-Depuis quand a t-on des mendiants sur Baker Street ? Annonça une voix rapide, visiblement stressé par la vision en face de lui. Une jeune homme en haillon et le visage couvert de crasse lui tendait une main couverte d'une mitaine poisseuse. Des mèches de cheveux clairs lui tombait sur le nez, et ses intentions n'étaient autre que de soutirer de l'argent au gentleman qui s'avançait pour rentrer chez lui. Cependant, il avait bien sous estimé les capacités du badaud de passage comme il avait du en rencontrer maintes fois. Celui-ci le jaugea très rapidement et en conclu avec vélocité que ce jeune homme possédait sur lui une arme blanche très légère, qu'il semblait assez chétif pour un homme, mais qu'il pouvait néanmoins faire preuve de grande force physique. Alors qu'en l'évitant, il s'approcha d'une ruelle, le dit jeune homme tenta de le pousser contre un mur dans l'obscurité. En réponse, Holmes l'attrapa par les bras et le jeta contre des caisses. Complètement sonné, le jeune voleur ne se releva pas.

-Déjà ? Je ne connais vraiment pas ma force ! Remettant sa chemise en place, Holmes se dirigea hors de la ruelle. Il tendit l'oreille vers les caisses, mais aucun son n'en sortait. Fichtre, je ne suis pas fort à ce point là... Pris de remord malvenu il fit demi-tour. Mon garçon ? Je ne t'ai pas fais mal ? Aucune réponse. Je ne t'ai pas tué au moins ? Silence. D'un air de dégout, il avança la pointe de son pied vers le corps affalé sur le ventre, il le poussa pour le mettre sur le dos. Le chapeau miteux du mendiant se décrocha de sa tête pour laisser apparaître une longue chevelure châtain qui lui tomba sur le visage pour affiner ses traits. Comment ? Se demanda Holmes, dubitatif. Vérifiant alentour qu'il n'était pas observé, il se pencha vers le corps respirant faiblement, et souleva le large haillon du belligérant. Il le rabaissa bien vite en s'excusant et en détournant le regard. Mais le corps ne réagissait pas. Bien, parfait ! Dit-il en se relevant. Superbe ! On les laisse entrer dans le quartier et...et...et voilà ! Il allait tourner les talons, se mordant le poing, puis arrivé à la sortie de la ruelle, couru vers le corps aux cheveux longs.

-Kof...kof !

-Bois doucement, je vais réellement finir par te tuer.

-AAH !

Réveillée par le verre froid sur ses lèvres, la jeune fille sursauta en voyant qu'elle était tenue par un inconnu, allongé sur une causeuse, dans une pièce sordidement mal rangée. Renversant le verre, elle commença à se débattre, se levant à toute vitesse, pour tomber aussi vite, sans même que Holmes ai daigné faire le moindre mouvement.

-Quand on est pas habitué à l'alcool, c'est sur qu'un tel réveil est brutal. Quoi ? Encore K.O ? Non mais tu plaisantes !

Le nez sur un tapis nauséabond, Milly ouvrit les yeux une nouvelle fois. Calmement, elle se retourna pour faire face au plafond. Encore blanc à quelques endroits, jaunis par le tabac. Assise, elle pu voir qu'elle se trouvait dans une bibliothèque, ou tout comme. Elle remarqua qu'elle n'avait plus de chaussure, ni son chapeau, et bien sur, ni son couteau. Elle se releva dans un mouvement de panique en cherchant la porte, courant vers elle, l'ouvrit pour découvrir sa liberté !

-Heeellooo theeere !

-AAAH !

Elle fut stoppé net par le maître de maison, qui avait l'air d'avoir patienté devant la porte pendant des heures. Ce qui était probablement le cas, vu la tasse de thé vide qui se trouvait par terre. Il poussa délicatement la jeune femme, et referma derrière lui.

-Je, je suis désolée ! Commença t-elle à bégayer. Je ne vous veux aucun mal, m'sieur Holmes, j'vous jure, aucun mal !

-C'est sur qu'avec ça, il sortit la lame, tu ne risquais même pas de découdre mes vêtements. Attends, monsieur Holmes, tu me connais ?

-Oui, oui oui ! Répondit-elle, des larmes dans les yeux.

-Hey, hey hey hey ! Il eu un mouvement de recul, les interactions sociales étaient loin d'être son péché mignon, et voilà qu'une mendiante venait pleurer dans son salon. Pourquoi l'avait il ramassé aussi, il commençait à regretter fortement. Comment ça, tu me connais ?

-Je vous ai cherché longtemps m'sieur, des mois, des mois !

Les larmes nettoyaient la crasse qu'elle avait sur son visage. Holmes eu un tic nerveux. Quelque chose ne tournait pas rond. En roulant des yeux, il se tourna vers la fenêtre.

-Mildred Camille Anderson, commença t-il, en croisant les bras. La jeune femme s'arrêta net de pleurer. Ou plutôt, Milly. Vous avez vraiment cru m'avoir aussi facilement ?

-J'avais pourtant bien commencé. Vous m'avez vraiment fait mal par contre. Répondit-elle en se massant le bas du dos et l'arrière du crâne.

-J'avoue ne pas vous avoir reconnu sur le moment, d'ailleurs, en citant votre nom je n'en étais même pas sur. La jeune femme déglutit. Ah, vous vous êtes vendue toute seule. Maintenant, pourquoi cette comédie ?

-Je ne pensais même pas que vous me connaissiez, pour tout vous dire. Qu'est ce qui m'a trahis ?

-Répondre à une question par une question ?

-Vous êtes doué à ce jeu là ?

-Et vous ?

-Qu'est ce qui m'a trahis ? Répéta t-elle, agacée.

-Les larmes, l'accent, la fausse crasse sur le visage. De la suie trouvée à même la ruelle où je vous ai sonné. L'erreur la plus grossière a été de croire qu'un mendiant ne se salissait que le visage, vos jambes et votre corps étaient immaculées. À la vue du visage outrée de la jeune femme, Holmes s'excusa derechef.

-Quelle fierté, sonner une femme.

-Pourquoi se dévaluer autant, très chère ?

-Où sont mes chaussures ?

-Une chose à la fois, je vous prie Mildred

-Milly

-Milly. Pourquoi cette comédie ? Il se retourna vers elle, assise sur la causeuse où elle était allongée quelques heures plus tôt. D'aussi loin que je me souvienne vous ne m'aviez encore jamais fait le plaisir de me montrer votre visage. Chacune de mes missions sous vos ordres n'étaient que par télégrammes et autres moyens vulgaires de communications.

-Est-ce de mon personnel que vous parlez quand vous dites « vulgaire » ?

-Qui d'autre ? Soit, que me vaut cette visite en tête à tête ? Suis-je sous la visée d'un homme embusqué ?

-Non, Holmes, nous sommes seuls.

-J'en reviens à ma questions initiales, comédie ? Déguisement ? Vol à la tire ?

-Je ne vous ai rien volé !

-Ah ça non, avec mon terrible crochet du gauche !

Il sourit avant de se ressaisir, se raclant la gorge il vint se mettre face à la jeune femme qui regardait ses pieds nus.

-J'ai été trahis Holmes, je suis seule.

-Grand bien vous fasse, une fortune pareille dans les mains d'une seule et unique femme.

-Cette trahison n'a rien à voir avec ma façon de gérer ma fortune... mon ancienne fortune. Écoutez moi, vous seul pouvez m'aider. L'homme qui a orchestré cette trahison est fort, très fort. Peut être plus fort que vous.

Holmes, alors en train de tripoter d'étranges machines sur son bureau, sursauta.

-Pardon ? Plus fort que moi ?

-Vous n'avez entendu que cela, n'est-ce pas ?

-Non, non, bien sur que non, votre ancienne trahison à permis d'aider votre fortune. Continuez.

Milly soupira, et repris son explication.

-Cet homme a enrôlé toute ma famille, mon personnel, c'est un homme influent, entouré d'hommes influents. Je ne sais pourquoi il s'est emparé de ma fortune et de mon nom, mais il est potentiellement dangereux.

-Qu'ai-je à faire là dedans ? Et pourquoi s'être déguisée je ne comprend toujours pas, si je ne vous avez pas ramassé dans la rue vous auriez fait quoi ? Hein ? Et puis

-Holmes !

-Quoi ! Je demande juste, je suis curieux de savoir pourquoi vous vous compliquez autant la vie vous les bonnes femmes.

-Je suis en danger ! Imaginez me promener dans la rue. Holmes, ma... ma tête est mise à prix en France.

Holmes ne pu se retenir de pouffer.

-Quoi ? Vous ?

Milly soupira une nouvelle fois.

-Pourquoi ai-je cru que vous pourriez m'aider ?

-Je vous accorde ce point très chère. Vous voulez boire quelque chose ?

-J'ai fait tout ce chemin, Holmes, déguisé en mendiant, sans effets, sans domestiques. Tout ça pour vous entendre dire que vous ne m'aiderez pas ?

-J'en ai bien peur. J'ai du bourbon.

-Gardez le votre bourbon ! Furieuse, Milly se dirigea d'un pas décidé vers la porte

-Attendez !

Un soupir de soulagement.

-Oh, Holmes j'ai

-Vos chaussures !

Folle de rage, la porte claqua, ainsi que celle de l'entrée. Perplexe, Holmes, un verre de bourbon à la main, s'assit sur la causeuse pourpre. Tournant le liquide, le portant à ses lèvres, le tournant encore, les yeux plongés dans sa propre cervelle. « Plus fort que moi », murmura t-il en se jetant sur la porte. La rue était déserte, et la nuit allait tomber. « Allons bon » se mit-il à penser « où peut-elle bien être ». Hésitant d'abord à sortir de chez lui, il se décida enfin lorsque les lampadaires s'allumèrent. Ses yeux se posèrent absolument partout, à la traque du moindre indice qui pourrait le conduire à Milly. Malheureusement, ce fut un parfait hasard qu'il la trouva dans une ruelle un peu plus loin, où elle s'était cachée, et où deux grands gorilles s'amusaient maintenant à la chahuter.

-Bah ma mignonne, qu'est ce que tu fais, seule et sale, nue pieds à la tombée de la nuit ?

-C'en est une hein Jas ? C'en est une !

-Mais laissez moi tranquille ! Je ne suis pas ce que vous pensez, je

-Mais c'est qu'elle s'exprime comme la reine d'Angleterre la jolie. J'aime ça moi les femmes cultivées.

-Moi aussi, mais croyez moi messieurs, celle-là ne l'est pas du tout.

Alors que les trois tournèrent la tête, tout se passa très vite, Holmes mit très vite ko le plus petit des deux, pour le plus grand, il fut aidé de Milly qui lui asséna un coup violent sur le sommet du crâne.

-Une lady qui se bat ?

-Je ne suis plus une Lady Holmes. Du moins, plus officiellement. Vous êtes venu me chercher ?

-J'accepte de vous aider. Enchantée, Milly le remercia. Et euh, j'ai vos chaussures. Holmes tendit à la jeune femme une paire de vieilles godasses trouées. Elle tendit les bras pour les prendre, en le remerciant. Vous voulez, euh, vous débarbouiller chez moi ?

-J'en serais ravie.