Bonjour tout le monde et bienvenue. Me voici de retour. En fin de compte, je n'étais pas complètement disparue de la surface de la terre. Cette histoire est la suite de La valse du cœur et de la nuit. Tous les personnages et les lieux reconnaissables appartiennent au professeur Tolkien. Les erreurs sont miennes. Et comme le français n'est pas ma langue maternelle, des erreurs, vous en trouverez. Les corrections sont les bienvenues. Toutes les remarques, les opinions et les critiques sont les bienvenues. Commentez, commentez autant que vous voulez. Vous me ferez plaisir.

1

Estel sourit et baissa la tête pour sentir encore le doux parfum de l'achillée. Il avait fini sa cueillette de fleurs et de feuilles. « Des simples », entendit-il la voix d'Elrond dans sa tête et opina.

"Les plantes médicinales sont nommées 'les simples'", se dit-il à mi-voix.

Il était seul. C'était l'été et le soleil matinal, à peine grimpé au-dessus des cimes des arbres, lui réchauffait déjà le dos. Il mit le couteau au fond du panier, sous les faisceaux odorants et colorés de sa récolte. Millefeuille, mélisse, menthe, répéta-t-il dans sa tête en se levant. Millefeuille, mélisse, mente. Ça faisait presque une chanson. Une grive chanta, perchée haut dans un hêtre voisin. Estel sourit en silence. Le jardin du maître d'Imladris se couvrit d'une brume légère. La rosée séchait, mais les genoux des culottes d'Estel étaient déjà mouillés. Il dégagea les mèches de ses yeux d'un mouvement de tête. Et le jardin n'est pas vraiment un jardin, pensa-t-il sur le chemin de retour. C'était une forêt éclatante de santé et de vie, avec quelques ruisselets çà et là, un étang plus loin, dans une clairière, et des animaux, des oiseaux et toutes les plantes que le cœur d'un guérisseur pouvait souhaiter. Millefeuille, mélisse, menthe. Tilleul, anis, camomille. Les noms résonnaient dans la tête de l'adolescent en cadence avec ses pas.

Un jeune chevreuil apparut dans le sous-bois devant lui et disparut en un clin d'œil. Estel déboucha sur un sentier que seul un elfe, ou un être élevé dans leur monde, pouvait voir. Quelques minutes plus tard, les dômes d'Imladris apparurent au-dessus des bosquets en fleurs. Il y avait de l'activité devant les grandes portes de la Dernière Maison Simple. Une troupe d'elfes, avec leurs montures et leur attirail de combat, se préparait pour le départ. Estel arriva de côté, par un chemin surélevé et herbeux. Il continua sans ralentir. Les allées et venues des patrouilleurs faisaient autant partie du train-train d'Imladris que les repas. L'adolescent entra par une terrasse ombragée au même moment que la voix d'Elladan ordonnait le rassemblement. Estel monta l'escalier en colimaçon et traversa le couloir qui le séparaient de sa chambre. Il s'arrêta sur le seuil. Sa mère était à sa fenêtre.

"Estel, le salua-t-elle en se retournant. Un devoir de seigneur Elrond?"

Gilraen désigna la corbeille dans les bras de son fils. Les fleurs embaumaient déjà la pièce. Estel secoua la tête.

"Non. C'est juste pour regarnir les réserves des guérisseurs."

Gilraen opina.

"Elladan et Elrohir quittent pour plusieurs semaines", dit-elle.

"Oui, ils sont à la tête du détachement des patrouilleurs", répondit Estel sans bouger.

Gilraen lui fit face de nouveau.

"Tu ne voulais pas leur dire bonjour? Leur souhaiter une bonne route, Estel?"

L'adolescent s'approcha de la fenêtre à temps pour voir les derniers guerriers disparaître parmi les arbres.

"Je l'ai fait hier, quand ils sont venus me dire qu'ils partaient."

Il souleva le panier à demi.

"Je vais porter ça."

À son retour, sa chambre était vide. Estel se rafraîchit et se changea. Il prit de sur la commode une longue robe blanche, sans manches et ouverte sur les côtés, puis se hâta dans l'aile magique d'Imladris. Pour lui, qui vivait maintenant pour devenir un guérisseur, l'aile de guérison était magique. Et la pièce où le seigneur Elrond lui enseignait son art l'était encore plus. Estel y entrait comme dans un temple. Il enfila la robe, attacha les courroies sur les côtés et regarda autour comme si les faisceaux de plantes séchées, des spatules et des creusets de toutes tailles était la plus belle vue de sa vie. Ici, Elrond lui montrait les propriétés des plantes. Ici ils macéraient des simples ensemble, purifiaient, distillaient, filtraient, condensaient et diluaient. Ils fabriquaient remèdes, teintures, onguents et cataplasmes pour des blessés. Estel ressortait de ce laboratoire elfique, où l'odeur d'alcool et de vinaigre dominait celle des plantes, comme s'il venait juste de prendre une grande bouffée d'air libre.

Bien sûr, le maître d'Imladris avait des assistants pour travailler le mortier et le pilon à sa place. Des guérisseurs compétents eux-mêmes, ces aides étaient capables d'enseigner les bases de la pharmacie à l'adolescent. Mais Estel aurait été incapable d'apprendre d'eux. Il supportait la proximité de très peu de gens : de sa mère, d'Elrond, des jumeaux, bien que dernièrement il semblait les fuir, et, dans la moindre mesure, de Glorfindel.

Elrond revint donc à ses bases pour l'enfant. Estel avait quatorze ans. Mais Elrond comptait qu'à son âge, il était en droit de considérer Estel comme un enfant. Et il continuerait à le protéger comme tel pendant quelques années encore. Il retournait à ses pesées, ses calibrations et ses calculs pendant deux heures à chaque matin. Et Estel le suivait pas à pas. Il apprenait vite. Et Elrond savait exactement où il voulait amener l'enfant. Au début la pharmacie, pour qu'il connaisse le fonctionnement des plantes. Puis le fonctionnement des êtres. La chirurgie suivrait plus tard, quand Estel sera prêt à affronter le sang et les plaintes de blessés. Les techniques de guérison plus subtiles et plus profondes viendraient en leur propre temps.

Le reste de la matinée était consacré soit à l'étude de langues, elfiques autant que celles des hommes, soit à la géographie et à l'histoire. En après-midi, ses responsabilités appelaient Elrond et Estel était libre de faire de sa journée comme bon lui semblait. Aujourd'hui, après un bref arrêt aux cuisines, Estel cogna sur le cadre de la porte ouverte des appartements de sa mère. Gilraen était seule dans sa pièce claire, meublée avec parcimonie. Elle était assise dos à la fenêtre, en biais, pour que toute la lumière tombe sur le métier installé devant elle.

"Estel, dit-elle en souriant. Entre, je t'en prie."

L'adolescent vint à ses côtés. La mère et le fils étudièrent la broderie ensemble. Le vent soufflait parmi les troncs dénudés et emportait les dernières feuilles rousses. Si elle n'a pas de fils argentés pour faire la neige, ses cheveux sont juste de la bonne couleur, pensa Estel. Si mince, si pâle, alors que tout s'épanouissait dans la vallée de Fondcombe. Pourquoi sa mère brodait-elle un paysage d'automne en plein été était un mystère pour lui. Elle était un mystère pour lui.

"Mère, puis-je vous poser une question?"

"Bien sûr, Estel. Que veux-tu savoir?"

Estel s'installa sur une chaise basse voisine que Gilraen libéra de ses articles de broderie. Elle le regarda poser ses mains sur ses genoux et rester dans une immobilité si peu caractéristique aux garçons de son âge.

"Justement, dit-il, mon nom. Il est elfique. Je ne sais pas pourquoi le maître Elrond m'a appelé comme ça, mais ce nom ne me convient plus. N'en ai-je pas un autre, mère?"

Il sembla à Estel que les joues déjà pâles de Gilraen pâlirent davantage.

"Tu étais très jeune à notre arrivée ici, dit-elle en posant l'aiguille avec un soin extrême. C'est ton nom, Estel."

L'adolescent baissa la tête. Sa mère était un mystère pour lui de plus d'une façon.

"J'avais deux ans, insista-t-il pourtant. Sûrement, là où nous vivions, les gens nommaient leurs enfants avant cet âge?"

Gilraen le regarda sans répondre. Il n'aima pas la fixité de son regard.

"Aujourd'hui, j'ai commencé à apprendre la lignée des Surintendants de Gondor", dit Estel.

Gilraen ne cillait même plus. C'était une grande femme, au port grave et fier. Estel fut surpris de lui trouver des airs d'un animal pris au piège. Il voulut la rassurer.

"Mère, dit-il avec toute la douceur dont il était capable, tous ces hommes m'ont fait penser à mon vrai père. J'aimerais connaître son nom, sa famille. Les simples gens aussi ont une famille, pas juste les nobles. S'il vous plaît, mère, ajouta-t-il devant son silence, je voulais vous le demander depuis longtemps."

Gilraen fit un effort visible sur elle-même.

"Je m'excuse, Estel. Je ne peux pas t'en parler."

Estel baissa les yeux. Il ne s'aimait pas dans le rôle du traqueur. Il s'inclina avant de s'en aller.

Les abords de la Dernière Maison Simple avaient retrouvé leur calme depuis le départ de la troupe d'Elladan et d'Elrohir. L'adolescent évita l'entrée principale par simple habitude. Ses jambes savaient où le mener quand sa tête était ailleurs.