« Je suis désolée, Clarke. Ils ne faisaient pas partie du marché. »

Et brusquement, tout s'écroula. Tout ces espoirs, enfouis au fond de son cœur, qu'elle avait nourrit depuis que l'alliance avec les Terriens avait été prononcés et qui avaient atteint leur paroxysme lorsque la lourde porte métallique du Mount Weather avait finalement cédée à leurs cordes. Toutes ces émotions qui la berçaient, tout ces sentiments n'étaient plus rien à présent mais un vague souvenir réduit en poussière. Depuis quelques jours, Clarke n'était qu'un tumulte instable de sensations qu'elle ne parvenait à saisir. Une véritable tempête émotionnelle séjournait au creux de son estomac et la jeune blonde avait de plus en plus de difficultés à dissimuler le fond de sa pensée.

Tout ceci avait commencé à l'handicaper lorsque, impuissante et fiévreuse, elle avait succombé à l'aura apaisante de la brune aux yeux encadrés de noir. Lorsque tout ces doutes et questions qu'elle se posait vis à vis de la Commandante des Terriens avaient obtenu leur réponse d'une manière plus qu'inattendue. La blonde avait remarqué que Lexa semblait baisser progressivement ses barrières et à laisser libre court à ses émotions. Rare étaient les moments où les pupilles azures de la Terrienne n'étaient pas teintés d'une lueur glaciale et dénuée de tout sentiment. Elle arborait toujours ce masque impitoyable et atrocement inhumain, qui déstabilisait énormément Clarke. Elle avait eut l'occasion de surprendre un éclat compatissant ou animé d'une émotion qu'elle ne parvenait pas à nommer dans les orbes bleutées de Lexa, mais ça n'était en général que durant l'espace d'une poignée de secondes, puis le masque revenait, plus dur et déstabilisant que jamais.

Le regard que Lexa avait posé sur elle lorsqu'elle avait prononcé ces quelques mots avait logé dans la poitrine de Clarke une douleur aigüe, une douleur qu'elle n'avait jamais ressentie avant. Une douleur qui était bien plus atroce que toute autre, bien plus aiguisée et violente que n'importe quelle lame. Une douleur dont elle ne se remettrait probablement jamais. Ses yeux l'observaient, impériaux et insensibles, ils la toisaient. Le visage de la brune encrassé de sang sec et d'un mélange de terre et de peinture était imperturbable, elle n'avait jamais vu la Commandante l'observer avec tant de distance. Depuis qu'elle avait poussé le pan de toile qui constituait l'entrée de sa tente pour la première, et que ses yeux s'étaient posés sur la silhouette de Lexa, elle ne l'avait jamais vue ainsi. Et cette vision était insupportable.

Tout cela ne pouvait arriver, elle ne pouvait l'avoir trahie si impitoyablement après tout ce qu'elles avaient traversé. Comment pourrait-elle être si atroce ? Pourquoi travailler si durement pour tout détruire à quelques secondes du dénouement ?

L'amour est une faiblesse.

Le souvenir de ces mots la heurtèrent violemment. Elle pouvait se remémorer le mouvement de ses lèvres lorsqu'elle les avaient prononcés, elle pouvait se rappeler le tressaillement de sa voix qu'elle n'avait put masquer lorsqu'elle avait prononcé son nom. C'était à ce moment précis qu'elle avait compris la complexité qui habitait Lexa, et à ce moment qu'elle s'était vraiment attachée à elle, réalisant que ce masque en était un, et qu'il dissimulait quelque chose de bien plus complexe que cela. De bien plus beau et fragile. Et elle s'était promise d'avoir totalement accès à cette partie cachée et protégée de Lexa un jour. Mais elle n'en aurait pas la possibilité.

« May we meet again. », déclara-t-elle finalement avant de tourner les talons, suivie de quelques terriens marchant d'un pas décidé.

Clarke ne détourna pas le regard de Lexa, habitée par un soudain espoir, avide. Son corps était tendu, presque gourd, espérant qu'elle se retourne, revienne vers elle. Un simple regard, un signe que tout n'était pas simplement terminé, qu'il s'agissait d'un mauvais rêve. Mais elle n'en fit rien. Elle disparut presque derrière les arbustes broussailleux de la forêt. La scène semblait irréelle, impossible, et pourtant le sentiment d'amertume qui emplissait sa bouche et engourdissait sa langue était bien présent. Ses genoux fléchirent presque sous son poids, et elle réalisa que l'ensemble de son corps refusait de lui obéir. Elle réalisa que c'était certainement la dernière fois qu'elle voyait la Commandante. Elle réalisa que c'était la fin. Elle réalisa que, habitée par une détermination et un désespoir amer, ses jambes s'animèrent, réduisant la distance qui la séparait de Lexa. Un cri sourd s'échappa de sa gorge enserrée, ressemblant au nom de la brune. Elle l'avait appelée, submergée par ses sentiments, elle l'avait appelée. Le cliquetis des armes sorties de leur fourreau par les gardes de Lexa ne la stoppa pas. Elle fut bientôt extrêmement proche de la Terrienne, et dans un dernier élan de folie, glissa ses mains autour de son cou avec force.

Et déposa violement ses lèvres contre les siennes.