Amis du soir, Bonsoir.
Il est 21h30 et je poste enfin le premier chapitre de la Suite de Sang pour Sang: "Étreintes Éphémères"

Je vous remercie du soutien que vous m'avez témoigné et j'espère que cette suite vous plaira.

A lire sur l'air de Jalan Jalan «Lotus».

Six Years Later



I.

- Je ne veux plus te revoir, jamais… Promets-moi que tu ne viendras pas…
- Je…Je ne peux pas.
- Promets…
- Je promets…


Elle enroule un peu plus son écharpe contre son cou. Le froid est mordant en cette période de l'année. Il s'insinue partout entre les grosses mailles de son pull en laine. Engoncée dans celui-ci, elle regarde le sol dallé des rues de Londres. Où va-t-elle déjà? Elle ne sait plus. Machinalement, elle emprunte le chemin de Traverse. Les boutiques foisonnent et il n'y a jamais eu autant d'animation que depuis ces six dernières années. Il n'y en a jamais eu si peu dans son cœur. Elle rejoint le centre de la petite rue sorcière où a été érigée une stèle. Son cœur se serre.
«Aux héros de la Guerre».
S'ensuit une liste incalculable de noms. Neville Londubat, Luna Lovegood, Dean Thomas... Tous ses amis qu'elle a vu tomber pour la liberté, voilà six ans. Il ne se passe pas un jour sans qu'elle ne pense pas à eux. Sans qu'elle ne rêve pas de ce maudit jour qui a détruit sa vie. Aujourd'hui c'est dimanche. Comme tous les dimanches, elle dépose une orchidée près du monument de marbre blanc. C'est la deux cent quatre vingt neuvième. Jamais elle n'oubliera. Le souvenir est marqué au fer blanc dans son cœur. Cicatrice qui ne se refermera jamais totalement.

- Excusez-moi, fait une voix masculine veloutée qui la sort de son recueillement.

Elle se retourne et tombe nez à nez avec un adolescent brun, étrangement souriant.

- Pardonnez-moi je ne voulais pas vous interrompre. Vous êtes… Hermione Granger?

Elle refoule un soupir. Elle n'en voulait pas, elle, de cette notoriété.

- Vous êtes dans mon livre d'Histoire de la Magie.

Il ne cache pas son émerveillement. Elle essaie de sourire mais n'y parvient pas. Elle n'est pas comme Ron à accueillir les autographes avec bonheur, ni comme Harry gêné mais accueillant. Elle fait pourtant de son mieux. Mais pour eux la fin de la guerre a été un soulagement, elle, elle l'a carrément détruite.

- Je voulais simplement vous dire à quel point j'admire ce que vous avez fait. Vous savez, détruire tous ces Mangemorts à l'aide d'un simple Mobiliarbus… C'était «ouah»!

Son regard ambré se voile, le garçonnet recule d'un pas.

- Non, murmure-t-elle, ce n'était pas ça… Ce n'est pas comme ça que j'ai vécu les choses. Là bas c'était le chaos, des gens agonisaient, c'était eux ou nous et il ne se passe pas un jour sans que je revois ces visages déformés par la douleur, quand bien même ils appartenaient à des Mangemorts. J'avais ton âge et je ne voulais pas tuer.

Le jeune homme frissonne, ce mot est devenu source de terreur. Bien plus qu'auparavant. Il est un nuage noir dans la quiétude de la Paix. Il écarquille les yeux. Visiblement il ne s'attendait pas à autant de froideur de la part d'une héroïne de guerre. Elle esquisse un soupir, elle entend déjà les protestations d'Harry.

- Excuse-moi, murmure-t-elle avant de se reprendre. Un autographe?

Elle a un sourire forcé lorsqu'elle sort sa plume pour griffonner deux mots sur le parchemin qu'il lui tend.

- Comment tu t'appelles?

- Joan.

- Voilà Joan.

Lorsqu'il n'est plus dans son champ de vision, elle s'autorise à flancher quelque peu, sa main fébrile se porte contre son front, elle tremble. Elle la hait cette faiblesse qui s'empare souvent de son cœur … Elle essaie de se reprendre, elle se redresse et se dirige vers le magasin de Farces et Attrapes. Il y a bien longtemps qu'elle n'a pas rendu visite aux Jumeaux.


- Hermione, souffle Fred Weasley en la serrant contre lui. Comment te sens-tu?

- Je vais bien Fred, je te remercie.

Elle jette un œil sur la décoration, tout n'est que couleurs éclatantes et merveilles d'amusement. L'espace d'un instant elle a envie de redevenir une petite fille, de s'émerveiller de cette explosion de bonheur. Les enfants collent leurs nez contre la vitre, auréolant celle-ci d'une buée hivernale. Tout n'est que Magie pour eux. Magie de l'enfance. De l'innocence.

- Cette affaire n'est pas trop délicate? Lui demande alors George.

- Oh, fait-elle en agitant une main, elle est assez difficile mais je m'accroche.

- Hermione n'a jamais abandonné, murmure une voix qu'elle connaît par cœur.

Elle vient serrer son meilleur ami contre elle.

- Harry, soupire-t-elle.

Il lui rend son accolade avec plaisir.

- Tu tombe à pic, murmure-t-il dans le creux de son oreille, j'avais besoin de quelqu'un pour garder les enfants ce soir. Ça te gênerait?

- Non, j'ai grand besoin de me changer les idées.

Il recule un peu. Plisse ses sourcils avant de glisser sa main dans celle de sa meilleure amie.

- Viens, murmure-t-il je t'emmène boire une bierraubeurre.

Saluant les deux Weasley, il l'entraîne chez Florian Fantarôme. Hermione, c'est sa sœur, c'est sa famille, il la connaît par cœur. Et il l'a senti ce petit picotement dans le creux de son estomac lorsqu'il l'étreignait. Il l'a sentie cette douleur qui l'affaiblit. Il sait que quelque chose ne va pas aujourd'hui.


Il n'a pas besoin de poser la question. Son regard en dit long. Ignorant les centaines de regards qui se portent sur eux, il tapote la table de bois attendant qu'elle veuille bien se confier à lui. Elle soupire, avant de glisser sa main dans son cartable et d'en ressortir un dossier relié. Une encre marine s'étale sur le papier jaunie: «Ministère de la Magie. Département de la Justice». Il glisse un regard vers elle. Elle contemple le ciel gris de l'hiver, monocorde. Elle qui a connu gris encore plus éclatant. Il sait déjà ce que ce dossier contient. Il fait glisser les feuilles le long de ses doigts avant de voir une mention surlignée: Dossier CX235: Drago Malefoy. Il ferme les yeux, en même temps que le dossier. Il entremêle ses doigts avant de les glisser sous son menton. Les passants ont arrêté de les toiser, quelques pigeons viennent à leurs pieds, picorer les quelques miettes délaissées.

- Tu ne vivais que pour cela pas vrai?

Elle relève la tête vers lui, le regard perdu. Ses doigts font tourner son verre, elle essuie les gouttelettes amoncelées sur la table de bois. Elle pince les lèvres, veut parler mais ne s'y résout pas. Il secoue la tête.

- Je le savais tu sais. Quand je t'ai vu accepter avec vivacité ce poste pour la Réhabilitation des Mangemorts. Tu attendais ce jour. Depuis six ans tu ne vis que pour ça.

De sa main droite elle attrape la petite capsule de la bierraubeurre, et la fait rouler entre ses doigts. Elle roule, roule, encore et encore alors que persiste le silence gênant. Harry pose sa main sur la sienne l'interrompant dans son geste.

- Hermione, dis quelque chose.

- C'est un nom Harry, rien que deux mots. Et pourtant lorsque j'ai lu ces mots là j'ai senti le monde vaciller. Tu sais ce que ça fait pas vrai?

Il hoche la tête, il ne connaît que trop bien ce sentiment.

- Avant, ma seule faiblesse c'était lui. Et depuis qu'il n'est plus là je suis remplie de failles.

Il baisse la tête ne sachant quoi dire. Après tout il sait que c'est vrai.

- Tu n'aurais peut-être pas dû…

- Quoi tomber amoureuse?

Elle esquisse un rire nerveux.

- Parce que tu crois que ce sont des choses qui se contrôlent?

- Non bien sûr…

Il joue nerveusement avec le lien de l'énorme dossier.

- Aimer Malefoy c'était comme sauter du haut d'un pont sans élastique, comme mettre sa main dans un feu, c'était de la folie, mais j'aimais ça. Tellement que ça m'a détruit. J'ai voulu y croire, mais notre histoire ce n'était que de la fumée… Elle s'est évaporée avec lui.

Un silence s'installe à leur table, il n'est ni oppressant, ni gêné. Ces deux là savent quand il faut se taire, ils n'ont pas besoin de mot pour se faire du bien.

- Tu l'as lu? Demande Harry au bout d'un moment faisant glisser le dossier vers elle.

- Je n'en ai pas encore eu le courage.

Elle lâche un soupir las.

- Je ne sais pas si j'ai réellement envie de voir ce qu'il contient.

- Mais tu savais… Que Malefoy avait…?

- Je savais que c'était un meurtrier.

Elle attrape la cuillère de son ami avec nonchalance et la plonge dans la glace à la Noix de Coco qu'il a commandé. Elle ferme les yeux.

- Ça me rappelle mes vacances à la mer. Quand j'étais petite mes parents m'amenaient souvent en France pour aller à la plage. Je mangeais souvent des glaces à la noix de Coco. Cela fait bien trop longtemps que je n'en ai pas mangé. J'avais oublié que c'était aussi bon.

- Comment vont-ils?

Elle hausse les épaules

- Ils sont toujours en Australie. Ils ont oublié jusqu'à mon existence, je pense que c'est mieux ainsi.

- Mais… La Guerre est finie…

- Je te l'ai déjà expliqué. Notre monde est trop dangereux pour eux. C'est ainsi.

Il glisse une main contre sa joue glacée.

- Seras-tu un jour heureuse ma Mione? Susurre-t-il

Elle sourit attrapant sa main dans la sienne.

- Bien sûr Harry.

Puis elle se lève, déposant quelques Gallions sur la table. arryHaHarry s'empresse de les lui remettre dans sa main. Elle lui sourit avant de déposer un baiser rapide sur sa joue.

- Tu peux dire à Ginny de déposer les enfants pour huit heures, si cela te convient.


«Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants…». Elle achève sa phrase par un baiser contre la peau pâle de la jeune Lily. Celle-ci dort déjà à points fermés. Elle caresse sa joue rebondie de petite fille, elle aurait tellement aimé avoir des enfants. Mais c'était ses enfants qu'elle voulait. Elle aurait voulu que tout se termine comme dans les contes. Les histoires que l'on racontait aux petites filles les berçaient d'illusions, si bien que lorsque la réalité frappait, la chute n'en était que plus rude. Avec précaution, elle se lève du lit mais la jeune Potter ne semble en aucun cas encline à se réveiller. Ses épaules pivotent vers le second lit où James et Albus se sont endormis l'un contre l'autre. Elle effleure leurs petites mains, avant de border davantage leurs lits. Elle dépose un baiser sur chaque front. Heureusement que les Potter sont là. Leurs petits cœurs d'enfants innocents lui redonnent la force d'avancer. Aujourd'hui plus que jamais. Elle sort de la chambre avant de rejoindre sa cuisine où une tasse de thé fumante l'attend. Elle s'assied à sa table et prenant sa respiration elle ouvre le dossier CX235 s'apprêtant à connaître les plus sombres secrets de Drago Malefoy.


Ses bottines en daim noir se sont recouvertes d'une fine pellicule de neige. Elle est là, elle ne sait pourquoi. Elle se tient à distance, ses frêles épaules recouvertes d'un châle en laine noire. Narcissa Malefoy attend impatiemment devant les grilles de la prison. Hermione se rappelle avec précision le jour où elle était venue rendre visite à Blaise Zabini. A l'époque le lieu était tenu secret et tout lui paraissait simple. La matriarche de la dynastie Malefoyenne a posé sa main sur l'épaule de la jeune fille qui l'accompagne, elle a les cheveux blonds relevés en chignon. Hermione ignore de qui il s'agit mais sa beauté est imposante, froide, charismatique. L'ancienne Gryffondor se presse un peu plus contre l'arbre contre lequel elle s'est adossée. Encore quelques secondes et elle le verra, il se tiendra là près de sa mère et à moins de deux cent mètres d'elle. Son cœur tambourine contre sa poitrine, elle ne s'est jamais sentie aussi vivante. Elle l'attend, malgré que le voile sur ses meurtres ait été levé, malgré ce qu'elle sait, elle reste là à l'attendre. Elle a lu le dossier toute la nuit. Des cernes noirs s'étendent sous ses yeux chocolat. La porte s'ouvre, elle sent ses mains devenir moites, elle a le cœur en émoi. Ses sens sont bouleversés. Et soudain il est là. Pareil à ses souvenirs. Grand, élégant malgré tout, peut-être un peu émacié, plus âgé. Mais beau, tellement beau. Mille émotions s'emparent d'elle, la joie immense, intense, pareil à un feu la brûlant de l'intérieur, la peur, la plénitude, la colère contre lui avant tout qui pendant ses six années lui a interdit le droit de visite. Mais elle n'a jamais renoncé. Elle était venue chaque jour, puis chaque semaine, et enfin chaque mois. C'était comme un rituel. Elle entrait et le visage désolé du gardien lui répondait. Et ils la regardaient sournoisement, et plus d'une fois elle avait hésité à leur lancer un sort. Enfin elle ressortait se disant que la prochaine fois peut-être…
Il avance laissant sa mère le serrer contre lui. Mais quelque chose a changé. Son regard n'est plus ni froid, ni hautain, ni doux il est simplement…vide. Narcissa lui glisse quelques paroles désignant la jeune fille à ses côtés avec un sourire entendu. Drago la regarde à peine, il lui adresse un signe de tête et elle lui répond par un sourire timide, mais son esprit semble ailleurs. Il suit sa mère qui pose une main contre son dos, l'encourageant à la suivre, à rentrer chez eux. Il regarde droit devant lui, et Hermione se rapproche un peu plus de l'arbre contre lequel elle s'était adossée. Elle a trop peur de flancher. Elle veut s'en aller à présent mais ses jambes refusent un quelconque mouvement, lui interdisant tout départ tant qu'il n'a pas disparu. Elle a les yeux rivés sur son dos gracieux, mais alors que sa marche a ralenti, elle le sent se tourner vers elle et deux orbes métalliques la cloue sur place. Au fond d'eux brillent une flamme qu'elle avait cru éteinte.


Verdict? :(