Coucou !
Alors, ceci est la suite de Point de Non-Retour. Il n'est pas nécessaire de l'avoir lu pour tout comprendre, mais disons que ça apporte des informations complémentaires, notamment sur le comportement de Kyle. Bref, je sais que ça fait longtemps, et j'avais prévu d'écrire quelque chose d'autre avant de poster le début de celle-ci. Je m'emmêlais les pinceaux, alors j'ai décidé de poster d'abord celui-ci.
Les ships mis en avant seront surtout autour de Kyle, avec l'apparition de Kip. Oui, je ne sais pas si vous vous souvenez de cet enfant qui avait zéro ami facebook, Kyle étant son premier ami. Je ne l'ai vu dans aucune fanfic française, alors j'espère que ça vous plaira tout de même.
Voilà, je vous laisse avec le début, sachez que ça sera en plusieurs parties, un peu comme Point de Non-Retour. Bonne lecture !
South Park appartient à Matt Stone et Trey Parker.
P.O.V. Kyle
Je suis pitoyable. Passer du rang de "mec le plus heureux du monde" à celui de "dépressif notoire qui se scarifie pour essayer d'oublier que son petit-ami adoré s'est barré avec son ennemi juré" est juste pathétique. Pourtant c'est la vérité, je ressemble à une épave depuis que Stan a quitté la ville pour tracer sa route avec Craig. Ce con n'aurait pas pu rester en ville, au lieu de trouver tous les prétextes fumeux et imaginables pour s'enfuir avec MON mec ? Oui parce qu'aux dernières nouvelles, c'est avec moi que Stan sortait. Mais non, ça avait été trop fort pour le péruvien, il a fallu qu'il vienne me le retirer jusque dans mon lit. Je sais qu'il aime me faire chier, je sais que voir Stan en proie à un dilemme psychologique le fait bander, mais pourquoi moi bordel ?! Je suis une putain de victime innocente, je n'avais pourtant rien demandé à personne si ce n'est un peu d'amour dans cette vie de merde. Il faut croire que ce gros con avait raison, les juifs ne sont pas fait pour être heureux. Pourtant mon père a bien vécu sa vie, d'ailleurs il était même voué à vivre très vieux. Mais il est mort d'un infarctus quand je lui ai annoncé que j'étais sorti avec Stan et que ça me déchirait de l'avoir vu partir avec un autre, qui plus est son pire ennemi devenu son amant qu'il ne quittait jamais. Maman n'avait pas osé nous dire que c'était le second infarctus de papa, pour ne pas qu'on s'inquiète trop. Elle avait juste dit qu'une surcharge de travail l'avait fait obtenir un congé le temps qu'il se remette. Ah la bonne blague… Si elle nous avaient dit la vérité à Ike et à moi, il serait peut-être encore avec nous maintenant.
Ça avait beaucoup choqué ma mère d'apprendre que j'étais homosexuel. A son tour elle s'est mit à me mettre plein de choses sur le dos, tout ça parce qu'elle pensait que j'étais l'incarnation de l'esprit du malin. Ma mère avait toujours eu un problème avec les gays. Elle faisait en sorte de ne jamais avoir à croiser Al Super Gay ou M. Esclave où qu'elle aille. Je m'étais rendu compte que ça aussi je ne l'avais pas remarqué avant de vraiment me pencher sur la question. Il y a de quoi se désespérer quand on voit de l'intolérance habitant sous le même toit que nous-même. Je me doute que si elle avait eu le choix et qu'elle ne faisait pas réellement attention à l'image qu'elle donnait d'elle aux autres, elle m'aurait déjà viré de la maison Broflovski. Elle ne le disait jamais, mais dans ses yeux je pouvais lire gravé à l'encre noire les mots fils indigne chaque fois qu'elle me regardait. Elle a pensé que ça se guérissait, pendant un long moment, alors elle m'a envoyé dans un camp de Be-Curious, c'est comme ça qu'ils appelaient les enfants homosexuels ou bisexuels. Je n'y suis pas resté longtemps parce qu'après que mon camarade de chambre se soit suicidé ma mère s'est inquiété pour moi. J'ai pensé qu'elle réagirait, mais au cas où j'avais emprunté les lames de rasoir que le défunt Bradley cachait dans son armoire pour les cas d'urgence. Quand il disait avoir envie de s'évader en vérité. Sa façon à lui c'était de se taillader les veines. Au début je trouvais ça dégueulasse et totalement immature, mais après avoir essayé j'y ai pris goût. Au début ça fait mal, mais ça permet de se concentrer sur la douleur plutôt que de se complaire dans son malheur. En vérité c'est tellement puissant qu'on ne pense plus à rien. La seule chose à laquelle on pense, c'est cette traînée rouge qui défile le long de nos bras, intarissable. Enfin, en partie. Je suis bien placé pour savoir qu'on a pas du sang jusqu'à l'infini et qu'on peut très vite être anémié. Le corps humain est tellement fragile que ça serait du gâteau de le briser. Mais je n'en ai pas la force. Tout ça parce que malgré tous ces malheurs, mon cœur refuse de croire que je n'aurais pas droit à une happy-end avant de crever et qu'il faut que je sois là pour la vivre. Que si je me tue, je ne la connaîtrais pas.
Foutu espoir qui me maintenait en vie, même en sachant que les deux seuls mecs avec qui j'avais couché avaient fini ensemble en se foutant bien de ma gueule. Je les ai vus passer devant chez moi, j'ai croisé le regard de Tucker alors que Stan était scotché au siège pour ne pas qu'il soit tenté de me rejoindre. Ce connard m'a fait un doigt d'honneur. Il a beau avoir obtenu ce qu'il veut, il aime toujours autant faire souffrir les autres. Je comprend qu'il s'en prenne à moi, il m'en veut pour plein de choses alors c'est normal. Je ne lui en veux pas, même si je devrais. Je sais que Tucker a ses raisons tout comme moi j'ai les miennes de le détester. Mais j'ai beau l'insulter, le traiter d'enfoiré ou de connard, je n'arrive pas à le haïr. Il a joué avec moi comme il a joué avec ses propres sentiments alors qu'il savait à l'avance ce qu'il allait se passer. Il se savait amoureux de Stan, même si leur amour l'un pour l'autre respire le malsain. Ils sont violents l'un avec l'autre, on dirait presque une relation SM. Je déteste ce genre de choses, mais voir Stan scotché au siège de la Jeep de Craig est bien plus insupportable que tout le reste. Je n'arrive pas à comprendre comment il peuvent vivre leur amour de la sorte. Pour moi l'amour est doux et chaud, tout le contraire de ce qu'il se passe entre eux. J'ai mal au cœur, il faut que je sorte de ma chambre. Ou alors que j'ouvre ma fenêtre et que je saute ? Ça aiderait tellement de monde que je ne sois plus là, autant mes parents que mon meilleur pote dont je n'ai plus aucune nouvelle maintenant. Je ne lui ai pas envoyé de textos depuis que toute cette histoire m'a fait tomber dans la déprime. Je ne veux plus communiquer avec personne et je préfère me morfondre dans cette pièce qui a vécu tellement de choses. C'est de la torture psychologique, mais Tucker m'y a tellement conditionné que je suis incapable de m'en sortir. En boucle je revois la fois où Stan a atterris dans ma chambre et qu'il m'a embrassé, témoignant sa jalousie envers le péruvien parce qu'il me regardait un peu trop intensément. A l'époque j'en avais naïvement été heureux. J'avais cru qu'il s'intéressait à moi, mais en vérité il était juste jaloux de moi parce que je couchais avec Craig. Cet enfoiré nous avaient bien menés en bateau et, si j'avais su, sûrement n'aurais-je rien dit ni rien fait pour lui prouver mes sentiments. Enfin, il était au courant depuis longtemps, pourtant il n'avait rien fait pour me dire qu'il savait. Ça aurait du me mettre la puce à l'oreille mais non, j'avais préféré me jeter à l'eau comme un con.
Je me décide à ouvrir la fenêtre. Chaque geste que je fais avec mes mains me fait souffrir, pourtant aujourd'hui je n'ai pas encore commencé les scarifications. Ma chair est encore à vif de la veille et je vois toutes les stries rougeoyantes qui se détachent sur ma peau pâle. Peut-être que, cette fois, la douleur sera tellement forte qu'elle me sera insupportable. Un peu comme la disparition de Stan, scotché au siège de Tucker sans la moindre possibilité de fuite. Et si, en réalité, mon meilleur pote ne voulait pas partir avec lui, qu'il n'avait pas eu le choix et que son regard me suppliait de l'aider et non pas de le pardonner ? Non. Il faut que j'arrête de me monter la tête. La dernière fois ça a mal fini, la preuve c'est que j'ai perdu mon meilleur ami. Le diable me sourit alors que j'approche mon bras de l'une des lames de rasoir que j'ai planquées sous mon matelas. J'en ai besoin, sinon je me torturerais encore plus l'esprit avec Stan. Ce qui aurait été normal, comme l'avait si bien dit Kenny lorsqu'il était allé me voir, inquiet que je n'aille plus en cours, ça aurait été que je décharge ma haine en me masturbant devant toutes les photos de Stan que je possédais, histoire que les souvenirs douloureux se transforment en une forme de plaisir. Mais là non plus je n'en ai pas eu le courage. Je ne voulais pas souiller ces souvenirs avec des intentions aussi viles. Il faut croire que je suis loin d'être le plus courageux de tous. Kenny avait promis de revenir me voir et pendant un temps il a tenu sa promesse. Un jour, il est même venu avec Clyde et je me suis senti affreusement mal lorsque je les ai vus s'embrasser dans la cuisine pendant que je réchauffais une pizza. On devait manger devant la télé, mais à la place quand je suis revenu mes larmes se sont mises à couler bien malgré moi. Les voir enlacés comme ça et amoureux, ça me rappelait la courte histoire que j'avais eue avec Stan, même s'il ne m'avait jamais vraiment aimé. Pendant la soirée, ils ont réussi à me remonter le moral, j'ai même ri à plusieurs reprises, ce qui les a confortés dans l'idée que j'allais mieux. Ce n'était pas le cas. Le masque, je l'ai composé en vitesse. J'ai beau être nul pour mentir, les masques c'est bien plus facile à créer. Seul Ike a réussi à me percer au jour. Mais ça ne le concerne pas, et il le sait. Du coup, on s'entre-ignore et on en parle jamais. Pourtant j'aurais adoré pouvoir en parler à quelqu'un.
Alors, j'ai voulu en parler à Kenny. Mais au moment où je me suis rendu chez lui, je l'ai vu se faire frapper par son père, dans l'unique but de protéger sa sœur. Ça m'a fait me sentir encore plus minable de déprimer seulement parce que mon père est mort à cause de moi et parce que je me suis fait larguer par le mec que j'aimais plus que tout au monde. Le pire c'est que c'était aussi mon meilleur pote… J'aurais tellement aimé qu'on ai pris le temps de s'expliquer tous les deux, il y avait forcément une explication logique à son comportement. J'aurais tellement aimé l'entendre, au moins pour arrêter de me triturer l'esprit comme je le fais en ce moment. Stop. Quoi que je fasse, mon esprit retourne sur son idée fixe : Stan. A croire que j'aime me torturer l'esprit, ce qui serait fort probable sinon j'aurais arrêté de penser à lui il y a bien longtemps. Je relève ma manche, exposant mon bras meurtri à la lumière croissante du soleil. Je me sens tellement mal…
« Kyle ? Qu'est-ce que tu comptes faire avec ce rasoir ? »
Ike. A l'entrée de la chambre. Personne ne m'avait jamais surpris et il a fallu que ça soit lui. Il déglutit péniblement. Je lâche le rasoir, espérant le cacher même si je sais qu'il l'a vu. Foutus réflexes de médeux… On s'observe longtemps dans le blanc des yeux. Moi sur le sol, mes scarifications à l'air libre, Ike me fixant avec insistance. Il attendait une réponse, ça se voyait dans son regard. Le problème, c'est que je n'avais aucune envie de contester ses théories. Parce que, à tous les coups, ses déductions sont les justes. Il est le seul encore à même de me comprendre, dans cette famille de barges homophobes. D'ordinaire, il me sourit tristement lorsque je masque mes émotions, mais là c'est différent. C'est différent parce que je suis face à lui, que j'avais une lame de rasoir dans les mains et que je comptais me tailler les veines. Avec stupeur, je le vois passer le pas de la porte et se rapprocher rapidement de moi. C'est à mon tour de me demander ce qu'il compte faire, avec son air sûr de lui. Il s'assoit juste en face de moi, nos genoux se touchent, et je le vois se saisir de la lame pour la jeter par la fenêtre. Je ne fais pas le moindre geste pour l'en empêcher, j'en ai des dizaines d'autres encore sous mon matelas. Il s'assied devant moi, posant ses mains sur mes épaules pour me secouer légèrement. Je ne réagis pas. A quoi bon ?
« Je sais que c'est dur, mais ça ne sert à rien de se ravager pour ça. Si tu aimes les garçons, tu n'as pas à en avoir honte. Ce n'est pas ta faute si papa l'a mal pris et je pense que ça tu le sais ! C'est la faute de maman, elle aurait du nous parler de l'infarctus de papa.
- Ike… Arrête, tu ne comprends pas ce que…
- Bien sûr que si je comprend ! Nous sommes de la même famille Kyle et ça me fait du mal de te voir constituer un masque parce que tu penses ne pas avoir le droit de souffrir. Mais chacun à ses facultés à résister à la douleur, tu n'as pas à te comparer à Kenny. Tu vas te faire du mal, lui il a connu la misère depuis qu'il est tout petit, il a appris à dompter la peine. Toi, tu étais heureux jusqu'à il y a peu de temps.
- Tu n'es pas mon frère Ike. Tu as été adopté. »
Il me lâche, exactement comme je l'avais prévu, et il m'observe comme si quelque chose venait de se briser en lui. Je n'aime pas faire ça, mais si ça peut éviter de m'étendre sur mes soucis du moment, ça m'arrangerait. J'aime beaucoup Ike, je ne veux pas qu'il se sente mal à cause de moi. S'il finit par me haïr il n'en sera que plus heureux de me voir dépérir. Dans ce cas, mieux vaut commencer à être désagréable tout de suite.
« Je n'ai pas besoin de l'aide d'un surdoué qui essaye de se reconvertir en psy, ça c'est mon domaine en temps normal. Et puis, tu ne connais pas toute l'histoire.
- Dans ce cas Kyle, je veux bien t'écouter d sans t'interrompre. Si ça peut te soulager je veux t'aider. Même si tu essayes de faire le méchant parce que tu vas mal, même si tu veux m'envoyer bouler ou me crier dessus. Je t'écouterais. Sache que je t'écouterais, même si tu dois être désagréable avec moi ou avec un autre membre de la famille. Je ne te haïrais pas. Parce que, malgré le fait que je sois canadien et pas toi, tu es mon frère et je t'aime. Tu sais que j'ai raison. Il faut que tu trouves la porte de sortie tant que tu le peux encore. Toi qui t'y connais en psychanalyse, tu devrais pourtant le savoir. Une fois le point de non-retour franchi il n'y a aucun moyen de revenir en arrière possible.
- Je ne veux pas en parler, c'est ça que tu ne comprends pas !
- Mais tu devrais, comme ça tu te sentirais moins seul.
- Va chier Ike, grognais-je en me dégageant, j'ai pas besoin d'un psy je t'ai dis. »
Je me lève et sors de ma chambre, laissant derrière moi un frère encore à moitié sous le choc de tout ce que je viens de lui balancer à la gueule. Il s'en remettra, il en a vu d'autres. N'empêche qu'en attendant je ne peux même plus me scarifier tranquillement. La lame de rasoir a dut atterrir dans la terre du jardin, elle doit être trop sale pour faire une entaille correcte et qui ne pourrait pas vraiment s'infecter. Toutes mes autres lames sont sous mon matelas, mais Ike est dans ma chambre. Il faut que j'aille faire un tour, en espérant que Stan arrêtera de surgir dans mes pensées au moment où je m'y attends le moins. Sinon je sens qu'un jour je vais faire une connerie. Mais c'est peut-être de ça dont ce monde a besoin, que je crève ! Il faut que je trouve un endroit où je souffrirais pas trop, peut-être que ça sera plus facile face à ma putain de couardise.
P.O.V. Kip
Il fallait bien que ça arrive un jour. Mes parents sont tombés sur mon ordinateur ouvert. Sur une page, une seule et unique page. Celle sur laquelle j'avais stocké toutes les plus belles photos de Kyle Broflovski. Je leur ai souvent dit que j'étais ami avec lui, ce qui n'était pas tellement faux puisque sur facebook les connaissances se font appeler amis également. Je suis devenu extrêmement célèbre sur ce site, mais il me manquait toujours mon premier ami. Kyle me manquait horriblement et je n'ai pas osé le redemander en ami après qu'il m'ait rejeté si violemment. Alors je me suis contenté d'observer sa page de temps à autre, de loin, en téléchargeant quelques fois des images de lui que je trouvais sympas. Je crois bien qu'au final, j'en ai pris des tonnes et des tonnes. Je téléchargeais toutes les images où il apparaissait, me maudissant de toutes les stocker sans la moindre autorisation. J'étais bien content que personne ne me voit faire ou que personne ne le sache, mais il est arrivé un moment où je suis tombé sur une photo qui m'a mis le moral à zéro. Kyle, dans les bras d'un autre garçon. Son meilleur ami, si je me souvenais bien de ce qu'il m'avait raconté lorsque nous étions encore amis. Mais là, sur cette photo, ils ne se tenaient pas comme des amis. Ils ressemblaient à un couple, un vrai de vrai. Une horrible douleur a traversé mon torse à ce moment-là et, depuis des années que je n'avais pas ressenti ça, j'ai eu envie de prendre l'air. Ces dernières années, j'étais devenu invisible aux yeux de tous. Plus personne ne me voyait, parce que je passais tout le temps que je pouvais sur un ordinateur, à faire des jeux en ligne avec un certain Kevin Stoley. Je n'ai jamais su à quoi il ressemblait en vrai, mais je m'en fichais un peu. Pour tout dire, dans ma tête il avait le visage de Kyle. Tout les gens dont je ne connaissais pas le visage avaient sa tête. C'était devenu une obsession. Je ne m'en suis rendu compte qu'au moment où j'ai vu ce garçon, sur la photo, le prendre dans les bras et l'embrasser.
Kyle était mon premier ami. C'était donc logique qu'il devienne la première personne que je n'ai jamais aimée. Non ? Mes parents ont été compréhensifs. Ils m'ont encouragé à lui avouer, ce que je n'ai toujours pas fait. Si je n'avais, ne serais-ce que tenté, je suis sûr qu'il m'aurait rejeté. Pour la simple et bonne raison qu'il ne doit plus se souvenir de moi. Nous ne nous sommes même jamais rencontrés en vrai alors c'est dire… Et puis, il sortait avec son meilleur ami il y a encore peu de temps. Je serais venu comme un cheveux sur la soupe si je lui avais dis de but en blanc Kyle, je t'aime. De un, ça aurait rendu le fameux Stan jaloux, je serais passé pour le gros méchant de l'histoire alors que j'ai des sentiments sans le vouloir. De deux, il me rejetterait tout de suite pour la simple et unique raison qu'il aime son meilleur ami. Quoique, ce n'est peut-être plus le cas maintenant. Ça fait longtemps que je n'ai plus vu de photos de Kyle en compagnie de Stan, comme s'il s'était barré sans laisser la moindre trace. Ça expliquerait l'air absent qu'il a sur ses photos actuelles, on dirait presque un zombie maintenant. Je m'en veux de penser ça, mais ça me donne encore plus envie de le protéger de le voir si fragile. Pourtant, vu de l'extérieur, il donne l'impression d'avoir une pêche d'enfer. Son illusion est bien réussie, sauf pour ceux qui le connaissent comme moi je le connais.
« Kiiiiiip ?
- J'arrive m'man, annonçais-je en relevant la tête de mon journal intime. »
Je sais, à mon âge c'est ridicule d'en avoir encore un. Mais on me l'a conseillé. Surtout mes parents en fait, quand ils ont fini par remarquer que je n'avais pas d'amis réels. Depuis qu'ils sont tombés sur mon stock de photos de Kyle, ils m'ont confisqués les premiers que j'ai écris. Je crois qu'ils ont dans l'idée de les lire. J'aurais préféré qu'ils s'abstiennent, il n'y a pas des choses très très glorieuses ou amusantes à l'intérieur. La façon dont j'ai écris, j'ai juste l'impression que ce n'est pas moi. Comme si quelqu'un avait pris possession de mon corps, juste pour écrire ces quelques lignes. Ça me fait ça chaque fois que j'écris un truc, et ça commence même légèrement à me faire flipper. Et si quelqu'un d'autre prenait vraiment possession de mon corps pendant ce court laps de temps ? Non. Je ne dois pas y penser. Stop la paranoïa Kip, tu te fais peur tout seul pour rien. Je ferme le livre et le range sous mon lit. Celui-là, mes parents ne l'auront pas. Il sera toujours hors de leur portée. Il y a des choses encore pires que dans le précédent, à savoir mon obsession presque maladive pour Kyle. Même si je sais que, en tombant sur mon dossier-photos, ils doivent déjà en savoir pas mal. Mais tant qu'ils ne savent pas le plus dégueulasse, je crois que je peux encore protéger ma prétendue innocence à leurs yeux. Même s'ils doivent se douter que je ne fais pas que garder des photos dans ce dossier uniquement pour les regarder quand l'envie me prend de le faire. Maman commence à s'impatienter alors que je descends les escaliers. Elle me voit arriver, tout sourire, elle aussi sourit. Dans sa main, il y a une assiette remplie de pancakes avec trois tonnes de sirop d'érable dessus. Ça tombe bien, j'en raffole et elle le sait mieux que personne.
{….}
Voilà. Je suis pour ainsi dire paré. Un sac à dos rempli d'affaires de cours qui vont m'être toutes plus inutiles les uns que les autres, une trousse, des crayons de couleur,… Le matériel du parfait écolier, ce que je suis bien loin d'être. Mais je peux laisser ma mère rêver. Je lui fais une bise sur le front avant de filer, qu'elle ne me dise pas de porter encore une fois cet immonde pull-over vert gerbe qu'elle me faisait porter au primaire. Non, là ça suffit ! Je suis grand maintenant, je m'habille comme je veux. Bon, pas trop méchamment non plus hein ! Je m'en voudrais de la faire défaillir alors qu'elle est si compréhensive avec moi. Mais quand je dis non, c'est non. Après tout, à quoi bon porter un vêtement trop petit pour moi ? Les fringues que j'ai maintenant sont beaucoup plus classes ! Et dire que je retourne enfin à l'école, depuis le temps. J'espère que les autres ne seront pas trop méchants avec moi, je ferais en sorte de ne pas l'être non plus. Prenez garde vils manants, sinon vous subirez le courroux de Kip ! Je crois que je m'emporte un peu… J'espère que Kyle sera dans la même classe que celle que je vais intégrer, ça serait mon plus beau rêve qui deviendrait réalité. Le voir en vrai, tous les jours, lui parler, le voir sourire… Je rêve trop, si ça se trouve je n'oserais même pas l'approcher.
J'entends la sonnerie. Je ne suis toujours pas devant la classe. Je commence à courir pour espérer entrer avant le prof, je finis par trouver la salle. Épuisé, je m'arrête un instant devant la porte pour reprendre mon souffle. Lorsque je m'apprête à appuyer sur la poignée, la porte s'ouvre d'elle-même, comme si elle était possédée. J'entends le professeur hurler, alors que le gros garçon qui vient d'ouvrir la porte me pousse pour pouvoir passer. Telle la brindille que je suis, je ne résiste pas longtemps avant d'être éjecté contre les casiers. Pourtant, j'assiste à toute la scène, de A à Z.
« Eric Théodore Cartman ! Retourne à ta place, IMMÉDIATEMENT !
- Nanana, j'entends pas ! Et j'vous laisserais pas donner encore une excuse de merde au feuj pour pas venir en cours, j'vais le ramener par la peau du cul et pour lui ça sera l'humiliation totale, ça je le jure. Il s'est assez foutu de notre gueule !
- Kyle Broflovski est absent pour raisons familiales, respectez sa décision. »
Kyle..? Ce type a bien dit Kyle ? Sans réfléchir, je me lance à la suite du fameux Eric Théodore, sans pour autant être trop visible. Si Kyle ne vient pas en cours, c'est qu'il y a un problème, et ce gros garçon a l'air de savoir où il habite. Pour le savoir aussi, il ne me restait plus que la solution de le suivre. Une fois là-bas, je… Je… Je ferais quoi ? Je ne sais pas… J'ai beau être amoureux de lui, je ne sais pas comment il est, hors des réseaux sociaux. Peut-être qu'il est totalement différent ? En tout cas, j'ai un point d'avance comparé aux autres, je sais que ça fait un moment qu'il ne va pas bien. Peu de gens doivent le savoir ça, non ? Oh, je sais ! Quand je le verrais, je lui ferais un gros câlin. Je suis sûr que c'est de ça dont il a besoin, qu'on lui prouve qu'on tient à lui. Je souris, fier de cette idée, alors que je suis le gros garçon à travers les rues commerciales. Qu'est-ce qu'il fait, là ? Pourquoi il entre dans un magasin ? Je m'arrête un instant devant la devanture pour voir qu'il est en train d'acheter quelque chose. Mais quoi ? Dans ce magasin, il n'y a que des fringues pour filles, alors pourquoi..? Je n'ai pas le temps de me poser d'autres questions qu'il en ressort, en sifflotant. Une fois qu'il est passé, je continue ma filature. Il ne semble pas m'avoir vu, je pense que c'est une bonne chose. Il s'arrête à un autre magasin, cette fois c'est un fast-food. Il me donne faim avec sa glace à l'italienne… Mon ventre ne peut s'empêcher de laisser échapper un grognement. Le gros garçon fait volte-face. Son regard sombre croise le mien. Trop tard, me voilà repéré…
« Pourquoi tu me suis depuis l'école, ducon ? Tu m'espionnes ?
- Euh… Je… Euh… Non ! Ce n'est pas ce que tu… vous ! Vous croyez…
- Je crois rien du tout, tu me suis depuis que je me suis cassé de cours, connard. Alors dis-moi, tu veux quoi bordel de merde ! »
Je ne répondis pas, mon sang se glaçant dans les veines sous l'effet de la panique. Qu'est-ce que je pouvais bien lui dire ? Que je le suivais parce qu'il allait chez Kyle ? A le voir, ce gros monsieur n'avait pas l'air si sympathique et ça ne m'étonnerait même pas qu'il soit en réalité un gros homophobe. Alors je ne préfère rien dire, de toute manière il n'est pas obligé de savoir. Si je ne lui dis pas, il ne saura pas. Je me contente de hausser les épaules et je le vois soupirer. Puis, il me regarde de bas en haut, comme s'il cherchait à savoir si j'étais dangereux ou autre chose. Je ne suis qu'une grosse brindille toute frêle, même si je le voulais je ne pourrais absolument pas blesser ce type.
« Hé, mais, t'es pas le sans amis, sur Facebook ? »
Nerveusement, je me mords la joue, pensant qu'il vient de me percer au jour et que je peux absolument pas nier ce qu'il a dit, bien que maintenant j'ai vraiment des tonnes d'amis sur Facebook, alors je détourne mon regard du sien.
« Je… J'ai des amis maintenant !
- Je suis même pas sûr de vouloir savoir pourquoi tu m'suis, maintenant. Tu veux qu'on soit amis sur Facebook, sale stalker ?!
- M-Mais non, je..!
- Ah ouais, je vois, tu me suis parce que j'ai dis que j'allais chez le feuj. C'était ton premier pote, c'est ça ? »
Je fais alors le rapprochement. Ce garçon, c'est celui qui faisait les podcasts sur Facebook, s'amusant à tort et à travers à commenter tout ce qu'il s'y passait, notamment d'enlever Kyle de ses amis parce qu'il était ami avec moi. Mes poings se crispent, mais je me force à rester calme. Il veut me faire du mal, mentalement, en me ridiculisant ou quoi, comme il l'a déjà fait. Pourquoi je l'ai suivi moi ? J'aurais tranquillement pu attendre le lendemain, qu'il ai ramené Kyle, pour faire sa connaissance proprement. Mais j'étais beaucoup trop impatient de le voir en vrai… Même si je l'avais déjà vu, puisqu'on était dans le même établissement, mais après cette histoire avec Facebook, mes parents avaient décidé que je devais me tenir à l'écart des réseaux sociaux, pour ça ils m'avaient empêché de retourner en cours, m'inscrivant à ceux par correspondance pour pouvoir me surveiller. Mon accès à l'ordinateur se limitait à faire des recherches pour les choses que je ne comprenais pas, et des révisions. Toute tentative pour aller sur un réseau social quel qu'il soit était bloquée par un contrôle parental omniprésent. Avec un père au foyer, c'était même difficile de couper à ce genre de choses… Mais, le coût de la vie à South Park avait augmenté, ne laissant pas d'autre choix à mes parents que de faire des économies tant qu'ils le pouvaient. C'est-à-dire que mon père a trouvé un travail, que je ne l'avais plus sur le dos mais… Le meilleur était resté ce qu'il m'avait annoncé à peine hier : Que je pouvais retourner à l'école. Ce n'était même pas une option d'ailleurs, je le devais, parce que les cours par correspondance, ça coûtait cher, pas comme l'école. Du coup, j'étais revenu. Et j'avais constaté que pas mal de choses avaient changé, en passant. Beaucoup, même Kyle. Il ne semblait pas aller très bien en ce moment.
Le gros garçon soupire avant de se mettre à ma hauteur.
« Tu sais quoi ? On va aller chercher ce connard ensemble. Il sera content de voir que sa petite-copine d'internet est revenue. »
{….}
J'avais toujours été maladroit pour me comporter avec les enfants de mon âge, mais me laisser sans contacts d'eux pendant quelques années maintenant n'avait pas arrangées les choses. Une fois arrivés chez le Broflovski, j'ai laissé Eric Théodore sonner sans rien dire. Après tout, il connaissait sa maison, alors que moi je la découvrais. Le sac avec les fringues qu'il avait achetées, il les lui a données avec un grand sourire qui ne m'avait pas plu, comme si ce qu'il voulait c'était uniquement faire du mal au rouquin. Rouquin qui ma foi semblait avoir le regard tellement vide qu'il était difficile de se dire qu'il allait bien. Enfin, visiblement, j'avais l'air d'être le seul à m'en rendre compte, alors, sans réfléchir, avant que Kyle n'ai pu saisir les affaires que lui tendait le gros, je l'avais pris dans mes bras. Je l'ai senti avoir un moment de recul à l'instant où je l'ai fais, et même le gros garçon avait cessé de parler, lâchant même le sac d'affaires. Pour autant, il n'a pas refusée mon étreinte, lorsque je l'ai serré un peu plus fort contre moi, bien au contraire. Bien qu'il n'ai pas répondu à mon étreinte, j'ai mis ça sur le coup de l'émotion. J'étais là pour lui, il n'avait plus à souffrir seul dans son coin, je l'aiderais quoi qu'il advienne, il faut qu'il remonte la pente, il le peut encore, tout espoir n'est pas encore perdu.
