Je me souviens qu'un jour d'ennui mortel, j'étais tombée, au détour d'une balade sur le net, sur un site assez insolite. Ce dernier recensait les Darwin Awards.
Là, vous êtes en train de vous demander qu'est ce que peut bien être un Darwin Award.
Je m'en doutais... C'est une récompense attribuée à une personne décédée suite à un comportement particulièrement stupide.
Sur le moment, j'avais pensé que les vainqueurs manquaient cruellement de bon sens pour avoir trouvé la mort dans de pareilles circonstances.
Prenez celle-ci par exemple : « Un homme et sa femme ont été tués par un bâton de dynamite qui a explosé dans leur voiture : s'ennuyant à bord de leur voiture à deux heures du matin, ils ont voulu allumer un bâton de dynamite et le jeter par la fenêtre pour voir ce que ça faisait, mais apparemment n'ont pas remarqué que les vitres étaient fermées quand ils ont lancé le bâton. »
Ou bien celle-là : « Un homme est mort noyé dans 50cm d'eau après avoir passé la tête dans une bouche d'égout et s'être bloqué… en cherchant ses clés de voiture. »
Ceux là, c'étaient vraiment des champions...
Ensuite, je m'étais demandé quelle pouvait bien être notre dernière pensée, juste avant d'y passer.
« Je suis sûr que ce pont est plus solide qu'il n'y parait », ou alors « Ce serpent n'a pas l'air si dangereux que ça ! ».
Pour ma part, ma dernière pensée avait été « Le petit bonhomme est rouge mais je dois bien avoir le temps de traverser avant qu'une voiture arrive ! »
Si j'avais su, j'aurais pensé à quelque chose de beaucoup plus classe, du genre « Je me demande comment je pourrais faire en sorte que tous les pays du monde soient en paix ».
Mais bon, ces choses là ne se calculent pas. Personne ne sait quand viendra son heure. Enfin, sauf ceux qui décident de mourir, là c'est différent . Dans mon cas, mourir était la dernière chose à faire.
Maintenant, vous êtes sûrement en train de vous demander pourquoi je ne suis pas plus perturbée que ça par le fait d'être morte. Sans doute parce que la mort ne fait peur qu'aux vivants. L'inconnu, la peur de souffrir, le sentiment de n'avoir pas eu le temps de faire tout ce qu'on avait prévu.
Je me souviens qu'à la mort de Finn, j'avais été accablée en pensant à tout ce qu'il ne pourrait plus accomplir. Il était si jeune et avait un avenir si prometteur.
Toutes ces préoccupations me passaient au dessus de la tête maintenant que j'étais passée de l'autre coté.
Alors que je regardais les secouristes tenter de ramener mon corps à la vie, je me rendais compte qu'il n'y avait ni paradis ni enfer. Cette constatation m'emplit soudain de regrets.
J'avais perdu tellement de temps à essayer de plaire à mes parents, de respecter la bible par peur d'aller rôtir en enfer, que j'avais l'impression d'être passée à côté de beaucoup de chose. Me goinfrer de bacon à m'en rendre malade, voler du vernis à ongle dans un magasin, avouer mes sentiments à Rachel...
Il y avait toujours ce lien entre nous. Cette sorte d'évidence que je n'avais cessé de rejeter aux fils des années. En la détestant, en la jalousant, en la trahissant et, pour finir, en tentant de l'oublier.
Quinn, tu es née idiote et tu es morte idiote. Voilà
Elle ne saurait jamais. Elle continuerait sa vie en pensant qu'elle m'étais indifférente.
J'étais sûre que ma mort ne chamboulerait pas la vie de mes amis. J'avais gaspillé tellement d'énergie à tenter des garder les autres bien à distance que le souvenir qu'ils avaient de moi allait vite sombrer dans l'oublie.
Une curiosité morbide s'empara de moi et je me demandais comment réagiraient mes proches à l'annonce de mon décès. Je tentais de chasser de mon esprit cette pensée un peu trop sordide à mon goût.
Et pourquoi pas après tout, j'étais morte alors autant en profiter. N'était-ce pas Rachel qui avait déjà planifier son enterrement dans les moindre détails ? De toute façon, il n'y avait plus personne pour me juger. Je n'avais plus besoin de faire semblant maintenant.
Il fallait que je sache comment Rachel allait réagir. C'était au final, la seule chose qui m'importait.
Je décidais donc de quitter le lieu de mon accident et de me rendre à New-York.
Le seul petit problème était que je n'avais pas la moindre idée de la manière dont je devais me déplacer.
Est-ce qu'un fantôme prenait le train ?
Je me concentrais pour tenter de changer de lieux. Tout devint très flou autour de moi et quand le paysage se stabilisa, je me rendis compte que je me trouvais à une centaine de mètre de mon point de départ. Ce qui me perturba le plus, en dehors du fait que je n'avais, pour l'instant, aucun contrôle sur mes déplacements, était que la nuit était tombée.
Combien de temps s'était-il écoulé ? Quelques heures, des jours, des semaines ?
Si j'avais encore été pourvu de poumons j'aurais, sans aucun doute, soupiré de résignation.
Concentre-toi Quinn pour l'amour de … De quoi d'ailleurs ? Bref...
Il fallait que j'arrête de penser en terme de temps et d'espace. J'essayai de visualiser l'appartement de Rachel à New-York. La ville, le quartier, la rue, l'immeuble.
A nouveau, tout sembla se voiler autour de moi et le décor qui se reforma après quelques instants m'indiqua que j'avais réussi.
Je me trouvais dans le salon du loft de Kurt, Santana et Rachel.
Je n'aurais su dire combien de temps c'était déroulé depuis le dernier jour du reste de ma vie mais je fus rassurée de voir Kurt dans l'entrebâillement de la porte de la chambre de Rachel. J'étais au moins sûre de ne pas avoir fait un bond de cinquante ans dans le futur.
« Tu es sûre que tu ne veux toujours rien manger Rach ? De ne pas vouloir te laver non plus ? Ça fait quand même cinq jours que... » La voix de Kurt se bloqua dans sa gorge. Il sembla vouloir ajouter quelque chose mais se ravisa, l'air résigné.
Curieuse, je traversais le mur de la chambre.
Je pensais d'abord m'être trompé dans mes déplacements fantomatiques tant la pièce que je découvrais était en désordre.
Les minces filets de lumières qui filtraient à travers les volets laissaient entrevoir des monceaux de vêtements, de mouchoirs usagés.
Sur la table de chevet, quelqu'un, sûrement Kurt, avait déposé un plateau repas auquel Rachel n'avait pas touché.
Sur le lit, on devinait une forme humaine roulée en boule sous la couette.
Ce n'est pas possible ! Pensai-je
« Si tu savais comme je t'en veux... » Murmura la forme dans le lit.
A qui pouvait-elle bien parler. Je me tournais vers la porte pensant que Kurt était entré à nouveau.
Personne...
« Comment as-tu pu me laisser Quinn ! »
Rachel se redressa soudainement. Envoyant valser la couette par terre, sur le côté du lit. Elle entoura ses genoux de ses bras et fixa un point sur le mur en face.
Comment était-ce possible ?
« Rachel ? Est-ce que tu me vois ? » tentais-je
Je me déplaçais dans la trajectoire de son regard mais elle avait déjà enfoui sa tête dans ses genoux et était secouée de sanglots.
Je m'approchai et voulus lui saisir le bras. Ma main passa au travers, Rachel ne réagit pas.*
« Elle ne peut pas te voir Quinn... Personne ne peut nous voir... » Dit une voix derrière moi.
Je me retournais, cherchant d'où pouvait bien venir cette voix. Je croisais un regard que je pensais ne plus jamais revoir.
« Finn ? »
