui écrase les pieds est moins facile que prévu, mais pour une fois, ne pas être traitée comme si elle est la plus fragile des poupées de porcelaine lui fait du bien.

Elle s'extirpe finalement du supplice de la foule, qui n'est pas sans lui rappeler celui des journalistes fous furieux devant le Broadway Theatre où elle travaille à plein temps, et s'assied à une table individuelle tout en arrangeant les cheveux qui sortent de sous son foulard. Elle commande le repas le plus commun que puisse lui offrir ce menu – quelque chose comme un plat de nems et des nouilles brûlantes. Au diable le régime draconien que son attaché de presse lui fait subir en vue de son prochain spectacle ! Le goût exotique de cette cuisine la change totalement de la nourriture lyophilisée et allégée à l'extrême qu'elle se doit de manger jour après jour pour garder la ligne...

Après avoir réglé l'addition en espèce, elle quitte le restaurant pour rejoindre la Jaguar qui l'attend plus haut sur l'avenue. Elle monte et disparait à l'intérieur, sous le regard interloqué de certains passants qui s'étonnent de voir une voiture si luxueuse dans leur quartier. Ils n'ont pas le temps de mieux la regarder que déjà, le véhicule reprend sa route en direction de Brooklyn. A l'intérieur, elle est entourée par une maquilleuse et une habilleuse qui l'aident à choisir sa tenue pour la réception de ce soir dans la résidence d'un riche producteur de Broadway. Bustier de satin rose ou robe sirène dorée ? Chignon éclaté ou longues anglaises ?

La jeune femme repose son front contre la vitre froide et se laisse bercer par les mouvements de la voiture, pendant que ses deux employées ferment sa robe derrière elle et coiffent une par une d'épaisses mèches de cheveux roses. Leurs mouvements dans son dos, leurs mains délicates qui s'efforcent de ne pas tirailler son cuir chevelu, de ne pas blesser cette peau si blanche, de ne pas heurter la sensibilité d'une personne si précieuse lui donnent de légers frissons. La fatigue d'une journée entière vient se loger dans la courbe fragile de sa nuque et lui rappelle le poids de sa célébrité, toutes ces responsabilités. Cette liberté qui pourtant n'existe pas, ces obligations dont elle se passerait bien... Le fait d'être forcée d'accorder de sa présence et de son temps à des personnes dont elle ne se soucie même pas ; sa garde-robe, ses mouvements, ses fréquentations, son emploi du temps réglés au millimètre par tous ces gens qui pourtant sont à son service... C'est comme d'enfiler une robe au corset trop étroit : ce monde étriqué, son rythme effréné, ce gotha hypocrite l'épuisent. Mais... Pour rien au monde elle ne troquerait cette vie contre celle du quidam New Yorkais. Car c'était un rêve...

« Mademoiselle Haruno, nous sommes arrivées, murmura la maquilleuse alors que la voiture venait de s'arrêter devant une luxueuse résidence. »

Elle leva les yeux vers le manoir auréolé de lampions et de bougies.

oOoOo

C'était comme un doux rêve.