Prologue

« Sans transition nous vous rappelons que cet homme, surnommé Smoker, est toujours activement recherché. Il est armé et extrêmement dangereux, si vous l'apercevez, mettez vous en lieu sur et prévenez la police. Nous... »

Une télécommande lancée avec force contre l'écran coupa la parole du présentateur. Le lanceur enfouit sa tête dans ses mains, en proie à un terrible mal de crane. Brusquement, l'homme balaya d'un revers de main tous les objets présents sur son bureau.

« Putain, putain, putain ! S'écria le commissaire, à bout de nerfs. »

Une petite blonde entra dans le bureau sombre. Un peu craintive, elle s'approcha de son supérieur.

« Monsieur, vous êtes attendu à la réunion de l'équipe...

- Dites leur que j'arrive, Nina. »

La secrétaire s'éloigna. Le commissaire inspira un grand coup, se leva et se dirigea vers la salle de réunion. Il s'installa, sous les regards de ses collègues. Son supérieur se tourna vers lui, l'air passablement énervé.

« Du nouveau dans l'affaire Smoker, Theurel ?

- Hm.. Non, monsieur.

- Vous vous foutez de ma gueule ? Ce type tue une fois par semaine depuis six mois, et vous êtes pas foutu d'avoir ne serait ce qu'un suspect ?!

- Si je puis me permettre, on a déjà put établir un début de profil psychologique..

- Et c'est tout ? En six mois ?! Et vous osez vous présenter comme un des meilleurs !

- Ce mec est un fantôme ! Personne ne l'a jamais vu, il n'a jamais laissé le moindre indice, rien, même sur ses lettres ! Se défendit vivement François.

- Alors comment vous avez pu établir un profil psychologique ?

- A sa façon de tuer. On pense qu'il a une manière d'agir assez similaire à un autre tueur.

- Le quel ?!

- Viktor, que j'ai arrêté il y a environ un an.

- Eh bien, essayez de bosser avec cette enflure !

- Comment ?!

- Des vies sont en danger, alors cassez vous de cette salle de réunion, allez chercher ce connard, et trouvez notre homme !

- Mais bordel, vous vous entendez ? Je veux pas côtoyer cette sombre merde ! Vous oubliez que ce mec a tenté de me tuer ou quoi ? S'emporta le commissaire.

- Je m'en fous ! Vous êtes flic, oui ou merde ?! Si vous avez un minimum de professionnalisme, mettez de côté vos ressentis et faites votre boulot ! Ou cette enquête sera votre dernière, me suis-je bien fait comprendre ?! »

Sur ses mots, François se leva, et quitta la pièce en claquant la porte. Il envoya un grand coup de pied dans un banc et retourna dans son bureau. Il n'arrivait pas à croire qu'il allait devoir collaborer avec lui. L'enflure qu'il tentait d'oublier depuis un an. Le seul criminel qui avait réussi à l'atteindre. Il inspira un grand coup, encore une fois, pour tenter de se calmer. Il sortit de la pièce en claquant la porte. La tête baissée, les poings serrés dans les poches, le commissaire se dirigea vers les cellules. Il passa la première porte. Le couloir dans le quel il s'infiltra était sombre, humide. Un frisson lui parcourut le dos. Il passa une seconde porte, présentant mécaniquement son badge. Il devait à présent passer devant des cellules. Les insultes fusaient à son passage, mais il avait appris à en faire abstraction, à l'instar de ses collègues. L'odeur de transpiration mélangée à la cigarette le prenait aux tripes. Quelle idée d'autoriser le tabac aux détenus..

Au fur et à mesure qu'il approchait de son antagoniste, le policier peinait à contrôler cette sorte de boule au ventre qui semblait vouloir remonter et éclater au grand jour, cette haine sans nom, cet affrontement qui n'en finirait jamais...

Assis dans sa cellule, Viktor alluma une cigarette. Il tira une latte en fixant le mur. Un bruit de pas se fit entendre. La porte s'ouvrit, laissant apparaître le commissaire, poings serrés, qui ne remercia même pas le gardien qui venait de lui ouvrir.

« Tiens tiens.. murmura le criminel en soufflant de la fumée. Tu m'avais manqué toi..

- Ferme la, j'ai pas de temps à perdre.

- Roh, depuis un an t'es toujours aussi rabat joie.. Tu vas arrêter de penser au boulot un peu ? Regarde, on est seuls, dans un endroit sombre, ça te...

- Ta gueule. J'ai une proposition à te faire.

- Ah enfin ! Tu préfères être en dessous ou au dessus ?

- Je sais pas si t'as entendu parler de ce type, Smoker...

- Oh, un plan à trois ? »

N'arrivant plus à se contenir, le commissaire saisit violemment Viktor par le col.

« Ferme ta putain de gueule ! On parle sérieusement là !

- Okok, calme toi.. Vas-y, raconte. »

Décontenancé, François lâcha son ennemi et se racla la gorge avant de poursuivre.

« - Un nouveau malade sévit. Ça fait six mois qu'il tue, et on ne sait rien de lui, mis à part qu'il réfléchit certainement comme toi. J'ai un deal à te proposer, tu nous aides à coincer cet enculé, et ta peine sera allégée. C'est clair ?

- Alors attend, si je comprend bien... Le gros méchant va devoir aider les gentils à coincer un plus gros méchant ?

- C'est l'idée.

- D'accord, mais à la condition qu'on se la joue pas Silence des Agneaux.

- Qu'on.. Quoi ?

- Putain mais t'as vraiment aucune culture cinématographique toi ! Dans le film, le méchant qui aide les gentils est enfermé comme un con. Mais moi, je refuse. C'est clair ?

- Entendu. Répondit François après une courte réflexion.

- Parfait. Je marche. »