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Avant-propos

Ceci n'est pas censé être un fic à chapitres, mais un endroit où je regroupe mes drabbles sur Albus Dumbledore et Gellert Grindelwald. Cela dit, le pairing étant plus ou moins canon, je n'aurai probablement qu'une seule version de leur romance, et chacun de ces instants volés sont donc partie d'une même histoire.

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Arrosoir

Lorsque le visiteur pénétra la demeure des Dumbledore, le fils aîné de la famille était au jardin. Il apprendrait par la suite qu'avant son arrivée au village – avant qu'ils ne deviennent amis – le jeune Albus Dumbledore avait pour récente habitude de passer tout le temps qu'il pouvait dans son luxurieux jardin, à s'occuper des plantes. Il n'était pas rare de le voir, dès l'aube, pieds nus dans l'herbe tendre, son arrosoir ensorcelé à la main, caressant les feuilles, murmurant au cœur des fleurs, doucement, amoureusement, comme si le monde était ce jardin et qu'il en était le protecteur.

Manquait-il donc tant de distractions, dans son domaine isolé, pour s'être ainsi épris d'un carré de gazon ? Le visiteur devinerait avec le temps qu'il y avait plus qu'une simple lubie derrière cette ferveur, plus qu'un simple moyen d'occuper son temps derrière ce culte. Albus faisait pousser des plantes étranges venues du monde entier ; certaines avaient été ramenées des voyages qu'il avait faits dans sa prime jeunesse, d'autres des voyages qu'il ne pouvait plus faire mais auxquels il pensait constamment. À la lecture de chaque livre traitant d'une culture lointaine, à l'écoute de chaque récit passionnant d'un ami de la famille, à la vue de chaque rose du Gabon et chaque pimprenelle de Corée, le regard d'Albus s'enflammait d'une inextinguible soif d'expériences et de savoir.

Curieux pour s'être fait maintes fois décrire le brillant Albus par sa grand-tante, le visiteur avait suivi la domestique tandis qu'elle allait tirer son maître de son jardinage passionné. Il n'était nulle part en vue quand ils arrivèrent, et il fallut bien deux longues minutes avant qu'il ne réponde à l'appel de son nom, tant il était absorbé par sa tâche. Depuis la terrasse à l'arrière de la maison, le visiteur put alors voir le fameux Albus, grand et anguleux, se redresser du milieu d'un massif de fleurs tel un arbre extraordinaire.

Il n'aurait su dire si son hôte était mécontent d'avoir été dérangé, tant le visage qu'il découvrait (au milieu d'une barbe douteuse et de longs cheveux dénoués qui partaient dans tous les sens), irradiait du simple bonheur de se tenir là, parmi les plantes, les orteils enfoncés dans la terre fraîche, le ciel azuré en guise de toit et le piaillement des oiseaux pour seule musique. En tournant la tête dans la direction de sa mère, Albus vit le visiteur et son expression se modifia légèrement. Son sourire léger se fit ténu, ses yeux grand ouverts s'écarquillèrent – oh, rien de réellement perceptible, surtout à cette distance, mais le visiteur le perçut néanmoins et apprécia la sensation que cela lui procurait. Albus tenait dans sa main cet arrosoir bleu pervenche duquel l'eau pouvait s'écouler indéfiniment sans jamais avoir à le remplir, et indéfiniment l'eau coulait tandis qu'il restait là, sans esquisser un geste, son regard vissé au regard du visiteur, comme s'il venait de rencontrer quelque merveille dont le sens lui échappait encore.

Ne sachant combien de temps il devrait attendre ce grand rêveur, le visiteur décida alors de le rejoindre lui-même et traversa sans hâte les quelques mètres qui le séparaient du massif de fleurs. Avisant l'eau qui coulait toujours de l'arrosoir sur les pieds d'Albus, il plaisanta :

« Je devine que vous essayez de prendre racine ? »

Albus baissa les yeux vers ses pieds et, après une seconde de stupéfaction, il regarda son invité avec un pétillement malicieux dans le fond des prunelles.

« Point du tout, mon cher. Il s'agit simplement de favoriser ma croissance.

– Tiens donc, s'amusa le visiteur. Vous me semblez pourtant déjà d'une stature respectable.

– Oh, bien sûr, vous dites cela maintenant ! Mais figurez-vous qu'il y a un mois encore, je ne mesurais guère plus d'un mètre cinquante.

– Ça alors ! Et pourtant, votre taille actuelle ne vous convient toujours pas ?

– C'est que, voyez-vous, je dois atteindre les deux mètres avant mes dix-huit ans.

– C'est un pari ?

– Un défi personnel. »

À cet instant, le visiteur sut indubitablement qu'Albus Dumbledore et lui étaient faits pour s'entendre.

« Gellert Grindelwald, se présenta-t-il sobrement.

– Albus Dumbledore, répondit doucement le jeune homme et, vérifiant l'état de propreté de sa main droite, il la tendit par-dessus le buisson de fleurs mauves pour serrer celle de Gellert.

– Enchanté ! fit Gellert avec une gaieté communicative.

– Ensorcelé, répliqua Albus sur le même ton.

– Pardon ? »

Albus sourit vraiment pour la première fois.

« Ravi de vous rencontrer. »