Ogmios

I

Harpocrate

Note de l'auteur : Me voilà reparti pour de nouvelles aventures! Dans lesquels, je l'espère, vous serez nombreuses à me suivre. Bonne lecture et donnez-moi vos avis sur cette nouvelle intrigue, entièrement sortie de mon imagination.

PS : Je vous laisse faire vos propres recherches sur les dieux Ogmios et Harpocrate. A vous ensuite de deviner, peut-être, les ficelles de l'intrigue ;)


Cela faisait maintenant deux semaines que nous naviguions dans l'espace profond. Quand je m'étais engagé sur cette mission de cinq ans, je m'attendais à plus d'action. Mais, je m'étais résigné. Les planètes inconnues n'étaient pas légion dans les coins encore inexplorés de l'espace. Heureusement, j'avais de quoi occuper mon temps libre. Mon mari était une source intarissable de surprises. Comment un homme aussi froid et peu avenant en apparence, pouvait être aussi créatif et attentif dans l'intimité ? Cela me dépassait. Mais je n'allais pas m'en plaindre. Ce côté de sa personnalité n'appartenait qu'à moi.

J'étais actuellement allongé sur le ventre, fraîchement douché, détendu et excité, sous les mains expertes de mon compagnon qui me prodiguait le plus délicieux des massages. A cheval sur l'arrière de mes cuisses, il étirait mes muscles noués par trop d'heures passées dans mon fauteuil de commandement. J'aurais été parfaitement décontracté sous ses caresses, si je ne sentais pas son érection imposante glisser entre mes fesses à chacun de ses mouvements. J'essayais de faire fi de l'ignorer, mais malgré moi, mon bassin venait de plus en plus nettement à sa rencontre.

Il se pencha soudainement sur moi et alla planter ses dents dans la chair tendre de ma nuque en donnant un coup de rein. Je me cambrai en réponse. De sa langue, il traça lentement une ligne de feu le long de ma colonne vertébrale, jusqu'à buter contre les deux globes charnus de mes fesses. Il les agrippa de ses mains, les écarta légèrement et reprit sa progression, s'insinuant dans mon intimité. Je gémis sous ce traitement inhabituel. La chaleur de sa bouche fit disjoncter ma capacité à réfléchir. Je ramenai mes genoux sous moi, pour lui donner un meilleur accès. Il me tortura de longues minutes, jouant de ses doigts et de la langue beaucoup trop agile pour ma santé mentale.

« Tu l'as aussi pioché dans ma tête, cette idée ? »

« Non. »

Il ne prit pas la peine de développer. Mais, je n'eus pas l'occasion de l'interroger plus avant. Il se redressa, enfonça ses phalanges profondément en moi, agaça mes points sensibles, s'amusa de mes réactions durant d'insupportables minutes. Il se retira ensuite, m'incita à m'allonger sur le côté et se glissa entre mes jambes, s'assit sur ma cuisse droite, avant d'attraper mon mollet gauche et de le poser sur son épaule. Mes adducteurs tirèrent légèrement, mais rien d'insupportable. Je ne me savais pas si souple.

« Je ne suis pas le seul à être une source intarissable de surprises. » Me taquina-t-il, avant de me pénétrer brusquement.

Il me pilonna à un rythme soutenu, s'enfouit ardemment en moi, me faisant gémir fortement. Je débitai des phrases incompréhensibles, cet angle de pénétration était plus intense, plus profond. Sa main gauche se glissa entre mes jambes, pour venir caresser mon membre à la même cadence que ses coups de reins, me rendit fou de plaisir. J'explosai soudainement dans le creux de sa paume, sur les draps, son nom sur mes lèvres. Il se pencha sur moi pour dévorer ma bouche, ses mouvements devinrent saccadés, jusqu'à ce qu'il se tende à son tour et se déverse en moi, un cri délicieux s'échappant de sa gorge.

Il reposa délicatement ma jambe et s'allongea contre mon dos en m'encerclant de ses bras. Je me collai un peu plus à lui en soupirant de bien-être. Nous avions encore deux heures devant nous, pour nous reposer, avant de prendre notre prochain quart.

Une fois douchés et habillés, nous nous mîmes en route vers la passerelle. Les portes du turbolift s'ouvrirent sur le pont en pleine effervescence.

« Capitaine ! » M'apostropha Sulu. « J'allais vous appeler. Nos senseurs ont capté la présence d'un planétoïde dans un espace encore inexploré. Devons-nous aller voir de plus près ? »

« Bien sûr, M. Sulu ! » Lui répondis-je, en prenant place dans mon fauteuil.

Spock alla s'installer derrière son poste, après m'avoir lancé un regard pétillant. Il savait que c'était ce que j'attendais depuis des jours. Je souris en observant l'écran principal. Enfin un peu d'action.

Nous étions en route vers la planète repérée par nos radars. Son système solaire n'apparaissait pas sur nos cartes et j'étais curieux de savoir ce que nous allions y trouver. Elle gravitait autour d'une naine rouge, à une orbite à peu près équivalente à celle de Mercure, par rapport à notre soleil. Mais, la différence d'âge des deux étoiles, en faisait une planète de classe M, tout à fait habitable.

Arrivé à proximité, Sulu nous mis en orbite. L'astre me rappela instantanément la Terre. Des continents, des océans et une atmosphère riche en oxygène. Une pointe de nostalgie me pinça le cœur, mais je la chassai bien vite. Quand on vivait dans l'espace, la mélancolie était un poison mortel. Je laissai les commandes au Japonais qui acquiesça, mais resta obstinément vissé à son poste de pilotage, refusant de prendre place dans mon fauteuil. Je ne lui en tenais pas rigueur. Tout le monde se demandait pourquoi j'acceptais un tel laxisme, mais personne n'avait encore osé poser la question. Je me garderai bien de répondre, de toute manière.

Spock se leva à ma suite, me suivit dans le turbolift et nous nous dirigeâmes vers la salle de téléportation. Les portes à peine refermées, je me réfugiai dans ses bras et l'emportai dans un baiser délicieux qui me laissa sans souffle et pantelant. Nos moments d'intimité, en dehors de nos quartiers durant notre temps libre, se limitaient à pas grand-chose. L'entièreté de l'équipage était au courant que nous étions mariés, et cela ne dérangerait personne si nous nous baladions main dans la main dans les couloirs. Mais, j'étais le Capitaine de ce navire, et Spock, mon premier officier. Nous n'étions pas deux jeunes Enseignes, presque anonymes, au milieu des plus de 400 hommes et femmes présents à bord. Un tel manque de professionnalisme, serait la porte ouverte à toutes les fenêtres. Nous nous contentions donc, de moments volés, dès que nous avions l'occasion d'être seuls. Cela me convenait, et il en était de même pour mon compagnon, qui aimait toujours aussi peu les démonstrations en public. Je le relâchai doucement, quand les portes s'ouvrirent de nouveau.

Kyle nous attendait derrière son pupitre, les coordonnées de la ville que nous avions choisie pour un premier contact, déjà entrées dans l'ordinateur. Elle était vaste et habitée. Bones était également présent, car il tenait à nous accompagner cette fois, malgré son aversion pour le téléporteur. D'après nos données, il semblerait que l'évolution de l'espèce humanoïde peuplant cette planète, en soit à un stade similaire la fin du XXème siècle terrien. Nous devions donc agir avec une certaine discrétion. Deux gardes de la sécurité nous accompagnaient, nous étions donc cinq sur cette expédition. Chacun de nous monta sur un plot. J'échangeai un dernier regard avec Spock, qui trahissait sûrement mon impatience. Il tendit sa main droite, en dépliant son index et son majeur. J'y glissai les miens, en me tournant vers Kyle.

« Énergie ! »

Nous nous matérialisâmes à l'entrée de la grande cité. Fort heureusement, personne ne passa par là pour nous voir. La ville était fortifiée, entourée de remparts immenses, ce qui ne cadrait pas vraiment avec l'époque présumée. Devait-on craindre une menace quelconque de l'extérieur ? Nous nous approchâmes rapidement de la haute porte. Une pancarte annonçait :

« Bienvenue à Harpocrate. Capitale de la culture d'Ogmios. »

Le nom de la ville avait manifestement été rajouté par-dessus un autre. En témoignait l'ancienne nomination illisible en dessous. Elle avait donc été rebaptisée. Plus bas, dans une police gothique difficilement lisible, car quelqu'un avait rayé la phrase, l'on pouvait déchiffrer :

« L'éloquence n'est que l'art d'embellir la logique. (1) »

Juste en dessous, rajouté au marqueur noir, une autre maxime remplaçait celle d'avant :

« Le silence est le sanctuaire de la prudence. (2) »

Ces contradictions étranges nous laissèrent perplexes. Nous trouverions sûrement plus de réponses à l'intérieur. Les portes étaient grandes ouvertes et donnaient directement sur une large avenue goudronnée, bordée d'arbres et de réverbères. Nous nous plongeâmes alors, dans une ambiance qui rappelait nos années quatre-vingt-dix.

Des voitures, qui pour nous semblaient préhistoriques, circulaient dans la rue. Des promeneurs s'affairaient à leurs occupations quotidiennes. Il régnait une effervescence propre à la vie urbaine, mais quelque chose me dérangea, sans que j'arrive à mettre le doigt dessus.

Directement sur notre gauche, débutait une ample zone piétonne. C'était apparemment jour de marché et les pavés étaient jonchés de stands en tous genres. Des légumes, aux vêtements, en passant par des meubles, en plus ou moins bon état.

Nous nous engouffrâmes dans la foule de badauds. Nos uniformes détonnaient quelque peu dans le paysage, mais personne ne sembla y prêter attention. Au contraire, les gens parurent avenants, souriant sur notre passage ou esquissant un signe de tête amical. Impossible, pour autant, de me détendre.

« Je n'arrive pas à me débarrasser du pressentiment que quelque chose cloche. » Pensai-je, en regardant Spock.

« Je partage ton état d'esprit. » Me répondit-il, silencieusement.

« Vous pourriez arrêter de faire ça tout le temps ? C'est impoli les messes basses, vous savez ? Même si c'est télépathique. » Chuchota Bones.

Comme un seul homme, mon compagnon et moi nous tournâmes vers Léonard. J'étais abasourdi, mais pas par le contenu de sa phrase, non, mais par le son de sa voix. J'échangeai un regard de compréhension avec Spock, il avait suivi le même cheminement de pensée. Puis, nous scrutâmes longuement la foule, pour être sûr que ce n'était pas qu'une impression.

Personne ne parlait.

Les habitants marchaient, les uns à côté des autres, faisaient leurs courses, marchandaient, souriaient, tout cela dans le plus religieux des silences. Seuls les bruits de la vie environnante nous parvenaient. Les talons claquant sur le sol, le vent dans les arbres, la circulation au loin, des aboiements ressemblant à ceux d'un chien, des rires d'enfants. Mais pas une parole.

Quelle étrange manière de cohabiter. Ce peuple était-il simplement dépourvu de cordes vocales ? Ou était-ce d'usage selon une loi quelconque ? Il n'y avait qu'un seul moyen de le savoir. Je m'approchai d'un homme d'âge mûr qui tenait une échoppe de chapeaux. Peut-être pourrait-il nous renseigner.

« Excusez-moi, monsieur. » L'interpelai-je, d'une voix forte, pour être entendu, en espérant que le traducteur universel épinglé à mon uniforme ferait correctement son travail. « Pourriez-vous… »

Mais l'individu changea radicalement de comportement. Il perdit son sourire et la panique se lut dans ses yeux. Il fit de grands gestes des mains, pour nous signifier de nous taire. Les passants à portée de voix s'écartèrent comme si j'avais la peste. Certains crièrent. Les femmes mirent leurs enfants à l'abri. Nous les observâmes, effarés.

Un profond malaise succéda ma tentative de communiquer. Les gens nous contournaient largement, les yeux baissés. Il allait être ardu de demander notre chemin. Nous décidâmes de reprendre notre route, nous finirions bien par tomber sur un bâtiment officiel.


(1) Citation de Denis Diderot. Elle ne peut évidemment pas être là normalement, mais je la trouvais appropriée.

(2) Citation de Baltasar Gracian. Elle ne peut évidemment pas être là non plus, mais je la trouvais appropriée également.