Son monde s'était arrêté. Autour de lui, tout le monde sautait, riait, acclamait leur sauveur. Très peu étaient agenouillés comme il l'était, se lamentant. Aucun ne ressentait autant de peine que lui. Il posa sa main sur le torse sans vie de Fred, et une larme chaude coula sur sa joue. Pourquoi ? Pourquoi devait-on lui enlever la personne la plus chère à ses yeux alors qu'elle n'avait même pas atteint sa majorité ? Comment réussirait-il sans lui ? Fred et George avaient toujours été comme les doigts de la main, impossibles à séparer. Or, c'était exactement ce que la mort avait réussi à faire. Les larmes redoublèrent, et il frappa son poing sur la table, sans se soucier des gouttes de sang qui apparaissaient. Puis, il posa la tête contre le corps de son jumeau et sombra dans l'inconscient.
A son réveil, la Grande Salle était presque vide. Les gens étaient sûrement rentrés célébrer le début de cette nouvelle ère. Il sentit une main sur son épaule, mais ne releva pas la tête.
« On rentre, » dit Ron d'une voix étouffée.
George secoua la tête, il ne pouvait pas se résoudre à laisser Fred tout seul ici. Ron soupira, puis prit son frère dans ses bras.
« Il ne reviendra pas, tu sais, » chuchota-t-il entre ses larmes avant de s'éloigner.
George le regarda rejoindre sa famille regroupée dans un coin avant de soupirer. Il savait que Fred ne reviendrait pas, pour qui le prenait-il ? Il avait juste besoin d'être seul pendant un moment. Oui, seul. Il rentrerait à l'appartement, prendrait une bonne douche et réfléchirait ensuite. Il se releva difficilement, puis hésita. Devait-il laisser Fred aussi ? Son cœur criait que non, mais il dut avouer qu'il ne pouvait pas trimbaler un cadavre mort jusqu'au Chemin de Traverse, que penseraient les gens ? Oh et puis, il s'en foutait, des gens. Qu'ils aillent raconter ce qu'ils voulaient ! Il passa ses bras sous ceux de Fred et commença à le soulever.
« Mauvaise idée, » l'interrompit une voix derrière.
Il se retourna et se retrouva face à Angelina Johnson, sa robe déchirée et sale, ses cheveux privés de leurs fines tresses habituelles. En temps normal, sa première réaction aurait été de lui dire gentiment de se mêler des ses propres affaires, mais il ne pouvait pas se résoudre à répliquer, pas devant son état délabré et perdu. Il se contenta de relâcher Fred, et toute la détermination qui était montée en lui disparut tout d'un coup. Angelina s'avança et l'enlaça.
« Je suis là, » murmura-t-elle.
George se laissa aller dans cette tendresse féminine et ferma les yeux. Puis, main dans la main, ils transplanèrent pour le Chemin de Traverse.
George se leva le lendemain après-midi avec la tête lourde et un poids au cœur. Les évènements de la veille lui revinrent en un flash. La mort de Fred, la victoire d'Harry, l'aide d'Angelina… Il ne put s'empêcher de ressentir de la gratitude envers la jolie noire. Elle l'avait rassuré, nourri et même mis au lit, sans rien demander en retour. C'est donc avec le cœur un peu plus léger qu'il se doucha et s'habilla avant de répondre à l'appel du ventre en se dirigeant vers la cuisine. Angelina s'y trouvait déjà, un pain au chocolat dans une main, le Daily Prophet dans l'autre.
« Bien dormi ? » demanda-t-elle sans lever les yeux de son journal.
« J'ai connu des nuits meilleures… » répondit George en prenant un croissant.
Angelina dut ressentir l'amertume dans sa voix car elle releva la tête, blessée. George put voir des traces de larmes sur ses joues et s'en voulut.
« Désolé, » murmura-t-il.
« C'est rien, » dit Angela en essuyant ses yeux du revers de sa main. « C'est que tu sais, il ne va pas manquer qu'à toi. »
Voyant le silence de George, elle se releva et débarrassa la table en un coup de baguette.
« Bon, je ferais mieux de m'en aller… »
Un nouveau silence gratifia sa phrase. Soupirant, elle s'avança vers George, hésita, puis finalement décida contre lui faire un câlin. Elle ramassa son sac et se dirigea vers la porte d'entrée.
« Angelina ? » appela George alors qu'elle s'apprêtait à ouvrir la porte.
« Oui ? »
« Merci. »
Elle se retourna, sourit légèrement et hocha la tête.
« Tu en avais besoin, » dit-elle avant de s'engouffrer dans la rue bien animée du Chemin de Traverse.
George l'observa partir avant de se retourner en soupirant vers l'appartement vidé de la présence d'un de ses occupants. Un peu de compagnie n'avait pas été désagréable en cette période de deuil…
