PRÉSENT, PARADIS

2015

"Bon... Je vais me répéter pour la troisième fois, elles étaient comment..?

Je regardai mes pieds et regrettai encore un peu plus d'avoir crié après ma vision. J'inspirai anxieusement et fermai les yeux.

-Elles... Elles étaient dix, éparpillées dans tout l'appartement. J'ai essayé de courir, de changer de pièce, mais il y en avait partout. Elles... Elles avaient un physique humain, mais je pouvais sentir que ce n'était qu'une enveloppe charnelle.

L'ange en face de moi soupira lentement puis jeta un coup d'œil derrière lui. Il aperçut la porte ouverte de mon paradis et se retourna vers moi. Il savait que je fixais cette porte depuis un moment maintenant et que j'avais une envie puissante de m'échapper.

-Tu sais que tu es mieux là qu'autre part? C'est ta place, tu es morte Pluton, tu ne peux pas partir, dit il calmement.

-Moui...", je chuchotai, j'avais l'habitude de ce genre de réflexion.

Cela devait faire depuis trente ans que je n'étais pas sortie de cet endroit, que les gens d'en bas appelaient le paradis, mais que je préférais nommer l'Enfer.

Sur Terre, j'avais été la fille la plus détestée de mon lycée mais paradoxalement, la plus admirée du quartier dans lequel je vivais.

Mes voisins se chuchotaient des rumeurs à mon propos, que je qualifierais de vraies en y repensant, mais n'osaient jamais me parler. On entendait dire que je n'étais pas seule, qu'une présence bénite m'accompagnait toujours, dans mes moindres déplacements.

Les quelques rangées de maisons qui fondaient tout mon quartier et faisaient sa population, étaient catholique dans l'ensemble. Je n'avais donc jamais eu de problème avec les gens du coin, qui me voyait comme un cadeau des cieux.

Cependant, ma maison ainsi que celles qui l'entouraient, ne faisait pas toute ma vie, et c'est là que le problème se nichait. Le lycée faisait aussi partie de ma routine terrienne, je devais me lever contre ma volonté pour me faire dévisager par des camarades bien peu tolérants pour accepter la réalité.

J'avais souvent été prise pour une folle, une chrétienne ayant eu des parents beaucoup trop dans la religion pour me faire comprendre qu'il n'était pas là. Lui, l'ange que les autres ne voulaient pas voir. Enfin, "ne pouvaient pas voir", le problème n'était pas le déni, mais l'incapacité à ouvrir les yeux sur cet autre monde, qui nous entourait.

Pour en revenir à ma famille et leur catholicisme, les lycéens avaient tout faux, sur toute la ligne. Ma famille étaient comme eux, ils ne comprenaient pas et ne pouvaient sentir cette présence céleste qui me parlait et à qui je répondais sans aucun problème. Ils avaient longtemps essayé de me raisonner, avant de se rendre à l'évidence : leur fille était probablement bipolaire et schizophrène.

"J'ai été prophète, je pense que le minimum c'est de m'accorder au moins une sortie par an, non? C'est si grave que ça de voir un ancien désigné de Dieu sortir de sa prison idyllique?

-Pluton... Tu ne peux pas, ton aide nous a souvent été précieuse mais c'est fini maintenant. Il n'y a aucun privilège pour les anciens messagers de notre père".

Fuck you fuck you fuck you, je pensais mentalement en m'imaginant frapper sa tête contre un mur. Je sortirai, un jour. Je sortirai et je retournerai sur Terre, que ces maudits anges le veuillent ou non.

AU MÊME MOMENT, TERRE

2015

Castiel s'approcha de moi, la rage brulant ses yeux et accélérant ses mouvements. Il n'était pas lui même, Rowena et son sort l'avait transformé en bombe à retardement qui risquait d'exploser sur n'importe qui d'assez innocent et impuissant pour ne pas se défendre. En l'occurence: moi.

La dévalorisation n'était pas mon fort, il est clair, mais je devais admettre que c'est dans ce genre de moment que mon surmoi arrêtait de me jeter des fleurs.

C'est dans ce genre de moment, qu'il me criait de jeter les armes.

Les pieds collés par un autre mot magique de ma mère, m'empêchait d'avancer ou même de bouger. Le sol m'avait pris au piège, je n'étais que son prolongement fait de chair et muni d'une conscience qui appelait à l'aide.

"Cas, Cas attend, non!" je tentai désespérément, pendant qu'il pointait son arme sur moi.

Voyant que ma tentative de le raisonner n'avait pas marché, j'attendis la sentence tomber en me protégeant de sa lame tranchante qui s'apprêtait à me transpercer.

C'est alors qu'au lieu de me trancher la gorge ou de me planter son arme dans le coeur, l'ange sous l'emprise du sort, préféra me taper violemment l'épaule avec son poing. Le geste fut d'une telle force qu'il m'envoya contre le mur et me décrocha de mon sort.

La douleur se propagea dans mon épaule et rendit mon bras complètement inapte à réceptionner un autre coup de poing sur cette partie de mon corps.

Je pris conscience que mes pieds étaient maintenant libres et que je pouvais marcher et même courir. L'usage de mes jambes me redonna la force et le courage de me relever et je me mis à penser le plus rapidement possible à un plan qui pourrait calmer Castiel.

"Ecoute Castiel, tu dois m'écouter! S'il te plait, entend moi!"

Le concerner fronça les sourcils et prit son crâne entre ses mains. Il la secoua vivement en se demandant à lui même de tout arrêter. Il devait surement faire référence aux ordres que lui criait sa tête. Castiel la releva et me fixa de ses yeux les plus effrayants, son regard était vide de toute raison et de toute moral.

Il vint jusqu'à moi et tenta de me blesser avec sa lame mais j'évitai son attaque pour mieux lui prendre le bras et l'empêcher de le bouger. Je lui arrachai son arme blanche et lui donna un coup de pied dans l'estomac.

La force démoniaque de mon attaque l'envoya au bout de la pièce mais ne l'acheva pas. J'attendis qu'il se relève pour réessayer de parler à son côté sain, qui devait lui crier d'arrêter.

Enfin, quoi que... Peut-être avais-je tord depuis le début et que Castiel ne voulait tout simplement pas stopper le sort pour continuer à me batte jusqu'à la mort... Oh...Je commençais à avoir l'habitude de ce genre de choses!

«Castiel... Je sais que tu te combats contre toi même là dedans, mais tu dois comprendre que la victoire de ton coté raisonné, est la seule issue de secours ! je tentai une énième fois, un poil surpris par les mots attentionnés que je venais de lui adresser.

La tête roulante, tendue par sa nuque qui semblait être fatiguée de retenir cette dernière de tomber, l'ange sembla entendre mes paroles et essaya tant bien que mal, de formuler une réponse.

-Tu sais que...Castiel commença à frissonner, même si je reprend le dessus...

-Tu me tueras, blah blah blah, oui je sais, ça fait des années que toi et les Winchies me sortent ça, je pense que j'ai compris ! je le coupai, levant les yeux au ciel. Je devais admettre que j'étais quand même soulager de l'entendre enfin parler.

L'angelot reprit sa respiration et essaya de se focaliser sur ce qu'il voulait dire. Castiel n'avait aucun envie de laisser ce mauvais côté gagner cette bataille.

-ASSEZ! grommela l'ange, confus par toute cette activité, assez...

Le brun se colla contre une caisse en bois qui trainait par là, et glissa jusqu'à toucher au sol. Son souffle devint plus lent, sa tête moins lourde, ses maux moins douloureux.

-Aide moi... il ajouta en chuchotant, profitant de sa raison qui lui revenait petit à petit.

Je m'arrêtai de respirer et croisai le regard en détresse de Castiel. Mon sourcils se leva gentiment, jusqu'à entrainer l'autre à lui aussi se hausser, comme pour se moquer de mon ennemi. Ma colonne vertébrale, jusque là crispée par les événements de cette journée, trouva encore une vertèbre à redresser. Ma nuque se cambra un peu plus et je montrai maintenant mon cou à Castiel, le tout en le regardant de haut.

-Pardon..? je m'avançai, tu crois vraiment, après ce qu'il vient de se passer, que je vais t'aider à améliorer ton état de santé.. ? je pris sa lame que j'avais caché dans ma manche et me baissai pour placer sa pointe, juste sous le menton de l'ange.

Castiel saisit le manche et ferma son poing sur le mien. Il me regarda avec ses yeux rempli de honte, puis la haine et la rage reprirent le dessus.

-Mais je ne te l'ai pas demandé, il retourna mon poignet subitement et le cassa, tu vas juste faire ce que je te dis ! ».

PRÉSENT, TERRE

2015

Le dernière souvenir que j'avais était sa paume effleurant la mienne. Ce geste fraternel, perpétuant la tradition des accolades encourageantes, fut la dernière chose dont je pu me rappeler avant de frapper la fenêtre de la voiture.

Je pouvais vaguement dire que nous n'étions pas seul, et que la crainte était présente, mais je ne savais plus pourquoi. Dean et moi étions effrayé par quelque chose, s'avançant à une vitesse effarante vers nous, mais quoi? Ou peut être même "qui"?

Quand je repris conscience, ma tête m'obligea à grimacer, comme pour me prévenir qu'une blessure à un quelconque endroit de mon corps, c'était formée. La cervelle lourde, je décidai d'ouvrir les yeux sur le spectacle que ma vue m'offrait :

La voiture était complètement sans dessus-dessous et je n'étais même plus à l'intérieur. Je fus étonné de remarquer que ma tête s'appuyait sur une herbe boueuse et sale, ayant elle aussi subie les damages de cette chose dont je ne pouvais me rappeler.

« SAM! SAM! »

La voix de mon frère, étouffé dans la voiture, complètement retournée, m'alerta et me fit me relever d'un coup, sans trop réfléchir à mon esprit ébréché par cette dernière scène.

Les yeux clignant, les jambes engourdies, je me rendis vers l'Impala et essaya d'y sortir Dean.

« Hey, je suis là! Tu vas bien? Tu m'entends? Je vais te sortir de là, mec. T'inquiète pas ! ».

Mon esprit devait me jouer des tours car la terre sur laquelle je laissais mes traces de pas, semblait boucher et mes oreilles sifflaient beaucoup trop fortement. Pourtant, je continuai d'essayer de rassurer Dean, en lui chuchotant que tout allait bien se passer, pendant qu'il criait mon prénom à la mort.

La peur, la crainte, la colère ainsi que le désespoir vinrent me frapper en même temps, comme pour me faire réaliser que je n'arriverais pas à extirper mon frère en dehors de cette voiture.

C'est alors que tout devint noir, mes jambes recommencèrent à flageller et je sentis mon dos se coller au sol, comme s'il ne voulait pas que je m'échappe. Je pouvais entendre les pleurs de Dean, ses cries, et moi, je ne pouvais rien faire, c'était fini.